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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_399/2023  
 
 
Arrêt du 25 août 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix, Haag, Müller et Merz. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
1. Le Centre Neuchâtel, 
2. Le PEV Neuchâtel, 
3. Andy Soguel, 
tous les trois représentés par Me Felix Uhlmann, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel, Le Château, rue de la Collégiale 12, 2000 Neuchâtel. 
 
Objet 
NR/CN-2023, sous-apparentement de listes, 
 
recours contre la décision du Conseil d'Etat 
du canton de Neuchâtel du 14 août 2023 
(REC.2023.193-DP/MLE/vca). 
 
 
Faits :  
 
A.  
L'élection pour le renouvellement intégral du Conseil national aura lieu le 22 octobre 2023. 
Dans ce contexte, le 27 juillet 2023, le Centre Neuchâtel, le Parti évangélique (PEV) Neuchâtel et Andy Soguel ont adressé un courrier à la Chancellerie d'Etat du canton de Neuchâtel demandant l'autorisation de constituer un sous-apparentement entre Le Centre Neuchâtel et PEV Neuchâtel: les listes s'intituleraient "Alliance du Centre - Le Centre" et "Alliance du Centre - PEV". Ce sous-apparentement interviendrait dans le cadre d'un plus large apparentement comprenant aussi le parti Vert'libéral neuchâtelois. 
Par courrier du 31 juillet 2023, la Chancellerie d'Etat du canton de Neuchâtel a répondu que les sous-apparentements entre listes de même dénomination dans lesquels des partis différents constitueraient des ailes d'appartenance d'un groupement étaient interdits, conformément à la circulaire du 19 octobre 2022 du Conseil fédéral aux gouvernements cantonaux concernant les élections pour le renouvellement intégral du Conseil national du 22 octobre 2023. 
Le Centre Neuchâtel, le PEV Neuchâtel et Andy Soguel ont interjeté un recours contre la réponse de la Chancellerie d'Etat du 31 juillet 2023 auprès du Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel (ci-après: le Conseil d'Etat). Par décision du 14 août 2023, celui-ci a rejeté le recours dans la mesure de sa recevabilité. 
 
B.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public qui concerne les élections populaires, le Centre Neuchâtel, le PEV Neuchâtel et Andy Soguel demandent au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 14 août 2023 et d'autoriser le sous-apparentement "Alliance du Centre" entre le Centre Neuchâtel et PEV Neuchâtel. 
Invités à se déterminer, la Chancellerie fédérale et le Conseil d'Etat ont conclu au rejet du recours. Les recourants ont répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Aux termes de l'art. 82 let. c LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires (recours en matière de droit public, art. 82 ss LTF). Cette voie de recours est notamment ouverte contre les décisions des gouvernements cantonaux qui statuent sur des recours contre des irrégularités affectant la préparation et l'exécution des élections au Conseil national (art. 80 al. 1, en relation avec l'art. 77 al. 1 let. c de la loi fédérale sur les droits politiques [LDP; RS 161.1]). 
La décision attaquée peut s'analyser en tant que décision en constatation de droit. A son consid. 6.4 in fine, le Conseil d'Etat arrive sans ambiguïté à la conclusion que "le sous-apparentement entre les listes des partis Le Centre NE et du PEV NE est (...) interdit". En ce sens, les recourants - dont deux d'entre eux sont précisément ces partis - ont un intérêt actuel et digne de protection à l'annulation de cette décision destinée à lier les autorités chargées de l'application de l'art. 31 al. 1bis LDP.  
Selon l'art. 89 al. 3 LTF, en matière de droits politiques, quiconque a le droit de vote dans l'affaire en cause a qualité pour recourir, ce qui est le cas d'Andy Soguel. La qualité pour recourir peut aussi être reconnue aux deux partis politiques recourants qui participent à l'élection au Conseil national (arrêt 1C_522/2015 du 29 octobre 2015 consid. 2.2). 
Les autres conditions de recevabilité devant le Tribunal fédéral sont remplies, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Analysant les conditions de recevabilité du recours devant lui, le Conseil d'Etat a jugé que le délai de recours de trois jours prévu à l'art. 77 al. 2 LDP par rapport au courrier de la Chancellerie d'Etat du 31 juillet 2023 était respecté. Il a toutefois laissé indécise la question de savoir si le délai pour recourir n'aurait pas dû partir le jour de la réception de la lettre d'information du 3 mai 2023 de la Chancellerie d'Etat du canton de Neuchâtel (adressée aux partis et groupements politiques notamment pour les rendre attentifs au fait que les sous-apparentements n'étaient possibles qu'entre listes d'un même parti conformément à la circulaire du Conseil fédéral du 19 octobre 2022). A cet égard, la Chancellerie fédérale évoque la question de savoir si le dies a quo du délai de l'art. 77 al. 2 LDP aurait pu être le 3 mai 2023.  
Selon l'art. 77 al. 2 LDP, le recours auprès du gouvernement cantonal doit être déposé dans les trois jours qui suivent la découverte du motif du recours. En l'espèce, le dies a quo ne peut être le 3 mai 2023 car le courrier de la Chancellerie d'Etat du 3 mai 2023 est une lettre d'information générale qui n'a pas de caractère contraignant pour les recourants. Ceux-ci ont appris seulement le 31 juillet 2023 que la Chancellerie d'Etat n'autorisera pas les partis Le Centre Neuchâtel et PEV-Neuchâtel à former un sous-apparentement de listes.  
 
3.  
Sur le fond, les recourants reprochent à l'instance précédente de ne pas avoir autorisé le sous-apparentement des listes "Alliance du Centre - Le Centre" et "Alliance du Centre - PEV", au motif que le sous-apparentement entre listes de partis politiques différents était interdit, conformément à la circulaire du Conseil fédéral du 19 octobre 2022. Ils se plaignent d'une violation de l'art. 31 al. 1bis LDP
 
3.1. A teneur de l'art. 31 al. 1bis LDP, seuls sont valables les sous-apparentements entre listes de même dénomination qui ne se différencient que par une adjonction destinée à établir une distinction quant au sexe, à l'aile d'appartenance d'un groupement, à la région ou à l'âge des candidats.  
L'art. 8c al. 2 de l'ordonnance sur les droits politiques du 24 mai 1978 (ODP; RS 161.11) précise que les listes d'un même groupement ne peuvent être sous-apparentées entre elles que si l'adjonction porte sur le sexe, l'âge, l'aile d'appartenance du groupement ou la région.  
 
3.2. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (arrêt 6B_1083/2021 du 16 décembre 2022 consid. 3.4 destiné à publication; ATF 149 IV 9 consid. 6.3.2.1; 148 IV 398 consid. 4.8; 145 IV 17 consid. 1.2 p. 18 s. et les références citées).  
 
3.3. L'interprétation littérale part du texte de la loi. En premier lieu, il faut relever que l'al. 1bis est rédigé d'une manière très restrictive. Plutôt qu'une formule telle que "Sont valables les sous-apparentements", le législateur a préféré écrire " Seuls sont valables les sous-apparentements..." ("Unterlistenverbindungen sind nur gültig..."; "Sono autorizzate soltanto le sotto-congiunzioni..."). Ce type de rédaction insiste donc sur le caractère exceptionnel de l'autorisation du sous-apparentement.  
S'agissant maintenant du terme "groupement" ( Gruppierung; gruppo), celui-ci se retrouve tel quel à l'art. 23 LDP (dénomination de la liste de candidats) et, avec la précision "groupement politique", à l'art. 47 LDP (mode de procéder en cas d'élection selon le système majoritaire). Cette notion relativement indéterminée a nécessairement une portée plus large que le terme de "parti" ou de "parti politique". A l'art. 23 LDP, la notion de "groupement politique" est d'ailleurs utilisée pour permettre à des candidats de se présenter s'ils ne sont pas membres d'un parti politique (STEFAN WYLER, Kommentierung zu Art. 23 BPR, in: Glaser/Braun Binder/Bisaz/Tornay Schaller (éd.), Onlinekommentar zum BPR - Version: 01.07.2023: https://onlinekommentar.ch/fr/  
kommentare/bpr31, N 5; voir aussi les interventions des Conseillers aux Etats Zopfi et Fässler lors des débats parlementaires du 19 septembre 2022, BO 2022 CE 775 s., voir infra consid. 3.4.5).  
Une interprétation littérale de l'art. 31 al. 1bis LDP ne conduit donc pas en elle-même à restreindre aux seuls partis politiques la faculté de bénéficier d'un sous-apparentement selon leur "aile d'appartenance". Déduire du texte légal actuel que le sous-apparentement ne serait autorisé que pour le "même" groupement, ou pour le "même" parti, ce qui irait dans le sens de l'interprétation du Conseil fédéral, ne s'impose pas non plus. Une telle interprétation ne paraît cependant pas absolument exclue. Tel peut, en particulier, être le cas si, en application du principe du pluralisme pragmatique des méthodes d'interprétation, l'un ou l'autre mode d'interprétation peut être considéré comme prépondérant. 
 
3.4. Il y a ainsi lieu de procéder à une interprétation téléologique et historique de l'art. 31 al. 1bis LDP.  
 
3.4.1. La restriction concernant les sous-apparentements prévue à l'art. 31 al. 1bis LDP a été introduite lors de la révision de la loi en 1994 (RO 1994 2414). La version initiale de 1976 prévoyait uniquement que "le sous-apparentement est également autorisé entre listes apparentées" (art. 31 al. 1 2 ème phrase aLDP; RO 1978 688).  
Lors de la réforme de 1994, le Conseil fédéral voulait supprimer totalement les sous-apparentements, au motif qu'ils compromettent la transparence de l'élection (FF 1993 III 405, 450, 505). C'est lors des débats parlementaires que l'art. 31 al. 1bis LDP a été introduit comme solution de compromis entre, d'une part, l'interdiction de tout sous-apparentement et, d'autre part, une autorisation illimitée des sous-apparentements (incluant les sous-sous-apparentements) (BO 1993 CN 2481 ss, en particulier les interventions Fischer et Seiler qui parlent de Mittelweg [p. 2484]).  
Il ressort des débats parlementaires que la volonté du législateur était de limiter les sous-apparentements aux listes d'un même groupement politique ou d'un même parti. Ainsi, le rapporteur de la Commission des institutions politiques du Conseil national qui a rédigé l'art. 31 al. 1bis LDP a expliqué vouloir "limiter les sous-apparentements aux listes d'un même groupement politique, par exemple, parti x femmes, parti politique x homme, ou parti politique y ville, parti politique y campagne, etc". S'il utilise le terme "groupement politique", c'est pour ne pas exclure les listes de candidats qui ne sont pas déposées par un parti politique. Mais l'intention est clairement d'interdire les sous-apparentements entre partis ou groupements différents, dans l'intérêt de la transparence de l'élection. Cela ressort d'ailleurs de la prise de parole du rapporteur germanophone qui explique qu'il s'agit de donner aux partis la possibilité de "sich die Teillisten per Unterlistenverbindung gewissermassen zu einer Gesamtliste der Partei verbinden und dass dann darüber hinaus diese Gesamtliste mit anderen Parteien verbunden wird" (rapporteur Fritschi BO 1993 CN 2485). La même intention se retrouve dans l'explication donnée par le rapporteur avant de voter sur l'art. 31 al. 1bis LDP: "Wir lassen weiterhin zu, dass sich Parteien mit benachbartem politischem Standort zu einem Block verbinden. Innerhalb der Parteien lassen wir zu, dass Untergruppen nach Geschlecht, Parteiflügel, Region oder Alter sich gewissermassen zur Gesamtliste der Partei zusammenschliessen" (rapporteur Fritschi BO 1993 CN 2487). Les opposants à la limitation des sous-apparentements prévue à l'art. 31 al. 1bis LDP en ont eu la même compréhension: "die Beschränkung der Unterlistenverbindungen auf Wahlvorschläge der jeweils gleichen Partei sind eindeutig Massnahmen, die vor allem gegen kleinere Parteien gerichtet sind"; [cette variante exclut les] "parteiübergreifende Unterlistenverbindungen" (proposition Ruf BO 1993 CN 2469).  
 
3.4.2. Dans la pratique cantonale, le sous-apparentement de listes de partis différents a régulièrement été autorisé (rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 5 novembre 2021 sur l'initiative parlementaire 21.402, p. 3; STEFAN WYLER, Kommentierung zu Art. 31 BPR, in: Glaser/Braun Binder/Bisaz/Tornay Schaller (éd.), Onlinekommentar zum BPR - Version: 01.07.2023: https://onlinekommentar.ch/fr/kommentare/bpr31, N 17).  
La doctrine a qualifié cette pratique de trop généreuse (ANINA WEBER, Schweizerisches Wahlrecht und die Garantie der politischen Rechte, 2016, N 725) voire d'illégale (GLASER/FREI, Rechtswidrige Unterlistenverbindungen zwischen verschiedenen Parteien, in: ZBl 2020 p. 308, 312; HANGARTNER/KLEY/BRAUN BINDER/GLASER, Die demokratischen Rechte in Bund und Kantonen der schweizerischen Eidgnossenschaft, 2023, N 653 p. 285). 
 
3.4.3. Le 18 février 2021, la Commission des institutions politiques du Conseil national a déposé une initiative parlementaire intitulée "Sous-apparentements de listes. Préciser les dispositions légales y afférentes" (21.402). "Afin de clarifier les choses et d'éviter que des sous-apparentements illicites ne soient conclus à l'avenir", elle a proposé de modifier l'art. 31 al. 1bis LDP comme suit:  
 
"1 bis Seuls sont valables les sous-apparentements entre listes de même dénomination qui ne se différencient que par une adjonction destinée à établir une distinction quant au sexe, à l'aile d'appartenance d'un parti politique, à la région ou à l'âge des candidats."  
La Commission des institutions politiques du Conseil national a relevé que "la formulation actuelle de l'art. 31 al. 1bis LDP n'[était] pas claire et s'[est demandée] si elle [était] conforme à la volonté du législateur. Selon le texte en vigueur, les sous-apparentements entre listes de même dénomination qui ne se différencient que par une adjonction destinée à établir une distinction quant à l'aile d'appartenance d'un groupement [étaient] possibles, ce qui p[ouvait] conduire à des abus de droit, qui se traduis[aient] par des sous-apparentements entre listes de partis différents". Elle a estimé que "les apparentements de listes [pouvaient] réunir plusieurs partis, mais pas les sous-apparentements et qu'il [était] nécessaire de clarifier ce point dans la loi" (rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 5 novembre 2021 sur l'initiative parlementaire 21.402, p. 3). 
 
3.4.4. Le 17 août 2021, la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats a décidé de ne pas donner suite à l'initiative susmentionnée. Elle a estimé que "le fait de remplacer « aile d'appartenance d'un groupement » par « aile d'appartenance d'un parti politique » n'apporterait pas davantage de clarté. En effet, à ses yeux, la notion de « parti » n'[était] pas plus précise que celle de « groupement ». Les partis ne [devaient] pas être avantagés par rapport aux groupements. Mais, pour la commission, il [était] également clair qu'il serait abusif que différents partis se définissent comme formant ensemble un « groupement » afin de pouvoir constituer des sous-apparentements. Il s'[agissait] toutefois là d'un problème d'application qui ne saurait être résolu par un changement terminologique dans la loi" (rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats du 8 avril 2022, p. 3).  
 
3.4.5. Le 29 novembre 2021, le Conseil national a décidé de donner suite à l'initiative parlementaire (BO 2021 CN 2178).  
Le 19 septembre 2022, le Conseil des Etats a décidé de ne pas y donner suite (BO 2022 CE 774 et 776). L'initiative parlementaire a ainsi été liquidée et l'art. 31 al. 1bis LDP n'a pas été modifié. 
Il ressort des débats parlementaires du Conseil national et du Conseil des Etats que les deux Conseils considèrent que l'art. 31 al. 1bis LDP n'autorise pas le sous-apparentement entre listes de différents partis. Ainsi le rapporteur de la Commission des institutions politiques du Conseil national a précisé: "on a vu à plusieurs reprises ces dernières années des sous-apparentements entre des listes de partis différents, par exemple des partis qui forment un seul et même groupe politique dans un parlement cantonal. Une telle pratique contourne la volonté du législateur fédéral. C'est pour cette raison que votre commission estime utile de préciser quelque peu la notion de sous-apparentement dans la loi afin de clarifier les choses et d'éviter que des sous-apparentements, qu'il faut bien qualifier d'illicites, ne soient conclus à l'avenir" (rapporteur Cottier BO 2021 CN 2178; voir aussi intervention de la Conseillère nationale Widmer, BO 2021 CN 2180 qui précise que lors de sous-apparentements de listes, il est encore plus difficile que lors d'apparentements de listes de savoir en faveur de quelle liste sa voix sera comptabilisée). 
De même, le rapporteur de la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats a relevé que: "Denn es ist eigentlich klar, was mit "Gruppierung" gemeint ist und was nicht. Was nicht gemeint sein kann, sind verschiedene Parteien. Haben also einzelne Partner in einer Gruppierung eigene, voneinander stark abweichende Programme, sind sie eigene Organisationen auf kantonaler Ebene, dann sind sie zusammengenommen weder eine einzelne Partei noch eine einzelne Gruppierung. (...) Ihre SPK hofft also, dass die Kantone auch ohne Gesetzesänderung aufgrund der klaren Rechtslage ihre Arbeit machen" (rapporteur Zopfi BO 2022 CE 775, 776). 
La divergence entre les deux Conseils se situe sur la manière de préciser cette interdiction de sous-apparentements entre partis différents. Alors que le Conseil national propose de modifier le texte de l'art. 31 al. 1bis LDP, le Conseil des Etats soutient qu'une modification législative n'est pas nécessaire et qu'il suffit de modifier à l'avenir la pratique d'application de cette disposition. 
 
3.4.6. Par conséquent, il ressort des débats parlementaires de 1993, de 2021 et de 2022 que l'art. 31 al. 1bis LDP doit être interprété comme interdisant les sous-apparentements entre listes de partis différents. La volonté du législateur initial et contemporain est claire. Les interprétations historique et téléologique conduisent ainsi à retenir que seul le sous-apparentement entre listes d'un même parti politique ou d'un même groupement est autorisé par l'art. 31 al. 1bis LDP.  
Ce résultat est encore confirmé par le mode de rédaction de l'al. 1bis: celui-ci est en effet rédigé de manière restrictive, de manière à conserver le caractère exceptionnel des sous-apparentements de listes (voir consid. 3.3). 
 
3.5. Il s'ensuit que le sous-apparentement entre les listes de même dénomination (Alliance du Centre) du PEV Neuchâtel et de Le Centre Neuchâtel est interdit car le PEV Neuchâtel et Le Centre Neuchâtel sont deux partis différents. Le Centre Neuchâtel et PEV Neuchâtel sont en effet des sections cantonales des partis politiques "Die Mitte/Le Centre" et "Evangelischen Volkspartei der Schweiz/Parti Evangélique Suisse EVP/PEV" qui sont tous les deux inscrits dans le registre des partis politiques sur le plan fédéral (art. 76a LDP).  
 
4.  
Les recourants critiquent aussi le fait que la décision attaquée s'est fondée sur la circulaire du 19 octobre 2022 du Conseil fédéral à l'attention des gouvernements cantonaux concernant les élections pour le renouvellement intégral du Conseil national du 22 octobre 2023 (FF 2022 2547). 
Il ressort de cette circulaire que "lors des travaux relatifs à l'initiative parlementaire 21.402 de la Commission des institutions politiques du Conseil national «Sous-apparentements de listes. Préciser les dispositions légales y afférentes», le Conseil national et le Conseil des États ont établi que des partis différents ne pouvaient être considérés comme des ailes d'appartenance d'un groupement. Les sous-apparentements entre listes de même dénomination dans lesquels des partis différents constitueraient des ailes d'appartenance d'un groupement sont donc interdits (p. 20) ". 
La circulaire en question constitue une ordonnance administrative, plus précisément une directive d'interprétation (THIERRY Tanquerel, Manuel de droit administratif, 2 e éd. 2018, N 335). De telles directives n'ont pas force de loi et ne lient ni le Tribunal fédéral ni les autres autorités d'application du droit. Le juge peut s'en écarter s'il l'estime contraire à la loi ou à une ordonnance. En revanche, si cette information permet une application correcte des dispositions légales dans le cas d'espèce, il y a lieu d'en tenir compte (arrêt 9C_698/2022 du 21 juin 2023 consid. 3.3.2 destiné à publication; ATF 142 II 182 consid. 2.3.2).  
Dans la mesure où la circulaire du Conseil fédéral apparaît - sur la question ici litigieuse des sous-apparentements - conforme à l'interprétation de la loi, elle peut être suivie par les autorités d'exécution. En l'appliquant dans la décision attaquée, le Conseil d'Etat n'a donc pas violé la loi et le grief doit être rejeté. 
 
5.  
Les recourants font encore valoir une violation de leurs droits politiques (art. 34 Cst.). Ils se plaignent d'une violation du principe de l'égalité des chances, au motif que la limitation des sous-apparentements de listes renforcerait les quorums naturels. 
 
5.1. L'art. 34 al. 2 Cst. garantit notamment l'égalité de traitement en matière de droit de vote, laquelle se compose, entre autres, du principe de l'égalité des chances ( Erfolgswertgleichheit). Ce principe garantit que toutes les voix exercent la même influence, c'est-à-dire qu'elles contribuent toutes de la même manière au résultat de l'élection et à la répartition des sièges. Des restrictions objectivement justifiées à ce principe sont cependant tolérées (ATF 145 I 259 consid. 4.4).  
Dans les petites circonscriptions électorales, la question de l'égalité des chances se pose effectivement du fait des quorums naturels élevés. En raison du nombre restreint de sièges dans les circonscriptions, l'égalité des chances est limitée. Les apparentements de listes permettent d'atténuer cette atteinte (arrêt 1C_546/2014 du 9 décembre 2014, consid. 4.3.3). 
Cette jurisprudence ne saurait toutefois s'appliquer aux sous-apparentements de listes. En effet, le sous-apparentement des listes ne permet pas un gain d'égalité des chances ( Erfolgswertgleichheit) car l'apparentement de listes aura déjà permis aux différentes listes sous-apparentées de gagner un siège (HANGARTNER/KLEY/BRAUN BINDER/GLASER, op. cit., N 653; voir aussi WEBER, op. cit., N 789). Les listes sous-apparentées n'entrent pas en ligne de compte lors de la répartition des sièges entre les listes et n'entraînent donc pas d'avantage en termes d'égalité des chances (sur la répartition des mandats entre listes apparentées et listes sous-apparentées, voir STEFAN WYLER, Kommentierung zu Art. 31 BPR, in: Glaser/Braun Binder/Bisaz/Tornay Schaller (éd.), Onlinekommentar zum BPR - Version: 01.07.2023: https://onlinekommentar.ch/de/kommentare/bpr31; voir aussi art. 40 à 44 LDP, en particulier art. 42 LDP).  
En d'autres termes, seul l'apparentement de listes garantit l'égalité des chances. Les sous-apparentements de listes ne sont pas nécessaires pour l'utilisation des suffrages restants (GLASER/FREI, op. cit., p. 313; voir aussi ATF 111 la 191, consid. 4c). 
 
5.2. Par conséquent, l'interdiction de sous-apparentements entre listes de partis différents ne constitue pas une restriction du principe de l'égalité des chances.  
Pour le reste, la liberté de vote au sens de l'art. 34 al. 2 Cst. ne comprend aucun droit à des apparentements de listes ou à des sous-apparentements de listes. 
Le grief de violation de l'art. 34 Cst. doit donc être écarté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
5.3. Les recourants font encore valoir que les petits partis seraient désavantagés par rapport aux groupements dans l'application de l'art. 31 al. 1bis LDP. Il n'est pas contesté que non seulement les partis politiques sont admis à l'élection du Conseil national, mais qu'en principe toute forme de groupement peut se présenter. De plus, les listes de candidats peuvent s'associer sans restriction pour former des apparentements de listes. En revanche, la législation prévoit une restriction en ce qui concerne les sous-apparentements de listes et ne les autorise qu'au sein du même groupement. On ne voit pas en quoi les petits partis politiques seraient ainsi désavantagés. Au contraire, le droit de présenter des candidatures privilégie les partis politiques grâce à un allègement administratif, dans la mesure où ils sont dispensés de recueillir des signatures si les conditions de l'art. 24 al. 3 LDP sont remplies.  
 
5.4. Les recourants soutiennent enfin à plusieurs reprises que l'atteinte à leurs droits politiques ne reposerait pas sur une base légale suffisante. Ils relèvent que le changement de pratique relatif au traitement des sous-apparentements pour les prochaines élections au Conseil national reposerait sur une appréciation du seul Conseil fédéral. Il en découlerait un déficit démocratique puisqu'une base légale formelle serait nécessaire.  
Cette critique peut être d'emblée écartée pour deux motifs. D'une part il ressort du considérant précédent (consid. 5.2) qu'il n'y a pas de violation des droits politiques. D'autre part, l'interdiction de sous-apparentements entre les listes de partis différents repose sur une base légale au sens formel, l'art. 31 al. 1bis LDP (voir supra consid. 4).  
 
6.  
Les recourants prétendent enfin que la cause devrait dans tous les cas être renvoyée à l'instance précédente pour examiner le cas particulier. Sur la base de l'interprétation que dégage le Tribunal fédéral, aujourd'hui pour la première fois, de l'art. 31 al. 1bis LDP, il est établi que le sous-apparentement de listes de partis politiques différents que les recourants appellent de leurs voeux est contraire à la loi. Dans de telles conditions, l'instance précédente a correctement appliqué le droit fédéral et il n'y a pas de place pour une éventuelle protection de la bonne foi des intéressés. 
En tout état de cause, ceux-ci sont renseignés depuis octobre 2022 sur la lecture par le Conseil fédéral de l'art. 31 al. 1bis LDP, lecture qui se révèle conforme à la loi. Leur argumentation apparaît en définitive sans objet. 
 
7.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté, aux frais des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 francs, sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Conseil d'Etat du canton de Neuchâtel, à la Chancellerie fédérale, aux Services du Parlement (Secrétariat général et Service juridique). 
 
 
Lausanne, le 25 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller