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2P.280/2000 
[AZA 1/2] 
 
IIe COUR DE DROIT PUBLIC 
************************************************ 
 
18 juin 2001 
 
Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, 
président, Hartmann, Betschart, Hungerbühler, Müller, Yersin 
et Merkli. Greffière: Mme Rochat. 
 
Statuant sur le recours de droit public 
formé par 
Le Hockey Club La Chaux-de-Fonds SA, représenté par Me Nicolas Aubert, avocat au Locle, 
 
contre 
la loi neuchâteloise du 24 octobre 2000 portant révision de la loi concernant l'exécution de la loi fédérale du 8 juin 1923 sur les loteries et les paris professionnels; 
 
(art. 27 et 36 Cst. : autorisation d'organiser de grandes 
loteries) 
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Le 24 octobre 2000, le Grand Conseil du canton de Neuchâtel a adopté une loi portant révision de la loi neuchâteloise du 19 mai 1924 concernant l'exécution de la loi fédérale du 8 juin 1923 sur les loteries et les paris professionnels. La nouvelle loi déclare modifier la loi cantonale d'exécution en introduisant trois dispositions nouvelles relatives aux compétences du Conseil d'Etat, voire de la Commission de répartition des bénéfices. En particulier, l'art. 4a prescrit que: 
 
"1Le Conseil d'Etat est habilité à conclure avec d'autres cantons des conventions ayant notamment pour but: 
 
a) de coordonner la politique des cantons en matière d'autorisation de grandes loteries; 
 
b) de définir comme grandes loteries celles dont la valeur d'émission dépasse 100'000 francs ou tout autre montant supérieur; 
 
c) d'organiser une péréquation des bénéfices d'exploitation des grandes loteries entre les cantons signataires; 
 
d) d'exiger des grandes loteries qu'elles participent au financement d'un programme intercantonal de prévention et des traitements du jeu pathologique; 
 
e) de prévoir que les autorisations de grandes loteries seront accordées à une seule entité, à qui les cantons signataires auront confié la mission exclusive de les exploiter, moyennant l'obligation de remettre l'entier des bénéfices d'exploitation à des organes indépendants d'elle et dûment habilités par les cantons signataires à les répartir entre les institutions d'utilité publique et de bienfaisance actives dans les territoires d'autorisation. 
 
2Il est également habilité à modifier et à dénoncer de telles conventions.. " 
 
B.- Agissant le 1er décembre 2000 par la voie du recours de droit public, le Hockey Club La Chaux-de-Fonds SA (en abrégé: le Hockey Club) conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'article premier de la loi portant révision de la loi concernant l'exécution de la loi fédérale du 8 juin 1923 sur les loteries et les paris professionnels du 24 octobre 2000 en ce qu'il introduit l'art. 4a al. 1 lettre e dans ladite loi cantonale d'exécution. A son avis, la disposition querellée constituerait une inégalité de traitement contraire à la liberté du commerce et de l'industrie, dans la mesure où elle permettrait la création d'un monopole dans le domaine des grandes loteries, sans répondre à un motif d'intérêt public. En ce qui le concerne, il explique qu'il doit faire face à d'importantes échéances financières, liées à l'exploitation d'un club de hockey en ligue nationale qui dispose de ressources financières limitées, de sorte que le développement envisagé d'une loterie lui est financièrement indispensable. La réglementation en cause est donc susceptible de toucher virtuellement sa liberté économique. 
 
Le Conseil d'Etat conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. 
 
Les parties ont maintenu leurs conclusions au terme du second échange d'écritures ordonné conformément à l'art. 93 al. 2 OJ
 
 
Considérant en droit : 
 
1.- a) Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 126 I 81 consid. 1 p. 83, 157 consid. 1 p. 258). 
 
b) L'exigence de l'épuisement des voies de droit cantonales - qui s'applique aussi aux recours de droit public dirigés contre un arrêté de portée générale (art. 86 al. 1 et 87 OJ; ATF 124 I 11 consid. 1a p. 13, 159 consid. 1b p. 161 et les arrêts cités) - est en l'espèce respectée, dès lors que le canton de Neuchâtel ne connaît pas d'instance de recours pour le contrôle de la constitutionnalité des lois cantonales. 
 
 
c) En vertu de l'art. 89 al. 1 OJ, l'acte de recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les trente jours dès la communication, selon le droit cantonal, de l'arrêté ou de la décision attaqués. Lorsqu'il s'agit d'un texte soumis au référendum facultatif, le délai de recours commence à courir dès que l'autorité compétente procède à la promulgation de l'acte législatif déjà publié et fixe son entrée en vigueur (ATF 124 I 145 consid. 1b p. 148, 159 consid. 1d p. 162). En l'espèce, la loi cantonale du 24 octobre 2000 portant révision de la loi concernant l'exécution de la loi fédérale du 8 juin 1923 sur les loteries et les paris professionnels, soumise au référendum facultatif, a été publiée dans la Feuille officielle du canton de Neuchâtel le 3 novembre 2000. A l'expiration du délai référendaire, le Conseil d'Etat l'a promulguée le 20 décembre 2000 et a fixé son entrée en vigueur au 1er janvier 2001. 
Déposé le 1er décembre 2000, le présent recours était donc prématuré, mais cela ne nuit pas à sa recevabilité (ATF 121 I 291 consid. 1b p. 293; 117 Ia 328 consid. 1a p. 330). 
 
De ce point de vue, le recours, qui remplit les conditions de forme de l'art. 90 al. 1 OJ, est donc en principe recevable. Il reste toutefois à examiner la qualité pour agir du recourant. 
 
2.- Le recourant a pour but l'exploitation d'une équipe de hockey sur glace professionnelle, ainsi que l'encouragement de ce sport dans le canton et l'arc jurassien, notamment pour les juniors. Depuis le 28 février 2000, il est inscrit au Registre du commerce de Neuchâtel comme société anonyme, dont le capital-actions s'élève à 1 million fr. (10'000 actions de 100 fr. au porteur). Le Conseil d'Etat soutient qu'en sa qualité de société anonyme, le Hockey Club ne saurait être titulaire d'une autorisation de loterie, comme il en avait bénéficié en 1999, de sorte qu'il n'aurait pas qualité pour recourir contre l'art. 4a al. 1 lettre e de la loi cantonale du 24 octobre 2000 qui, pour les grandes loteries (supérieures à 100'000 fr.), autorise la création d'un monopole en faveur d'une seule organisation. 
 
a) La qualité pour recourir par la voie du recours de droit public se détermine exclusivement d'après l'art. 88 OJ (ATF 126 I 43 consid. 1a p. 44). Selon cette disposition, la qualité pour agir appartient aux particuliers et aux collectivités lésés par des arrêtés ou décisions qui les concernent personnellement ou qui sont de portée générale. 
Lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre un arrêté de portée générale, la qualité pour recourir appartient à toute personne dont les intérêts juridiquement protégés sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront l'être un jour; une simple atteinte virtuelle suffit, pourvu qu'il y ait un minimum de vraisemblance que le recourant puisse un jour se voir appliquer les dispositions prétendument inconstitutionnelles (ATF 125 I 71 consid. 1b/aa p. 75, 104 consid. 1 p. 106/107, 173 consid. 1b p. 174, 369 consid. 1a p. 372, 474 consid. 1d p. 477/478; 125 II 440 consid. 1c p. 442). ; 124 I 11 consid. 1b p. 13, 145 consid. 1c p. 148, 159 consid. 1c p. 161/162). D'une manière générale, la voie du recours de droit public n'est pas ouverte pour défendre des intérêts de portée générale ou de purs intérêts de fait (ATF 121 I 367 consid. 1b p. 369; 120 Ia 110 consid. 1a p. 111 et les arrêts cités). La qualité pour agir suppose que le recourant soit directement touché dans ses droits (ATF 113 Ia 94 consid. 1a/aa p. 95); le tiers atteint indirectement par une décision ou un arrêté n'a qu'un intérêt de fait à son annulation, de sorte qu'il n'a pas qualité pour recourir (ATF 115 Ia 76 consid. 1c p. 79; 114 Ia 20 consid. 1 p. 21 et les arrêts cités). En particulier, l'actionnaire d'une société touchée par une décision n'a pas qualité pour agir, parce que lui-même n'est atteint qu'indirectement (arrêt du 31 juillet 1985 en la cause SI Résidence Miremont SA contre canton de Genève, publié in RDAF 1985 p. 384 ss). 
 
 
 
b) La loi fédérale du 8 juin 1923 sur les loteries et les paris professionnels (LLP; RS 935. 51) pose le principe général que les loteries sont prohibées, sous réserve des loteries servant à des fins d'utilité publique ou de bienfaisance, ainsi que des emprunts à primes (art. 3 LLP). En ce qui concerne ces loteries, elles ne doivent pas être destinées à assurer l'exécution d'obligations légales de droit public (art. 5 LLP) et sont accordées par l'autorité cantonale compétente aux seuls titulaires énumérés à l'art. 6 LLP, prévoyant que: 
 
" L'autorisation n'est accordée qu'aux corporations 
et institutions de droit public, ainsi qu'aux groupements 
de personnes et fondations de droit privé 
qui ont leur siège en Suisse et présentent toute 
garantie quant à l'exploitation correcte de la loterie. 
 
Le titulaire d'une autorisation ne peut la céder à 
des tiers.. " 
 
Dans son Message du 21 août 1918 (FF 1918 IV p. 355 et 356), le Conseil fédéral relevait que la loi avait pour mission essentielle de veiller à ce que les loteries d'utilité publique soient exploitées dans des conditions qui garantissent la probité des opérations. Tout en laissant les détails de la réglementation aux cantons pour qu'ils puissent tenir compte des besoins et usages locaux, le projet prévoyait déjà que l'organisation d'une loterie était subordonnée à la délivrance préalable d'un permis de l'autorité, ce qui supposait que le titulaire de l'autorisation remplisse certaines exigences (art. 10 du projet). Quant au cercle des titulaires, il était défini de la manière suivante à l'art. 9 (FF 1918 IV p. 369): 
 
"Le permis d'organiser et d'exploiter une loterie 
n'est délivré qu'aux corporations et établissement 
de droit public et aux groupements de personnes, 
fondations et établissements qui s'occupent exclusivement 
d'oeuvres d'utilité publique et ont leur 
siège en Suisse. 
 
Le titulaire du permis de loterie ne peut transférer 
celui-ci à des tiers.. " 
 
Cette disposition a ensuite été scindée en deux par la Commission du Conseil des Etats chargée de soumettre le projet aux Chambres: alors que l'art. 7 (devenu art. 5 LLP) reprenait la notion de but d'utilité publique ou de bienfaisance, l'art. 8 (devenu art. 6 LLP) limitait les titulaires aux "groupements de personnes privés et aux fondations" ("privatrechtliche Personenvereinigungen und Stiftungen"), afin d'éviter que les loteries servent à financer des tâches qu'une collectivité publique est chargée légalement d'assumer (Bull. stén. CE 1921 p. 27 et p. 83). Compte tenu des réticences du Conseiller fédéral Häberlin à exclure d'emblée les corporations de droit public, l'art. 8 avait toutefois été renvoyé à la Commission (Bull. stén. CE 1921 p. 83 à 85). Dans sa séance du 4 avril 1921, le Conseil des Etats avait alors accepté la proposition de sa Commission d'inclure les corporations et institutions de droit public dans la liste des titulaires, tout en précisant à l'article 7, qu'aucune loterie destinée à assurer l'exécution d'obligations légales de droit public ne devrait être autorisée (Bull. stén. CE 1921 p. 124 à 126). Avant d'adopter l'art. 8 dans sa teneur correspondant à l'actuel art. 6 LLP, la Commission du Conseil national avait cependant suggéré de remplacer l'énumération du Conseil des Etats par le terme "personnes morales" qui devait comprendre les institutions d'utilité publique et de bienfaisance qu'il paraissait souhaitable de mettre au bénéfice des exceptions créées par la loi (Bull. stén. CN 1922 p. 863 et 864). Dans ce contexte, le terme "personnes morales" (en allemand: "juristische Personen") visait avant tout les associations et les fondations. 
Le Conseil des Etats s'était toutefois opposé à cette proposition pour des motifs de clarté des définitions juridiques. 
A son avis, même si le terme "juristische Personen" pouvait en principe englober les corporations et les établissements de droit public, il était plutôt compris comme une notion relevant du droit civil (Bull. stén. CE 1923 p. 23 et 24). Le Conseil national avait fini par se rallier à cet avis, considérant qu'il s'agissait d'une pure question de forme (Bull. stén. CN 1923 p. 145). Quoi qu'il en soit, il n'en reste pas moins que le titulaire de l'autorisation doit viser un but d'utilité publique ou de bienfaisance (art. 5 LLP). 
 
 
Sur le plan cantonal, le règlement neuchâtelois du 17 décembre 1954 concernant les loteries et le commerce professionnel des valeurs à lots reprend, à son art. 5, les termes mêmes de l'art. 6 al. 1 LLP avec la restriction contenue à l'art. 5 2ème phrase LLP au sujet de la prohibition des loteries destinées à assurer l'exécution d'obligations légales de droit public. L'application de ces dispositions est toutefois restée limitée, dans la mesure où, pour pallier les abus, les cantons ont rapidement conclu des conventions intercantonales afin de confier l'organisation des loteries à de grandes entités (voir notamment pour la Suisse allemande et le Tessin, excepté Berne, l'Interkantonale Vereinbarung betreffend die gemeinsame Durchführung von Lotterien vom 26. Mai 1937 ou la Convention relative à la loterie de la Suisse romande du 9 octobre 1943; sur ce point, voir également Georg Müller, Aktuelle Rechtsfragen des Lotteriewesens, ZBl 89/1988 p. 143/144). 
 
c) Dans ce contexte, il paraît déjà douteux que l'autorisation donnée au recourant pour organiser une grande loterie en 1999 ait répondu aux exigences légales. En effet, si une personne morale peut en principe obtenir une autorisation en vertu de l'art. 6 LLP, celle-ci dépend des buts que doivent poursuivre les grandes loteries, soit des buts d'utilité publique ou de bienfaisance au sens de l'art. 5 LPP. Ces notions sont indéterminées et se recoupent en partie; elles sont définies de cas en cas, mais doivent toujours concerner des activités désintéressées servant le bien commun ou portant secours à des personnes individuelles (Georg Müller, op. cit. , p. 150 à 152). Or, même si l'on admet que le Hockey Club remplit une tâche d'utilité publique en formant des juniors à la pratique du hockey, cela ne concerne qu'une partie restreinte de son activité qui, pour le reste, n'a certainement rien de désintéressé. Quoi qu'il en soit, la situation du recourant est devenue plus claire depuis qu'il s'est transformé en société anonyme. Comme on l'a vu (supra consid. 2b), il ressort des débats aux Chambres que les titulaires des autorisations d'organiser des loteries ont été désignés de façon limitative par le législateur à l'art. 6 al. 1 LLP et que, du point de vue du droit privé, seules les personnes morales poursuivant des buts purement désintéressés d'utilité publique ou de bienfaisance sont visées, à l'exclusion des sociétés commerciales. Par conséquent, il serait manifestement contraire aux buts poursuivis par la loi fédérale sur les loteries et les paris professionnels d'accorder une autorisation à une société anonyme qui, comme le recourant, cherche à financer par ce biais son activité principale, à savoir le développement d'une équipe de hockey professionnelle en ligue nationale (sur l'utilisation de l'argent provenant des loteries voir Georg Müller, op. cit. , p. 150 ss). 
 
d) Il s'ensuit que, dans la mesure où le Hockey Club ne saurait être compris dans le cercle des personnes susceptibles d'obtenir l'autorisation d'organiser une grande loterie, il ne peut pas non plus prétendre être directement touché par l'art. 4a al. 1 lettre e de la loi cantonale du 20 octobre 2000, qui donne la compétence au Conseil d'Etat d'accorder à une seule entité de telles autorisations. Il n'a donc pas qualité pour attaquer cette réglementation par la voie du recours de droit public. 
 
3.- Au vu de ce qui précède que le recours doit être déclaré irrecevable, avec suite de frais à la charge du recourant (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral, 
 
1. Déclare le recours irrecevable. 
2. Met à la charge du recourant un émolument judiciaire de 2'000 fr. 
 
3. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant et au Grand Conseil du canton de Neuchâtel. 
_______________ 
Lausanne, le 18 juin 2001ROC/elo 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
La Greffière,