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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_197/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 13 mars 2018  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Kiss, Présidente, Klett, Hohl, Niquille et May Canellas. 
Greffier : M. Piaget. 
 
Participants à la procédure 
X.________, représenté par Me Valentin Aebischer, 
recourant, 
 
contre  
 
Z.________, représenté par Me Dominique Morard, 
intimé. 
 
Objet 
action possessoire (art. 927 al. 1 CC); 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, IIe Cour d'appel civil, du 14 mars 2017 
(102 2016 212). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par contrat du 25 novembre 2000, les frères P.A.________ et G.A.________ ont pris à bail un domaine agricole de 117 poses, de 3'600 m2 chacune (soit les art. 115, 1146, 1186, 1187, 1193, 1206 du registre foncier de la commune de U.________ et l'art. 2001 du registre foncier de la Commune de V.________, dans le canton de Fribourg). Le contrat a été passé entre la propriétaire de l'époque, représentée par son gérant X.________.  
En ce qui concerne sa durée, le bail a été conclu pour une période initiale de 9 ans, soit du 22 février 2001 au 22 février 2010; il était prolongeable de 6 ans, soit jusqu'au 22 février 2016, le délai de résiliation étant d'un an avant l'expiration (complètement selon l'art. 105 al. 2 LTF). 
Sous conditions spéciales, le contrat mentionne: 
 
Les fermiers actuels, MM. P.A.________ et G.A.________ s'engagent à renoncer à leur droit de préemption au profit de M. X.________.  
Au départ de MM. P.A.________ et G.A.________, M. X.________, pour le cas où aucun de ses enfants ne reprendrait le bail, s'engage à le remettre à un des neveux de MM. P.A.________ et G.A.________ " (art. 105 al. 2 LTF).  
 
A.b. X.________ est devenu propriétaire du domaine le 15 octobre 2003. L'autorité foncière cantonale, qui a autorisé son acquisition, lui a imposé de reconduire le bail à ferme pour une nouvelle période de 6 ans dès le 22 février 2010.  
Le 21 mai 2004, en vue d'obtenir différentes aides cantonales et fédérales, les parties ont prolongé la durée du bail de 20 ans, jusqu'en 2024, ce qui a été approuvé par l'autorité foncière cantonale. 
 
A.c. Les 6 novembre 2013 et 3 janvier 2014, les parties ont signé une convention de résiliation du bail:  
 
Le bail à ferme agricole liant les parties prendra définitivement fin le 31 décembre 2015. Par la signature du présent acte, les fermiers ont pleinement conscience qu'il n'existe aucune possibilité de prolongation de leur bail ".  
 
A.d. Le 4 avril 2015, un neveu des fermiers, B.________, a adressé au propriétaire une offre de reprise du bail.  
Le 21 mai 2015, l'autorité foncière cantonale, qui avait pris connaissance de la convention de résiliation des parties, a informé celles-ci que, dès le 21 février 2016, le propriétaire pouvait conclure un nouveau contrat de bail agricole avec le fermier de son choix et n'avait pas l'obligation de conclure avec un neveu des fermiers. 
Le 2 juin 2015, le propriétaire a donc conclu un nouveau contrat de bail à ferme agricole avec un tiers, C.________, qui devait entrer en possession du domaine le 1er janvier 2016. 
 
A.e. A la suite de discussions et d'un échange de correspondances (dont un dernier courrier du 27 novembre 2015), le propriétaire, les fermiers et le nouveau fermier C.________ ont décidé que le contrat prendrait fin le 21 février 2016, et non le 31 décembre 2015.  
Le 10 décembre 2015, par courrier de leur avocat, les fermiers et leur neveu B.________ ont mis le propriétaire en demeure de conclure un bail à ferme agricole avec ce dernier pour la durée légale de 9 ans au moins, dès le 22 février 2016. 
Le propriétaire s'y est opposé. 
 
A.f. Par courrier du 1er février 2016, les fermiers ont informé le propriétaire qu'ils transmettaient leur exploitation agricole à un autre de leurs neveux, Z.________, à compter du 22 février 2016.  
 
B.   
Le 9 février 2016, le propriétaire a adressé au Président du Tribunal civil de l'arrondissement de la Veveyse une requête de mesures provisionnelles, assortie d'une requête de mesures superprovisionnelles, concluant à ce qu'il soit donné ordre à Z.________ de libérer immédiatement le domaine, que lui-même soit autorisé à avoir recours à la force publique si celui-ci ne s'exécutait pas; il a également requis que l'occupant soit condamné à payer un fermage de 3'107 fr. 85 par mois dès le 22 février 2016 et jusqu'à son départ et qu'il lui soit fixé un délai de 30 jours pour ouvrir action au fond. 
Après avoir rejeté la requête de mesures superprovisionnelles le 17 février 2016, faute d'urgence, le Président du tribunal a rejeté la requête de mesures provisionnelles par ordonnance du 22 septembre 2016. 
Statuant le 14 mars 2017, la IIe Cour d'appel civil du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a rejeté l'appel du propriétaire, pour les motifs qui seront discutés ci-après. 
 
C.   
Contre cet arrêt, le propriétaire a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 18 avril 2017, concluant principalement à ce que le défendeur libère le domaine à bref délai, sous la menace de la peine d'amende de l'art. 292 CP et, en cas d'inexécution, à ce que lui-même soit autorisé à mettre en oeuvre la force publique. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle instruction et décision dans le sens des considérants. Il se plaint d'application arbitraire de l'art. 927 CC et d'appréciation arbitraire des faits (art. 9 Cst.). 
Le neveu défendeur conclut principalement à l'irrecevabilité du recours; il soutient que le demandeur a introduit une requête de mesures provisionnelles au sens de l'art. 261 CPC, puisque celui-ci a conclu à ce qu'un délai lui soit octroyé pour déposer l'action au fond, et, partant, que la décision rendue ne peut être qu'incidente, ce qui imposait au recourant de démontrer un préjudice irréparable, ce qu'il n'a pas fait. Subsidiairement, l'intimé conclut au rejet du recours; selon lui, le recourant n'a pas démontré que l'interprétation donnée à la notion de maîtrise effective du domaine par la cour cantonale serait arbitraire, ni que celle-ci se serait méprise en retenant que le propriétaire n'avait jamais eu la maîtrise effective du domaine. 
La cour cantonale a indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à formuler. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le défendeur intimé soutient que le demandeur n'aurait déposé qu'une requête de mesures provisionnelles (et préalablement de mesures superprovisionnelles) dans le cadre d'une action possessoire qui devait être introduite ultérieurement, puisqu'il a demandé qu'un délai lui soit imparti pour ouvrir action au fond. Selon lui, l'arrêt attaqué ne serait donc qu'une décision incidente pour laquelle l'existence d'un dommage irréparable devrait être établie par le recourant (art. 93 al. 1 let. a LTF). 
 
1.1. Examinant successivement les deux argumentations retenues par le Président du Tribunal civil de la Veveyse, la cour cantonale a admis tout d'abord que le demandeur a introduit l'action réintégrande de l'art. 927 al. 1 CC, puis que le propriétaire avait certes établi son droit de propriété alors que le défendeur n'avait pas établi ni rendu vraisemblable le sien, mais que le propriétaire n'avait pas allégué, ni donc rendu vraisemblable que l'atteinte à son droit de propriété risquait de lui causer un dommage difficilement réparable au sens de l'art. 261 al. 1 CPC.  
 
1.2. Il ressort du dossier que le demandeur a déposé principalement une requête intitulée " de mesures provisionnelles et de mesures superprovisionnelles " tendant à l'expulsion du défendeur, en se fondant principalement sur l'art. 927 CC avec référence à FRANÇOIS BOHNET, Actions civiles, 2014, no 17 ad § 39 et no 15 ad § 54, lequel admet que, si les conditions en sont remplies, l'action possessoire de l'art. 927 CC peut être accordée à l'occasion du procès au fond en revendication comme une mesure provisionnelle  sui generis; subsidiairement, " même si, par impossible, [le président du tribunal] devait estimer que l'action possessoire basée sur l'art. 927 CC n'était pas donnée en l'espèce ", le demandeur a conclu au prononcé de mesures provisionnelles avant introduction de l'action pétitoire, en se prévalant des art. 937 CC (recte: art. 641 al. 2 CC) et 261 ss CPC.  
Autrement dit, le demandeur a introduit, principalement, une action possessoire, avant procès au fond et, subsidiairement, des mesures provisionnelles au sens des art. 261 ss CPC dans le cadre d'une action pétitoire de l'art. 641 al. 2 CC qui serait introduite ultérieurement. 
 
1.3. En tant qu'elle statue (subsidiairement) sur une requête de mesures provisionnelles (art. 261 ss CPC), à savoir sur l'expulsion du défendeur avant l'introduction de l'action (pétitoire) en revendication (art. 641 al. 2 CC), la décision attaquée est une décision incidente au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Le recours est irrecevable à cet égard, faute pour le recourant d'avoir démontré que cette décision serait susceptible de lui causer un préjudice (juridique) irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF), étant rappelé que le risque d'être exposé à une perte en argent n'est pas un préjudice juridique au sens de cette disposition (ATF 138 III 76 consid. 1.2; 137 III 324 consid. 1.1; 134 I 83 consid. 3.1; arrêts 4A_585/2014 du 27 novembre 2014 consid. 1.1 et 4A_32/2017 du 9 février 2017 consid. 1.1 et les arrêts cités).  
En tant qu'elle se prononce sur l'action possessoire (art. 927 CC), en statuant définitivement sur la protection de la possession, la décision attaquée est une décision finale au sens de l'art. 90 LTF. Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1, 46 al. 2 et 45 al. 1 LTF), par le propriétaire qui a succombé dans ses conclusions, contre une décision confirmant le refus de l'expulsion du défendeur, rendue sur appel par le tribunal supérieur du canton (art. 75 LTF) dans une affaire portant sur des droits réels (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur litigieuse est supérieure à 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est donc recevable à cet égard. 
 
2.   
La décision sur l'action possessoire (art. 927 CC) est une décision portant sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 133 III 638 consid. 2), de sorte que seule peut être dénoncée la violation de droits constitutionnels, en particulier l'arbitraire (art. 9 Cst.). 
D'après la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 I 13 consid. 5.1; 131 I 217 consid. 2.1, 57 consid. 2; 129 I 173 consid. 3.1). 
Pour être jugée arbitraire, la violation du droit doit être manifeste et pouvoir être reconnue d'emblée (ATF 133 III 462 consid. 4.4.1). Le Tribunal fédéral n'a pas à examiner quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement dire si l'interprétation qui a été faite est défendable (ATF 132 I 13 consid. 5.1). Le recourant doit démontrer en quoi l'application qui a été faite du droit est arbitraire (art. 106 al. 2 LTF; ATF 133 III 462 consid. 2.3). 
 
3.   
Aux termes de l'art. 927 al. 1 CC, quiconque usurpe une chose en la possession d'autrui est tenu de la rendre, même s'il y prétend un droit préférable. 
 
3.1. L'action possessoire de l'art. 927 al. 1 CC, dite action réintégrande, a pour fonction d'empêcher que la possession ne soit usurpée et, par là, a pour but de protéger la paix publique. Elle a pour objet la défense de la possession comme telle et vise à rétablir rapidement l'état antérieur. Elle ne conduit pas à un jugement sur la conformité au droit de cet état de fait. Elle n'assure au demandeur qu'une protection provisoire. Le juge ne doit examiner la question du droit à la possession de la chose que lorsqu'il est saisi de l'action pétitoire en revendication (art. 641 al. 2 CC; ATF 113 II 243 consid. 1b p. 244; arrêts 5A_98/2010 du 7 mai 2010 consid. 4.1.2; 5P.509/2006 du 8 mai 2007 consid. 1.3; cf. PAUL-HENRI STEINAUER, Les droits réels, tome I, 5e éd., 2012, n. 313 ss; EMIL W. STARK/BARBARA LINDENMANN, Berner Kommentar, 2016, nos 1 ss Vorb. ad Art. 926-929 CC; SUTTER/SOMM, Eigentum und Besitz, in TDPS V/1, 2014, n. 1309; BETTINA HÜRLIMANN-KAUP, Grundfragen des Zusammenwirkens von Miete und Sachenrecht, 2008, n. 129). Comme le précise l'art. 927 al. 1 in fine CC, le défendeur à l'action réintégrande ne peut pas exciper du droit préférable qu'il aurait sur la chose (ATF 113 II 243 consid. 1b; STEINAUER, op. cit., n. 344; STARK/LINDENMANN, op. cit., nos 91 ss Vorb. ad Art. 926-929 CC).  
L'art. 927 al. 2 CC réserve une situation exceptionnelle, celle dans laquelle le défendeur établit aussitôt un droit - réel ou contractuel (ATF 40 II 559 consid. 3 p. 564 ss; STARK/LINDENMANN, op. cit., no 20 ad art. 927 CC) - préférable qui l'autoriserait à reprendre la chose au demandeur (ATF 113 II 243 consid. 1b p. 245 in fine; arrêt 5A_98/2010 précité consid. 4.1.2; cf. STEINAUER, op. cit., n. 345 ss; EMIL W. STARK/WOLFGANG ERNST, in Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch, 5e éd. 2015, no 6 ad art. 927 CC).  
Le jugement sur l'action réintégrande de l'art. 927 al. 1 CC statue définitivement sur la protection de la possession et, partant, le rétablissement de l'état antérieur (ATF 113 II 243 consid. 1b p. 244). Le juge n'a pas à fixer au demandeur un délai pour introduire une action au fond sur l'existence du droit. L'action pétitoire en revendication (art. 641 al. 2 CC), qui porte sur la protection du droit, peut mettre fin aux effets du jugement sur l'action possessoire (ATF 113 II 243 consid. 1b p. 244). Il s'agit d'une action réelle, qui ne doit pas être confondue avec l'action contractuelle en restitution de la chose louée, à l'échéance du bail (art. 23 al. 1 LBFA; pour le bail à loyer ordinaire, art. 267 al. 1 CO). Elle peut être assortie ou précédée d'une requête de mesures provisionnelles (art. 261 ss CPC) et de mesures superprovisionnelles (art. 265 CPC). 
 
3.2. Le demandeur à l'action réintégrande (art. 927 al. 1 CC) doit prouver la réalisation de deux conditions: premièrement, qu'il avait la possession de la chose et, deuxièmement, qu'il en a perdu la possession à la suite d'un acte d'usurpation illicite. Le degré de la preuve exigé par l'art 927 al. 1 CC est la certitude (  voller Beweis); la simple vraisemblance (  blosses Glaubhaftmachen) ne suffit pas (SUTTER-SOMM, op. cit., n. 1348).  
 
3.2.1. Premièrement, le demandeur doit établir qu'il avait la possession de la chose.  
La possession suppose la maîtrise effective de la chose et la volonté correspondante de celui qui l'exerce de posséder (art. 919 al.1 CC; STEINAUER, op. cit., n. 176 ss; SUTTER-SOMM, op. cit., n. 1207). La maîtrise multiple étant possible (STEINAUER, op. cit., n. 211 ss), il peut s'agir de la possession immédiate de la personne qui exerce directement, sans intermédiaire, la maîtrise de fait sur la chose, mais aussi de la possession médiate de celui qui l'exerce par le truchement d'un tiers à qui il a accordé un droit (réel ou personnel) sur la chose (STEINAUER, op. cit., n. 214 et 340a; SCHMID/HÜRLIMANN-KAUP, Sachenrecht, 5e éd. 2017, n. 214; SUTTER-SOMM, op. cit., n. 1216 ss; HÜRLIMANN-KAUP, op. cit. n. 130; STARK/LINDENMANN, op. cit., no 6 Vorb. ad art. 926-929 CC). 
Lorsque le propriétaire de l'immeuble loue celui-ci à un locataire (ou fermier), les deux sont possesseurs: le locataire a la possession immédiate (  unmittelbarer Besitz) et le propriétaire la possession médiate (  mittelbarer Besitz) (HÜRLIMANN-KAUP, op. cit., n. 114, 118 et 120). Si, en tant que moyen de réaction contre une voie de fait apparente, l'action possessoire protège avant tout le possesseur immédiat contre les tiers (STARK/LINDENMANN, op. cit., no 48 Vorb. ad art. 926-929 CC; SUTTER-SOMM, op. cit., n. 1318), elle protège aussi le possesseur médiat, propriétaire de l'immeuble (cf. art. 937 al. 1 et 2 CC).  
Le transfert de la possession s'effectue selon les règles des art. 922 ss CC (HÜRLIMANN-KAUP, op. cit., n. 122). Lorsque le propriétaire, qui a loué son immeuble à un locataire (ou à un fermier), l'aliène par contrat de vente en la forme authentique (art. 216 al. 1 CO) (titre d'acquisition), le nouveau propriétaire en acquiert la propriété après réquisition d'inscription (acte de disposition) et inscription au registre foncier (acte matériel) (art. 956 al. 1 et 972 CC). Le bail passe à l'acquéreur (art. 261 et 290 let. a CO et, pour le bail à ferme agricole, art. 14 LBFA) (HÜRLIMANN-KAUP, op. cit., n. 544 s.). L'aliénateur cède aussi au nouveau propriétaire la possession médiate qui est la sienne, par délégation de possession (  Besitzanweisung), sans que la possession immédiate du locataire (ou du fermier) n'en soit affectée (art. 924 al. 1 1ère hypothèse CC; cf. STEINAUER, op. cit., n. 271 ss; STARK/LINDENMANN, op. cit., nos 15 et 18 ad art. 924 CC; SUTTER-SOMM, op. cit., n. 1277).  
 
3.2.2. Deuxièmement, le demandeur doit prouver qu'il a perdu la possession de la chose à la suite d'un acte d'usurpation illicite.  
L'acte d'usurpation enlève au possesseur sa possession sur la chose. Il est illicite lorsqu'il n'est justifié ni par la loi, ni par le consentement du possesseur (STEINAUER, op. cit., n. 326 par renvoi du n. 343). 
Lorsque, à la fin de son bail, le locataire (ou le fermier) transfère la possession immédiate de la chose à un tiers sans l'accord du propriétaire bailleur, celui-ci est-il atteint dans sa possession médiate par un acte d'usurpation illicite? La question est controversée en doctrine (cf. notamment HÜRLIMANN-KAUP, op. cit., n. 183 et note 106; STARK/LINDENMANN, op. cit., nos 50 ss Vorb. ad art. 926-929 CC; STEINAUER, op. cit., n. 343 renvoyant à n. 330b; en matière de sous-location, soit lorsque le bail principal n'a pas pris fin, cf. PETER HIGI, Zürcher Kommentar, no 53 ad art. 262 CO et les arrêts de la Cour de justice de Genève du 12 mars 1998, in SJ 1998 p. 471 et du 2 mai 1985 in SJ 1985 p. 474, 477). 
 
3.3. En l'espèce, le propriétaire recourant invoque l'arbitraire dans l'application de l'art. 927 al. 1 CC à deux égards. L'intimé conclut à l'irrecevabilité du recours. Il y a donc lieu d'examiner d'abord le grief d'irrecevabilité.  
 
3.3.1. Dans sa réponse, le neveu intimé conclut principalement à l'irrecevabilité du recours, parce que le possesseur (et propriétaire) recourant n'aurait pas établi qu'une application conjointe des art. 927 et 261 ss CPC serait en l'espèce arbitraire, en d'autres termes parce que le demandeur n'aurait pas établi qu'il serait arbitraire de requérir des mesures provisionnelles dans le cadre d'une action possessoire, et ce avant même l'introduction de celle-ci.  
Or, contrairement à ce que croit l'intimé, le demandeur n'a pas sollicité des mesures provisionnelles pour la durée du procès principal sur l'action réintégrande, mais, après des mesures superprovisionnelles (art. 265 CPC), il a agi directement par l'action réintégrande de l'art. 927 al. 1 CC. La question de savoir si l'action possessoire peut être accompagnée ou précédée d'une requête de mesures superprovisionnelles de l'art. 265 CPC - ce qui est généralement admis -, voire si des mesures provisionnelles peuvent être prises dans le cadre (ou avant l'introduction) d'une action possessoire - en procédure ordinaire ou simplifiée en fonction de la valeur litigieuse - (question que le Tribunal fédéral avait pu laisser ouverte dans l'arrêt 5A_98/2010 déjà cité consid. 4.2.1  in initio), n'a donc pas à être tranchée en l'espèce.  
Quant au chef de conclusions du demandeur tendant à ce qu'un délai lui soit accordé pour ouvrir action au fond, il se comprend en relation avec ses conclusions subsidiaires. 
Il s'ensuit que le recours n'est pas irrecevable. 
 
3.3.2. Dans un premier grief, le propriétaire recourant soutient qu'en tant que propriétaire et possesseur des immeubles, il doit pouvoir requérir la restitution de la " chose ", objet de sa possession, aux conditions prévues pour la réintégrande de l'art. 927 CC, " sans que d'autres conditions ne lui soient imposées, telles que celles de l'art. 261 CPC ".  
Or, contrairement à ce que croit le recourant, la cour cantonale a rejeté l'action réintégrande au motif que, bien qu'il soit propriétaire du domaine et inscrit au registre foncier, il n'en a jamais eu la possession. Elle n'a pas soumis cette action aux conditions de l'art. 261 CPC. Ces conditions n'ont été examinées qu'en relation avec sa requête subsidiaire de mesures provisionnelles antérieures à l'action au fond en revendication. Le recourant cite à mauvais escient BOHNET (cf. supra consid. 1.2) qui admet que l'action possessoire de l'art. 927 al. 1 CC peut être accordée à l'occasion du procès au fond comme une mesure provisionnelle  sui generis.  
De même, contrairement à ce que croit le recourant, la cour cantonale n'a pas non plus examiné l'exception d'un droit préférable au sens de l'art. 927 al. 2 CC, cette disposition n'étant de toute façon pas applicable en l'espèce. 
 
3.3.3. Dans son deuxième grief, le propriétaire recourant reproche à la cour cantonale d'avoir nié qu'il dispose de la possession des immeubles du domaine (première condition de l'art. 927 al. 1 CC) et, partant, d'avoir ainsi arbitrairement rejeté son action réintégrande de l'art. 927 al. 1 CC.  
La cour cantonale a considéré que le contrat de bail a été conclu entre l'ancienne propriétaire du domaine et les fermiers, le 25 novembre 2000. Le demandeur n'en est devenu propriétaire qu'ultérieurement le 15 octobre 2003. Les fermiers ont transmis leur exploitation à leur neveu, le défendeur. La cour cantonale en a déduit que le propriétaire n'a donc jamais eu la possession des immeubles, celle-ci ayant passé de la propriétaire précédente aux fermiers et de ceux-ci au défendeur. 
Cette conception est en contradiction manifeste avec les règles sur le transfert de la possession des art. 922 ss CC. Lorsque le propriétaire qui a affermé son immeuble aliène celui-ci, par contrat de vente en la forme authentique (art. 216 al. 1 CO), il cède aussi à l'acquéreur la possession médiate qui est la sienne, par délégation de possession (  Besitzanweisung), sans que la possession immédiate des fermiers n'en soit affectée (art. 924 al. 1 1ère hypothèse CC), puisque le bail à ferme agricole passe à l'acquéreur (art. 14 LBFA). Il est arbitraire d'appliquer à l'acquisition ensuite de cession volontaire de la possession par l'aliénateur à l'acquéreur une solution que la doctrine, citée par l'arrêt attaqué, n'a appliquée qu'à l'acquisition d'un immeuble par acte officiel, dans le cadre d'une vente aux enchères publiques après faillite (art. 656 al. 2 CC; arrêt 4A_632/2009 du 5 janvier 2010 consid. 2.1; STARK/ERNST, op. cit., no3  in fine ad art. 927 CC, repris par PASCAL PICHONNAZ, in Commentaire romand, Code civil II, 2016, no 3 ad art. 927 CC); l'art. 261 al. 1 CO et l'art. 14 LBFA mettent certes sur un même pied l'aliénation de la chose louée et son enlèvement dans le cadre d'une poursuite pour dettes ou d'une faillite, mais c'est uniquement en ce qui concerne le rapport contractuel de bail qui passe à l'acquéreur; il n'est pas nécessaire de trancher ici comment se transfère la possession dans le cadre de l'exécution forcée.  
Il s'ensuit qu'il doit être admis que le recourant, propriétaire actuel de l'immeuble, en est le possesseur médiat (première condition de l'art. 927 al. 1 CC). 
 
4.   
Le recours doit ainsi être admis et la cause renvoyée à la cour cantonale pour examen et décision sur la deuxième condition de l'action possessoire de l'art. 927 al. 1 CC, soit sur la question de savoir s'il y a eu ou non un acte d'usurpation illicite de la part du neveu des anciens fermiers (cf. supra consid. 3.2.2). 
Les frais de la procédure et les dépens doivent être mis à la charge de l'intimé, qui a conclu à l'irrecevabilité et au rejet du recours et qui, partant, succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.   
L'intimé versera au recourant un montant de 5'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, IIe Cour d'appel civil. 
 
 
Lausanne, le 13 mars 2018 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Kiss 
 
Le Greffier : Piaget