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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
4A_101/2020  
 
 
Arrêt du 14 avril 2021  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Hohl, Présidente, Niquille et May Canellas. 
Greffière : Mme Godat Zimmermann. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Nicolas Cuénoud, 
recourant, 
 
contre  
 
B1.________ SA 
(anciennement B2.________ SA), 
représentée par Me Guy Stanislas, 
intimée. 
 
Objet 
contrat de travail; plan social; retraite anticipée, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2020 par la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève (C/23625/2017-5 CAPH/10/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 1er avril 1987, A.________ (ci-après: l'employé) a été engagé par B3.________ SA, une filiale suisse du groupe pharmaceutique français B.________, dont les actifs et passifs seront repris par B1.________ SA.  
En 1999, il a intégré une autre filiale suisse, B2.________ SA, afin de gérer les licences du groupe. Il était alors à la tête d'une équipe de quatre personnes, sous la direction de C.________. 
A partir de 2010, l'employé était également en charge d'une équipe de trois personnes à Paris, sous la direction de D.________. Depuis lors, il a travaillé alternativement à Genève, lieu de son domicile, et à Paris. 
 
A.b. Le groupe B.________ a connu diverses restructurations.  
En 2016, voire déjà en 2015, il a été décidé de délocaliser la gestion des licences du site de Genève au site de Singapour. L'activité commerciale de B2.________ SA devait ainsi cesser au 31 décembre 2016. 
Un plan social a été mis en place. Il prévoyait une procédure interne permettant aux employés dont le poste était supprimé de bénéficier d'un reclassement et, si aucun poste de remplacement n'était envisageable, de percevoir une indemnité de départ correspondant à un mois de salaire par année de service avec un minimum de 3 mois et un maximum de 36 mois. Les employés de plus de 58 ans perdant leur emploi bénéficiaient en outre d'un pont AVS financé par B2.________ SA jusqu'à l'âge de 62 ans pour les femmes et de 63 ans pour les hommes. 
Les employés genevois subordonnés à A.________ ont bénéficié du plan social, qui leur a été communiqué début septembre 2016. E.________ a pu poursuivre son activité au sein de B1.________ SA. F.________, âgé de moins de 58 ans lors de son licenciement le 6 septembre 2016, a perçu une indemnité de départ. G.________ et H.________, âgées de plus de 58 ans lorsque leurs contrats ont été résiliés le 20 septembre 2016, respectivement le 30 novembre 2016, ont bénéficié d'un pont AVS en sus d'une indemnité de départ. 
Les lettres de résiliation, signées par C.________ et A.________, indiquaient la cause de la fin des rapports de travail ainsi que les conditions de départ (indemnité de licenciement, rente-pont AVS pour les employées âgées de plus de 58 ans et rachat possible au sein de la caisse de pension); les trois employés licenciés étaient invités à prendre contact avec I.________, directrice des ressources humaines, afin de convenir d'un entretien en vue des formalités de départ. Les intéressés ont été libérés de l'obligation de travailler le 1er décembre 2016 pour H.________, le 1er janvier 2017 pour les deux autres, soit trois mois avant la fin de leurs contrats de travail respectifs. 
 
A.c. Pour sa part, A.________ a quitté l'entreprise le 31 décembre 2016. Les circonstances ayant entouré son départ sont litigieuses.  
Le 18 août 2016, l'employé s'est adressé à C.________. Il l'informait que D.________ avait obtenu un "  package " pour l'équipe de B2.________ SA sans solution de reclassement interne, à savoir environ 30 mois de salaire et le pont AVS pour G.________, environ 20 mois de salaire et le pont AVS pour H.________ et environ 23 mois de salaire pour F.________. Pour sa part, l'employé s'était vu accorder le pont AVS, mais souhaitait s'entretenir avec C.________ à propos de son "  package ".  
Par courriel du 31 août 2016, D.________ a précisé à l'employé sa position, qui était la suivante: "J'ai obtenu l'accord de la DRH sur ce que tu m'avais demandé initialement. C'est bien toi qui, «n'ayant droit à rien», a formulé la demande autour du pont AVS. (...) Je n'ai pas l'intention, maintenant que ceci est acquis, de m'impliquer dans une inflation de revendications auprès de la RH. Ça ne serait pas crédible (...). Je t'ai déjà dit que je ne supporterai pas ton approche (...). Je ne me prononce pas sur le bien-fondé ou non de ta nouvelle demande et ne m'opposerai évidemment pas à une issue qui te serait plus favorable." 
Par courrier du 26 septembre 2016 adressé à I.________, l'employé "a confirmé" la fin du contrat au 31 décembre 2016, indiquant qu'il ne pouvait envisager de poursuivre son activité professionnelle au sein de B.________ à Paris, dans la mesure où, à plus de 58 ans et avec "ses problèmes de hanches", il lui serait trop difficile de passer encore plus de temps loin de chez lui. 
Le même jour, dans un courrier signé tant par C.________ que par la directrice du service juridique des filiales suisses de B.________ et contresigné par A.________, B2.________ SA "a confirmé" son engagement de verser à l'employé un montant de 115'150 fr., équivalent à un pont AVS, à condition qu'il parte en retraite anticipée au plus tard le 31 décembre 2016, un départ différé ne lui donnant plus droit au pont AVS. La lettre était similaire à celles envoyées aux subalternes de l'employé en ce qui concerne l'invitation à prendre contact avec I.________ et la possibilité d'un rachat au sein de la caisse de pension; en revanche, elle contenait un paragraphe supplémentaire relatif aux actions B2.________ SA, qui continueraient de "vester" comme prévu en 2017/2018 et restaient acquises à l'employé. 
Environ six mois après avoir quitté l'entreprise, l'employé a réclamé à B2.________ SA la somme de 654'845 fr.10, correspondant à l'indemnité de départ qui, à son avis, lui restait due au titre du plan social. 
 
B.   
Par demande du 5 octobre 2017, portée le 1er février 2018 devant le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève après l'échec de la conciliation, A.________ a assigné B2.________ SA (ci-après: l'employeuse) en paiement de 654'845 fr.10 plus intérêts. 
Par jugement du 17 avril 2019, le tribunal a débouté l'employé de ses conclusions. 
Statuant le 16 janvier 2020 sur appel de A.________, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé ce jugement. En substance, elle a considéré que l'employé avait démissionné de son poste afin de prendre une retraite anticipée de sorte qu'il n'était pas éligible au plan social mis en place par l'employeuse. Elle a ainsi écarté la thèse du congé-modification, selon laquelle l'employé aurait été licencié ensuite de son refus de travailler à 100% à Paris. 
 
C.   
A.________ interjette un recours en matière civile contre l'arrêt cantonal. A titre principal, il reprend ses conclusions condamnatoires telles que formulées dans sa demande. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à la cour cantonale. 
Dans sa réponse, B2.________ SA propose le rejet du recours. 
Le recourant a encore déposé des observations, suivies d'une ultime détermination de l'intimée. 
Pour sa part, la cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
Après le dépôt du recours, B1.________ SA a repris les actifs et passifs de B2.________ SA, laquelle a été radiée par suite de fusion. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par le tribunal supérieur institué comme autorité cantonale de dernière instance, lequel a statué sur recours (art. 75 LTF). La cause atteint la valeur litigieuse de 15'000 fr. ouvrant le recours en matière civile dans les affaires pécuniaires relevant du droit du travail (art. 74 al. 1 let. a LTF). Le recourant, dont les conclusions condamnatoires ont été rejetées, a la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). Déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, le recours est en principe recevable, sous réserve de l'examen des griefs particuliers. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1; 136 II 304 consid. 2.4). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 86 consid. 2, 115 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4; 139 I 229 consid. 2.2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). "Manifestement inexactes" signifie ici "arbitraires" (ATF 143 I 310 consid. 2.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 264 consid. 2.3). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, la partie doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes en conformité avec les règles de procédure les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
 
3.  
 
3.1. Selon l'arrêt attaqué, le recourant a démissionné pour le 31 décembre 2016 afin de prendre une retraite anticipée et a obtenu, après négociation, un montant de 115'150 fr. à titre de pont AVS. La cour cantonale a jugé qu'en contresignant la lettre du 26 septembre 2016 de l'employeuse, l'employé avait accepté les conditions de son départ et ne pouvait revenir sur son accord en réclamant en sus l'indemnité prévue par le plan social appliqué aux collaborateurs de son département. D'une part, le recourant ne pouvait de bonne foi plaider l'erreur sur les mécanismes du plan social, dès lors qu'il avait été associé à l'élaboration de celui-ci et avait lui-même veillé à sa bonne application à ses subordonnés. D'autre part, l'employé ne pouvait se prévaloir du principe d'égalité de traitement, car les circonstances entourant son départ différaient de celles ayant présidé au licenciement de ceux qui avaient bénéficié du plan social. La cour cantonale a écarté la thèse du congé-modification avancée par le recourant, car il n'était pas établi que l'employé avait reçu une proposition ferme de nouvelle affectation à plein temps à Paris, ni que ce changement constituait une condition résolutoire au maintien du contrat de travail.  
 
3.2. Invoquant l'art. 9 Cst., le recourant reproche tout d'abord à la cour cantonale d'avoir apprécié les preuves de manière arbitraire en retenant que l'intimée ne lui avait fait aucune proposition ferme de poursuivre ses activités à 100% à Paris. L'existence d'une telle offre, supposant une modification importante des rapports de travail, serait déterminante pour le sort du litige. A suivre le recourant, en refusant la proposition de travailler à plein temps à Paris dans son courrier du 26 septembre 2016, il aurait en effet pris acte de la fin des rapports de travail décidée par l'employeuse, puisque son poste à Genève disparaissait. La cour cantonale aurait ainsi violé le droit fédéral en interprétant cette lettre comme une démission de l'employé, alors que le contrat de travail aurait pris fin dans le contexte d'un congé-modification.  
Dès lors que, selon lui, il a été licencié à la suite d'une restructuration, le recourant considère avoir droit aux prestations du plan social mis en oeuvre par l'employeuse en 2016. Il invoque à cet égard l'égalité de traitement par rapport aux autres employés de son département, ainsi que par rapport à tous les collaborateurs de la filiale suisse qui auraient bénéficié d'un plan social lors des diverses restructurations échelonnées depuis 20 ans. 
Le recourant conteste au surplus avoir renoncé au plan social en convenant du pont AVS avec l'employeuse. Il relève que le pont AVS ne lui a pas été accordé à titre d'indemnité de départ, mais à titre de "  stay on bonus ", afin qu'il accompagne le démantèlement de B2.________ SA jusqu'à la fin de l'année 2016. Il ajoute que les négociations relatives à ce pont AVS ont eu lieu avant qu'il ne demande en juillet-août 2016 à bénéficier du plan social, à une époque où il était encore dans l'erreur de croire qu'il n'avait pas droit au plan social.  
 
4.   
Le recourant fonde sa prétention à une indemnité de départ sur le plan social mis en place en 2016 à l'occasion de la cessation de l'activité commerciale de l'employeuse au 31 décembre 2016. 
 
4.1. Rangé parmi les mesures destinées à protéger les travailleurs dans le cadre d'un licenciement collectif (art. 335d ss CO), le plan social est défini à l'art. 335h al. 1 CO, entré en vigueur le 1er janvier 2014, comme une convention par laquelle l'employeur et les travailleurs fixent les moyens d'éviter les licenciements, d'en limiter le nombre ou d'en atténuer les conséquences. Volontairement brève et générale (Message du 8 septembre 2010 relatif à une modification de la LP, FF 2010 5912), cette description correspond à la notion dégagée précédemment par la jurisprudence, laquelle reste applicable pour déterminer les formes possibles, la teneur et les limites d'un plan social (WYLER/HEINZER, Droit du travail, 4e éd. 2019, p. 688; JEAN CHRISTOPHE SCHWAAB, Le licenciement collectif, 2018, p. 104).  
Le plan social peut prendre diverses formes juridiques. Lorsqu'il est conclu entre l'employeur et un syndicat, il est considéré comme une forme particulière de convention collective de travail; les travailleurs peuvent se prévaloir directement des droits conférés par le plan social, qui revêt ainsi un caractère normatif (ATF 133 III 213 consid. 4.3.1; 132 III 32 consid. 6.1; 130 V 18 consid. 2.3). Lorsqu'il est passé avec la représentation des travailleurs, le plan social a également un effet normatif (cf. ATF 133 III 213 consid. 4.3.2; arrêt 4A_610/2012 du 28 février 2013 consid. 2.2; ISABELLE WILDHABER, in Arbeitsrecht, Portmann et von Kaenel éd., 2018, n° 20.149 p. 861). Tel n'est pas le cas du plan social négocié et conclu directement avec les travailleurs, lequel se présente comme un accord bilatéral avec chaque travailleur, devenant partie intégrante du contrat individuel de travail (cf. arrêt 4A_610/2012 précité consid. 2.2; WILDHABER, op. cit., n° 20.149 p. 861; SCHWAAB, op. cit., p. 107). Lorsque le plan social ne résulte pas d'une négociation, mais d'une décision unilatérale de l'employeur, il s'agit également d'une offre qui, si elle est acceptée par le travailleur, est incorporée au contrat individuel de travail (ATF 133 III 213 consid. 4.3.3; 132 III 32 consid. 6.1); si le plan social prévoit des prestations en faveur du travailleur sans contre-partie, l'acceptation pourra intervenir tacitement (art. 6 CO) (SCHWAAB, op. cit., p. 107). 
 
4.2. En l'espèce, aucun élément ne laisse supposer que le plan social en jeu revêt une valeur normative. Il n'a pas été conclu avec un syndicat ni avec une représentation du personnel. Selon l'état de fait arrêté par la cour cantonale, l'employeuse a établi de son propre chef en 2016 un plan social pour les employés dont le poste était supprimé en raison de la délocalisation de la gestion des licences du site de Genève à celui de Singapour. Les prestations prévues pour les collaborateurs sans reclassement possible consistaient en une indemnité de départ en fonction de l'ancienneté d'un maximum de 36 mois, à laquelle s'ajoutait un pont AVS pour les employés de plus de 58 ans.  
Début septembre 2016, l'employeuse a communiqué les prestations prévues par le plan social aux trois subordonnés du recourant pour lesquels aucun autre poste n'était envisageable et qui allaient être licenciés. La volonté de s'obliger de l'employeuse n'est pas mise en doute. C'est dire qu'en acceptant tacitement l'offre de l'employeuse, les trois intéressés ont conclu un contrat, les clauses relatives aux indemnités susmentionnées étant incorporées à leur contrat de travail. 
L'intimée n'a pas adressé la même offre au recourant, qui n'a pas été dans la situation de l'accepter fût-ce tacitement. L'employé ne peut donc pas fonder sa prétention à l'indemnité de départ directement sur le plan social, qui ne lie pas les parties à la présente procédure. 
 
5.   
Parallèlement à la communication du plan social aux subordonnés genevois du recourant, l'intimée a soumis une offre différente à l'employé, alors âgé de plus de 58 ans: la promesse d'un pont AVS moyennant un départ en retraite anticipée au plus tard le 31 décembre 2016. 
La question est de savoir si le recourant peut se prévaloir d'une inégalité de traitement discriminatoire pour ne pas s'être vu proposer, en sus du pont AVS, une indemnité de départ calculée selon l'ancienneté. 
 
5.1. De manière générale, le principe de la liberté contractuelle prévaut sur le principe de l'égalité de traitement dans le contrat de travail (cf. ATF 129 III 276 consid. 3.1). Il n'est toutefois pas exclu que certaines formes de discrimination puissent constituer une violation par l'employeur de son obligation de respecter la personnalité du travailleur (cf. arrêt 4A_610/2012 précité consid. 2.4). Ainsi, un plan social ne doit pas établir de différences sur la base de critères inacceptables lorsqu'il fixe les catégories de travailleurs ayant droit aux prestations offertes/convenues ou à certaines de ces prestations; l'égalité de traitement trouve ses limites dans l'interdiction de l'arbitraire et l'interdiction de la discrimination (FF 2010 5912; WYLER/HEINZER, op. cit., p. 692).  
 
5.2. En l'espèce, le recourant a quitté l'entreprise dans des circonstances différentes de celles qui ont entouré le départ de ses trois subordonnés.  
Ces derniers ont été licenciés parce que leur poste était supprimé et qu'un reclassement à l'interne n'était pas possible. 
A la même période, le recourant, qui partageait alors son temps de travail entre Genève et Paris, a pris une retraite anticipée. A cet égard, il ne ressort pas des constatations de la cour cantonale que le poste même de l'employé était supprimé à la suite de la restructuration. 
La thèse du licenciement, plus précisément du congé-modification, ne résiste pas à l'examen. Contrairement à ce que l'employé soutient, la cour cantonale a retenu sans arbitraire qu'il n'avait reçu aucune proposition ferme de nouvelle affectation à plein temps à Paris. Les deux témoignages indirects invoqués par le recourant ne permettent pas de conclure que l'intimée aurait fait plus qu'évoquer la possibilité pour l'employé de poursuivre ses activités à Paris. L'un des témoins en cause a du reste déclaré expressément qu'il ignorait si, après sa discussion avec le supérieur du recourant à Paris, l'employeuse avait réellement formulé une proposition ferme à ce sujet. Faute d'une offre de modification des rapports de travail, il n'y a pas lieu de se demander si un refus de la part de l'employé mettait ipso facto un terme au contrat. 
En réalité, la question de la poursuite des rapports de travail à Paris ne s'est jamais sérieusement posée. En effet, le recourant, avant de chercher à obtenir en plus une indemnité de départ en été 2016, a négocié d'emblée un pont AVS, ce qui suppose qu'il entendait arrêter de travailler. Il n'est pas contesté au surplus que ce pont AVS a été présenté comme une sorte de "  stay on bonus ", le recourant acceptant de rester jusqu'au 31 décembre 2016 afin d'accompagner les collaborateurs dans la première phase de la restructuration. Cet élément confirme la volonté du recourant de partir en pré-retraite en 2016.  
Dans sa lettre du 26 septembre 2016, l'employeuse offre de verser le pont AVS au recourant à condition que celui-ci parte en retraite anticipée au plus tard le 31 décembre 2016. L'employé a accepté cette offre en la contresignant; le même jour, il a confirmé par écrit à l'employeuse la fin du contrat au 31 décembre 2016, ce qui ne peut se comprendre que comme une démission à cette date. 
Comme la cour cantonale l'a jugé à bon droit, les parties ont négocié les conditions de départ en pré-retraite du recourant. En définitive, celui-ci n'a pas obtenu l'indemnité de départ qu'il avait réclamée dans un second temps et que l'employeuse avait accordée à ses subordonnés. Ces derniers ont perdu leur emploi contre leur volonté, en raison de la restructuration, alors que le recourant - qui se préparait à la retraite anticipée par des rachats depuis 2010 et était lassé de partager son temps de travail entre Paris et Genève - a choisi de prendre une retraite anticipée, à l'occasion de la restructuration. Que l'employeuse ait traité différemment ces deux situations ne consacre manifestement aucune inégalité discriminatoire. 
 
6.   
En conclusion, la prétention du recourant à une indemnité de départ calculée selon le plan social est dépourvue de fondement. Aucune violation du droit fédéral ne peut être imputée à la cour cantonale. Le recours doit être rejeté. 
 
7.   
Le recourant, qui succombe, prendra à sa charge les frais judiciaires (art. 66 al. LTF) et versera des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 8'500 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 9'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 14 avril 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
La Greffière : Godat Zimmermann