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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4P.284/2006 /ggz 
 
Arrêt du 19 janvier 2007 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Kolly. 
Greffière: Mme Godat Zimmermann. 
 
Parties 
B.________ AG (anciennement A.________ AG), 
recourante, représentée par Mes Bernard Lachenal 
et Carole van de Sandt, 
 
contre 
 
C.________ Ltd, 
D.________ SA, 
intimées, représentées par Mes Philippe Neyroud 
et Olivier Wehrli, 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
art. 9 Cst. (procédure civile; demande de révision cantonale), 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre 
civile de la Cour de justice du canton de Genève du 
15 septembre 2006. 
 
Faits : 
A. 
C.________ Ltd, dont le siège est à Londres, et D.________ SA, sise à Madrid, sont des sociétés contrôlées par F.________ Office, succursale de F.________ Authority. Cette dernière est une entité publique koweïtienne chargée, par l'entremise de ses bureaux de Londres, de réaliser et de gérer les investissements à l'étranger de l'Etat du Koweït. Dès 1986, F.________ Office a effectué des investissements en Espagne par le biais de D.________ SA et a acquis d'importantes participations dans des entreprises espagnoles. 
 
B.________ AG (anciennement A.________ AG) est une société de droit suisse dont le siège se trouve à Frauenfeld (TG). Elle avait une succursale à Genève. 
 
A.________ Corporation (actuellement E.________ Corporation) est une société holding qui détient les participations de plusieurs filiales, notamment de A.________ Company (actuellement E.________ Company); elle coordonne la politique générale du groupe et fournit à ses filiales divers services de conseil. Pour sa part, A.________ Company est l'une des plus importantes banques commerciales des Etats-Unis; elle était la principale filiale de A.________ Corporation. A.________ Company supervisait les activités en Suisse de B.________ AG. 
B. 
Par demande du 26 septembre 2000, C.________ Ltd et D.________ SA ont ouvert action contre B.________ AG et A.________ Corporation devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. Elles concluaient à ce que les défenderesses soient condamnées, conjointement et solidairement, à leur payer différents montants totalisant 721'657'970 USD et 500'000'000 fr. Elles soutenaient que des détournements de fonds avaient été commis à leur préjudice entre 1988 et 1992, notamment par leurs propres administrateurs agissant de concert avec certains organes de B.________ AG et A.________ Corporation. 
 
En cours de procédure, les défenderesses ont formé une demande d'appel en cause de X.________, Y.________ et Z.________; les demanderesses ne s'y sont pas opposées. 
Dans son mémoire de réponse, B.________ AG a conclu au déboutement des demanderesses de toutes leurs conclusions. Pour sa part, A.________ Corporation a contesté sa légitimation passive, exposant qu'elle était simplement une société holding sans activité. Elle a relevé que B.________ AG était supervisée par A.________ Company, ce que les demanderesses savaient parfaitement. 
 
C.________ Ltd et D.________ SA ont alors conclu à la rectification de A.________ Corporation en A.________ Company. Par jugement du 29 août 2003, le Tribunal de première instance a ordonné la rectification. La Cour de justice du canton de Genève a confirmé ce jugement par arrêt du 18 juin 2004. 
 
A.________ Corporation et A.________ Company ont interjeté un recours de droit public, qui a été admis par arrêt du 17 novembre 2004 (ATF 131 I 57). En résumé, le Tribunal fédéral a jugé que le droit cantonal relatif à la rectification d'une désignation incorrecte des parties avait été appliqué arbitrairement, dès lors qu'il s'agissait en réalité d'une substitution de partie. 
 
A la suite du renvoi de la cause, la Cour de justice a invité les parties à prendre des conclusions. Dans ce cadre, B.________ AG a invoqué la nullité de l'assignation à raison de la non-individualisation des conclusions, soutenant que les demanderesses, par des conclusions communes, réclamaient à tort la réparation d'un dommage prétendument subi en commun, comme si elles étaient titulaires d'une seule créance en dommages-intérêts. 
 
Statuant le 20 janvier 2006, la cour cantonale a annulé le jugement du 29 août 2003, puis elle a constaté que A.________ Company n'était pas partie à la procédure, débouté les demanderesses de leurs conclusions en tant qu'elles concernaient A.________ Corporation et renvoyé la cause au Tribunal de première instance pour instruction et nouvelle décision sur le fond. Considérant, à la suite du Tribunal fédéral, qu'un risque de confusion s'opposait à la rectification des parties, la Cour de justice en déduit que A.________ Company n'a jamais été partie à la procédure. Elle relève par ailleurs que les demanderesses admettent s'être trompées en assignant A.________ Corporation. Enfin, elle expose que les conclusions de B.________ AG en constatation de la nullité de l'assignation sont irrecevables, au motif qu'elles ont été soulevées tardivement. 
Contre l'arrêt du 20 janvier 2006, B.________ AG a interjeté un recours de droit public (cause 4P.56/2004) et un recours en réforme (cause 4C.80/2006), tous deux déclarés irrecevables par arrêts de ce jour. De plus, elle a déposé une demande de révision cantonale. 
 
Par arrêt du 15 septembre 2006, la Cour de justice a partiellement admis la demande et complété le dispositif de l'arrêt du 20 janvier 2006 par la mention expresse que l'incident de la nullité de l'assignation soulevé par B.________ AG était irrecevable; pour le surplus, elle a rejeté la demande de révision. 
C. 
B.________ AG forme un recours de droit public. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt du 15 septembre 2006 en tant qu'il déclare irrecevable l'incident de nullité de l'assignation et en tant qu'il la déboute de ses autres conclusions. 
 
C.________ Ltd et D.________ SA proposent, principalement, l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, son rejet. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
L'acte dont est recours a été rendu avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007, de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF). Par conséquent, la procédure reste soumise à l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ; art. 132 al. 1 LTF). 
2. 
L'arrêt attaqué a été rendu à la suite d'une demande de révision. Cette demande a été partiellement admise, dans le sens que le dispositif de la décision entreprise a été complété pour réparer un oubli; il y a été expressément ajouté, ce qui ressortait déjà des considérants de l'arrêt du 20 janvier 2006, que l'incident de nullité de l'assignation soulevé par la recourante était irrecevable. Pour le surplus, la demande a été rejetée. L'arrêt du 15 septembre 2006 n'a donc en aucune façon modifié la décision du 20 janvier 2006, qui était une décision incidente ne pouvant pas faire l'objet d'un recours de droit public (cf. arrêt de ce jour dans la cause 4P.56/2006). 
 
L'arrêt attaqué termine la procédure de révision au niveau cantonal; il est donc susceptible de faire l'objet d'un recours de droit public. Cependant, il se rapporte à une décision incidente qui, elle, ne pouvait pas faire l'objet d'un tel recours. Cette décision incidente, non modifiée par l'arrêt attaqué, ne saurait dès lors être attaquée à présent, dans le cadre d'un recours de droit public dirigé contre l'arrêt de révision, car cela permettrait de contourner, par le dépôt d'une demande de révision, l'exclusion du recours de droit public contre les décisions incidentes (art. 87 al. 2 OJ). Il s'ensuit que le recours est recevable uniquement dans la mesure où la recourante soulève des griefs constitutionnels se rapportant à la procédure de révision elle-même, à l'exclusion de griefs relatifs à la décision incidente faisant l'objet de la demande de révision. 
3. 
La recourante se plaint d'une violation de l'interdiction de l'arbitraire dans le cadre de l'application de l'art. 154 LPC/GE. Cette disposition prévoit qu'il y a notamment lieu à révision d'un jugement s'il a été prononcé sur des choses non demandées ou s'il a été adjugé plus qu'il n'a été demandé. La recourante reproche à la Cour de justice de ne pas avoir admis avoir statué «ultra petita» dans la décision incidente et d'avoir en conséquence rejeté la demande de révision sur ce point. 
 
Dans l'assignation, qui vaut premier mémoire de demande, les intimées ont pris des conclusions communes. En précisant dans les considérants de sa décision incidente que le Tribunal de première instance devrait «clarifier ce que chacune des intimées réclame individuellement», la Cour de justice ne l'astreint pas à accorder aux intimées un montant supérieur à celui articulé dans les conclusions ou un montant pour un motif autre que ceux invoqués à l'appui des conclusions prises. La petite phrase sous-entend simplement la possibilité de n'admettre que partiellement les conclusions prises, dans le sens notamment que certains montants demandés ne seraient pas dus aux deux intimées solidairement ou collectivement, mais à l'une d'elles seulement. Or, allouer tout ou partie des montants réclamés par plusieurs demandeurs à un seul d'entre eux, ne revient pas à accorder plus que demandé, mais au contraire à n'allouer qu'une partie de ce qui était demandé; ce n'est pas accorder plus ou autre chose. 
 
La décision incidente ne va pas au-delà des conclusions prises. Le grief d'arbitraire dans l'application des dispositions de droit cantonal sur la révision est infondé. 
4. 
Les autres griefs soulevés par la recourante ne se rapportent pas à la procédure de révision, mais à la décision incidente dont la révision était demandée. Ces griefs sont pour l'essentiel une reprise de ceux déjà soulevés dans le recours de droit public interjeté contre l'arrêt du 20 janvier 2006. Partant, ils sont irrecevables. 
5. 
Vu le sort réservé au recours, la recourante supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) et versera des dépens aux intimées (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 30'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de 35'000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 19 janvier 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: