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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_694/2021  
 
 
Arrêt du 8 août 2022  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux Jametti, Juge présidant, Chaix et Haag. 
Greffière : Mme Corti. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Yves Grandjean, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, 
passage de la Bonne-Fontaine 41, 
2300 La Chaux-de-Fonds. 
 
Objet 
procédure pénale; qualité de partie plaignante, 
 
recours contre l'arrêt de l'Autorité de recours en matière pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 18 mai 2021 (ARMP.2021.47/sk). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le Ministère public de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: le Ministère public) a ouvert, le 15 février 2021, une instruction pénale (référencée sous MP.2021.852), contre des agents, inconnus, de la société B.________ SA, chargés de la sécurité du Centre fédéral pour requérants d'asile (CFA) de Perreux à Boudry (NE), pour exposition (art. 127 CP), éventuellement omission de prêter secours (128 CP), subsidiairement pour lésions corporelles graves (122 CP). 
En substance, l'enquête porte sur les faits suivants déduits notamment du rapport de police du 16 mars 2021, lui même établi après l'audition des principaux intéressés et l'analyse d'images de vidéosurveillance: 
 
- A.________, ressortissant marocain, né en 2002 (en 2004 selon lui), a demandé l'asile en Suisse en automne 2020 et a été placé au CFA à Boudry; 
- le 13 février 2021, vers 18 heures, alors qu'il faisait froid, A.________ est arrivé en état d'ébriété au CFA, après être sorti durant l'après-midi. Constatant son état, deux agents de sécurité de la société B.________ SA, mandatée par le Secrétariat d'Etat au migrations (SEM) pour assurer la sécurité du CFA, l'ont alors placé, à 18h19, dans un container destiné à accueillir notamment les personnes ivres pour une période de dégrisement. Constatant des tensions entre l'intéressé et deux autres personnes déjà présentes dans ledit container, deux agents de sécurité ont sorti A.________ pour le placer, à 18h22, dans un autre container qui n'avait pas été préalablement chauffé, alors que l'intéressé était torse nu et agité; ce dernier a posé sa veste par terre et s'est mis à faire des appuis faciaux. Après que des agents sont intervenus entre 18h25 et 18h30, notamment pour calmer l'intéressé (qui pleurait) et pour le soumettre à une fouille, celui-ci s'est couché par terre, à 18h33, semblant faire un malaise. Environ 90 secondes plus tard, des agents de sécurité sont entrés dans le container, ont placé l'intéressé en position latérale de sécurité et sont restés auprès de lui. Durant les minutes qui ont suivi, les agents l'ont recouvert avec sa veste, puis avec une couverture et un duvet. Des ambulanciers sont arrivés à 19h14 et l'ont pris en charge. Selon le médecin-légiste mandaté par le Ministère public, dans l'intervalle qui s'est écoulé avant l'arrivée de l'ambulance, l'intéressé risquait l'arrêt cardiaque à tout moment. A son arrivée à l'hôpital, A.________ présentait un état d'hypothermie avec une température corporelle de 33°C, une hypoglycémie à 3, une alcoolémie d'au moins 0,8 o/oo et se trouvait dans un état de stress intense. Une enflure et une rougeur à une main, ainsi qu'une dermabrasion au thorax, ont en outre été constatées; 
- lors de ses premières déclarations, recueillies à l'hôpital le jour même à 20h34 par une patrouille de gendarmerie, A.________ a déclaré en substance avoir eu, vers 14h, une altercation avec deux autres requérants d'asile, notamment en raison de son origine et de son homosexualité; il avait reçu des coups au visage et s'était fait marcher sur la main droite; ses agresseurs lui avaient également enlevé sa veste; deux agents de sécurité les avaient ensuite mis tous les trois dans un container, où les deux autres requérants avaient continué à le frapper sans aucune intervention des agents; après quelque temps, ces derniers avaient sorti les deux agresseurs du container où l'intéressé était resté environ 3 heures dans le froid et sans couvertures; il avait enlevé son pull pour s'étendre dessus; il avait ensuite convulsé une fois, puis une deuxième fois 20-30 minutes plus tard, à la suite de quoi l'ambulance avait été appelée; 
- A.________ a été reconduit au CFA par la police le 14 février 2021 vers 3 heures du matin; 
- le même jour, à 12h15, le prénommé a été entendu par la police, en qualité de personne appelée à donner des renseignements, et en présence d'un interprète. A cette occasion, il a renoncé à être assisté par un conseil juridique. Il a déclaré, en bref, que lors de son arrivée dans le premier container, il avait été agressé par les deux autres occupants, avait perdu connaissance à cause du froid et s'était fait voler son argent par les deux personnes en question. Quand la police lui a demandé certaines précisions à l'encontre des agents de sécurité qui l'avaient mis dans le container, il a dit qu'il était fatigué car il avait dormi à peu près une heure. La police lui a notamment demandé s'il avait quelque chose à reprocher aux agents de sécurité, ce à quoi il a répondu: " Ils m'ont traité comme un animal. Pour vous répondre, je ne souhaite pas déposer plainte contre les deux agents ". S'agissant des deux autres occupants du premier container, il a déclaré: " J'ai peur des deux autres personnes lorsqu'elles vont apprendre que j'ai déposé une plainte pénale. Je ne sais pas si je vais à nouveau rencontrer ces deux personnes. Je ne veux pas déposer plainte pour le vol. Je vous laisser (sic) faire votre enquête. Encore une fois, je ne veux pas déposer plainte. Peut-être que vous verrez sur les caméras ce qui m'est arrivé dans le container ". A l'issue de son audition, A.________ a signé un formulaire de police comportant la rubrique: " Renonciation de porter plainte (art. 30 al. 5 CP) " et indiquant: " Je renonce expressément à porter plainte contre: Inconnu, Concernant: Vol, menaces. Je prends note que la renonciation est définitive et que je ne peux porter plainte à nouveau ". 
 
B.  
Le 30 mars 2021, A.________, agissant par sa mandataire d'alors, a déposé plainte et dénonciation pénales contre inconnus auprès du Ministère public pour les " traitements illicites " à son encontre survenus, en particulier, le 13 février 2021 au CFA à Boudry. Il a en outre déclaré vouloir participer à la procédure comme partie plaignante au pénal et au civil. 
Par courrier du 6 avril 2021, le Ministère public a notamment remis à l'intéressé une copie du procès-verbal de son audition du 14 février 2021 ainsi que de la décision d'ouverture d'instruction rendue le 15 février 2021. Pour le surplus, il a constaté que l'intéressé avait renoncé, lors de son audition du 14 février 2021, à déposer plainte pour les faits du 13 février 2021 et qu'il ne pouvait pas revenir sur cette renonciation. 
Par arrêt du 18 mai 2021, l'Autorité de recours en matière pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: la cour cantonale) a rejeté le recours formé par A.________ contre ce courrier. Elle a considéré en substance que ce dernier avait clairement exprimé sa volonté de ne pas déposer plainte pénale contre les deux agents de sécurité qui l'avaient placé dans le container. Elle a aussi rejeté la demande d'assistance judiciaire pour la procédure de recours. 
 
C.  
Par acte du 21 juin 2021, A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant, principalement, à l'admission de son recours et à la constatation qu'il s'était valablement constitué partie plaignante au pénal et au civil dans la cause MP.2021.852. A titre subsidiaire, le recourant conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite en outre l'octroi de l'assistance judiciaire pour les procédures cantonale et fédérale. 
L'autorité précédente a renoncé à se déterminer. Quant au Ministère public, il n'a pas déposé d'observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La décision attaquée a été rendue dans le cadre d'une procédure pénale par une juridiction statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF. Le recourant se voit dénier la qualité de partie plaignante et se trouve dès lors définitivement écarté de la procédure pénale. Le prononcé entrepris revêt donc à son encontre les traits d'une décision finale au sens de l'art. 90 LTF (ATF 139 IV 310 consid. 1). Eu égard au statut de partie plaignante qui lui est refusé, le recourant peut se plaindre d'une violation de ses droits de partie et dispose ainsi de la qualité pour recourir au Tribunal fédéral, indépendamment des éventuelles conclusions civiles qu'il pourrait faire valoir (art. 81 LTF; ATF 141 IV 1 consid. 1.1 et 1.2; arrêts 1B_537/2021 du 13 janvier 2022 consid. 1; 1B_43/2021 du 28 juillet 2021 consid. 1). Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et les conclusions qui y sont prises sont recevables (art. 107 al. 2 LTF). 
Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
En premier lieu, le recourant fait valoir une violation de l'art. 305 CPP, à savoir du devoir d'information qui incombait à la police à son égard - vu son statut de victime - lors de l'audition du 14 février 2021. 
 
2.1. Au sens de l'art. 118 CPP, on entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil (al. 1). Une plainte pénale équivaut à une telle déclaration (al. 2). La déclaration doit être faite devant une autorité de poursuite pénale avant la clôture de la procédure préliminaire (al. 3). Le lésé peut faire une déclaration écrite ou orale, les déclarations orales étant consignées au procès-verbal (art. 119 al. 1 CPP). Dans la déclaration, le lésé peut, (cumulativement ou alternativement), demander la poursuite et la condamnation de la personne pénalement responsable de l'infraction (plainte pénale; art. 119 al. 2 let. a CPP) et/ou faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction (action civile; art. 119 al. 2 let. b CPP) par adhésion à la procédure pénale.  
 
2.2. Selon l'art. 305 CPP, lors de la première audition, la police ou le ministère public informent de manière détaillée la victime sur ses droits et devoirs dans le cadre de la procédure pénale (al. 1). La police ou le ministère public fournissent par la même occasion à la victime des informations notamment sur les adresses et les tâches des centres de consultation (al. 2 let. a) et la possibilité de solliciter diverses prestations relevant de l'aide aux victimes (al. 2 let. b). L'observation du présent article doit être consignée au procès-verbal (al. 5).  
La victime doit en particulier être informée de son droit à s'adresser aux centres de consultation de son choix (art. 15 al. 5 de la loi du 23 mars 2007 sur l'aide aux victimes d'infractions [LAVI]; RS 312.5); elle doit également être informée de la gratuité des prestations qui y sont fournies (notamment l'assistance juridique appropriée dont la victime à besoin, les conseils et l'aide à faire valoir ses droits) et du fait qu'elle n'est pas tenue de rembourser les frais de l'assistance gratuite d'un défenseur (art. 5, 12 al. 1, 13 al. 1 et 30 LAVI; RIEDO/BONER, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2014 [ci-après: BSK StPO], n° 28 ad art. 305 CPP). Lors de la première audition, il peut être difficile d'évaluer si la personne entendue peut ou non être qualifiée de victime. A ce stade, il faut se fonder sur les allégués du lésé et sur la vraisemblance des actes et de l'atteinte pour déterminer si la personne concernée revêt la qualité de victime (cf. ATF 129 IV 216 consid. 1.2.1). En ce sens, la doctrine retient qu'il faut considérer de manière large le statut de victime (DEVAUD/ BERSET HEMMER, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019 [ci-après: CR CPP], n° 5a ad art. 305 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Petit commentaire CPP, 2e éd. 2016, n° 3 ad art. 305 CPP). La police et le ministère public doivent informer la victime sur l'ensemble des droits spécifiques et protecteurs qui lui appartiennent durant la procédure pénale, dans la mesure où ces droits sont pertinents dans la situation concrète (DEVAUD/ BERSET HEMMER, op.cit., n° 6 ad art. 305 CPP). La victime doit être également informée de la possibilité d'acquérir un statut supplémentaire, à savoir celui de partie plaignante, en déclarant expressément vouloir participer à la procédure pénale (DEVAUD/ BERSET HEMMER, op.cit., n° 7 ad art. 305 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, op. cit., n° 6 ad art. 305 CPP). 
 
2.3. L'autorité précédente a retenu que, même s'il était vrai que le recourant ne semblait pas avoir été avisé de ses droits selon la LAVI, il lui avait été demandé s'il souhaitait être assisté par un avocat, ce qu'il avait décliné; elle ne voyait par ailleurs pas ce que l'information du droit de faire appel au centres LAVI aurait pu changer à la position du recourant.  
 
2.4. En l'occurrence, le recourant a notamment déclaré, lors de son audition du 14 février 2021 devant la police, avoir été agressé par les autres occupants du container et avoir été " traité comme un animal " par les agents de sécurité du CFA; il ressort aussi de son procès-verbal d'audition que la police savait que l'intéressé avait été amené à l'hôpital en ambulance la veille de l'audition; ce dernier avait par ailleurs déjà informé de ces faits la patrouille de gendarmerie qui s'était rendue à l'hôpital pour recueillir ses premières déclarations. Dans ces conditions particulières, la police ne pouvait pas ignorer que le recourant présentait assez d'éléments pour être qualifié de victime au sens de la LAVI et elle aurait dû l'informer sur ses droits conformément à l'art. 305 CPP.  
Or, comme admis par l'autorité inférieure, le recourant ne semble pas avoir été informé de ses droits au sens de la LAVI; il ne ressort en effet pas du procès-verbal d'audition que l'intéressé a reçu des informations détaillées, notamment sur la possibilité de s'adresser aux centres de consultation LAVI et d'y recevoir gratuitement plusieurs prestations comme l'assistance juridique, l'aide à faire valoir ses droits, ainsi que la prise en charge d'un défenseur au sens des art. 5, 12 et 30 al. 3 LAVI. Ainsi, le recourant s'est vu privé de la possibilité de recevoir gratuitement des conseils juridiques adéquats à sa situation concrète. La cour cantonale a aussi omis de prendre en compte que, n'ayant pas été avisé de ses droits de victime, le recourant ne pouvait pas savoir qu'il disposait de la possibilité d'acquérir le statut de partie plaignante, en déclarant expressément vouloir participer à la procédure pénale. 
Ainsi, le raisonnement de l'autorité précédente ne peut pas être suivi. Certes, le recourant a renoncé à être assisté par un avocat; cependant, il ressort du procès-verbal d'audition du 14 février 2021 que la police lui a donné une information inexacte, en indiquant qu'il pouvait faire appel à un défenseur de son choix à ses frais (et non gratuitement comme prévu par la LAVI). 
Partant, l'autorité précédente a violé l'art. 305 CPP et ce grief doit être admis. Cette violation du droit fédéral est de nature à influencer la suite du raisonnement. 
 
3.  
Le recourant reproche en effet à l'autorité précédente une violation des art. 120 et 386 al. 3 CPP, ainsi que d'avoir constaté arbitrairement les faits (art. 97 LTF) en retenant qu'il avait renoncé, de façon éclairée et consciente, à poursuivre les agents de sécurité lors de son audition du 14 février 2021; sa renonciation ne pouvait pas être considérée comme définitive. Ces griefs se confondent et seront examinés ensemble. 
 
3.1. D'après l'art. 120 CPP, le lésé peut en tout temps déclarer par écrit ou par oral qu'il renonce à user des droits qui sont les siens; la déclaration orale est consignée au procès-verbal. La renonciation est définitive (al. 1). Si la renonciation n'a pas été expressément restreinte à l'aspect pénal ou à l'aspect civil, elle vaut tant pour la plainte pénale que pour l'action civile (al. 2).  
La renonciation de la partie plaignante à ses droits procéduraux doit être exprimée de façon claire et sans équivoque (arrêt 1B_446/2018 du 14 novembre 2018 consid. 4.4; CAMILLE PERRIER DEPEURSINGE, CPP annoté, 2e ed. 2020, p. 193 ad art. 120 CPP; MAZZUCCHELLI/POSTIZZI, in BSK StPO, n° 7 ad art. 120 CPP). D'une manière générale, l'autorité devra donc s'assurer que la partie plaignante entend bel et bien renoncer à ses droits, quitte à utiliser des formulaires préimprimés donnant toutes explications utiles sur les modalités et les conséquences de la renonciation (JEANDIN/FONTANET, in CR CPP, n° 6a ad art. 120 CPP). Le formulaire doit refléter correctement la situation juridique, être suffisamment compréhensible pour pouvoir être rempli par un non-juriste et sans l'aide d'un employé d'une autorité pénale, ainsi que permettre de tirer des conclusions claires sur la volonté de l'intéressé ( arrêts 1B_446/2018 du 14 novembre 2018 consid. 4.4; 1B_74/2016 du 23 septembre 2016 consid. 3.3; 1B_188/2015 du 9 février 2016 consid. 4.3; 6B_978/2013 du 19 mai 2014 consid. 2.4). 
A teneur de l'art. 304 al. 2 CPP, le fait de renoncer à porter plainte ou le retrait de la plainte pénale sont soumis aux mêmes exigences de forme que le dépôt de la plainte elle-même. Une renonciation à porter plainte pénale doit donc intervenir soit par écrit, soit oralement; dans ce dernier cas, elle est consignée au procès-verbal (art. 304 al. 1 CPP). 
Aux termes de l'art. 30 al. 5 CP (auquel on peut se référer, mais qui n'a plus de portée propre après l'entrée en vigueur de l'art. 304 al. 2 CPP; LANDSHUT/BOSSHARD, in DONATSCH/LIEBER/SUMMERS/WOHLERS [édit.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 3e éd. 2020, vol. II, n° 7 ad art. 304 CPP; CHRISTOF RIEDO, in Basler Kommentar, Strafrecht I, Art. 1-136 StGB, 4e éd. 2019 [ci-après: BSK StGB], nos 121 s. ad art. 30 CP), si l'ayant droit a expressément renoncé à porter plainte, sa renonciation est définitive. Selon la doctrine relative à cette disposition, la renonciation au dépôt de plainte est une déclaration de volonté de l'ayant droit par laquelle il entend ne pas provoquer de poursuite pénale. Cette déclaration doit être expresse, à savoir claire et sans réserve (DANIEL STOLL, in Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2e éd. 2021 [ci-après : CR CP], n° 47 ad art. 30 CP; DUPUIS ET AL., Petit commentaire, Code pénal, 2e éd. 2017, n° 22 ad art. 30 CP; CHRISTOF RIEDO, in BSK StGB, n° 119 ad art. 30 CP; cf. aussi RIEDO/BONER, in BSK StPO, nos 32-34 ad art. 304 CPP; ATF 90 IV 168 consid. 1; arrêt 6B_220/2019 du 12 avril 2019 consid. 1.1 et les arrêts cités). Une renonciation ne peut pas être déduite de circonstances, d'un comportement, d'actes concluants ou d'une absence de réaction. Cependant, une renonciation valable peut résulter d'un comportement concluant si l'ayant droit a été informé en conséquence (DUPUIS ET AL., op. cit., n° 22 ad art. 30 CP; cf. aussi ATF 115 IV 1 consid. 2b). 
En ce qui concerne les voies de recours, la renonciation et le retrait sont définitifs, sauf si la partie a été induite à faire sa déclaration par une tromperie, une infraction ou une information inexacte des autorités (art. 386 al. 3 CPP). Cette disposition s'applique par analogie à la renonciation par la partie plaignante à ses droits procéduraux au sens de l'art. 120 CPP (arrêts 6B_173/2021 du 14 juillet 2021 consid. 3.3; 1B_323/2019 du 24 octobre 2019 consid. 2.1 e 2.3; 1B_74/2016 du 23 septembre 2016 consid. 3.2; JEANDIN/FONTANET, in CR CPP, n° 11 ad art. 120 CPP; MAZZUCCHELLI/POSTIZZI, in BSK StPO, n° 7 ad art. 120 CPP; VIKTOR LIEBER, in DONATSCH/LIEBER/SUMMERS/WOHLERS [édit.], Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 3e éd. 2020, vol. I, n° 3 ad art. 120 CPP; SCHMID/JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, 3e éd. 2018, n° 3 ad art. 120 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2e éd. 2016, n° 6 ad art. 120 CPP). 
 
3.2. Déterminer ce qu'une personne a su, voulu, envisagé ou accepté relève du contenu de la pensée, à savoir de faits "internes", qui en tant que tels, lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'ils n'aient été retenus de manière arbitraire (ATF 141 IV 369 consid. 6.3; arrêts 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 6.4.2 non publié in ATF 145 IV 470; 6B_515/2019 du 11 juin 2019 consid. 1.1.3; en matière de renonciation à déposer plainte pénale, voir 6B_220/2019 du 12 avril 2019 consid. 1.2 et 1.3). Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1).  
 
3.3. En l'espèce, l'autorité cantonale a considéré en substance que le recourant avait exprimé clairement sa volonté de ne pas déposer plainte pénale contre les agents de sécurité et de ne pas poursuivre ces derniers; même s'il semblait ne pas avoir été avisé de ses droits selon la LAVI, l'on ne pouvait pas considérer que sa renonciation à déposer plainte n'était pas éclairée; il avait en effet renoncé à être assisté par un avocat et la loi n'exigeait de surcroît pas, pour qu'une renonciation soit valable, que la personne soit avisée des conséquences de cette renonciation; l'absence d'information ne pouvait par ailleurs pas être considérée comme une information inexacte au sens de l'art. 386 al. 3 CPP.  
La cour cantonale a ensuite écarté l'argument du recourant selon lequel il était confronté à des autorités de poursuite pénales qu'il ne pouvait pas clairement identifier, dans son système de connaissance socio-culturel, comme étant différentes de celles qui avaient causé son hospitalisation. Elle a relevé que l'intéressé avait été entendu dans les locaux de la police neuchâteloise par deux inspecteurs - dont on devait présumer qu'ils s'étaient présentés - et il devait ainsi savoir qu'il ne s'agissait pas d'agents de sécurité au service d'une société privée. 
 
3.4. Il n'est pas contesté que le recourant a indiqué, lors de son audition du 14 février 2021, qu'il ne souhaitait pas déposer plainte contre les deux agents; or, dans le contexte particulier du cas d'espèce, se pose la question de savoir si, par cette déclaration, l'intéressé a clairement manifesté sa volonté de ne pas déposer plainte pénale et de ne pas poursuivre les agents.  
D'abord, le recourant n'a pas déclaré, de manière affirmative, vouloir renoncer à poursuivre les agents, se contentant d'indiquer ne pas souhaiter déposer plainte; il ne faut pas non plus perdre de vue que l'intéressé n'est pas francophone et que la traduction de ses propos a été assurée par un interprète (et non par un juriste).  
Ensuite, la police ne s'est pas assurée - en lui donnant notamment toutes les explications utiles sur les modalités et les conséquences d'une renonciation - que le recourant entendait, par ses propos, bel et bien renoncer, de façon claire et sans équivoque, à ses droits; en particulier, la police n'a pas fait signer au recourant la formule de renonciation à porter plainte pour les faits reprochés aux agents - laquelle aurait pu permettre de tirer des conclusions claires sur la volonté de l'intéressé -, alors qu'elle lui a fait signer ce formulaire en lien avec les faits relatifs aux deux autres personnes présentes avec lui dans le premier container (se référant à des infractions de vol et menaces). 
De plus, il faut prendre en compte le contexte particulier dans lequel s'est déroulée cette audition. D'abord, le recourant a été entendu moins de 12h après la fin des événements et a indiqué être fatigué ainsi que n'avoir dormi qu'une heure; ensuite, contrairement à ce qu'a retenu l'autorité cantonale, il est probable qu'un requérant d'asile marocain, arrivé en Suisse depuis seulement quelques mois, ne puisse pas faire la différence entre les autorités de poursuite pénales et les agents de sécurité privée à l'origine de son hospitalisation; dans de telles circonstances, il n'est pas exclu qu'il ait pu craindre des représailles de ces derniers. 
Au demeurant, on ne peut pas exclure que lorsque le recourant a déclaré, lors de son audition, " je vous laisse faire votre enquête ", il pouvait aussi se référer au contexte de faits en relation avec les agents de sécurité, contrairement à ce qu'a considéré l'autorité précédente. 
Enfin et surtout, comme on l'a déjà vu, le recourant n'as pas été informé de ses droits de victime et a été induit à faire sa déclaration par une information inexacte de la police, à savoir la possibilité de faire appel à un défenseur à ses frais (cf. consid. 2); il ne peut ainsi pas être considéré, en application de l'art. 386 al 3 CPP, que l'intéressé a renoncé de manière définitive à ses droits procéduraux. 
Il s'ensuit que l'autorité cantonale a constaté de manière arbitraire les faits et violé l'art. 386 al. 3 CPP en considérant que le recourant avait, lors de son audition du 14 février 2021, renoncé à ses droits procéduraux de partie plaignante au sens de l'art. 120 CPP
 
4.  
Le recours doit dès lors être admis, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs. L'arrêt attaqué est annulé. La cause est renvoyée au Ministère public pour qu'il prenne en considération la plainte pénale déposée le 30 mars 2021 par le recourant ainsi que sa demande de constitution de partie plaignante au pénal et au civil dans la cause MP.2021.852. Elle est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale de recours. 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure fédérale (art. 66 al. 4 LTF). Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat, a droit à des dépens pour la procédure fédérale à la charge de la République et canton de Neuchâtel (art. 68 al. 1 LTF). Une indemnité de dépens sera par conséquent allouée à l'ancienne mandataire du recourant, Me C.________, pour le travail effectué. La requête d'assistance judiciaire du recourant est ainsi sans objet. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. 
 
2.  
L'arrêt attaqué est annulé. La cause est renvoyée au Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
3.  
La requête d'assistance judiciaire est sans objet. 
 
4.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
5.  
Une indemnité de dépens, fixée à 2'000 fr., est allouée à l'ancienne mandataire du recourant, Me C.________, à la charge de la République et canton de Neuchâtel. 
 
6.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, à l'Autorité de recours en matière pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel ainsi que, pour information, à l'ancienne mandataire du recourant. 
 
 
Lausanne, le 8 août 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Jametti 
 
La Greffière : Corti