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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
8C_238/2018  
 
 
Arrêt du 22 octobre 2018  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Maillard, Président, 
Frésard et Wirthlin. 
Greffière : Mme Castella. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Guérin de Werra, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (réduction des prestations; participation à une rixe), 
 
recours contre le jugement de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais du 22 février 2018 (S2 17 56). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________, né en 1978, travaillait comme aide menuisier au service de B.________ SA. A ce titre, il était assuré obligatoirement contre le risque d'accident auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). 
Par déclaration d'accident du 20 septembre 2016, l'employeur a annoncé à la CNA que le 3 septembre précédent, vers 23h50, à la sortie d'un bar, un individu impliqué dans une bagarre avait poussé A.________, de sorte que celui-ci était tombé et s'était fracturé la cheville droite. En raison de l'accident, A.________ a été hospitalisé jusqu'au 14 septembre 2016 et a subi une incapacité totale de travail. La CNA a pris en charge le cas. 
Dans un formulaire rempli le 30 septembre 2016, l'assuré a expliqué qu'une bagarre avait éclaté alors qu'il était en train de rentrer chez lui; il avait tenté de séparer les protagonistes qui l'ont poussé, ce qui l'a fait tomber. 
Le 16 novembre 2016, l'assuré a déposé une plainte pénale contre C.________ et D.________, lesquels avaient été interpellés par la police la nuit de l'altercation. Ces deux individus ont été condamnés pour rixe, par ordonnances pénales du 17 mars 2017, sur la base de l'état de fait suivant: "Le 3 septembre 2016, entre 2h00 et 2h30, suite à des provocations verbales, une bagarre a débuté en face de l'établissement E.________ entre C.________, D.________, A.________ et F.________. Des coups se sont échangés de part et d'autre. Alors que A.________ tentait de venir en aide à son ami F.________, C.________ et D.________ leur ont asséné des coups de poing et des coups de pied". 
Entendu à son domicile par un inspecteur de la CNA le 14 février 2017, l'assuré a expliqué que dans la nuit du 3 septembre 2016, il se trouvait dans un bar avec F.________. A un moment donné, les deux hommes sont sortis de l'établissement dans l'intention de rentrer chez eux. F.________ a commencé à se battre avec des personnes sans que l'assuré en connaisse la raison. Celui-ci est alors intervenu pour séparer les protagonistes. Ce faisant, il a été violemment poussé à terre, a perdu l'équilibre et s'est retrouvé au sol sur le dos. Un des protagonistes lui a donné un violent coup de pied sur la cheville, lui écrasant cette dernière. A l'issue de l'entretien, après avoir été informé que le fait d'intervenir dans une bagarre représentait une entreprise téméraire entraînant une réduction des indemnités journalières, l'assuré a déclaré qu'il n'était pas intervenu dans la bagarre mais que c'est l'individu en question qui était venu vers lui l'agresser. Cela étant, il a refusé de signer le procès-verbal d'entretien. 
Par décision du 10 avril 2017, confirmée sur opposition le 19 avril suivant, la CNA a réduit de 50 % les prestations en espèces dues à l'assuré. 
 
B.   
Saisie d'un recours, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton du Valais l'a rejeté par jugement du 22 février 2018. 
 
C.   
A.________ forme un recours devant le Tribunal fédéral, dans lequel il conclut à l'annulation du jugement cantonal et de la décision sur opposition de la CNA, ainsi qu'au versement d'indemnités journalières non réduites depuis le 6 septembre 2016. Par ailleurs, il demande à être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire. 
La CNA, la cour cantonale et l'Office fédéral de la santé publique n'ont pas déposé d'observations sur le recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) prévu par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.   
Le litige porte sur le bien-fondé de la réduction des prestations en espèces opérée par la CNA, de sorte que le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction précédente (cf. art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF). 
 
3.   
L'art. 49 al. 2 OLAA [RS 832.202] dispose que les prestations en espèces sont réduites au moins de moitié en cas d'accident non professionnel survenu notamment en cas de participation à une rixe ou à une bagarre, à moins que l'assuré ait été blessé par les protagonistes alors qu'il ne prenait aucune part à la rixe ou à la bagarre ou qu'il venait en aide à une personne sans défense (let. a). La notion de participation à une rixe ou à une bagarre est plus large que celle de l'art. 133 CP. Pour admettre l'existence d'une telle participation, il suffit que l'assuré entre dans la zone de danger, notamment en participant à une dispute. Peu importe qu'il ait effectivement pris part activement aux faits ou qu'il ait ou non commis une faute: il faut au moins qu'il se soit rendu compte ou ait pu se rendre compte du danger. En revanche, il n'y a pas matière à réduction en cas de légitime défense ou plus généralement lorsque l'assuré se fait agresser physiquement, sans qu'il y ait eu au préalable une dispute, et qu'il frappe à son tour l'agresseur dans un mouvement réflexe de défense (arrêt 8C_702/2017 du 17 septembre 2018 consid. 3.1 et les arrêts cités). 
 
4.   
Se fondant sur les déclarations faites par les protagonistes de l'altercation et par un des témoins, lors de leurs auditions par la police, les premiers juges ont retenu que l'altercation impliquait au départ principalement C.________ et F.________ et que D.________ et le recourant s'étaient ensuite mêlés dans la bagarre au côté de leurs amis respectifs. Si l'idée du recourant était de prêter main-forte à son ami F.________, on ne pouvait pour autant en déduire qu'il avait volé au secours d'une personne sans défense. En effet, F.________ avait sans conteste adopté un comportement insultant et agressif à l'égard du groupe adverse qui a riposté. Le recourant s'était alors délibérément interposé. Ce faisant, il s'était exposé à un risque réel de bagarre générale. Vu l'échauffement des esprits allant de pair avec l'état avancé d'ébriété de certains protagonistes, dont F.________, et leur envie d'en découdre, le recourant devait s'attendre, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à ce que la situation dégénère. Il s'était ainsi placé dans la zone de danger exclue par l'assurance-accidents. 
 
5.   
Le recourant fait valoir que, sur le plan pénal, lui et son ami F.________ n'ont pas été considérés comme des participants à la rixe, vu que seules deux ordonnances pénales ont été prononcées à l'encontre de D.________ et C.________. Aussi, le ministère public aurait admis que lui et son ami s'étaient limités à sa défendre. Plus précisément, le recourant serait intervenu seulement dans un second temps pour séparer les protagonistes, afin de venir en aide à F.________ qui se trouvait sans défense sous les coups de deux agresseurs. 
 
6.   
Le grief est mal fondé. En effet, l'absence de condamnation pénale n'est pas décisive (supra consid. 3). En outre, on ne saurait retenir que le recourant s'est limité à se défendre dans la mesure où il a lui-même admis être intervenu dans la bagarre (cf. formulaire du 30 septembre 2016, rapport d'audition du 14 février 2017). On rappellera à cet égard que, selon la jurisprudence, il faut accorder la préférence aux premières déclarations de l'assuré, données alors qu'il en ignorait peut-être les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le fruit de réflexions ultérieures (voir ATF 142 V 590 consid. 5.2 p. 594 s.; 121 V 45 consid. 2a p. 47). En outre, si le recourant et F.________ n'ont pas été en mesure d'expliquer de manière précise et/ou convaincante ce qui a causé l'altercation, il ressort des versions concordantes de C.________, D.________ et des deux témoins, que des provocations verbales ont précédé la bagarre, en particulier, que F.________ a crié "fuck Albanie" et "fuck Portugal", en référence aux pays d'origine de C.________ et D.________ (procès-verbaux d'audition des 1er, 3 et 5 février 2017). Dans ces conditions, on ne saurait retenir que le recourant n'a pas pu se rendre compte du danger et qu'il s'est contenté de venir en aide à une personne sans défense. On est fondé à considérer qu'il a plutôt voulu prêter main-forte à son ami. La cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral en confirmant la réduction opérée par la CNA. 
 
7.   
Vu ce qui précède, le recours se révèle mal fondé et doit être rejeté. 
 
8.   
Le recourant requiert le bénéfice de l'assistance judiciaire. Comme ses conclusions sont apparues d'emblée vouées à l'échec, il doit être débouté de sa demande (art. 64 al. 1 LTF a contrario). Il supportera donc les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 22 octobre 2018 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : Castella