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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1360/2021  
 
 
Arrêt du 7 avril 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys, Muschietti, 
van de Graaf et Koch. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
Ministère public de la République 
et canton de Neuchâtel, 
passage de la Bonne-Fontaine 41, 
2300 La Chaux-de-Fonds, 
recourant, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par Me Jean-Luc Addor, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Discrimination raciale (art. 261bis CP), 
 
recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel 
du 7 septembre 2021 (CPEN.2021.9). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 15 juillet 2020, le Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers a libéré A.________ du chef d'infraction de discrimination raciale (art. 261bis CP) et statué sur les frais et dépens. 
 
B.  
Par jugement du 7 septembre 2021, la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel a partiellement admis l'appel formé par le Ministère public neuchâtelois à l'encontre de la décision de première instance en ce sens que le montant de l'indemnité selon l'art. 429 CPP allouée à A.________ a été réduit. Pour le surplus, elle a confirmé la décision attaquée, en particulier l'acquittement de A.________. Ce jugement se fonde en substance sur les faits suivants. 
 
B.a. A.________ a exercé des activités politiques qui l'ont amené, en 2001, à participer à la fondation du parti B.________. En 2003, il a été élu au Conseil national. En 2013, il a été porté au Conseil d'État neuchâtelois. En raison d'ennuis de santé, il a démissionné de cette charge en 2014. Actuellement, A.________ exerce une fonction de conseiller politique. Depuis le 1er juin 2021, il travaille pour le parti B.________ du canton de Genève en qualité de secrétaire général.  
 
B.b. Le 18 avril 2019, l'association " C.________ " a dénoncé auprès du ministère public du Valais des commentaires publiés sur le compte Facebook de A.________, incitant, selon la dénonciatrice, à la haine envers les citoyens musulmans. A la dénonciation étaient jointes des captures d'écran de publications effectuées entre le 4 et le 9 avril 2019. En particulier, le 6 avril 2019, A.________ avait partagé sur sa page Facebook un article du journal " D.________ " intitulé " Près de Lyon, une inquiétante école musulmane sous contrat et...sous influence ", illustré d'une photo montrant, de dos, deux femmes voilées et deux jeunes filles, dont l'une est voilée, se dirigeant vers l'entrée d'un bâtiment. A.________ avait commenté sa propre publication en ces termes: " l'infection s'étend ".  
En réaction à cette publication, on pouvait notamment lire les commentaires suivants, émanant de diverses personnes: 
 
- Une image représentant une bouteille incendiaire avec le texte " En bon voisin offre de la chaleur à la mosquée du coin "; 
- " Bravo A.________. Tout ce monde retour dans leur pays et on détruit les mosquées et tout ce qui va avec "; 
- Une image représentait un soldat utilisant un lance-flamme avec le texte " Nettoyez-moi toute cette merde " ainsi que le commentaire " Fusillez moi tout ça "; 
- " Je veux bien les aider à devenir martyre...tout seuls " et " on va devoir se mettre en mode antibiotique "; 
- " Ce serait le moment de se poser des questions quand à ce musée ou à chaque fois que je passais devant j'avais de lancer une grenade... " [sic]; 
- " L'islam c'est comme le cancer, il progresse en silence! Quand tu n'en entends pas parler, tu crois le danger écarté et c'est là qu'il avance...!!! Et ces connards de Bruxelles voudraient nous enlever nos flingues.!!!!! Et pourquoi pas nous apprendre à nous mettre à 4 pattes pour la prière ! !!!!! "; 
- Une image d'une guillotine; 
- " a faire sauter ", en commentaire à l'image du Musée E.________ de U.________ diffusée par l'auteur de cette publication; 
- " Oui, c'est vrai à faire sauter avec tous ceux [...] qui sont dedans ". 
 
B.c. Le partage par A.________ de l'article du journal " D.________ " du 6 avril 2019 sur son compte Facebook faisait suite à trois publications précédentes du prénommé, postées les 4 et 5 avril 2019, la première se référant à un article du journal F.________ concernant, selon A.________, le " financement de l'islam tendance Frères musulmans en Suisse en général et à U.________ en particulier " ainsi que " des versements non négligeables provenant de la Qatar Fondation, oeuvre de bienfaisance proche des Frères musulmans. Ce club réservé aux prosélytes d'un islam pur, genre Brunei, a pour leader incontesté un bon type interdit d'entr... "[sic], et la seconde consistant en une photo montrant des gens barbus et armés, se référant à un article du journal G.________ intitulé " Salafisme et complotisme, le double moteur du djihad en Suisse. Un ancien agent secret et un journaliste retracent l'histoire des djihadistes... " avec le commentaire de A.________: " La religion d'amour et de paix, suite et pas... fin. Vivement la sortie du livre ! ". Venait enfin une photo d'un grand bâtiment avec la référence à un article de H.________ dont le titre était le suivant: " U.________: le musée sur l'islam inquiète des députés neuchâtelois ", assortie du commentaire de A.________: " Les craintes exprimées par le parti B.________ à l'époque et moquées par beaucoup ne semblent plus si farfelues à la lumière des éléments mis en évidence dans l'ouvrage Qatar Papers. On se réjouit de savoir ce qu'en pensent les autorités locales et cantonales aujourd'hui ".  
 
B.d. La police a identifié six auteurs des commentaires litigieux publiés sur le compte Facebook de A.________. Tous se sont vus condamnés par ordonnances pénales rendues le 13 février 2020 par le ministère public pour discrimination raciale au sens de l'art. 261bis CP.  
 
C.  
Le Ministère public neuchâtelois forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut principalement, avec suite de frais, à la réforme du jugement du 7 septembre 2021 en ce sens que A.________ est condamné, pour violation de l'art. 261bis CP, à une peine de 60 jours-amende avec sursis pendant deux ans, subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal cantonal neuchâtelois pour nouvelle décision. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. La cour cantonale a confirmé l'acquittement de l'intimé du chef d'infraction de l'art. 261bis CP pour la publication et le commentaire du 6 avril 2019 dont il était l'auteur. Elle a fait sienne l'appréciation du tribunal de première instance selon laquelle le titre de l'article insistait sur le caractère inquiétant de l'école, résultant du contrat et de l'influence dont elle serait l'objet, ce qui se vérifiait à la lecture de l'article qui évoquait des liens entre cette école et des organisations islamiques décrites comme radicales et terroristes, révélées notamment par l'ouvrage " Qatar papers: comment l'émirat finance l'islam de France et d'Europe " de Christian Chesnot et de Georges Malbrunot. Le commentaire de l'intimé (" l'infection s'étend ") se comprenait en lien avec les précédents commentaires de sa part, publiés sur Facebook les 4 et 5 avril 2019, dans lesquels il évoquait les liens entre le financement de l'islam en Suisse et à U.________ en particulier, par des mouvements qui seraient liés à des mouvances radicales (étant rappelé que l'intimé n'a pas été poursuivi pour ces publications-là). Ainsi, de l'avis de la cour cantonale, tant l'interprétation littérale du commentaire litigieux de l'intimé que le contexte dans lequel il avait été formulé ne pouvaient raisonnablement conduire un lecteur moyen non averti à le comprendre comme étant haineux, rabaissant ou discriminant à l'égard des musulmans en général.  
La cour cantonale a également confirmé l'acquittement de A.________ à raison des commentaires publiés par des tiers sur sa page Facebook. 
 
1.2. Le recourant ne remet pas en cause l'acquittement de l'intimé à raison de la publication dont il est l'auteur. En revanche, il estime que celui-ci endosse une responsabilité pénale pour les commentaires, constitutifs de discrimination raciale, publiés par des tiers sur son compte Facebook.  
 
1.3. Aux termes de l'art. 261bis CP, se rend coupable de discrimination raciale celui qui, publiquement, aura incité à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse (al. 1); celui qui, publiquement, aura propagé une idéologie visant à rabaisser ou à dénigrer de façon systématique les membres d'une race, d'une ethnie ou d'une religion (al. 2) ou encore celui qui aura publiquement, par la parole, l'écriture, l'image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaissé ou discriminé d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur race, de leur appartenance ethnique ou de leur religion ou qui, pour la même raison, niera, minimisera grossièrement ou cherchera à justifier un génocide ou d'autres crimes contre l'humanité (al. 4).  
L'art. 261bis CP vise notamment à protéger la dignité que tout homme acquiert dès la naissance et l'égalité entre les êtres humains. En protégeant l'individu du fait de son appartenance à un groupe ethnique ou religieux, la paix publique est indirectement protégée (ATF 140 IV 67 consid. 2.1.1 p. 69; 133 IV 308 consid. 8.2 et les références citées). La norme concrétise les engagements internationaux de la Suisse dans le cadre de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale conclue à New York le 21 décembre 1965 (RS 0.104), entrée en vigueur pour la Suisse le 29 décembre 1994 (ATF 140 IV 67 consid. 2.1.1 p. 69; 133 IV 308 consid. 8.2 et les références citées; arrêt 6B_644/2020 du 14 octobre 2020 consid. 1.2). 
 
2.  
Le recourant soutient tout d'abord qu'en offrant la tribune d'une personnalité publique aux internautes, leur permettant ainsi d'y publier des propos illicites, l'intimé avait propagé une " idéologie visant à rabaisser ou à dénigrer de façon systématique [...] ce groupe de personnes [soit la communauté musulmane] ", selon la définition de l'art. 261bis al. 2 CP
La cour cantonale a constaté que l'acte d'accusation ne décrivait pas le processus visé par l'art. 261bis al. 2 CP, qui suppose que des propos déjà exprimés par autrui soient communiqués à des tiers dans l'intention de les convaincre et de les renforcer dans leurs idées (cf. ATF 146 IV 23 consid. 2.2.3 et 2.2.4 à propos de l'art. 173 ch. 1 al. 2 CP: voir aussi: ATF 140 IV 102 consid. 2.2.2 p. 104 s.). Par conséquent, cette prévention ne pouvait être retenue. 
Le recourant ne discute nullement les considérations cantonales. Dénué de motivation suffisante, son grief est par conséquent irrecevable (cf. art. 42 al. 2 LTF). 
 
3.  
Le recourant expose que l'intimé doit répondre pénalement, sous l'angle de l'art. 261bis CP, de son comportement consistant à ne pas avoireffacé de son " mur " virtuel les commentaires de tiers appelant à la haine et à des actes de violence contre un groupe de personnes en raison de leur appartenance religieuse. Selon lui, un tel manquement menace la paix publique, bien davantage, d'ailleurs, que les agissements des auteurs des commentaires énumérés ci-dessus. 
 
3.1. La cour cantonale a retenu qu'ainsi formulé, le reproche du recourant pouvait tomber sous le coup des al. 1 et 4 de l'art. 261bis CP et ressortait donc bien de l'acte d'accusation. Elle a constaté que l'intimé, qui était une personnalité publique engagée politiquement, était titulaire d'un compte Facebook ouvert à tous qu'il alimentait presque tous les jours et qui suscitait des commentaires. Les thèmes discutés étaient ceux qui sont " chers au parti B.________ ". L'intimé avait déclaré qu'en abordant un sujet comme le financement d'une tendance de l'islam radical par les Frères musulmans ou par le biais du Qatar, il savait que ses publications avaient un caractère politique et suscitaient la polémique. S'il avait précisé qu'il ne se sentait pas responsable des commentaires faits par les personnes qui consultaient son compte Facebook, il avait ajouté qu'il avait supprimé certains commentaires lorsqu'il avait eu l'occasion de le faire - il se livrait régulièrement à cet exercice qui devenait de plus en plus compliqué avec l'écoulement du temps - et qu'il avait bloqué deux cents personnes, voire quatre cents à ce jour.  
L'autorité précédente a considéré qu'en application des principes développés par le Tribunal fédéral (en particulier l'arrêt 6B_645/2007 du 2 mai 2008), il n'était pas question, de manière générale, d'exiger du titulaire d'un compte Facebook de surveiller en permanence les réactions publiées par des tiers à ses propres publications, ni de le rendre systématiquement et pénalement responsable des commentaires postés par des tiers. En revanche, on aurait pu attendre de l'intimé, lorsque les commentaires visés par l'acte d'accusation lui avaient été effectivement signalés, qu'il prenne les mesures nécessaires pour les éliminer de son compte. Lors des débats d'appel, l'intimé avait expliqué que tout son compte était resté " en l'état " depuis le moment où il avait été averti de la dénonciation, de manière à figer les choses pour la police. La cour cantonale a retenu cette explication au bénéfice du doute, considérant qu'il n'était en effet nullement improbable que le prénommé ait pensé qu'il ne lui appartenait pas de modifier l'état de fait pertinent dès lors que la justice avait été saisie et que des actes d'instruction devaient être en cours. Au reste, les faits décrits dans la décision d'ouverture de la procédure et qui lui ont été signifiés le 7 juin 2019, repris dans l'acte d'accusation, visaient la période entre le 4 et le 6 avril 2019, de sorte qu'il était douteux qu'on puisse le condamner pour des agissements ou des omissions après le 6 avril 2019. 
 
3.2. Le recourant ne discute pas les considérations cantonales excluant la responsabilité pénale de l'intimé pour le comportement adopté après avoir été averti de l'ouverture d'une procédure pénale et, a fortiori, de l'existence de contenus illicites sur son " mur " Facebook. Il concentre son reproche sur le fait d'avoir omis de surveiller les réactions postées sur son compte à la suite de sa propre publication et de les supprimer lorsqu'elles étaient problématiques. Le recourant soutient, en particulier, que l'intimé savait qu'il comptait parmi ceux qui le suivaient sur Facebook des personnes susceptibles de se livrer à des commentaires excessifs, spécialement lorsqu'il ouvrait un débat sur un sujet aussi sensible que celui de la crainte qu'une certaine forme de l'Islam provoque dans les pays occidentaux, avec tous les risques d'amalgame que cela impliquait. L'autorité précédente aurait également dû prendre en considération le fait que le nombre de ces publications était relativement peu important (189 commentaires) et que, parmi celles-ci, la majorité démontrait que le risque d'amalgame était loin d'être théorique. Du reste, ces commentaires étaient, pour certains d'entre eux, accompagnés d'images frappantes (une bouteille incendiaire, un lance-flamme, une guillotine). Selon le recourant, on pouvait donc affirmer qu'une lecture rapide de la totalité de ces commentaires ne devait pas prendre plus d'une vingtaine de minutes ce qui, sur cinq jours, représentait une moyenne de quatre minutes par jour. L'intimé avait donc l'obligation de prendre connaissance de ces commentaires compte tenu du risque accru, qu'il ne pouvait ignorer, d'héberger, sur sa page Facebook, visible par des milliers de personnes, des propos excessifs. Faute d'avoir pris les mesures nécessaires pour éviter les conséquences résultant du danger qu'il avait créé, il devait être condamné sous l'angle de l'art. 261bis CP.  
 
3.3.  
 
3.3.1. La CourEDH a récemment été saisie de la question de savoir si la condamnation pénale du titulaire d'un compte Facebook à raison du contenu de messages écrits par des tiers sur son " mur " était conforme au principe de liberté d'expression prévu à l'art. 10 CEDH (arrêt de la CourEDH Sanchez c. France [requête n° 45581/15] du 2 septembre 2021). Dans cette affaire, l'intéressé, alors candidat aux élections législatives municipales, avait posté sur la page de son compte Facebook, dont l'accès était ouvert à ses nombreux " amis " (soit 1'829 personnes) un billet visant son adversaire de l'époque. Deux internautes avaient réagi à cette publication en postant à leur tour des messages jugés constitutifs de haine raciale vis-à-vis de la communauté musulmane. Le titulaire du compte Facebook avait été reconnu coupable par les juridictions internes de provocation à la haine ou à la violence à l'égard d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou non-appartenance à une ethnie, nation, race ou religion déterminée. Il lui avait été concrètement reproché de ne pas avoir retiré assez promptement les commentaires publiés par des tiers sur son " mur " Facebook. La CourEDH a constaté que la condamnation, constitutive d'une atteinte à la liberté d'expression, reposait sur une base légale suffisante (soit l'art. 93-3 de la loi française no 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle qui prévoit la punissabilité, comme auteur principal, du " directeur " ou " codirecteur de la publication " - avec la précision que " [l]orsque l'infraction résulte du contenu d'un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel, le directeur ou le codirecteur de publication ne peut pas voir sa responsabilité pénale engagée comme auteur principal s'il est établi qu'il n'avait pas effectivement connaissance du message avant sa mise en ligne ou si, dès le moment où il en a eu connaissance, il a agi promptement pour retirer ce message " -) et visait un but légitime.  
La CourEDH a ensuite examiné si la décision prise par les autorités reposait sur des motifs pertinents et suffisants dans les circonstances de la cause. Elle a attaché une importance particulière au support utilisé et au contexte dans lequel les propos incriminés ont été diffusés, et par conséquent à leur impact potentiel sur l'ordre public et la cohésion du groupe social: " si la possibilité pour les individus de s'exprimer sur Internet constitue un outil sans précédent d'exercice de la liberté d'expression, les avantages de ce média s'accompagnent d'un certain nombre de risques, avec une diffusion comme jamais auparavant dans le monde de propos clairement illicites, notamment des propos diffamatoires, haineux ou appelant à la violence " (arrêt de la CourEDH Sanchez précité, § 86). La CourEDH a relevé que, bien que considéré comme " auteur " par la loi française et sanctionné pénalement à ce titre, les juridictions internes avaient caractérisé les faits établissant la responsabilité du requérant en raison d'un comportement particulier, directement lié à son statut de titulaire du " mur " de son compte Facebook. Pour la CourEDH, il était légitime qu'un tel statut emporte des obligations spécifiques, en particulier lorsque, à l'instar du requérant, le titulaire du " mur " d'un compte Facebook décidait de ne pas faire usage de la possibilité qui lui était offerte d'en limiter l'accès, choisissant au contraire de le rendre accessible à tout public. Avec les juridictions internes, la CourEDH a estimé qu'un tel constat valait particulièrement dans un contexte susceptible de voir apparaître des propos clairement illicites, comme en l'espèce (arrêt de la CourEDH Sanchez précité, § 100). En conclusion, elle a considéré qu'au vu des circonstances spécifiques de l'affaire et eu égard à la marge d'appréciation de l'État défendeur, l'ingérence litigieuse pouvait passer pour nécessaire dans une société démocratique (arrêt de la CourEDH Sanchez précité, § 104). 
On signalera encore l'opinion dissidente de la juge Mourou-Vikström, qui pose la question plus générale de la responsabilité pénale " dérivée " ou " projetée " du titulaire d'un compte Facebook pour des propos publiés par des tiers, a fortiori lorsque ce titulaire est, comme en l'espèce, un homme public ou politique ayant un nombre élevé d' " amis ". La juge a reproché à la majorité de faire peser sur le titulaire d'un compte Facebook la même responsabilité que celle incombant à un portail d'actualités invitant les lecteurs à commenter les articles publiés (hypothèse de l'arrêt Delfi AS c. Estonie [GC] [requête n° 64569/09], CEDH 2015). Par ailleurs, elle a estimé que les juridictions internes n'avaient pas suffisamment établi la connaissance effective qu'aurait eue le requérant des messages publiés. Or, la connaissance étant l'un des éléments fondamentaux permettant d'établir la responsabilité pénale du titulaire du compte, elle devait être établie dans le respect des règles du droit pénal. Pour elle, le constat d'absence de violation de l'article 10 CEDH faisait peser sur le titulaire du compte une obligation de contrôle très lourde, de nature à dissuader l'exercice de la liberté d'expression (arrêt de la CourEDH Sanchez précité; opinion dissidente de la juge Mourou-Vikström).  
Concernant la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, celle-ci a jugé, dans son arrêt Unabhängiges Landeszentrum für Datenschutz Schleswig-Holstein contre Wirtschaftsakademie Schleswig-Holstein GmbH du 5 juin 2018 (C-210/16, EU:C:2018:388), que l'administrateur d'une page fan hébergée sur Facebook devait être qualifié de responsable du traitement des données des personnes qui visitent sa page et qu'il existe dès lors une responsabilité conjointe avec l'exploitant du réseau social à ce titre, au sens de la Directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO L 281 du 23 novembre 1995, p. 31-50).  
 
3.3.2. En l'état du droit suisse, il n'existe aucune norme régissant spécifiquement la responsabilité pénale des prestataires de services internet tels que Facebook et Twitter, ni, a fortiori, des simples " fournisseurs de contenus " que sont les utilisateurs de ces réseaux. A plusieurs reprises, le Conseil fédéral a affirmé qu'il n'y avait pas lieu de légiférer sur la responsabilité pénale des fournisseurs de services, considérant notamment que l'obligation d'effacer ou de bloquer un message diffusé sur un réseau social, indépendamment de toute décision administrative ou judiciaire, posait de délicates questions de compatibilité avec les droits fondamentaux, notamment la liberté d'expression (Avis du 1er décembre 2017 en réponse à l'interpellation n° 17.3734 Discours de haine sur les réseaux sociaux. Le Laisser-faire ?).  
Ainsi, à la différence de la France par exemple, qui a défini dans une loi les conditions auxquelles " le directeur ou le codirecteur de publication " pouvait répondre comme auteur principal des messages publiés par des tiers sur son compte (cf. arrêt de la CourEDH Sanchez précité), le législateur suisse ne s'est volontairement pas emparé de cette question, ce que reconnaît d'ailleurs le recourant.  
 
3.3.3. Cela étant, le recourant estime que la responsabilité pénale de l'intimé peut se déduire des principes existants du droit pénal suisse. Il se réfère à l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_645/2007 du 2 mai 2008 (publié in SJ 2008 I 373) ainsi qu'à une opinion doctrinale commentant ledit arrêt (cf. Bianchi della Porta/Robert, Responsabilité pénale de l'éditeur de médias en ligne participatif - Comment se prémunir des contenus illicites " postés " par des tiers? in Medialex 1/09, p. 25).  
Le Tribunal fédéral a en effet été amené, dans l'arrêt précité, à examiner l'éventuelle responsabilité pénale de celui qui gère, sur un site internet, un forum de discussion, en raison de la publication de contenu illicite sur cette plateforme. Constatant, dans le cas d'espèce, que l'exploitant du forum avait omis de retirer de l'espace de discussion une vidéo de propagande djihadiste, le Tribunal fédéral a tout d'abord rappelé qu'en application du principe dit de la subsidiarité, la mise à disposition d'installations constitue une prestation positive. Dans cette perspective, l'omission reprochée à l'exploitant du forum de ne pas avoir supprimé la vidéo litigieuse devait être replacée dans le contexte plus global des activités déployées en relation avec son forum, ce qui pouvait conduire à exclure la forme subsidiaire de l'omission et à lui reprocher une action, sans qu'il soit nécessaire d'examiner s'il endossait une position de garant. Cela étant, même la qualification du comportement comme pure omission ne lui permettrait de toute façon pas d'exclure sa responsabilité pénale. Le Tribunal fédéral a considéré, en effet, que " l'exploitation d'un forum de discussion est indissociable du risque que des contenus illégaux y soient déposés et, partant, que des intérêts juridiquement protégés par une norme pénale soient lésés. Si, en lui-même, ce risque n'excède pas ce qui peut être admis en société ( Sozialadäquanz) et ne permet vraisemblablement pas de fonder une obligation de surveillance permanente, la situation est cependant différente lorsque l'exploitant du forum a effectivement connaissance de la présence de ce contenu illégal sur son site " (arrêt 6B_645/2007 précité consid. 7.3.4.4.2). Dans un tel cas, le Tribunal fédéral a considéré que le risque d'atteinte - à supposer qu'il ne soit pas encore réalisé - à des intérêts protégés par le droit pénal était tel qu'il excédait ce qui pouvait être admis. On pouvait dès lors déduire l'obligation de l'exploitant de supprimer le contenu litigieux du principe non écrit selon lequel il incombe à celui qui crée un danger de prendre les mesures nécessaires pour en éviter les conséquences. Il s'agissait donc uniquement de déterminer si le comportement de la personne en cause - indépendamment de sa qualification comme action ou comme omission -, était constitutif d'une infraction pénale et si celle-ci en répondait en qualité d'auteur, de coauteur ou de complice (arrêt 6B_645/2007 précité consid. 7.3.4.4.2 et les références citées). En l'espèce, l'exploitant, qui avait admis partager l'opinion véhiculée par la vidéo incriminée, a été condamné en tant que coauteur de l'infraction de soutien à une organisation criminelle. En effet, en exploitant le forum sur lequel se trouvait la vidéo, ce que l'intéressé savait, il avait intentionnellement collaboré à l'exécution de l'infraction. Par ailleurs, en permettant de toucher de plus nombreux internautes que les seuls sites d'une tierce partie, sa participation n'était pas secondaire, mais procédait de l'intention de diffuser plus largement ces informations (arrêt 6B_645/2007 précité consid. 7.3.4.5). Il résulte encore de cet arrêt qu'une incrimination au titre de complice peut également entrer en considération lorsque l'exploitant du forum a facilité et encouragé l'infraction par une contribution sans laquelle les événements auraient pris une tournure différente, sans toutefois que son assistance ne constitue nécessairement une condition sine qua non à la réalisation de l'infraction (cf. arrêt 6B_645/2007 précité consid. 7.3.4.4.2). Le Code pénal excluant la complicité par négligence, l'exploitant du forum doit donc avoir eu conscience et volonté de prêter assistance à l'auteur (cf. Bianchi della Porta/Robert, op. cit., p. 25).  
Il a été soutenu en doctrine que la jurisprudence du Tribunal fédéral précitée pouvait être transposée au cas de l'exploitant d'un blog (David Equey, La responsabilité pénale des fournisseurs de services internet, étude à la lumière des droits suisse, allemand et français, 2016, n° 899 ss). De même, un réseau social accessible en principe à tous les utilisateurs d'internet, axé sur l'interactivité, offrait des caractéristiques semblables (cf. David Equey, op. cit., n° 1029 et 1035). En outre, toujours selon cet auteur, un blogueur peut engager sa responsabilité pénale à partir du moment où des informations illicites sont déposées sur l'espace mis à disposition des internautes, qu'il en est informé et qu'il ne procède pas à leur effacement (David Equey, op. cit., n° 907).  
C'est encore le lieu de préciser que la jurisprudence a exclu l'application de l'art. 28 CP - lequel prévoit que lorsqu'une infraction a été commise et consommée sous forme de publication par un média, seul le responsable de la publication (par opposition à ceux qui la diffusent) est en principe punissable - lorsque l'infraction réprimée par l'art. 261bis CP est retenue (ATF 126 IV 176 consid. 2 p. 177 in JdT 2001 IV 121; 125 IV 206 consid. 3c p. 211 s. in SJ 2000 I 65). 
 
3.4. En l'espèce, la cour cantonale a constaté que l'intimé alimentait son compte Facebook, ouvert à tous, presque tous les jours, qu'il n'y publiait rien de personnel mais abordait divers sujets de société qui suscitaient des commentaires. On peut dès lors admettre, avec l'autorité précédente, que l'intimé utilisait son compte Facebook d'une façon comparable à celle d'un forum de discussion tel que dans l'arrêt 6B_645/2007 évoqué ci-dessus, de sorte que les principes qui en découlent sont pertinents en l'espèce.  
 
3.5. Le comportement reproché à l'intimé sera tout d'abord examiné sous l'angle d'une omission.  
 
3.5.1. Conformément à l'art. 11 CP, un crime ou un délit peut aussi être commis par le fait d'un comportement passif contraire à une obligation d'agir (al. 1). Reste passif en violation d'une obligation d'agir celui qui n'empêche pas la mise en danger ou la lésion d'un bien juridique protégé par la loi pénale bien qu'il y soit tenu à raison de sa situation juridique, notamment en vertu de la création d'un risque (al. 2 let. d).  
Dans le cas d'espèce, il est vrai qu'en choisissant de ne pas limiter l'accès à son " mur " Facebook, mais au contraire de le rendre accessible à tout public, et d'y aborder des thèmes de nature politique, de surcroît sensibles et sujets aux amalgames, l'intimé a créé un risque que des contenus illégaux y soient déposés (cf. arrêt de la CourEDH Sanchez précité; cf. consid. 3.3.1 supra). Cependant, conformément à la jurisprudence, ce risque ne dépasse ce qui peut être socialement admis que si l'intéressé avait connaissance du contenu problématique qui a été ajouté sur sa page (arrêt 6B_645/2007 précité consid. 7.3.4.4.2; dans le même sens: David Equey, op. cit., n° 907). Puisqu'il n'a pas été établi que l'intimé aurait eu connaissance du contenu illicite publié sur son " mur " avant l'ouverture d'une procédure pénale, une responsabilité pénale pour l'omission reprochée à l'intimé est exclue sous cet angle.  
 
3.5.2. Le recourant soutient cependant que dans la présente configuration de fait, le risque encouru par l'intimé ne serait plus socialement admissible. Se référant à l'art. 97 al. 1 LTF dans la mesure où il serait nécessaire de compléter l'état de fait cantonal, il affirme que certaines circonstances propres au cas d'espèce (caractère polémique des sujets abordés sur le compte Facebook de l'intéressé, profil des internautes susceptibles de le consulter et de s'y exprimer, nombre et type de commentaires publiés par des tiers) devaient faire naître, à charge de l'intimé, un devoir de prendre connaissance du contenu potentiellement litigieux publié sur son compte. Il souligne également que l'avis personnel des internautes qui ont été condamnés par ordonnance pénale, s'il avait été publié sur leurs propres réseaux, n'aurait eu qu'un impact insignifiant en termes d'atteinte à la paix publique; diffusés sur celui d'un homme politique, ils atteignaient un public plus nombreux, de sorte que ce bien juridique était plus sérieusement mis en danger, ce dont l'intimé, en définitive, devait répondre.  
 
3.5.3. Le recourant appelle ainsi à poser des principes qui vont au-delà de la portée de l'arrêt 6B_645/2007 précité. En effet, cet arrêt fonde la responsabilité pénale de l'auteur sur sa connaissance du contenu illicite publié sur la plateforme qu'il exploite, mais il ne définit pas les contours du risque socialement admissible ni ceux d'une obligation de surveillance et de modération permanente.  
 
3.5.4. Le principe de la légalité (art. 1 CP; 7 CEDH) est violé lorsque quelqu'un est poursuivi pénalement en raison d'un comportement qui n'est pas visé par la loi; lorsque l'application du droit pénal à un acte déterminé procède d'une interprétation de la norme pénale excédant ce qui est admissible au regard des principes généraux du droit pénal; ou si quelqu'un est poursuivi en application d'une norme pénale qui n'a pas de fondement juridique (ATF 147 IV 274 consid. 2.1.1 p. 289; 144 I 242 consid. 3.1.2 p. 251). Le justiciable doit pouvoir savoir, à partir de la lettre de la disposition topique et, au besoin, de l'interprétation faite de celle-ci par les tribunaux ou, le cas échéant, après avoir recouru à des conseils éclairés, quels sont les actes et omissions qui engagent sa responsabilité pénale et quelle est la sanction qu'il encourt pour ceux-ci (arrêt de la CourEDH Kadusic c. Suisse du 9 janvier 2018 [requête n° 43977/13], n° 68 et les arrêts cités).  
Dans le cas présent, il convient de rappeler que le législateur, soucieux de ne pas mettre en place une norme susceptible d'entraîner des restrictions disproportionnées au principe de la liberté d'expression, n'a pas souhaité, à ce jour, prévoir l'obligation, incombant aux titulaires de compte sur un réseau social - ni d'ailleurs, aux prestataires de service eux-mêmes (cf. consid. 3.3.2 supra) -, de modérer le contenu publié par autrui. Il n'y a pas lieu de revenir sur ce choix par le biais d'une interprétation jurisprudentielle. En effet, il serait manifestement problématique, sous l'angle du principe de la légalité, de faire dépendre l'existence d'une obligation de surveillance et de modération du titulaire d'un compte Facebook (ou tout autre réseau social) de circonstances telles que la sensibilité des sujets abordés, le cercle de potentiels destinataires des publications, ou encore le nombre ou le caractère frappant des commentaires " postés " en réaction à la publication originelle, puisque dite obligation reposerait intégralement sur une évaluation délicate à opérer, difficilement prévisible et manifestement empreinte de subjectivité. De surcroît, cela reviendrait à placer sur les épaules de l'intéressé, simple utilisateur d'un réseau social, un devoir de vigilance très lourd, puisque permanent et exhaustif - un seul commentaire de tiers pouvant potentiellement suffire à entraîner la responsabilité pénale du titulaire du compte -, et cela, alors qu'aucune norme ne le prévoit expressément. 
 
3.5.5. En définitive, la thèse défendue par le recourant ne trouve aucun fondement de lege lata. En tout état, ses réflexions peuvent être relativisées dans la mesure où l'on constate que la plupart des auteurs des publications litigieuses ont été identifiés et condamnés pénalement pour leurs propos (cf. let. B.d supra). Si ces personnes-là sont dissuadées, par la menace de la sanction pénale, de communiquer des propos haineux ou discriminatoires sur une plateforme jouissant d'une certaine visibilité, la paix publique est indirectement protégée (cf. consid. 1.1 supra). Aussi, le recourant ne saurait être suivi lorsqu'il affirme qu'en ne mettant pas à charge du titulaire du compte une obligation de surveillance constante, tout l'arsenal de l'art. 261bis CP manque son but.  
 
3.5.6. Considérant ce qui précède, il convient de s'en tenir à des principes clairs et prévisibles, ce qui exclut de conclure, en l'état du droit positif, que des circonstances d'espèce, telles que celles mises en exergue par le recourant, puissent générer une obligation de surveillance et de modération à charge du titulaire d'un compte sur un réseau social. Il s'ensuit que l'intimé ne répond pas d'un comportement passif contraire à une obligation d'agir, au sens de l'art. 11 al. 1 et 2 let. d CP, pour avoir omis de supprimer les messages illicites publiés à son insu par des tiers sur son compte Facebook.  
 
3.6. A supposer que le libre accès au " mur " de son compte Facebook constitue une prestation positive de l'intimé en faveur de tiers, dans la mesure où il leur est ainsi offert une plateforme publique sur laquelle exprimer leur avis personnel, le comportement de l'intimé pourrait être appréhendé comme une action. Il conviendrait alors d'examiner dans quelle mesure le prénommé en répond au titre d'une participation aux infractions commises par les auteurs des publications litigieuses (cf. arrêt 6B_645/2007 précité consid. 7.3.4.4.2).  
La coactivité suppose une collaboration intentionnelle et déterminante à la décision de commettre une infraction. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet, auquel il peut adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Ce qui est déterminant, c'est que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.1 p. 155; 130 IV 58 consid. 9.2.1 p. 66; 125 IV 134 consid. 3a p. 136). De même, le complice doit avoir l'intention de favoriser la commission de l'infraction, même si le dol éventuel suffit (art. 25 CP; ATF 121 IV 109 consid. 3a p. 119 s.; 118 IV 309 consid. 1a p. 312 et les arrêts cités). Il doit à la fois savoir ou se rendre compte qu'il apporte son concours à un acte délictueux déterminé et le vouloir ou l'accepter; il suffit qu'il connaisse les principaux traits de l'activité délictueuse qu'aura l'auteur, lequel doit donc déjà avoir pris la décision de commettre l'acte (ATF 132 IV 49 consid. 1.1 p. 52 et les références citées). 
Dans l'arrêt 6B_645/2007 précité, il a été retenu que l'intention du prévenu, tout au moins dès qu'il a eu connaissance de la présence de la vidéo illicite sur son site, portait sur la publication de ce document, de sorte qu'en exploitant le forum sur lequel se trouvait la vidéo, ce qu'il savait, il avait intentionnellement collaboré à l'exécution de l'infraction (consid. 7.3.4.5). En l'espèce, puisque l'intimé ignorait la présence de contenu litigieux publié par des tiers sur sa page virtuelle, on ne voit pas comment, faute d'un accord des volontés entre les auteurs principaux et l'intimé, celui-ci aurait pu participer aux infractions commises par ceux-là, que ce soit à titre principal ou accessoire. 
Partant, sous cet angle également, une responsabilité pénale en qualité de titulaire d'un compte Facebook pour des propos publiés par des tiers ne peut s'envisager aussi longtemps que l'intéressé n'avait pas connaissance du contenu illicite publié sur son " mur ". 
 
3.7. Sur le vu de ce qui précède, considérant qu'il n'a pas été établi que l'intimé aurait toléré, en connaissance de cause, les publications litigieuses dès leur apparition sur son compte, la cour cantonale n'a pas violé l'art. 261bis al. 1 et 4 CP en concluant que cette disposition n'était pas applicable en l'espèce. Elle n'a, en toute hypothèse, pas non plus établi les faits de manière manifestement inexacte, ceux allégués par le recourant, relatifs aux circonstances propres au cas d'espèce (cf. consid. 3.5.2 supra) étant sans influence sur le sort de la cause au regard de ce qui précède (art. 97 al. 1 in fine LTF).  
 
4.  
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. Il est statué sans frais (art. 66 al. 4 LTF). L'intimé, qui n'a pas été invité à se déterminer, ne saurait prétendre à des dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 7 avril 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Musy