Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_956/2021
Arrêt du 20 décembre 2021
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Escher et Bovey.
Greffière : Mme Dolivo.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Mes Vivian Kühnlein et Justine Ayer, avocats,
recourante,
contre
Juge de paix du district de Lausanne,
Côtes-de-Montbenon 8, 1014 Lausanne.
Objet
placement à des fins d'assistance,
recours contre l'arrêt de la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 19 octobre 2021 (D520.021431-211563 216).
Faits :
A.
Le 5 juin 2020, la situation de A.________ a été signalée par une assistante sociale du Service social médecine-chirurgie du CHUV. L'intéressée, qui vivait seule et n'avait pas d'enfants, avait été hospitalisée le 20 mai 2020 en raison d'une chute à son domicile trois heures après son retour d'une précédente hospitalisation. Elle souffrait de troubles cognitifs, n'avait pas sa capacité de discernement quant au choix de son lieu de vie, était fermement opposée à son admission dans un EMS et refusait toute l'aide proposée. Elle était très peu entourée et avait aussi besoin d'aide sur le plan administratif.
Le 17 juin 2020, l'autorité de protection de l'adulte a entendu l'intéressée au CHUV puis, par courrier du 22 juin 2020, l'a informée que l'enquête en institution d'une curatelle ouverte en sa faveur porterait désormais aussi sur un éventuel placement à des fins d'assistance.
A.a. Le 29 juin 2020, la Professeure B.________, professeure associée en gériatrie et réadaptation gériatrique au CHUV, a prononcé le placement à des fins d'assistance de A.________. Dans un rapport daté du lendemain, elle a notamment indiqué que selon les médecins, seul un accompagnement 24 heures sur 24 pourrait assurer un retour à domicile sécure, ce que l'intéressée refusait, de sorte qu'un placement à des fins d'assistance était nécessaire. Le 3 juillet 2020, A.________ a intégré la Fondation C.________. Le 23 juillet 2020, la Dre D.________, spécialiste FMH en psychiatrie et en psychothérapie, a rendu un rapport dans lequel elle concluait, en définitive, à la nécessité d'un encadrement institutionnel 24 heures sur 24 de l'intéressée, précisant que si celle-ci devait rentrer à domicile, même un dispositif ambulatoire maximal ne pourrait pas empêcher de sérieuses mises en danger (fractures sur chute, traumatisme crânien chez une expertisée anticoagulée avec risque hémorragique important, dénutrition, déshydratation, absence d'hygiène, infections, prise anarchique du traitement, mises en danger par désorientation spatiale, entre autres).
Par décision du 24 juillet 2020, la Juge de paix du district de Lausanne (ci-après: la Juge de paix) a rejeté l'appel formé par l'intéressée contre la décision de placement.
A.b. Par ordonnance de mesures d'extrême urgence du 12 août 2020, la Juge de paix a ordonné provisoirement le placement à des fins d'assistance de A.________.
A.c. Dans un rapport du 17 août 2020, le Dr E.________, médecin responsable à la Fondation C.________, a fait état d'un déni anosognosique total de l'intéressée, qui était dépendante pour presque tous les actes de la vie quotidienne hormis manger. Sa démarche était incertaine et le risque de chute était majeur, de sorte qu'une surveillance rapprochée était nécessaire malgré l'usage d'un déambulateur. Si son discours paraissait structuré, les troubles cognitifs dont elle souffrait n'en étaient pas moins sérieux, ce d'autant qu'elle présentait une incapacité totale à évaluer la situation avec objectivité.
A.d. Par attestation du 19 août 2020, le Dr F.________ a exposé qu'il suivait A.________ depuis janvier 2006 et que si sa patiente retournait à son domicile, il n'aurait aucun problème à organiser une prise en charge par le CMS deux fois par jour.
A.e. Par ordonnance de mesures provisionnelles du 20 août 2020, la Juge de paix a dit qu'elle poursuivait l'enquête en placement à des fins d'assistance et a confirmé le placement provisoire à des fins d'assistance.
A.f. Dans un rapport du 7 octobre 2020, la Dre G.________, médecin traitant de A.________ à la Fondation C.________, a notamment indiqué que l'intéressée restait dépendante pour tous les gestes de la vie quotidienne. A la suite d'une nouvelle chute, le 9 octobre 2020, elle ne parvenait plus à marcher par crainte de tomber à nouveau, si bien que des moyens auxiliaires étaient nécessaires pour le transfert du lit au fauteuil. Ses capacités de marche ne s'étant pas améliorées durant le séjour, un risque de chute restait très élevé, voire aggravé depuis le rapport établi le 17 août 2020, et ce malgré une surveillance rapprochée au sein de l'EMS. Le nouveau bilan cognitif restait déficitaire, parlant en faveur de troubles cognitifs majeurs. L'intéressée restait dans le déni de sa problématique et disait vouloir rentrer chez elle.
A.g. Le 12 février 2021, un rapport d'expertise a été rendu par la Dre H.________, psychiatre de la personne âgée. L'experte concluait que l'intéressée présentait un trouble cognitif majeur chronique, soit une démence probablement d'origine neuro-dégénérative et potentiellement toxique (antécédents de consommation chronique éthylique et de benzodiazépines), dont l'évolution la plus probable était une aggravation progressive. Elle ne disposait pas de la capacité de discernement pour la gestion de l'ensemble de ses affaires administratives et financières, ni en ce qui concernait sa santé. En outre, elle ne paraissait pas prendre conscience des atteintes à sa santé et de son besoin d'aide, ni qu'elle présentait un besoin de protection, n'étant pas à même d'assurer elle-même la sauvegarde de ses intérêts et étant susceptible de prendre des engagements contraires à ceux-ci. De plus, en raison de son anosognosie et de ses difficultés lors de la marche, elle présentait un danger pour elle-même, notamment sous la forme d'une hygiène dégradée, d'une incapacité de se relever, d'un risque de chute avec risque de fracture et traumatisme crânien, d'une déshydratation et d'une dénutrition. Elle nécessitait une aide et une présence permanentes pour toute activité de la vie quotidienne, hormis manger. Selon les indications de son entourage et du réseau, lorsqu'elle était encore à domicile, son hygiène était très relative, elle n'était pas compliante pour les soins de base avec le CMS et son réfrigérateur était régulièrement rempli d'aliments pourris. Lors des diverses hospitalisations, des retours à domicile avaient été tentés, cependant, une fois chez elle, A.________ était de nouveau peu compliante et complètement anosognosique de son état et de ses difficultés. L'experte était d'avis que seule une prise en charge institutionnelle dans un établissement de type EMS psychogériatrique ou psychogériatrique compatible (en raison des troubles cognitifs majeurs) pouvait apporter à A.________ l'assistance nécessaire, l'intéressée étant incapable d'adhérer à l'aide dont elle avait besoin, ne se rendant pas compte de sa problématique.
B.
Une audience a eu lieu le 31 août 2021 devant la Justice de paix, audience durant laquelle A.________ a été entendue, de même qu'une infirmière de la Fondation C.________ ainsi que l'experte, qui a confirmé les conclusions de son rapport, précisant que l'intéressée aurait besoin de l'aide de trois à quatre personnes si elle devait retourner à domicile.
B.a. Par décision du 31 août 2021, la Justice de paix a mis fin à l'enquête en institution d'une curatelle et en placement à des fins d'assistance, institué une curatelle de représentation au sens de l'art. 394 al. 1 CC et de gestion au sens de l'art. 395 al. 1 CC en faveur de A.________, nommé I.________ en qualité de curateur, énuméré les tâches et les devoirs de celui-ci, ordonné, pour une durée indéterminée, le placement à des fins d'assistance de A.________ à la Fondation C.________ ou dans tout autre établissement approprié et privé d'effet suspensif tout recours éventuel contre la décision.
B.b. A.________ a interjeté recours contre cette décision auprès de la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la Chambre des curatelles). Elle a été entendue à l'audience du 19 octobre 2021. Le recours a été rejeté par arrêt du même jour.
C.
Par acte du 19 novembre 2021, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement à la levée immédiate du placement à des fins d'assistance. Subsidiairement, elle demande qu'il soit mis fin à l'enquête ouverte eu égard à l'institution d'une curatelle, que l'enquête soit suspendue eu égard au placement à des fins d'assistance jusqu'à ce que le curateur ait transmis au juge des propositions d'alternatives au placement, selon les modalités précisées plus loin, et que le curateur exercera les tâches suivantes dans le cadre de la curatelle de représentation: représenter l'intéressée dans les rapports avec les tiers, en particulier en matière de logement, santé, affaires sociales, administration et affaires juridiques, et sauvegarder au mieux ses intérêts; veiller à la gestion de ses revenus et de sa fortune, administrer ses biens avec diligence, la représenter dans ce cadre, notamment à l'égard des établissements financiers et accomplir les actes juridiques liés à la gestion; examiner quelles alternatives au placement à des fins d'assistance seraient envisageables au vu de ses revenus et de sa fortune et en faire état au juge dans un délai de deux mois dès notification de la décision; la représenter, si nécessaire, pour ses besoins ordinaires. La recourante demande que son placement à des fins d'assistance provisoire à la Fondation C.________ soit confirmé dans l'intervalle, mais que le placement soit réexaminé par le juge sitôt que le curateur aura fait part des alternatives audit placement. Plus subsidiairement, elle sollicite le renvoi de la cause à la Chambre des curatelles pour nouvelle décision. Elle demande aussi le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
Il n'a pas été demandé d'observations.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours a pour objet une décision finale (art. 90 LTF; arrêt 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 1.2; 5A_872/2013 du 17 janvier 2014 consid. 1.1 non publié in ATF 140 III 101), rendue par un tribunal supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 75 LTF), confirmant un placement à des fins d'assistance, c'est-à-dire une décision sujette au recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF). Il a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme prévue par la loi (art. 42 al. 1 LTF). La recourante a qualité pour recourir, dès lors qu'elle a pris part à la procédure devant l'autorité précédente, qui l'a déboutée de ses conclusions, et que, faisant toujours l'objet de la mesure de placement litigieuse, elle dispose d'un intérêt actuel et pratique au recours (art. 76 al. 1 LTF). Le recours en matière civile est en principe recevable sous l'angle de ces dispositions.
1.2. La conclusion subsidiaire de la recourante n'est recevable qu'en tant qu'elle vise à ce que la cause soit renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle examine si des mesures moins incisives qu'un placement seraient envisageables. Elle est irrecevable pour le surplus, dès lors qu'elle outrepasse l'objet de la contestation (sur cette notion, cf. ATF 142 I 155 consid. 4.4.2 et les références).
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Lorsque la décision repose sur plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires, et que chacune d'elles suffit à sceller le sort de la cause, la partie recourante doit démontrer que chacune de ces motivations est contraire au droit; à défaut, la motivation du recours n'est pas suffisante (ATF 143 III 364 consid. 2.4 i.f.; 142 III 364 consid. 2.4; 138 I 97 consid. 4.1.4).
Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).
2.2. L'autorité qui ordonne une mesure de protection de l'adulte dispose d'un large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC), dont le Tribunal fédéral ne revoit l'exercice qu'avec retenue; il n'intervient que si cette autorité a pris en considération des éléments qui ne jouent aucun rôle au sens de la loi ou a omis de tenir compte de facteurs essentiels (arrêts 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 2.2; 5A_634/2016 du 21 septembre 2016 consid. 2.2 et la référence).
2.3. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 143 I 310 consid. 2.2; 140 III 264 consid. 2.3), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (cf. supra consid. 2.1). L'appréciation des preuves n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a procédé à des déductions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3).
Il résulte de ce qui précède que les faits exposés par la recourante seront ignorés, en tant qu'ils ne sont pas expressément visés par un grief d'arbitraire dans l'établissement des faits, qu'ils s'écartent de ceux contenus dans la décision attaquée et que la recourante n'invoque par ailleurs pas, ni a fortiori ne démontre, qu'ils auraient été constatés de manière insoutenable ou que leur correction influerait sur le sort de la cause. Tel est notamment le cas de l'allégation selon laquelle la recourante a affirmé, depuis le début de la procédure, qu'elle préférerait quitter la Suisse pour rentrer dans son pays, le Danemark, afin de pouvoir y rejoindre ses proches plutôt que finir ses jours enfermée dans un EMS en Suisse.
3.
La Chambre des curatelles a retenu qu'il ressortait des nombreux rapports médicaux au dossier, en particulier de l'expertise psychiatrique du 12 février 2021, que A.________ souffre de troubles cognitifs sévères ainsi que de troubles majeurs de la marche et qu'elle est dépendante pour toutes les activités du quotidien, hormis pour manger et boire. Tous les soignants ainsi que l'experte, la Dre H.________, s'accordaient à dire que seule une prise en charge institutionnelle était en mesure d'apporter à l'intéressée les soins dont elle avait besoin et d'éviter sa mise en danger (dénutrition, déshydratation, état d'abandon, chutes graves). Depuis 2017, plusieurs retours à domicile avaient été tentés et avaient échoué en raison du manque de compliance de l'intéressée, mais surtout en raison des nombreuses chutes dont elle avait été victime, pour certaines avec des conséquences graves. Comme l'avait souligné l'experte, si un retour à domicile était envisagé, il ne pourrait être garanti que par le tournus permanent, jour et nuit, de trois à quatre soignants. Une telle mesures s'avérerait quoi qu'il en soit vaine, l'intéressée peinant, en raison de son anosognosie, à adhérer à l'aide qui lui était apportée. Son argument tiré de la dignité humaine et de son droit à déterminer la manière dont elle entendait finir sa vie était tenu en échec par son absence avérée de capacité de discernement quant à son lieu de vie depuis 2020 à tout le moins. S'il était vrai que le Dr F.________ estimait que sa patiente pouvait retourner à domicile avec l'aide du CMS, son avis était minorisé par les conclusions des nombreux praticiens investis dans la prise en charge de A.________ depuis plusieurs années, ainsi que par les conclusions de l'expertise psychiatrique du 12 février 2021. Enfin, la Fondation C.________ apparaissait comme un établissement approprié à la problématique de la personne concernée et en mesure de lui apporter l'aide dont elle avait besoin, ce qui était d'ailleurs corroboré par le rapport de la Dre G.________ du 7 octobre 2020, qui avait constaté une amélioration de sa santé et de son hygiène depuis qu'elle séjournait dans l'institution.
Au vu de ce qui précède, la Chambre des curatelles a confirmé le placement à des fins d'assistance de A.________, considérant que les conditions de l'art. 426 CC étaient réalisées. A toutes fins utiles, elle a rappelé que l'autorité de protection examine régulièrement si les conditions du maintien de la mesure sont toujours appropriées (art. 431 CC), de sorte que l'argument selon lequel il s'agirait d'une mesure assimilable à une privation de liberté à vie était infondé.
4.
La recourante soutient que la mesure de placement prononcée viole l'art. 426 al. 1 CC, en particulier les principes de la proportionnalité et de la subsidiarité intrinsèques à cette disposition. Elle contreviendrait également à son droit à la liberté personnelle et à la dignité humaine, à son droit à la vie privée et au principe de l'interdiction des discriminations.
5.
L'art. 426 CC dispose qu'une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsque, en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaires ne peuvent lui être fournis d'une autre manière (al. 1). Il y a lieu de tenir compte de la charge que la personne concernée représente pour ses proches et pour des tiers, ainsi que de leur protection (al. 2), et la personne concernée doit être libérée dès que les conditions du placement ne sont plus remplies (al. 3). La personne concernée ou l'un de ses proches peut demander sa libération en tout temps (al. 4).
5.1. La notion de " troubles psychiques " englobe toutes les pathologies mentales reconnues en psychiatrie, à savoir les psychoses et les psychopathies ayant des causes physiques ou non, les démences, ainsi que les dépendances, notamment l'alcoolisme, la toxicomanie ou la pharmacodépendance (arrêt 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2.1 et les références). Il y a " grave état d'abandon " lorsque la condition d'une personne est telle qu'il y aurait atteinte à sa dignité si elle n'était pas placée dans une institution afin de lui apporter l'assistance dont elle a besoin. En réalité, il est rare qu'une personne soit placée pour cette raison, car l'état d'abandon se double souvent d'une déficience mentale ou de troubles psychiques (Message du Conseil fédéral du 28 juin 2006 concernant la révision du code civil suisse [Protection de l'adulte, droit des personnes et droit de la filiation], FF 2006 6635, spéc. p. 6695).
L'art. 426 CC exige la réalisation de trois conditions cumulatives, à savoir une cause de placement (troubles psychiques, déficience mentale ou grave état d'abandon), un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée permettant de satisfaire les besoins d'assistance de la personne placée ou de lui apporter le traitement nécessaire (arrêt 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2.1 et la référence).
Ainsi, le placement à des fins d'assistance ne peut être décidé que si, en raison de l'une des causes mentionnées de manière exhaustive à l'art. 426 CC, l'intéressé a besoin d'une assistance personnelle, c'est-à-dire présente un état qui exige qu'une aide lui soit fournie, souvent sous la forme d'un traitement médical, que des soins lui soient donnés et qu'une protection au sens étroit lui soit assurée (ATF 134 III 289 consid. 4; arrêt 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2.1). Dans sa décision, l'autorité de protection doit indiquer quel danger concret pour la vie ou la santé de l'intéressé subsisterait, dans le cas d'espèce, si le traitement ou l'assistance n'était pas mis en oeuvre, l'existence d'un risque purement financier n'étant a priori pas suffisant; le risque de danger pour les tiers peut également être pris en compte (art. 426 al. 2 CC; ATF 140 III 101 consid. 6.2.3). Il faut encore que la protection nécessaire ne puisse être réalisée autrement que par une mesure de placement à des fins d'assistance, c'est-à-dire que d'autres mesures, telles que l'aide de l'entourage, l'aide sociale ou un traitement ambulatoire, aient été ou paraissent d'emblée inefficaces (ATF 140 III 101 consid. 6.2; arrêt 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2.1 et les références). Il s'agit là de l'application du principe de proportionnalité, qui exige que les actes étatiques soient propres à atteindre le but visé, justifiés par un intérêt public prépondérant, et qu'ils soient à la fois nécessaires et raisonnables pour les personnes concernées. La mesure doit être considérée comme une
ultima ratio, toutes les mesures alternatives portant une atteinte moins importante à la situation juridique de l'intéressé devant être examinées. Une mesure restrictive est notamment disproportionnée si une mesure plus douce est à même de produire le résultat escompté. L'atteinte, dans ses aspects matériel, spatial et temporel, ne doit pas être plus rigoureuse que nécessaire (arrêts 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2.1; 5A_564/2008 du 1er octobre 2008 consid. 3).
Eu égard au principe de la proportionnalité, le fait que l'assistance ou le traitement nécessaires ne puissent pas être fournis d'une autre façon que par un internement ou une rétention dans un établissement constitue l'une des conditions légales au placement. Tel peut notamment être le cas lorsque la personne concernée n'a pas conscience de sa maladie et de son besoin de placement (ATF 140 III 101 consid. 6.2.3 et les références; arrêt 5A_634/2016 du 21 septembre 2016 consid. 3.1) ou que son bien-être nécessite un traitement stationnaire, qui ne peut être couronné de succès que s'il est assuré sans interruption (arrêts 5A_374/2018 du 25 juin 2018 consid. 4.2.1; 5A_652/2016 du 15 décembre 2016 consid. 2.2).
5.2. Droit constitutionnel codifié aux art. 10 al. 2 et 7 Cst. , la liberté personnelle garantit le droit à l'intégrité physique et psychique, la liberté de mouvement (art. 10 al. 2 Cst.), le respect de la dignité humaine (art. 7 Cst.) et, de manière générale, toutes les facultés élémentaires dont l'exercice est indispensable à l'épanouissement de la personne humaine (ATF 142 I 195 consid. 3.2; 134 I 209 consid. 2.3; arrêt 2C_294/2020 du 15 mars 2021 consid. 6.1). La liberté personnelle n'est pas absolue. Comme pour tout autre droit fondamental, des restrictions sont admissibles si elles reposent sur une base légale, si elles sont justifiées par un intérêt public et si elles respectent le principe de la proportionnalité; en outre, elles ne peuvent violer l'essence des droits fondamentaux (art. 36 Cst.; ATF 133 I 27 consid. 3.1; 130 I 16 consid. 3, 65 consid. 3.1; 126 I 112 consid. 3a). L'étendue de la protection de la liberté personnelle, y compris des droits qui en découlent, et les limites à l'admissibilité des atteintes doivent être concrétisées dans chaque cas d'espèce, au vu de la nature et de l'intensité de l'atteinte et eu égard au besoin de protection particulier de la personne concernée (ATF 133 I 58 consid. 6.1; 126 I 112 consid. 3a; 124 I 85 consid. 2a; 120 Ia 147 consid. 2a; arrêt 5A_656/2007 du 13 mars 2008 consid. 2.3.1 [placement en chambre fermée dans le cadre d'un placement à des fins d'assistance]).
6.
La recourante fait valoir que devant l'autorité cantonale, elle a conclu, à titre subsidiaire, à ce que son curateur soit chargé d'établir un inventaire de tous ses biens ainsi que des propositions d'alternatives au placement en tenant compte de ces biens, l'enquête en placement devant être suspendue dans l'intervalle. En rejetant cette conclusion pour le motif que ses finances ne lui permettraient à l'évidence pas d'assumer les frais d'un traitement ambulatoire, la cour cantonale aurait écarté la mesure moins incisive qui lui était proposée, violant ainsi le principe de la subsidiarité posé par l'art. 426 CC. Le fait qu'en vertu de l'art. 431 CC, son curateur puisse présenter les éléments financiers en question lors du réexamen périodique du placement qui interviendrait dans les six mois suivant le placement n'y changerait rien, une telle durée dépassant ce qui est tolérable au vu de l'atteinte extrêmement grave à sa liberté personnelle.
En outre, sa liberté personnelle (art. 10 a. 2 Cst., 5 CEDH et 9 Pacte ONU II) serait violée, en tant que la Chambre des curatelles n'aurait pas examiné les alternatives possibles au placement et que la mesure prononcée serait assimilable à une privation de liberté à vie, puisque selon l'expertise, son état ne va aller qu'en s'aggravant de sorte que la possibilité d'une levée de la mesure ne serait en réalité que théorique. La mesure de placement ne serait en outre justifiée ni par un intérêt public, ni par un besoin social impérieux. La décision entreprise contreviendrait aussi à l'art. 7 Cst., qui garantit la dignité humaine, en tant qu'elle ne lui permettrait pas de décider de quelle manière elle entend passer les derniers moments de son existence et finir sa vie, à savoir en l'occurrence rester chez elle indépendamment des éventuelles conséquences néfastes que cela pourrait engendrer sur sa santé, comme elle n'avait cessé de l'affirmer au cours de la procédure. L'arrêt querellé violerait en outre l'interdiction des discriminations (8 al. 2 Cst., 14 CEDH, 26 Pacte ONU II) qui vise tant les discriminations directes qu'indirectes. Se référant aux statistiques de l'OFSP, la recourante souligne qu'il y a une corrélation exponentielle entre l'avancement en âge et le risque de souffrir de démence, et que la démence concerne beaucoup plus de femmes que d'hommes. Dès lors que la mesure litigieuse repose sur une expertise psychiatrique selon laquelle la recourante est atteinte de démence, elle se fonderait sur deux critères sensibles au sens de l'interdiction des discriminations, soit l'âge et le sexe. Enfin, l'arrêt cantonal violerait son droit à la vie privée garanti par les art. 13 al. 1 Cst., 8 CEDH et 17 du Pacte ONU II, en tant qu'elle la priverait de décider de la manière dont elle désire finir sa vie. La mesure ne serait justifiée par aucun intérêt public ni besoin social impérieux, la recourante rappelant à cet égard que selon la jurisprudence de la CourEDH, il s'agit de trouver un juste équilibre entre le respect de la dignité et de l'autodétermination de l'individu et la nécessité de le protéger. La recourante ajoute qu'elle ne représente aucun danger pour la société. Elle estime que son droit à l'autodétermination devrait prédominer au vu de la gravité de l'atteinte causée par la mesure.
7.
7.1. Par sa critique relative à l'art. 426 CC, la recourante ne conteste ni l'existence d'une cause de placement - en l'occurrence un grave état d'abandon lié à une démence -, ni le fait que l'institution dans laquelle elle est placée est appropriée et que le placement est apte à atteindre le but d'assistance visé. Elle remet uniquement en cause le caractère subsidiaire et proportionné de la mesure. Sur ce point, elle se limite à s'en prendre à l'argument de la Chambre des curatelles tiré du fait que ses finances ne permettraient pas de prévoir une mesure ambulatoire. Or, la cour cantonale a retenu, dans une seconde motivation, que le retour à domicile de la recourante - qui ne pourrait être garanti que par le tournus permanent, jour et nuit, de trois à quatre soignants - était une mesure qui s'avérerait quoi qu'il en soit vaine, la recourante peinant, en raison de son anosognosie, à adhérer à l'aide qui lui était apportée. La recourante ne discute nullement cette seconde motivation (cf. supra consid. 2.1, 1er § in fine), pas plus qu'elle ne se plaint d'arbitraire quant à l'établissement des faits sur lesquels elle se fonde (cf. supra consid. 2.3), de sorte que le grief de violation de l'art. 426 CC est irrecevable faute de motivation suffisante.
7.2. S'agissant des arguments présentés en lien avec le grief de violation de sa liberté personnelle, la recourante se méprend lorsqu'elle prétend que les alternatives au placement n'ont pas été examinées. Comme indiqué précédemment, la Chambre des curatelles a expressément écarté la possibilité d'un retour à domicile et a dûment motivé sa décision à cet égard. En tant qu'elle fait valoir que le placement n'est justifié ni par un intérêt public, ni par un besoin social impérieux, elle omet que compte tenu du mandat de protection à l'égard des personnes qui ont besoin d'aide ancré dans la loi (art. 388 al. 1 CC), il n'est pas possible de nier l'existence d'un intérêt public justifiant une atteinte aux droits fondamentaux s'agissant de mesures de protection de l'adulte (cf. en matière de médication forcée ATF 130 I 16 consid. 5.2 et la référence à l'ATF 127 I 6 consid. 8; arrêts 5A_356/2016 du 8 juin 2016 consid. 5.2.4; 5A_211/2014 du 14 juillet 2014 consid. 3.1). On ne discerne par ailleurs pas en quoi les art. 10 al. 2 Cst., 5 CEDH et 9 Pacte ONU II auraient une portée propre par rapport aux règles du CC à cet égard, et la recourante ne le précise pas plus avant (cf. supra consid. 2.1 in fine). Pour le surplus, elle ne conteste pas que le placement repose sur une base légale au sens de l'art. 36 al. 1 Cst., à savoir l'art. 426 CC. Autant que recevable, le grief de violation de sa liberté personnelle doit ainsi être rejeté.
7.3. En tant qu'elle invoque la violation de l'art. 7 Cst., la recourante méconnaît que, son placement ayant été prononcé afin de lui apporter les soins dont elle a besoin et d'éviter sa mise en danger (notamment dénutrition, déshydratation, état d'abandon, chutes graves) - éléments qu'elle ne remet pas en question -, il a précisément pour but de la protéger et de garantir sa dignité humaine. Le grief doit ainsi être rejeté.
7.4. En tant qu'elle fait valoir que le délai maximal de six mois prévu par l'art. 431 al. 1 CC pour réexamen périodique de la mesure apparaît excessif au vu de l'intensité de celle-ci, la recourante omet que quoi qu'il en soit, la loi prévoit que la personne concernée doit être libérée dès que les conditions du placement ne sont plus remplies (art. 426 al. 3 CC). L'intéressée ou l'un de ses proches peut demander sa libération en tout temps (art. 426 al. 4 CC), et les institutions sont tenues de signaler à l'autorité de protection chaque placement qu'elles estiment pouvoir être levé (STEINAUER/FOUNTOULAKIS, Droit des personnes physiques et de la protection de l'adulte, 2014, n° 1398 et les références).
7.5. S'agissant du grief de violation de l'interdiction des discriminations, la recourante ne fait pas valoir que les dispositions conventionnelles qu'elle cite offriraient une garantie plus étendue que celle de l'art. 8 al. 2 Cst. En outre, il apparaît que contrairement à ce qu'elle soutient, son placement - mesure dont on ne peut pas nier l'intérêt public (cf. supra consid. 7.2) - n'a pas été prononcé qu'en raison de sa démence mais aussi du grave état d'abandon dans lequel elle se trouve et de son anosognosie quant à sa problématique, l'intéressée ayant besoin de nombreux soins et de surveillance afin d'éviter sa mise en danger. Partant, sa critique est d'emblée dénuée de pertinence.
7.6. En tant que la recourante fait valoir la violation de son droit à la vie privée pour le motif que son droit à l'autodétermination ne serait pas suffisamment pris en considération, la recourante ne peut être suivie. Quand bien même les dispositions qu'elle cite à cet égard auraient une portée propre par rapport à l'art. 426 CC, ce qui demeure douteux, force est de constater que selon les faits de l'arrêt entrepris, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF; cf. supra consid. 2.2), elle n'a pas conscience de son état et de ses difficultés et ne dispose pas de la capacité de discernement quant à la question de son lieu de vie. Dans ces circonstances et au vu de l'ampleur du besoin d'assistance de la recourante, la décision entreprise est proportionnée. Quant au prétendu défaut d'intérêt public, il peut être renvoyé au consid. 7.2 supra.
7.7. Vu les considérations qui précèdent, le placement à des fins d'assistance de la recourante apparaît régulier au regard des dispositions légales applicables, en particulier, respecte les principes de la proportionnalité et de la subsidiarité, ce qui entraîne le rejet de la conclusion principale de la recourante ainsi que de sa conclusion subsidiaire, dans la mesure de sa recevabilité (cf. supra consid. 1.2). Il n'y a pas non plus lieu de renvoyer la cause à la cour cantonale, comme le sollicite la recourante dans sa conclusion plus subsidiaire.
8.
En conclusion, le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Le recours étant d'emblée dépourvu de chances de succès, la requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée (art. 66 al. 1 LTF). Compte tenu des circonstances, le présent arrêt est rendu sans frais (art. 66 al. 1, 2e phrase, LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.
3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
4.
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à la Juge de paix du district de Lausanne, à la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud et au curateur de la recourante.
Lausanne, le 20 décembre 2021
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Dolivo