Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_512/2019
Arrêt du 12 novembre 2020
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Kiss, présidente, Hohl, Niquille, Rüedi et May Canellas.
Greffière Monti.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Louis Gaillard,
défendeur et recourant,
contre
B.________ Limited,
représentée par Me Christophe Zellweger,
demanderesse et intimée.
Objet
mandat; honoraires d'avocat,
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 29 août 2019 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/42/2015; ACJC/1256/2019).
Faits :
A.
A.a. B.________ Limited est une société de droit anglais active dans le conseil juridique (ci-après: B.________ Ltd, ou la société de conseil juridique).
En mai et juin 2009, elle a conclu des "contrats de représentation juridique"
(Legal Representation Agreements) avec plusieurs plaignants américains qui avaient été victimes d'une fraude financière orchestrée par un individu basé en Angleterre. Selon ces accords, B.________ Ltd devait recouvrer les fonds détournés par l'escroc et intervenir à cette fin notamment en Suisse. Les plaignants s'engageaient à signer toute procuration permettant de les représenter devant les autorités judiciaires suisses. B.________ Ltd s'obligeait à payer avec ses propres ressources tous les frais liés à cette représentation, dont les frais judiciaires et les honoraires d'avocats mandatés en Suisse. En contrepartie, elle avait le droit à 7,5 % des sommes récupérées dans le cadre du litige contre l'escroc. L'accord devait entrer en force dès que les parties auraient signé celui-ci, ainsi que les procurations pour les avocats suisses engagés par B.________ Ltd.
Un jugement anglais du 18 novembre 2009 a ordonné que les quelque 16,5 millions de dollars américains (USD) déposés par l'escroc auprès d'une banque genevoise fussent restitués aux plaignants américains, qui étaient reconnus comme les ayants droit économiques. Ces fonds faisaient l'objet d'un séquestre pénal à la suite d'une demande d'entraide des autorités anglaises.
A.b. Le 2 décembre 2009, l'administrateur de B.________ Ltd a adressé à l'avocat A.________, inscrit au Barreau du canton de Genève, une télécopie débutant en ces termes: "Je vous écris en vue de
[sic!, i.e. 'en considération de'] votre longue expérience en matière de litige et en espérant que vous puissiez assister nos clients dans une affaire à Genève." Il expliquait agir pour plusieurs clients américains victimes d'une fraude financière, dont l'objectif était de faire exécuter en Suisse le récent jugement anglais et de récupérer ainsi les fonds déposés par l'escroc dans la banque genevoise. Il précisait que certains plaignants étaient dépourvus de ressources suite à la fraude et avaient hâte d'obtenir ce recouvrement.
L'avocat genevois a accepté de se charger du recouvrement des fonds confisqués à Genève; il n'est pas établi qu'il aurait eu connaissance, avant la présente procédure, du contenu des contrats liant B.________ Ltd aux plaignants. Après des interventions auprès du juge d'instruction pénal, il a sollicité et obtenu des séquestres civils pour chacun des plaignants en février 2010. Il a ensuite fait notifier des poursuites à l'escroc en Angleterre. Au mois d'avril 2011, les avoirs saisis ont été versés à l'office des poursuites. A cette même époque, les plaignants américains ont signé des procurations habilitant l'avocat à les représenter devant les autorités administratives et judiciaires suisses dans toute démarche nécessaire en vue de faire exécuter un jugement anglais du 24 février 2011. Le malfaiteur a formé des plaintes qui ont été déclarées irrecevables en mai 2011 par l'autorité de surveillance en matière de poursuites. Finalement, les fonds ont pu être recouvrés à hauteur de 15'494'883 fr. 95, montant qui a été versé sur le compte-clients de l'avocat en date du 27 juillet 2011.
A.c. L'avocat avait adressé quasi mensuellement à B.________ Ltd des notes d'honoraires intermédiaires pour l'activité déployée entre le 4 décembre 2009 et le 22 juin 2011. Certaines notes étaient restées impayées.
Le 29 juillet 2011, l'avocat a établi une facture finale de 802'888 fr. 20 au titre d'honoraires, frais et débours. Ce montant incluait une prime de succès (
success fee) de 520'000 fr.
Sur les quelque 15,5 millions de francs encaissés sur son compte-clients, l'avocat a déduit 750'000 fr. pour ses honoraires, puis a transféré le solde à B.________ Ltd.
Celle-ci a immédiatement contesté la note d'honoraires en s'étonnant de son ampleur. Elle a objecté que le prélèvement d'environ 3,5 % opéré sur la somme recouvrée, en sus des heures de travail facturées, n'avait jamais été convenu.
Le 23 janvier 2012, B.________ Ltd a saisi la Commission en matière d'honoraires d'avocats. Par préavis notifié le 29 janvier 2014, cette autorité a considéré que la prime de succès était disproportionnée en tant qu'elle représentait 3,29 % du montant recouvré [calcul opéré sur la base d'une prime de 521'800 fr. et d'un encaissement de 15'812'154 fr., réd.]. Aussi devait-elle être réduite à 2,5 % du résultat, soit 395'303 fr. 85.
B.
B.a. Le 5 janvier 2015, B.________ Ltd a ouvert action contre l'avocat genevois devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. La société de conseil juridique prétendait au paiement de 520'000 fr. plus intérêts, soit le montant retenu par l'avocat au titre de prime de succès.
Par décision incidente du 13 juin 2016, le Tribunal a admis la légitimation active de la demanderesse, considérant que celle-ci s'était liée à l'avocat genevois par un sous-mandat. La Cour de justice genevoise a confirmé cette analyse dans un arrêt du 10 mars 2017. Le recours interjeté au Tribunal fédéral a été déclaré manifestement irrecevable (arrêt 4A_210/2017 du 22 mai 2017).
Statuant sur le fond le 2 octobre 2018, le Tribunal de première instance a entièrement admis la demande, condamnant l'avocat défendeur au paiement de 520'000 fr. plus intérêts à 5 % l'an dès le 1er août 2011.
B.b. Par arrêt du 29 août 2019, la Cour de justice a rejeté l'appel formé par l'avocat. Ses considérants seront évoqués ci-dessous dans la mesure utile à la discussion des griefs soulevés dans le présent recours.
C.
L'avocat a déposé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Il a conclu au rejet de la demande intentée par la société de conseil juridique.
L'effet suspensif sollicité à l'appui du recours a été refusé.
L'autorité précédente a produit le dossier de la cause sans émettre d'observations.
La société intimée a conclu au rejet du recours.
Le recourant a répliqué, suscitant une duplique de la partie adverse.
Considérant en droit :
1.
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. et au délai de recours (art. 74 al. 1 let. b LTF, resp. art. 100 al. 1 LTF en lien avec l'art. 45 al. 1 LTF).
2.
Le recourant soulève des griefs ayant trait à la légitimation active de B.________ Ltd, à l'exception de prescription et à la prime de succès dont il s'estime créancier. Ces trois questions seront traitées successivement.
3.
3.1. En premier lieu, le recourant critique la décision incidente du 10 mars 2017 par laquelle la Cour de justice a reconnu la légitimation active à B.________ Ltd au motif que cette entité s'était liée à lui par un sous-mandat (cf. let. B.a
supraet art. 93 al. 3 LTF). De son point de vue, la demanderesse/intimée aurait agi comme représentante directe des plaignants américains qui seraient ses propres mandants.
Un rappel des principes théoriques s'impose à ce stade, étant entendu que l'applicabilité du droit suisse n'est pas discutée. L'unique point litigieux est de savoir si l'avocat recourant a conclu un mandat au sens des art. 394 ss CO avec l'intimée B.________ Ltd, ou avec les plaignants américains.
3.2. Selon l'art. 398 al. 3 CO, le mandataire est tenu d'exécuter personnellement le mandat, à moins qu'il ne soit autorisé à le transférer à un tiers, qu'il n'y soit contraint par les circonstances ou que l'usage ne permette une substitution de pouvoirs.
Plutôt que d'exécuter lui-même le contrat, le mandataire peut, en son nom mais pour le compte du mandant, en confier tout ou partie de la réalisation à un tiers (substitut ou sous-mandataire), lequel l'exécutera de manière indépendante, sous sa propre responsabilité; on parle de substitution (cf. TERCIER ET ALII, Les contrats spéciaux, 5e éd. 2016, nos 4414 s.; WALTER FELLMANN, Berner Kommentar, 1992 [cité ci-après FELLMANN, Berner Kommentar], nos 543, 561 et 592 ad art. 398 CO). Le mandataire conclut un (sous-) contrat - généralement un (sous-) mandat - avec le substitut. Comme (sous-) mandant, il doit payer d'éventuels honoraires au sous-mandataire, peut lui donner des instructions et exiger de lui une exécution diligente et fidèle de l'obligation ainsi "sous-traitée" (TERCIER ET ALII, op. cit., n° 4428; FELLMANN, Berner Kommentar, nos 562 et 592 s. ad art. 398 CO).
Entre le mandant principal et le substitut, il n'y a en soi aucune relation contractuelle directe. Le substitut ne peut faire valoir ses prétentions - en particulier son droit à la rémunération (arrêt 4C.378/2002 du 1er avril 2003 consid. 5.2) - que contre le mandataire, à l'exclusion du mandant principal. Ce dernier dispose en revanche d'une action directe contre le substitut, l'art. 399 al. 3 CO l'habilitant à "faire valoir directement (...) les droits" dont le mandataire dispose envers la personne qu'il s'est substituée. Le mandant principal peut notamment donner des instructions au substitut (ATF 121 III 310 consid. 4a
in fine p. 315; 110 II 183 consid. 2b p. 187) ou exiger une reddition de compte selon l'art. 400 CO (TERCIER ET ALII, op. cit., nos 4429 s.; FELLMANN, Berner Kommentar, nos 610-614 ad art. 398 CO, nos 92-95 et 101 ad art. 399 CO; OSER/WEBER, in Basler Kommentar, Obligationenrecht I, 7e éd. 2020 [ci-après: Basler Kommentar OR I], nos 6 s. ad art. 399 CO; JOHAN DROZ, La substitution dans le contrat de mandat, 2008, n. 602 ss; JOSEF HOFSTETTER, Der Auftrag und die Geschäftsführung ohne Auftrag, Schweizerisches Privatrecht VII/6, 2000, p. 98 et sous-note 39).
Le substitut peut être chargé d'accomplir des actes juridiques ou judiciaires. S'il agit au nom du mandant principal, la procuration peut être fournie soit par le mandataire s'il en a les pouvoirs, soit par le mandant principal directement. Ce dernier cas n'implique pas nécessairement l'existence d'un mandat direct, la procuration pouvant exister sans contrat de mandat (BOHNET/MARTENET, Droit de la profession d'avocat, 2009, n. 2674; FELLMANN, Berner Kommentar, nos 621-626 ad art. 398 CO et nos 42 s. ad art. 396 CO).
La substitution doit être distinguée de situations voisines, soit en particulier du cas où le mandataire s'adjoint les services d'un auxiliaire (art. 101 CO; cf. ATF 112 II 347 consid. 2), ou encore de la représentation directe, où le mandataire conclut le contrat au nom du mandant, lequel se trouve ainsi lié au tiers. La distinction peut parfois s'avérer délicate (cf. TERCIER ET ALII, op. cit., nos 4417 ss; FELLMANN, Berner Kommentar, nos 535 ss ad art. 398 CO; DROZ, op. cit., n. 244 ss; sur le
Vermittlungsauftrag, cf. par ex. FELLMANN, Berner Kommentar, nos 559 s. ad art. 398 CO et DROZ, op. cit., n. 330-332).
Comme exemple de substitution, la doctrine cite le cas de l'avocat généraliste consulté par un client qui souhaite fonder une société et émet des préoccupations fiscales. L'avocat accepte le mandat en prévenant qu'il utilisera probablement les services d'un confrère spécialisé en droit fiscal - ce qu'il fait effectivement. Le fiscaliste est alors le substitut de l'avocat généraliste au sens de l'art. 399 CO (DROZ, op. cit., n. 449 ss, cité par BOHNET/MARTENET, op. cit., n. 2673).
3.3. Dans son jugement incident du 10 mars 2017, la Cour de justice a dû déterminer qui, des plaignants américains ou de B.________ Ltd, avait mandaté l'avocat genevois pour recouvrer les fonds séquestrés auprès d'une banque genevoise. Elle a envisagé trois options:
- un mandat conclu directement avec les plaignants;
- un mandat conclu avec ceux-ci par l'intermédiaire de B.________ Ltd,
en tant que représentante directe;
- un sous-mandat conclu avec B.________ Ltd.
La Cour genevoise a écarté la première hypothèse en arguant du fait que l'avocat n'avait pas été approché ni sélectionné par les plaignants, mais bien par B.________ Ltd. Il avait eu avec celle-ci de nombreux contacts chaque mois, tandis que ses factures n'évoquaient aucun échange avec les plaignants avant le mois d'août 2010. Les factures, libellées au nom de la société prénommée, avaient été adressées par courriels à celle-ci et non aux plaignants; l'entité avait procédé au paiement des notes intermédiaires, à l'exclusion des plaignants. Ces derniers avaient certes signé des procurations en faveur de l'avocat, mais ne l'avaient fait qu'en avril 2011, soit 17 mois après la conclusion du contrat et le début de l'activité déployée par l'avocat, et 3 mois avant la fin du mandat. Qui plus est, B.________ Ltd s'était chargée de faire parvenir ces procurations aux plaignants et de les restituer, signées, à l'avocat genevois. Celui-ci avait certes entretenu des échanges avec quelques plaignants, mais B.________ Ltd était restée son interlocutrice principale.
La deuxième hypothèse - soit la représentation directe - devait également être exclue. Il importait peu de savoir si B.________ Ltd, notamment par sa télécopie du 2 décembre 2009, avait agi en son nom propre pour le compte des plaignants, ou au nom de ceux-ci. Elle n'avait de toute façon pas les pouvoirs
ad hoc, à teneur des accords conclus avec les plaignants. Il n'était pas démontré que les plaignants auraient ratifié l'acte accompli soi-disant en leur nom, ni qu'ils auraient communiqué à l'avocat, même tacitement, l'existence de pouvoirs confiés à B.________ Ltd.
Finalement, la Cour de justice constatait que la dernière option - sous-mandat - devait être retenue. Selon les accords négociés avec les plaignants américains, B.________ Ltd devait se substituer des plaideurs étrangers pour qu'ils exécutent sa mission consistant à récupérer les fonds des plaignants; elle seule devait se lier aux sous-mandataires qu'elle aurait engagés, et devait les payer au moyen de ses propres deniers. Elle avait agi mue par une intention conforme aux contrats: elle avait elle-même sélectionné et contacté l'avocat genevois, dont elle avait ensuite été l'interlocutrice principale; elle lui avait donné des instructions, s'était tenue informée de son activité et avait reçu les factures d'honoraires et frais, dont elle avait le cas échéant exécuté le paiement.
Quant à l'avocat, il avait la volonté d'accepter le mandat qui lui était confié et de voir ses honoraires payés, sans avoir de préférence quant à l'identité de son cocontractant, ni en avoir manifesté une.
En bref, concluait la Cour de justice, B.________ Ltd voulait contracter avec l'avocat genevois, tandis que celui-ci souhaitait contracter tant avec elle qu'avec les plaignants, ou du moins était-il indifférent à cet égard. Il s'ensuivait la manifestation d'une volonté réciproque et concordante de conclure un sous-mandat. Il importait peu que l'avocat ait communiqué avec certains plaignants; la figure juridique de la substitution permettait au mandant principal de donner des instructions au sous-mandataire et de se tenir informé de son activité. Les procurations signées par les plaignants ne permettaient pas d'inférer une volonté que la relation contractuelle fût nouée directement entre l'avocat et ceux-ci. Un tel lien contractuel ne découlait pas davantage de la missive du 22 octobre 2010, dans laquelle B.________ Ltd s'était excusée d'avoir tardé à payer des notes d'honoraires en invoquant quelques difficultés à obtenir de l'argent des clients. En effet, rien n'indiquait que les "clients" en question fussent les plaignants américains; quand bien même ce serait le cas, cela n'exclurait nullement une volonté concordante de conclure un sous-mandat.
3.4. A la lumière notamment des "contrats de représentation juridique" conclus entre B.________ Ltd et les plaignants (let. A.a
supra), l'autorité précédente était fondée à retenir la figure du sous-mandat.
Des plaignants américains victimes d'un escroc basé en Angleterre ont chargé une société anglaise de conseil juridique de recouvrer leurs fonds, localisés notamment en Suisse. Pour mener à bien ces contrats - qui, au regard du droit suisse en tout cas, doivent être qualifiés de mandats -, dite société était expressément habilitée à engager des avocats suisses dont elle devait assumer les honoraires. Une telle hypothèse entre bel et bien dans les prévisions d'un sous-mandat: avec l'aval de ses mandants, la société de conseil juridique s'est substitué un tiers spécialisé en droit suisse et inscrit au barreau du canton dans lequel devait être exécutée une partie du mandat. Le tiers en question disposait de l'indépendance caractéristique du substitut (sur cette question, cf. entre autres FELLMANN, Berner Kommentar, nos 539 ss et 562 ad art. 398 CO; DROZ, op. cit., n. 393 ss; cf. aussi arrêt 4A_407/2007 du 14 mars 2008 consid. 2.3). Comme l'a relevé la Cour de justice dans une argumentation convainquante, les procurations délivrées par les plaignants américains quelque 17 mois après que l'avocat genevois eut été abordé par B.________ Ltd et eut débuté son activité n'indiquaient pas, dans les circonstances d'espèce, que le mandat aurait été conclu directement avec les plaignants. La délivrance d'une procuration ne fait pas obstacle à la qualification d'un sous-mandat (consid. 3.2
supra); en l'occurrence, ces procurations étaient prévues par les "contrats de représentation juridique", qui plaident clairement pour la construction d'un sous-mandat. N'est pas non plus décisif le fait qu'à une reprise, B.________ Ltd se soit excusée d'un retard dans le paiement des honoraires en l'imputant aux difficultés qu'elle avait à "extirper" des fonds de ses clients (
"difficulties extracting monies from clients"). La Cour de justice a relevé qu'il ne s'agissait pas nécessairement des plaignants américains, et cette appréciation est dénuée d'arbitraire - n'en déplaise au recourant -, vu l'extrait de la missive du 22 octobre 2010 cité dans la décision incidente. Au demeurant, retenir le contraire n'aurait pas l'incidence escomptée par le recourant. On ignore en effet comment les contrats de représentation juridique ont été pratiquement mis en oeuvre, et de quelle manière B.________ Ltd finançait ses frais jusqu'à l'encaissement des fonds; il s'agissait en outre d'un épisode isolé.
3.5. Le recourant objecte qu'il ignorait le contenu des accords liant les plaignants américains à B.________ Ltd, de sorte qu'on ne saurait s'appuyer sur ceux-ci pour en inférer que les deux parties - lui comme la société de conseil juridique - avaient une réelle et commune intention de conclure un sous-mandat. En présence de volontés divergentes, l'autorité précédente aurait dû interpréter les manifestations de volonté selon le principe de la confiance. Or, de son point de vue, rien dans la télécopie du 2 décembre 2009 ne permettrait objectivement d'inférer que la société de conseil juridique entendait conclure un sous-mandat. Une telle construction juridique serait singulière; la règle générale voudrait que l'avocat soit le mandataire direct de ses clients. De surcroît, les avocats anglo-saxons ne prendraient notoirement aucun engagement personnel sans signer des contrats détaillés, qui font en l'occurrence défaut.
Pareille argumentation est sans issue. Certes, la Cour de justice a précisé que l'avocat genevois ignorait le contenu des "contrats de représentation juridique". Il est vrai aussi que B.________ Ltd s'est exprimée avec une certaine ambiguïté lors de sa prise de contact avec l'avocat genevois, si l'on considère l'extrait de télécopie du 2 décembre 2009 et le résumé qu'en livrent l'arrêt attaqué et le jugement incident: la prénommée a en effet émis le souhait que l'avocat "
puiss[e] assister [se]s clients dans une affaire à Genève ", expliquant agir pour plusieurs clients américains victimes d'une fraude et vouloir récupérer les fonds déposés par l'escroc auprès de banques établies en Suisse, en faisant exécuter dans ce pays le jugement anglais récemment obtenu. De tels propos peuvent notamment insinuer que l'avocat genevois serait le cocontractant des plaignants américains, qu'il "assisterait" directement.
Les deux concessions effectuées ci-dessus n'ont cependant pas les conséquences que le recourant voudrait leur attribuer: elles n'impliquent pas nécessairement qu'il faille interpréter les manifestations de volonté selon le principe de la confiance, soit d'après le sens que le destinataire pouvait de bonne foi leur accorder. Cette méthode d'interprétation n'intervient que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties, ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves (cf. par ex. ATF 144 III 93 consid. 5.2.3). L'interprétation dite objective ne permet au demeurant pas de tenir compte de comportements postérieurs à la conclusion du contrat - ce qui semble échapper au recourant (ATF précité, consid. 5.2.3
in fine p. 99). Avant de recourir à une telle méthode, encore faudrait-il établir qu'il était arbitraire de retenir une volonté concordante de conclure un mandat avec B.________ Ltd. Or, un tel
requisit n'est pas rempli.
Selon la Cour de justice, B.________ Ltd avait la volonté de contracter avec le recourant - autrement dit de conclure le mandat en son nom propre -, constatation qui ne fait l'objet d'aucun grief d'arbitraire. La cour cantonale a en outre considéré qu'il était à tout le moins indifférent au recourant de conclure avec cette société ou avec les plaignants américains. Or, cette conclusion échappe au grief de violation de l'art. 9 Cst. (sur la notion d'arbitraire, cf. par ex. ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2). Le recourant objecte vainement que la nature même du mandat d'avocat dicterait de connaître l'identité précise de son mandant - alors qu'il ne prétend pas avoir ignoré pour le compte de qui B.________ Ltd agissait. Au vu notamment de l'ambiguïté entourant la télécopie du 2 décembre 2009 et de la mise en exécution immédiate du mandat sans clarification requise par le recourant, il n'était pas insoutenable de déduire une indifférence quant à l'identité du cocontractant.
En bref, l'autorité précédente n'a pas versé dans l'arbitraire en constatant une volonté commune de conclure un contrat entre B.________ Ltd et le recourant. L'autorité précédente était ainsi dispensée de recourir au principe de la confiance. Elle pouvait en outre conclure en droit que le recourant et B.________ Ltd s'étaient liés par un sous-mandat, de sorte que cette dernière avait la légitimation active.
La première branche de griefs se trouve ainsi privée d'assise.
4.
En deuxième lieu, le recourant reproche à l'autorité d'appel d'avoir enfreint le droit fédéral en déclarant irrecevable l'exception de prescription formulée en plaidoirie finale devant le premier juge.
4.1.
4.1.1. A teneur de l'art. 142 CO, le juge ne peut suppléer d'office le moyen résultant de la prescription. Le débiteur doit donc soulever l'exception de prescription dans le procès, en la forme et au stade définis par le droit procédural (ATF 94 II 26 consid. 4c p. 36; 80 III 41 consid. 2; arrêts 4A_210/2010 du 1er octobre 2010 consid. 7.1.1; 4A_56/2008 du 8 octobre 2009 consid. 9.1; 4C.409/2005 du 21 mars 2006 consid. 3.1, in SJ 2006 I 433; cf. aussi MAX GULDENER, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd. 1979, p. 259; RAFAEL KLINGLER, Die Eventualmaxime in der Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2010, n. 172).
4.1.2. L'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ) prohibait la présentation de "faits, exceptions, dénégations et preuves nouveaux" dans la procédure de recours en réforme au Tribunal fédéral. Les moyens de défense que sont les "exceptions" étaient donc assujettis au même régime que les faits et moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ; sur l'exception de prescription, cf. ATF 123 III 213 consid. 4 et 5). Dans certaines procédures cantonales - dont celle du canton de Zurich -, la réglementation sur les
nova s'étendait aussi aux exceptions (REETZ/HILBER, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, [Sutter-Somm et alii éd.] 3e éd. 2016 [ci-après: Kommentar Sutter-Somm], n° 67 ad art. 317 CPC).
4.1.3. Désormais, les
nova sont régis par les art. 229, 317 et 326 CPC , respectivement par l'art. 99 LTF. Aucune de ces dispositions ne mentionne les "exceptions" (sur les motifs de cette omission dans la LTF, cf. le Message y relatif [FF 2001 4138] et les remarques de BERNARD CORBOZ, in Commentaire de la LTF, 2e éd. 2014, nos 50 ss ad art. 99 LTF).
La jurisprudence a précisé que l'exception de prescription n'est pas l'expression d'un point de vue juridique susceptible d'être examiné librement. Elle suppose bien plutôt une déclaration de volonté, et partant la résolution d'une question de fait consistant à déterminer si, et quand elle a été émise (arrêt 5A_586/2008 du 22 octobre 2008 consid. 5; ATF 138 II 169 consid. 3.1 p. 170). En conséquence, il a été jugé que la présentation de ce moyen de défense en appel ou devant le Tribunal fédéral relève de l'art. 317 al. 1 CPC, respectivement de l'art. 99 LTF (arrêts 4A_209/2019 du 8 octobre 2019 consid. 8.2.3; 4A_305/2012 du 6 février 2013 consid. 3.3; cf. aussi ATF 138 II 169 consid. 3.1 et 134 V 223 consid. 2.2).
La doctrine majoritaire dresse la même analyse (cf. entre autres KLINGLER, op. cit., n. 209 et 213; REETZ-HILBER, op. cit., nos 31, 33 et 67 ad art. 317 CPC; MEIER/SOGO, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 2010, p. 348 et 491). Du moment que l'exception de prescription doit être introduite dans le procès au même titre que des allégations de fait, il lui paraît justifié d'assimiler celle-là à celles-ci (DENIS TAPPY, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2e éd. 2019, n° 41 ad art. 221 CPC et n° 21 ad art. 229 CPC; HEINZMANN/COPT, Avant l'heure, c'est pas l'heure - après l'heure, c'est plus l'heure, in DC 2014 p. 142). La doctrine relève aussi que les restrictions entourant l'introduction de
nova découlent du principe de concentration (ou maxime éventuelle), lequel impose en substance d'"abattre ses cartes" au début du procès; ces réserves doivent logiquement prévaloir pour l'exception de prescription, puisqu'il s'agit d'un droit du débiteur dont le juge ne peut tenir compte d'office (DEMIAN STAUBER, in ZPO-Rechtsmittel, Berufung und Beschwerde, [Kunz et alii éd.], 2013, n° 14 ad art. 317 CPC; CHRISTOPH LEUENBERGER, in Kommentar Sutter-Somm, nos 1 et 14b ad art. 229 CPC; STAEHELIN ET ALII, Zivilprozessrecht, 3e éd. 2019, § 10 n. 42; KLINGLER, op. cit., n. 154, 181 et 653 s.; ROBERT DÄPPEN, in Basler Kommentar OR I, n° 4 ad art. 142 CO; STEPHEN BERTI, Zürcher Kommentar, 3e éd. 2002, nos 14 et 17 ad art. 142 CO; FABIENNE HOHL, Procédure civile, t. I, 2e éd. 2016, n. 1316 ss; cf. aussi FRANÇOIS BOHNET, Les défenses en procédure civile suisse, in RDS 2009 II p. 316 s. et p. 319 s.; GULDENER, op. cit., p. 259 et p. 489 et sous-note 49).
Certains auteurs préviennent que lorsqu'un justiciable déclare sur le tard vouloir exciper de la prescription, les conditions des art. 229 al. 1 ou 317 al. 1 CPC seront rarement réalisées (TAPPY, op. cit., n° 41 ad art. 221 CPC; REETZ/HILBER, op. cit., n° 31 ad art. 317 CPC [p. 2570
in fine]). On ne peut que leur donner raison, compte tenu notamment du changement législatif intervenu en 2011. On rappellera à cet égard que jusqu'au 31 décembre 2010, le dépôt d'une action ne suspendait pas le cours de la prescription. Aussi la prescription risquait-elle d'être acquise pendant la procédure judiciaire si le demandeur restait inactif (cf. entre autres DÄPPEN, op. cit., n° 1 ad art. 138 CO; PASCAL PICHONNAZ, in Commentaire romand, Code des obligations I, 2e éd. 2012, n° 1 ad art. 138 CO; ATF 130 III 202 consid. 3.2; 123 III 213 consid. 3). Depuis le 1er janvier 2011, le dépôt d'une requête de conciliation ou d'une action interrompt la prescription (art. 135 ch. 2 CO), mais à cet effet s'ajoute désormais la suspension du nouveau délai de prescription, jusqu'à ce que "la juridiction saisie cl[ose] la procédure" (art. 138 al. 1 CO; cf. DÄPPEN, op. cit., no 2 ad art. 138 CO; PICHONNAZ, op. cit., nos 2 et 5 ad art. 138 CO).
4.2. En appel, le recourant s'est plaint de ce que le premier jugement ne statuait pas sur l'exception de prescription qu'il avait soulevée dans sa plaidoirie finale aux débats principaux. La Cour de justice a concédé une violation du droit d'être entendu - après avoir relevé que la partie adverse ne contestait pas les faits. Cela étant, elle a jugé le moyen tardif, et partant irrecevable.
On relèvera au passage qu'il n'est pas fait état d'une déclaration relative à l'exception de prescription dans le procès-verbal de l'audience du 6 juin 2008, au cours de laquelle le recourant est censé avoir soulevé ce moyen. Peu importe toutefois, puisque la Cour de justice n'a pas remis en cause cet élément et a conclu à l'irrecevabilité du moyen, analyse qui ne peut qu'être approuvée au vu de la jurisprudence précitée.
L'exception de prescription doit être introduite dans les mêmes délais que les allégations de fait et satisfaire le cas échéant au régime restrictif des
nova (consid. 4.1.3
supra), énoncé à l'art. 229 CPC pour la première instance (cf. entre autres BOHNET, op. cit., p. 319 s.; KLINGLER, op. cit., n. 653,
contra DANIEL WILLISEGGER, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3e éd. 2017, n° 18 s. ad art. 229 CPC; ERIC PAHUD, in Schweizerische Zivilprozessordnung [ZPO], Kommentar, (BRUNNER ET ALII ÉD.), 2e éd. 2016, n° 5 ad art. 229 CPC). Le recourant a prétendu soulever un argument juridique recevable en tout temps compte tenu du principe
jura novit curia. Croyant obtenir gain de cause sur la base de cette prémisse erronée, il n'a lui-même pas prétendu réaliser les prévisions de l'art. 229 CPC, ce qui épargne toute discussion supplémentaire.
4.3. Par surabondance, on relèvera l'apparente inconsistance du moyen. Le recourant semble en effet avoir voulu jouer avec les mots. L'intimée avait exigé le "remboursement" du "montant indûment touché", respectivement la "restitution" du
success fee "indûment retenu". Le recourant voudrait en inférer qu'il est l'objet d'une action en enrichissement illégitime soumise à un délai de prescription annuel, selon le droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2019 (ancien art. 67 al. 1 CO). En réalité, aux termes de l'art. 400 al. 1 CO, le mandataire doit
"restituer" au mandant "tout ce qu'il a reçu" du chef de la gestion du mandat, par quoi il faut entendre notamment ce qu'il a encaissé auprès de tiers en exécution du mandat. Le verbe
"restituer" (
erstatten/restituire) est réducteur (ATF 143 III 348 consid. 5.1.2 p. 354; FELLMANN, Berner Kommentar, nos 10 s. et 115 ad art. 400 CO; TERCIER ET ALII, op. cit., no 4493). B.________ Ltd a bel et bien émis une prétention fondée sur l'art. 400 al. 1 CO à l'encontre de l'avocat qui, en exécution de son mandat, avait encaissé sur son compte-clients le 27 juillet 2011 les fonds provenant de la levée du séquestre, fonds qu'il avait reversés peu après à la mandante prénommée, sous réserve d'une somme pour ses honoraires incluant 520'000 fr. à titre de prime de succès. L'action du mandant contre le mandataire récalcitrant se prescrit par dix ans (art. 127 CO; ATF 143 III 348 consid. 5.2.1; 81 II 358 consid. 3; FELLMANN, Berner Kommentar, n° 168 ad art. 400 CO; TERCIER ET ALII, op. cit., no 4495). Sachant que la requête de conciliation a été déposée le 5 janvier 2015, l'exception paraissait bel et bien vouée à l'échec (art. 135 ch. 2 et art. 138 al. 1 CO ), ce que l'autorité précédente était toutefois dispensée de préciser.
4.4. En bref, le grief afférent à l'exception de prescription se révèle dépourvu de fondement.
5.
En troisième et dernier lieu, le recourant plaide qu'il était en droit de facturer une prime de succès (
success fee), contrairement à ce qu'a jugé l'autorité précédente.
5.1. La résolution de cette question impose de rappeler au préalable les principes gouvernant la rémunération de l'avocat.
5.1.1. Selon le droit privé du mandat qui régit la relation entre l'avocat et son client, les honoraires du mandataire sont fixés au premier chef par la convention des parties, à défaut par l'usage et en dernier ressort par le juge, qui tiendra compte de toutes les circonstances pertinentes en veillant à ce que la rémunération soit objectivement proportionnée (
objektiv angemessen) aux services rendus (cf. art. 394 al. 3 CO; ATF 135 III 259 consid. 2.2; 101 II 109 consid. 2). Les critères pertinents incluent la nature et la durée du mandat, sa complexité objective, l'ampleur du travail fourni et le temps consacré, le degré d'urgence de l'exécution, la formation, l'expérience et la position du mandataire, ou encore la responsabilité assumée, qui tend à s'accroître en fonction de la valeur litigieuse (ATF 117 II 282 consid. 4c p. 284; FELLMANN, Berner Kommentar, n° 413 ad art. 394 CO; HOFSTETTER, op. cit., p. 82 s.).
De longue date, il a été admis que le droit public cantonal (réservé par l'art. 6 CC) réglemente la rémunération des avocats pour leur activité devant les autorités judiciaires du canton (ATF 117 II 282 consid. 4a; 66 I 51 consid. 1 p. 56; 41 II 474 consid. 1a p. 481).
Faisant usage de la compétence concurrente conférée par l'art. 95 al. 1 Cst., la Confédération a adopté une loi fédérale sur la libre circulation des avocats (LLCA; RS 935.61), entrée en vigueur le 1er juin 2002 (JEAN-FRANÇOIS AUBERT, in Petit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, [Aubert/Mahon éd.] 2003, nos 6-7 ad art. 95 Cst.). L'art. 12 let. e LLCA s'oppose à ce que l'avocat, avant la conclusion d'une affaire
[vor Beendigung eines Rechtsstreits/prima della conclusione di una causa], passe une convention avec son client par laquelle ce dernier accepterait de faire dépendre les honoraires du résultat de l'affaire; il ne peut pas non plus s'engager à renoncer à ses honoraires en cas d'issue défavorable du procès. Pour le reste, la LLCA ne contient aucune règle sur la fixation des honoraires d'avocat. Aussi les cantons conservent-ils la faculté d'ériger des règles générales sur le calcul des honoraires (arrêt 2P.318/2006 et 2A.733/2006 du 27 juillet 2007 consid. 8.3.1 et la référence au Message du Conseil fédéral concernant la LLCA [FF 1999 p. 5355 s. pour la version française]; ATF 135 III 259 consid. 2.2 p. 261; arrêt 4A_481/2013 du 26 mars 2014 consid. 3.1; arrêt 2C_205/2019 du 26 novembre 2019 consid. 4.3; cf. les critiques de FELLMANN, Übersetztes Anwaltshonorar als Berufspflichtverletzung und das vermeintliche Recht der Kantone, das Anwaltshonorar zu regulieren, in Revue de l'Avocat 2020 p. 41 ss).
5.1.2. Dans le canton de Genève, l'art. 34 de la loi sur la profession d'avocat (LPAv; RS/GE E 6 10) a la teneur suivante:
"Les honoraires sont fixés par l'avocat lui-même compte tenu du travail qu'il a effectué, de la complexité et de l'importance de l'affaire, de la responsabilité qu'il a assumée, du résultat obtenu et de la situation de son client."
En 2009, la cour de céans a tranché un différend entre un client et son avocat genevois qui avaient contracté en août 2001 un mandat ayant duré quelque 6 ans et demi. L'homme de loi avait présenté des notes d'honoraires intermédiaires établies en fonction du temps de travail (634'420 fr.), puis avait brandi une facture finale de 2'127'000 fr. correspondant à 2,36 % de la somme recouvrée (remboursement d'un prêt). L'autorité de modération avait réduit la note finale à 2 % du résultat obtenu, soit 1'800'000 fr.
La cour de céans a rejeté le recours formé contre cette décision. Elle a constaté - en se référant notamment à l'art. 34 LPAv - l'existence d'un usage genevois consistant à prendre en compte le résultat obtenu pour déterminer le montant des honoraires. Dans la mesure où elle s'était appuyée sur un tel critère pour majorer la somme due, l'autorité de modération n'avait pas enfreint le droit fédéral (art. 394 al. 3 CO), ni appliqué arbitrairement l'art. 34 LPAv. La cour de céans a évoqué l'art. 12 let. e LLCA et constaté que les parties n'avaient conclu aucune convention sur les honoraires, de sorte qu'il n'y avait pas lieu d'examiner si le lien entre la rémunération et le résultat était admissible au regard de cette disposition: "toute référence au
pactum de quota litis ou au
pactum de palmario [étai]t ici hors de propos". Quant au grief dénonçant une prétendue violation du devoir d'information selon l'art. 12 let. i LLCA, il était irrecevable faute de motivation suffisante. L'autorité précédente avait relevé qu'une information incomplète n'induisait pas une réduction des honoraires, et la partie recourante n'expliquait pas en quoi le droit fédéral aurait ainsi été violé (arrêt 4A_561/2008 du 9 février 2009, partiellement publié à l'ATF 135 III 259).
La doctrine a jugé cette décision critiquable, en particulier sous l'angle du principe de la confiance et du devoir d'information de l'avocat (art. 12 let. i LLCA), quand bien même le mandat avait débuté avant l'entrée en vigueur de la LLCA (cf. DANIEL SCHWANDER, Erfolgshonorar ohne Zustimmung des Klienten? [...], in RJB 2009 p. 582 ss, spéc. p. 606 ss; SCHMID/RÜEGG, in RJB 2012 p. 946 ss; WALTER FELLMANN, in Kommentar zum Anwaltsgesetz, [Fellmann/Zindel éd.] 2e éd. 2011, no 123b ad art. 12 LLCA).
En 2013, une autre cour du Tribunal fédéral a connu d'un litige ayant pour toile de fond un séquestre obtenu par un avocat genevois en garantie de sa créance d'honoraires (art. 271 al. 1 ch. 4 LP). Celui-ci avait finalement facturé une prime de résultat de 150'000 fr., en sus de ses honoraires établis d'après le temps de travail (680'535 fr.). Statuant sous l'angle de l'arbitraire, l'autorité de céans a éconduit le débiteur séquestré en invoquant notamment l'usage genevois précité, respectivement une "pratique genevoise" permettant à l'avocat d'adresser à son client une facture complémentaire fondée sur le résultat dans la mesure où son intervention avait été déterminante pour celui-ci (arrêt 5A_582/2012 du 11 février 2013 consid. 5.5.1.2 et la référence à MICHEL VALTICOS, in Commentaire romand, Loi sur les avocats, 2010, n° 210 ad art. 12 LLCA).
5.1.3. En juin 2017, la cour de céans a rendu un arrêt de principe sur l'art. 12 let. e LLCA et le
pactum de palmario, défini comme un accord en vertu duquel l'avocat aura droit à une prime en cas de succès, en plus des honoraires dus indépendamment du résultat (ATF 143 III 600 consid. 2.4 p. 603 et consid. 2.7.1 p. 608; 135 III 259 consid. 2.3 p. 262). Il en découle notamment les éléments suivants:
- L'art. 12 let. e LLCA interdit de convenir que les honoraires consisteront en une quote-part du résultat de l'affaire (
pactum de quota litis). L'interdiction vaut-elle aussi lorsqu'une part seulement des honoraires dépend du résultat (
pactum de palmario) ? Ce dernier pacte était prohibé dans la plupart des cantons avant l'entrée en vigueur de la LLCA (ATF 143 précité, consid. 2.7.3 p. 610 s.). Les méthodes d'interprétation de la loi ne permettent pas de dégager une solution univoque. De façon générale, les honoraires de résultat sont problématiques à deux égards: d'une part, l'avocat risque de léser le client parce qu'il est mieux à même de mesurer l'issue d'un procès; d'autre part, il risque de perdre son indépendance du fait de son intéressement au résultat du procès (consid. 2.7.4 p. 611). Pour prévenir ces deux dangers, il n'est pas nécessaire d'interdire le
pactum de palmario; il suffit de l'assortir de limites, qui sont de trois sortes (consid. 2.7.5 p. 614) :
- P
remièrement, l'avocat doit toucher en tous les cas - indépendamment de l'issue de la procédure - un honoraire de base qui lui permette non seulement de couvrir ses coûts de revient, mais aussi d'obtenir un profit raisonnable (
ein angemessener Gewinn).
-
Deuxièmement, la prime de succès, par rapport à l'honoraire de base, ne doit pas être à ce point élevée qu'elle mette en cause l'indépendance de l'avocat et crée un risque de lésion. Un plafond ne saurait être fixé. Toutefois, la limite est clairement franchie lorsque la prime de succès excède l'honoraire de base.
-
Troisièmement, le pacte doit être conclu soit au début de la relation contractuelle, soit après la conclusion de l'affaire, mais pas en cours de mandat. Ces limites temporelles découlent d'une part de l'art. 12 let. i LLCA, qui impose à l'avocat acceptant un mandat d'informer son client des modalités de facturation, d'autre part de la nécessité d'endiguer le risque de lésion.
Ces limites ont suscité commentaires et critiques (cf. notamment FELLMANN/HÄFLIGER, in Revue de l'avocat 2017 p. 502 ss; RAUBER/NATER, in RSJ 2017 p. 605 ss; BENOÎT CHAPPUIS, De l'interdiction de la multidisciplinarité au
pactum de palmario [...], in La pratique contractuelle 2018 p. 106 ss; FRANÇOIS BOHNET, in RSPC 2017 p. 519 s.; SCHUMACHER/DALLAFIOR, in PJA 2017 p. 1287 ss). Elles ont été confirmées ultérieurement (cf. en particulier l'arrêt précité 2C_205/2019 consid. 3.2).
Les principes applicables étant posés, il sied maintenant de présenter l'analyse de l'autorité précédente.
5.2. La Cour de justice a souligné que les parties n'avaient conclu aucune convention sur les honoraires de l'avocat.
S'inscrivant dans la ligne des arrêts précités rendus en 2009 et 2013 (consid. 5.1.2
supra), la Cour a fait état d'un usage genevois selon lequel le résultat obtenu pouvait être pris en considération pour déterminer le montant des honoraires; elle a ajouté qu'une prime de succès pouvait être facturée au client, à condition toutefois que l'activité déployée par l'avocat ait été déterminante dans le résultat obtenu.
Cela étant, la Cour genevoise constatait que l'avocat n'avait pas informé la mandante de cet usage. Il paraissait plus que critiquable qu'un avocat puisse ajouter une prime de succès sans que son client n'ait reçu la moindre information sur ce point au début de la relation contractuelle. Cette déficience était d'autant plus blâmable que le résultat ne faisait pratiquement aucun doute dans le cas concret. Imposer unilatéralement en fin de mandat une prime de succès dépassant le double des honoraires facturés au tarif implicitement admis par le client sur la base de notes d'honoraires intermédiaires heurtait gravement le sentiment de justice. Pour ces motifs déjà, la décision du premier juge [déniant une prime de succès à l'avocat, réd.] était justifiée.
Au demeurant, l'avocat ne contestait pas que la perception d'une prime de succès fût possible uniquement lorsque l'activité déployée avait été déterminante dans le résultat atteint. Or, cette condition n'était pas réalisée. L'avocat avait principalement établi des demandes de séquestre civil et des réquisitions de poursuite, et rédigé de nombreuses correspondances en vue notamment de faire accélérer la procédure de recouvrement et de répondre aux interrogations des clients de la mandante. Son travail n'avait pas été particulièrement complexe; il était dépourvu de risques particuliers, les fonds en question étant d'ores et déjà localisés et bloqués, tandis que les ayants droit économiques de ceux-ci étaient reconnus par plusieurs jugements.
Si l'on additionnait la prime revendiquée par l'avocat aux honoraires déjà facturés, le tarif horaire résultant de ce total ascendait à quelque 1'525 fr., alors que la moitié des heures de travail (sur un total de 481,5 heures) avaient été accomplies par un collaborateur ou un stagiaire. Un tel tarif serait disproportionné au regard de l'activité déployée. La rémunération déjà facturée (213'730 fr., frais et débours en sus), correspondant à quelque 1,4 % de la somme à recouvrer, était déjà en adéquation avec les prestations fournies et les risques encourus, d'autant plus qu'aux dires de l'autorité de modération, certaines prestations semblaient avoir été comptabilisées à double, tandis que d'autres avaient pris un temps anormalement long, les tarifs horaires appliqués se situant dans le haut de l'échelle. En définitive, il n'y avait pas lieu d'ajouter une prime de succès au montant déjà important facturé sur la base du taux horaire, pour récompenser un résultat dont aucun élément ne permettait de douter.
5.3. Pour les motifs qui vont être précisés ci-dessous, on ne saurait reprocher à l'autorité précédente d'avoir enfreint le droit fédéral en considérant que l'avocat ne pouvait prétendre à aucune prime de succès.
Tout d'abord, les critiques et commentaires de la doctrine concernant l'ATF 135 III 259 méritent d'être pris en considération. En particulier, DANIEL SCHWANDER a contesté qu'on puisse se dispenser d'examiner l'admissibilité de la prime de succès à l'aune de l'art. 12 let. e LLCA sous prétexte que cette disposition présuppose un accord des parties qui faisait défaut dans le cas jugé (ATF précité, consid. 2.3
in fine). Cet auteur concède que l'interdiction énoncée à l'art. 12 let. e LLCA vise nommément des
conventions des parties, mais cela ne signifie pas que le droit cantonal puisse habiliter un avocat à s'attribuer unilatéralement un honoraire de résultat que la LLCA interdit de prévoir dans un accord contractuel (SCHWANDER, op. cit., p. 587). Cette analyse ne peut qu'être approuvée. Le droit public fédéral, dérogeant au principe de l'autonomie contractuelle (cf. art. 394 al. 3 CO), prohibe l'honoraire de résultat revêtant les traits d'un
pactum de quota litis afin de garantir l'indépendance de l'avocat et protéger le client d'une éventuelle lésion; la jurisprudence en a déduit une admissibilité restreinte du
pactum de palmario, celui-ci étant sujet à trois conditions. Le législateur cantonal doit logiquement agir dans le respect du droit public fédéral et des principes développés par la jurisprudence fédérale; il ne saurait en contredire le sens et l'esprit (BOHNET ET ALII, in Commentaire romand, op. cit., n° 47 ad art. 1 LLCA; SCHMID/RÜEGG, op. cit., p. 948 let. b
in fine). De la même manière, un usage au sens de l'art. 394 al. 3 CO qui contreviendrait au droit fédéral ne saurait être pris en considération pour fixer des honoraires.
Par ailleurs, la doctrine a insisté à juste titre sur le devoir d'information de l'avocat découlant de l'art. 12 let. i LLCA (qu'impose aussi le droit du mandat). Dans son arrêt de principe concernant le
pactum de palmario, la cour de céans a en effet souligné que ce devoir contribuait à éviter le risque de lésion du client (ATF 143 III 600 consid. 2.7.5 p. 614). Cette même obligation a été prise en compte pour fixer les limites temporelles à la conclusion du
pactum
de palmario, la cour renvoyant à un arrêt relatif à l'honoraire forfaitaire (Pauschalhonorar; arrêt 2C_247/2010 du 16 février 2011); cette décision précise entre autres qu'il s'agit d'un mode de rémunération spécial, encore prohibé par les cantons il y a peu et nécessitant un accord exprès (arrêt précité, consid. 5.4).
Dans le même ordre d'idées, un auteur soutient que la violation du devoir d'informer ne doit certes pas entraîner la suppression des honoraires lorsque ceux-ci sont établis d'après le temps consacré, mais que tel devrait en revanche être le cas lorsque l'avocat prétend à une prime de succès (SCHWANDER, op. cit., p. 610). D'autres insistent sur l'absolue nécessité de donner des explications circonstanciées au client sur la prime de succès (FELLMANN, op. cit., n° 123a ad art. 12 LLCA), ou admettent plus généralement qu'une violation du devoir d'information peut influer sur le montant de la rémunération (BOHNET/MARTENET, op. cit., no 1787; cf. aussi VALTICOS, op. cit., n° 294 ad art. 12 LLCA).
Il découle de ces considérations que si l'avocat entend pouvoir encaisser une prime de succès en sus des honoraires indépendants du résultat, il doit en informer le client lorsqu'il accepte le mandat (cf. art. 12 let. i LLCA), en précisant notamment quel élément ("résultat") justifiera la perception de cette prime. Une telle exigence revient à requérir un accord des parties. En effet, à compter du moment où l'avocat s'est conformé à son devoir d'informer le client et que celui-ci n'a pas réagi, il y a accord tacite. Cette solution se justifie au regard des particularités de cette forme d'honoraire, qui n'est admissible que dans certaines limites vu les motifs sous-tendant l'art. 12 let. e LLCA.
Aussi est-ce à juste titre que la Cour de justice a dénié le droit à la perception d'une telle prime, sachant qu'un accord exprès ou tacite des parties faisait défaut (sur le constat factuel de l'omission d'informer la mandante, cf. consid. 5.4
infra).
L'art. 34 LPAv se prête clairement à une interprétation compatible avec le droit fédéral tel qu'il a été précisé dans l'ATF 143 III 600 et dans les réflexions qui précèdent. Si cette règle de droit cantonal habilite l'avocat à fixer
lui-même les honoraires en mentionnant le
résultat obtenu, cela ne signifie pas nécessairement qu'elle légalise la facturation d'une prime de succès imposée unilatéralement. Elle entend préciser que l'avocat établit sa note d'honoraires sans être lié à un tarif (ATF 93 I 116 consid. 5b p. 122 et arrêt 4P.256/2005 du 18 janvier 2006 consid. 3.3) et énonce les principes généraux qui doivent gouverner la fixation des honoraires, le résultat obtenu étant un critère parmi d'autres - qui ne doit du reste pas forcément être pris en compte (arrêt 4P.342/2006 du 5 mars 2007 consid. 4.1.2).
Pour le surplus, on relèvera que l'usage au sens de l'art. 394 al. 3 CO suppose une pratique généralisée recueillant l'adhésion de tous les cercles intéressés et s'inscrivant sur un certain temps (FELLMANN, op. cit., nos 375 ss et 409 ss ad art. 394 CO). On ne saurait déjà parler d'usage sur la base d'une décision de l'autorité de modération ayant validé la perception d'une prime de succès par l'avocat (cf. VALTICOS, op. cit., n° 210 ad art. 12 LLCA, cité dans l'arrêt 5A_582/2012 consid. 5.5.1.2, lequel mentionne une décision de l'autorité de modération). En tout état de cause, des honoraires ne sauraient être établis sur la base d'un usage qui contreviendrait au droit fédéral.
5.4. Dans le cas concret, la Cour de justice a constaté que l'avocat genevois n'avait pas informé sa cliente de l'"usage genevois" permettant de prélever une prime de succès. L'avocat/recourant dénonce à cet égard des constatations manifestement inexactes.
Les juges genevois auraient indûment écarté la pièce 41, soit un courriel du 20 août 2010 adressé à l'intimée dans le cadre d'un autre mandat, dont il ressortirait que celle-ci était informée de la possibilité de percevoir un
success feeen fin de mandat. L'avocat avait produit ce document le 2 mars 2018, en réaction à une audition effectuée le 31 janvier 2018, au cours de laquelle l'administrateur de l'intimée avait dit ignorer l'existence d'une pratique de
success fee dans le canton de Genève. Tenant compte de l'intervalle entre ces deux dates, les juges genevois ont considéré que l'avocat avait tardé à remettre le document, ce qui les dispensait d'examiner s'il était encore en droit d'introduire des faits nouveaux à ce stade de la procédure (art. 229 CPC).
Le simple fait d'avoir évoqué une prime de succès dans un autre contexte dont on ignore les spécificités ne signifie pas encore que l'avocat aurait satisfait à son devoir d'information dans le mandat litigieux. Qui plus est, l'avocat ne démontre pas avoir réalisé les conditions posées par l' art. 229 al. 1 et 2 CPC pour l'introduction d'éléments nouveaux. Dans la mesure où il était l'objet d'une action en "restitution" de 520'000 fr. fondée sur l'art. 400 al. 1 CO et qu'il invoquait à l'appui de ses conclusions libératoires une créance d'honoraires consistant en une prime de succès, il devait alléguer et prouver tous les éléments censés fonder celle-ci, en particulier le respect du devoir d'information. Or, il ne prétend pas avoir cherché à introduire des
nova lors des débats d'instruction ou à l'ouverture des débats principaux, et ne démontre pas davantage avoir fait preuve de la diligence requise en attendant l'audition de l'organe de l'intimée pour avoir l'idée de fournir une pièce nouvelle.
5.5. Ayant constaté à bon escient que l'avocat ne pouvait prétendre à une prime de succès de 520'000 fr., la Cour de justice a encore examiné si la rémunération déjà perçue, liée au tarif horaire, était en adéquation avec les prestations fournies et les risques encourus. Elle a répondu par l'affirmative - ce qui ne prête pas le flanc à la critique.
5.5.1. Le recourant lui reproche d'avoir largement minimisé l'importance de son intervention dans le recouvrement des fonds, en établissant les faits de manière arbitraire. Plus précisément, la Cour de justice aurait indûment refusé de faire entendre divers témoins (plaignants américains et ancienne collaboratrice) sur ses allégués 33, 47, 61 et 62.
Le grief est infondé. Comme l'a souligné la cour d'appel, l'allégué 33 concernait la légitimation active de B.________ Ltd (il exposait en substance que les clients américains, et non B.________ Ltd, avaient formellement mandaté l'avocat pour qu'il procède au recouvrement de leurs fonds). On ne discerne ainsi pas de pertinence avec la question litigieuse. Quant aux allégués 47 et 62, ils invoquaient des contacts fréquents avec les plaignants américains; or, aux dires de la Cour de justice, un tel fait résultait déjà de nombreux courriels produits. Par appréciation anticipée, il était concevable de renoncer aux témoignages requis sans pour autant verser dans l'arbitraire. On relèvera enfin que le recourant ne s'est pas prévalu de l'allégué 61 devant l'autorité précédente, lequel ne lui serait au demeurant d'aucun secours: il y affirme simplement que l'avocat s'est focalisé sur la levée des séquestres pénaux et l'obtention d'une saisie définitive sur lesdits fonds.
5.5.2. Examinant le rôle exercé par l'avocat, la Cour de justice a concédé que le montant à recouvrer était très élevé (15,5 millions de francs), les honoraires facturés (213'730 fr.) représentant 1,4 % de la somme obtenue. Elle a cependant expliqué de façon circonstanciée pour quelles raisons l'enjeu et le résultat obtenu devaient être relativisés dans les circonstances d'espèce, alors que l'avocat pouvait s'appuyer sur des décisions judiciaires étrangères et intervenait dans une phase relevant de l'exécution. Cela n'excluait naturellement pas des complications et rebondissements, mais dans le cas concret, une rémunération au temps de travail, multiplié par un tarif horaire qualifié de haut, permettait d'intégrer ces éléments à satisfaction. On relèvera encore que le recourant ne dit mot du reproche qui lui est fait d'avoir facturé à double certaines opérations, respectivement d'avoir comptabilisé un temps anormalement long pour certains actes.
Le recourant voudrait s'appuyer sur une Circulaire du 4 juin 1997 émise par l'ODAGE, selon laquelle les honoraires peuvent être fixés soit d'après un taux compris entre 2 % et 10 % de la valeur litigieuse, soit d'après une base horaire avec une majoration selon un pourcentage croissant de la valeur litigieuse. Force est de constater que l'arrêt attaqué n'évoque pas cette circulaire qui est largement antérieure au mandat (décembre 2009-juillet 2011). Le site Internet de l'ODAGE précise même que depuis une dizaine d'années, le secrétariat de la Commission de la concurrence (ComCo) juge contraire à la Loi sur les cartels toute recommandation sur les honoraires émanant des ordres cantonaux d'avocats. Ces éléments suffisent déjà à clore la discussion. Au demeurant, l'existence d'un tarif usuel au sein d'une branche n'empêcherait pas de s'en écarter dans la mesure où son application conduirait à une rémunération sortant des limites du raisonnable (FELLMANN, Berner Kommentar, n° 419 s. ad art. 394 CO; HOFSTETTER, op. cit., p. 82 ch. 5
in fine).
5.5.3. En définitive, l'autorité précédente n'a pas enfreint le droit fédéral en concluant que la rémunération déjà perçue était "en adéquation avec les prestations fournies", c'est-à-dire objectivement proportionnée (
objektiv angemessen) à celles-ci. Le recourant échoue à démontrer que la cour d'appel se serait fondée sur des critères erronés; on ne discerne pas davantage un abus ou un excès dans le large pouvoir d'appréciation dont elle disposait.
Ce constat scelle définitivement le sort d'une prétention en complément d'honoraires, étant précisé que le recourant ne formule pas d'autres griefs ( art. 42 al. 1 et 2 LTF ; ATF 140 III 115 consid. 2 p. 116).
6.
En définitive, le recours doit être rejeté aux frais de son auteur, qui versera à son adverse partie une indemnité de dépens (art. 66 al. 1, art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 8'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 9'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 12 novembre 2020
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La présidente : Kiss
La greffière : Monti