Intestazione
145 III 56
10. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A.A. contre B.A. (recours en matière civile)
5A_443/2018 du 6 novembre 2018
Regesto
Art. 124a e 124b cpv. 2 CC; divorzio; nuovo diritto sul conguaglio della previdenza professionale dei coniugi; motivi gravi che permettono di derogare al principio della divisione per metà.
Nell'ambito del conguaglio della rendita secondo l'art. 124a CC, il giudice può ispirarsi ai principi risultanti dall'art. 124b CC (consid. 5.1). La violazione grave da parte di un coniuge del suo dovere di contribuire al mantenimento della famiglia costituisce un motivo grave che permette di scostarsi dal principio della divisione per metà (consid. 5.3 e 5.4). Nel caso concreto, il rifiuto della divisione non costituisce un abuso del potere d'apprezzamento (consid. 6).
A.A. (1945) et B.A. (1953) se sont mariés le 23 octobre 1972. Ils ont eu deux enfants, aujourd'hui majeurs. Les époux ont connu d'importantes difficultés conjugales durant de nombreuses années.
Par jugement du 3 avril 2017, le Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a prononcé leur divorce, dit qu'aucune contribution d'entretien ne serait due entre eux, condamné l'époux à verser à l'épouse 28'121 fr. 45 au titre de la liquidation du régime matrimonial et refusé à l'époux l'allocation d'une indemnité équitable au sens de l'ancien art. 124 CC.
Statuant le 11 avril 2018 sur l'appel interjeté par l'époux, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a réformé cette décision, en ce sens que B.A. a été condamnée à verser à A.A. 2'094 fr. 50 au titre de la liquidation du régime matrimonial, le jugement étant confirmé pour le surplus.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par l'époux contre cette décision.
(résumé)
Extrait des considérants:
5. A teneur de l'
art. 7d al. 2 Tit. fin. CC relatif au traitement de la prévoyance professionnelle en cas de divorce, les procès en divorce pendants devant une instance cantonale sont soumis au nouveau droit dès l'entrée en vigueur de la modification du 19 juin 2015. L'arrêt entrepris a été rendu le 11 avril 2018, soit après l'entrée en vigueur, le 1
er janvier 2017, de la novelle du 19 juin 2015 portant notamment modification des
art. 122 ss CC (RO 2016 2313). C'est ainsi à juste titre que la cour cantonale a appliqué le nouveau droit à la question du partage de la prévoyance professionnelle des époux.
5.1 Selon l'
art. 122 CC, les prétentions de prévoyance professionnelle acquises durant le mariage et jusqu'à l'introduction de la procédure de divorce sont partagées entre les époux.
L'
art. 124a CC règle les situations dans lesquelles, au moment de l'introduction de la procédure de divorce, l'un des époux perçoit une rente d'invalidité alors qu'il a déjà atteint l'âge réglementaire de la retraite ou perçoit une rente de vieillesse - comme c'est le cas en l'espèce. Dans ces situations, il n'est plus possible de calculer une prestation de sortie, de sorte que le partage devra s'effectuer sous la forme du partage de la rente (Message du 29 mai 2013 concernant la révision du code civil suisse [Partage de la prévoyance professionnelle
BGE 145 III 56 S. 58
en cas de divorce], FF 2013 4341, 4363 ad
art. 124a CC [ci-après:Message LPP]). Selon l'
art. 124a CC, le juge
apprécie les modalités du partage. Il tient compte en particulier de la durée du mariage et des besoins de prévoyance de chacun des époux (al. 1). L'énumération des circonstances que le juge doit prendre en considération lorsqu'il prend une telle décision fondée sur son pouvoir d'appréciation n'est pas exhaustive (FF 2013 4365 ad
art. 124a CC). S'il prend en considération d'autres circonstances que la durée du mariage et les besoins de prévoyance de chacun des conjoints, le juge doit préciser lesquelles. Entrent notamment en ligne de compte les circonstances justifiant l'attribution de moins ou de plus de la moitié de la prestation de sortie (
art. 124b CC; FF 2013 4365 ad
art. 124a CC et 4370 ad
art. 124b CC). En d'autres termes, si l'
art. 124b CC ne s'applique pas directement aux cas de partage d'une rente, mais vise uniquement les cas de partage des prestations de sortie, le juge peut toutefois s'inspirer des principes ressortant de cette disposition dans le cadre de l'exercice du pouvoir d'appréciation que lui confère l'
art. 124a CC (JUNGO/GRÜTTER, Scheidung, vol. I, 3
e éd. 2017, n
os 23 et 27 ad
art. 124a CC; LEUBA/UDRY, Partage du 2
ème pilier: premières expériences, in Entretien de l'enfant et prévoyance professionnelle, 2018, p. 9; ANNE-SYLVIE DUPONT, Les nouvelles règles sur le partage de la prévoyance en cas de divorce, in Le nouveau droit de l'entretien de l'enfant et du partage de la prévoyance, 2016, n. 85 p. 81 s.; THOMAS GEISER, Gestaltungsmöglichkeiten beim Vorsorgeausgleich, RJB 153/2017 p. 1 [12]).
5.2 Selon l'
art. 124b al. 2 CC, le juge attribue moins de la moitié de la prestation de sortie au conjoint créancier ou n'en attribue aucune pour de
justes motifs. C'est le cas en particulier lorsque le partage par moitié s'avère
inéquitable en raison de la liquidation du régime matrimonial ou de la situation économique des époux après le divorce (ch. 1) ou des besoins de prévoyance de chacun des époux, compte tenu notamment de leur différence d'âge (ch. 2).
Dans un arrêt rendu sous l'empire de l'ancien droit du partage des avoirs de prévoyance professionnelle (
ATF 133 III 497), le Tribunal fédéral avait considéré que le partage pouvait être refusé lorsqu'il s'avérait manifestement inéquitable pour des motifs tenant à la liquidation du régime matrimonial ou à la situation économique des époux après le divorce (ancien
art. 123 al. 2 CC), mais aussi en cas d'abus de droit (
art. 2 al. 2 CC), par exemple lorsque les époux avaient contracté un mariage de complaisance ou n'avaient jamais eu l'intention
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de former une communauté conjugale. En revanche, une violation des devoirs découlant du mariage ne constituait pas un motif de refus du partage des avoirs de prévoyance professionnelle. Le comportement des conjoints durant le mariage ne jouait aucun rôle dans ce domaine, étant relevé que l'
art. 125 al. 3 ch. 1 CC, selon lequel une violation grave de l'obligation d'entretien de la famille pouvait justifier un refus d'allouer une contribution d'entretien, n'avait pas été conçu par le législateur en relation avec le partage des prestations de sortie (
ATF 133 III 497 consid. 4 et 5; arrêt approuvé par HEINZ HAUSHEER, in RJB 144/2008 p. 557 s.). En conséquence, le Tribunal fédéral avait retenu, dans le cas d'espèce de l'
ATF 133 III 497, que l'on ne pouvait pas refuser de partager les avoirs de prévoyance professionnelle par moitié entre les époux, quand bien même l'épouse avait travaillé à plein temps depuis le début du mariage, alors que l'époux n'avait pas travaillé ou ne l'avait fait que de manière sporadique, leurs deux enfants vivant pour leur part, dès leur naissance, chez leurs grands-parents maternels.
5.3 Il reste à examiner si cette jurisprudence peut être confirmée sous l'empire du nouveau droit du partage de la prévoyance professionnelle.
5.3.1 La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales. Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; en particulier, il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste. Si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de choisir celle qui est conforme à la Constitution (
ATF 144 III 54 consid. 4.1.3.1 et les références). Lorsqu'il s'agit d'interpréter de nouvelles dispositions, les travaux préparatoires revêtent une importance particulière (
ATF 133 III 497 consid. 4.1 in fine et les références).
5.3.2 Le texte de l'
art. 124b al. 2 CC prévoit la possibilité pour le juge de s'écarter du principe du partage par moitié pour de "justes motifs" et cite deux exemples à ses chiffres 1 et 2. Il ne précise toutefois pas plus avant la notion de justes motifs et n'indique en particulier pas si la violation par un conjoint de son obligation de contribuer à l'entretien de la famille, au sens de l'
art. 163 CC, pourrait constituer un tel motif.
Selon le Message LPP, la liste des justes motifs énumérés à l'
art. 124b al. 2 CC, pour lesquels le juge peut renoncer au partage par moitié, n'est pas exhaustive. D'autres cas de figure sont envisageables, celui notamment où le conjoint créancier "ne se serait pas conformé à son obligation d'entretien" (selon les textes allemands et italiens du Message: "(...) seine Pflicht, zum Unterhalt der Familie beizutragen, grob verletzt hat" [FF 2013 4182]; "(...) ha violato in modo grave l'obbligo di contribuire al mantenimento della famiglia" [FF 2013 4918]), auquel cas il paraîtrait insatisfaisant qu'il puisse exiger la moitié de la prestation de sortie du conjoint débiteur (FF 2013 4371 ad
art. 124b CC). Le Message se réfère ici expressément à l'
ATF 133 III 497. Dans le cadre des travaux parlementaires, la conseillère nationale Gabi Huber a exposé que cette jurisprudence était insatisfaisante, et que des situations comme celle de l'
ATF 133 III 497 ne devraient plus exister lorsque le nouvel
art. 124b CC serait entré en vigueur (BO 2015 CN 766). La Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a souligné que le principe d'un partage par moitié demeurait, mais qu'il convenait d'offrir au juge une certaine flexibilité (BO 2015 CN 768). Enfin, alors que l'avant-projet de modification du Code civil disposait, tout comme l'ancien
art. 123 al. 2 CC, que le juge refuse le partage par moitié, en tout ou partie, lorsque celui-ci s'avère
manifestement inéquitable (art. 122 al. 2 ap-CC), le nouvel
art. 124b al. 2 CC ne mentionne finalement que le terme
inéquitable, ceci afin de laisser une plus grande marge d'interprétation au juge (FF 2013 4352 ainsi que 4370 ad
art. 124b CC).
Une partie de la doctrine soutient que, même sous l'empire du nouveau droit, le fait pour un époux d'avoir contribué à l'entretien de la famille dans une plus grande proportion que ce que lui impose l'
art. 163 CC n'est pas déterminant pour le partage des avoirs de prévoyance professionnelle, seuls des motifs de nature économique pouvant être qualifiés de justes motifs au sens de l'
art. 124b al. 2 CC (REGINA AEBI-MÜLLER, ZBJV 2018 p. 608; dans le même sens GEISER, op. cit., p. 15, selon lequel le comportement des époux durant le
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mariage ne constitue pas un juste motif de refus du partage). D'autres auteurs affirment, en se référant au Message LPP, que la jurisprudence découlant de l'
ATF 133 III 497 ne peut plus être appliquée depuis l'entrée en vigueur du nouveau droit (JUNGO/GRÜTTER, op. cit., n° 17 ad
art. 124b CC; MYRIAM GRÜTTER, Der neue Vorsorgeausgleich im Überblick, FamPra.ch 2017 p. 127 [138]). En d'autres termes, ils admettent que le juge puisse désormais tenir compte, dans son appréciation, non seulement de motifs de nature purement économique tels que ceux cités à l'
art. 124b al. 2 CC, mais aussi de la violation grave, par un époux, de son obligation d'entretien de la famille (MARKUS MOSER, Teilung mit Tücken - der Vorsorgeausgleich auf dem Prüfstand der anstehenden Scheidungsrechtsrevision, SZS 2014 p. 100 [122 s.]).
On peut certes craindre que le nouvel
art. 124b al. 2 CC n'ait pour effet, en quelque sorte, de réintroduire par la bande le divorce "pour faute" et de détourner le but initial de la loi (GEISER, op. cit., p. 15). Dans son Message, le Conseil fédéral souligne toutefois qu'il conviendra de veiller à ce que l'application de l'
art. 124b al. 2 CC ne vide pas de sa substance le principe du partage par moitié (FF 2013 4371 ad
art. 124b CC), le partage de la prévoyance professionnelle devant, dans l'idéal, permettre aux deux conjoints de disposer d'un avoir de prévoyance de qualité égale (FF 2013 4349). Ces principes ont été conçus pour être appliqués indépendamment de la répartition des tâches convenue durant le mariage. Il n'en demeure pas moins que la volonté du législateur, dans le cadre de la novelle du 19 juin 2015, était d'assouplir les conditions auxquelles le juge peut exclure totalement ou partiellement le partage. Il a clairement souhaité que le fait, pour un époux, d'avoir gravement violé son obligation de contribuer à l'entretien de la famille puisse constituer un juste motif au sens de l'
art. 124b al. 2 CC, contrairement à ce que préconisait l'
ATF 133 III 497.
5.4 En définitive, au vu du but général de la loi concernant le partage de la prévoyance en cas de divorce, le comportement des époux durant le mariage ne constitue en principe pas un critère à prendre en considération; il ne s'agira donc pas d'analyser dans chaque situation la proportion dans laquelle chaque époux s'est impliqué dans l'entretien de la famille et de pondérer le partage des avoirs en fonction de ces éléments. Cependant, selon la volonté claire du législateur, le juge du divorce a désormais la possibilité de tenir compte, dans son appréciation, de la violation par un époux de son obligation d'entretenir
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la famille. Il ne peut toutefois le faire que de manière restrictive, afin d'éviter que le principe du partage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle des époux ne soit vidé de sa substance. En particulier, c'est seulement dans des situations particulièrement choquantes que de tels justes motifs peuvent l'emporter sur les considérations économiques liées aux besoins de prévoyance respectifs des époux, de sorte que le juge est habilité, sur cette base, à refuser totalement ou partiellement le partage des avoirs de prévoyance professionnelle (dans le même sens, cf. DUPONT, op. cit., n. 84 p. 81; MOSER, op. cit., p. 122 et 123, qui parle de "krass ehewidrigen Verhaltens" et de "grobe Verletzung ehelicher Unterhaltspflicht"), et ce même si la prévoyance du conjoint créancier n'apparaît pas adéquate (cf. à ce sujet HERZIG/JENAL, Verweigerung des Vorsorgeausgleichs in der Scheidung: Konfusion um Rechtsmissbrauchsverbot und Unbilligkeitsregel, Jusletter 21 janvier 2013, n. 17 et la critique formulée au n. 18).
6. En l'espèce, le recourant ne conteste pas avoir gravement violé son obligation de contribuer à l'entretien de la famille. Il ne remet pas en cause les constatations de fait de l'autorité cantonale, selon lesquelles il n'a que très peu travaillé et ne s'est occupé ni des enfants, ni du ménage, et ce tout au long du mariage. Dans ce contexte, la cour cantonale pouvait considérer que l'on se trouvait en présence de justes motifs, au sens de l'
art. 124b al. 2 CC, dont elle pouvait s'inspirer dans le cadre de l'exercice de son pouvoir d'appréciation prévu par l'
art. 124a CC (cf. supra consid. 5.1 et 5.4).
Le recourant soutient qu'en refusant tout partage, la cour cantonale a abusé de son pouvoir d'appréciation, dès lors qu'au vu de sa profession, même s'il avait régulièrement travaillé, il n'aurait pas pu accumuler autant d'avoirs de prévoyance professionnelle que son épouse. Sur cette base, il expose que l'on ne saurait lui attribuer un montant plus faible que s'il avait travaillé tout au long du mariage. Cela étant, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment du fait qu'il a gravement violé son obligation de contribuer à l'entretien de la famille, ce tout au long du mariage, qu'il n'a pas contribué à l'éducation et à la prise en charge des enfants ni aux tâches du ménage, qu'il a disposé seul d'un crédit de 90'864 fr. dont son épouse a dû assumer seule le remboursement, qu'il a exercé, tout au long du mariage, une surveillance étroite sur celle-ci au point de la priver d'autonomie, la maltraitant ainsi que leurs enfants, tant physiquement que psychologiquement, et privant parfois la famille de l'argent
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nécessaire à ses besoins de base car il jouait une partie du salaire de son épouse aux jeux de hasard, on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation (cf. consid. 2.2 non publié). Enfin, en tant que le recourant fait valoir qu'il a d'importants besoins de prévoyance, il omet que dans la situation exceptionnelle où, comme en l'espèce, le refus de prévoyance est lié à un manquement grave de l'un des époux à son obligation de contribuer à l'entretien de la famille, le critère du caractère adéquat des avoirs de prévoyance du conjoint créancier peut être relégué au second plan (cf. supra consid. 5.3.2).