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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_266/2023  
 
 
Arrêt du 19 septembre 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, 
Stadelmann, Moser-Szeless, Beusch et Scherrer Reber. 
Greffier : M. Bürgisser. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par M e Frank Tièche, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Commission communale de recours en matière de 
taxes et d'impôts communaux de la 
Commune d'Aigle, 1806 Aigle 
intimée, 
 
Municipalité d'Aigle, 
Hôtel de Ville, place du Marché 1, 1860 Aigle, représentée par M e Benoît Bovay, avocat, 
 
Objet 
Taxes de raccordement de la Municipalité d'Aigle/VD (récusation), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 16 mars 2023 (FI.2023.0012). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA (ci-après: la société ou la contribuable) est propriétaire des parcelles n° xxx et n° yyy de la Commune d'Aigle (canton de Vaud). Le 2 mai 2022, la Municipalité de la Commune d'Aigle (ci-après: la Municipalité) a notifié à la contribuable deux décisions de taxation, l'une portant sur la taxe de raccordement aux eaux claires pour un montant de zzz fr. et l'autre sur la taxe de raccordement aux eaux usées pour un montant de aaa fr. La contribuable a déféré ces deux décisions auprès de la Commission communale de recours en matière de taxes et d'impôts communaux de la Commune d'Aigle (ci-après: la Commission communale de recours).  
 
A.b. Par courrier du 21 décembre 2022, la Commission communale de recours a informé la Municipalité qu'au vu de la complexité du cas, elle avait décidé de confier un mandat à un avocat pour l'assister dans le suivi procédural et le traitement du recours et que son choix s'était porté sur M e B.________, avocat à Lausanne (ci-après: l'avocat externe). Cependant, ne disposant pas de ressources budgétaires propres, elle a indiqué à la Municipalité qu'elle lui ferait suivre pour paiement les factures d'honoraires de l'avocat externe.  
Le 23 décembre 2022, le Président, ainsi que la Greffière de la Commission communale de recours ont signé une procuration au nom de "la Commune d'Aigle, par sa Commission de recours (...) " en faveur de l'avocat externe. L'objet du mandat était libellé de la manière suivante: "Recours formé par A.________ SA à l'encontre des décisions rendues par la Municipalité d'Aigle (taxe de raccordement eau potable et taxe de raccordement eaux potables et eaux usées) ". 
Le 23 janvier 2023, la société a pris connaissance des divers documents précités à l'occasion de la consultation du dossier de la procédure. 
 
A.c. Par courrier du 24 janvier 2023 adressé à la Commission communale de recours, la contribuable a requis la récusation de l'avocat externe et le retranchement des pièces ("supports d'information") qu'il aurait pu adresser à celle-ci ou à son Président. Le 4 février 2023, la Commission communale de recours a rejeté la demande de récusation.  
 
B.  
Statuant par arrêt du 16 mars 2023, le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, a rejeté le recours de la société dans la mesure où il est recevable. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ SA conclut principalement et en substance à la réforme de l'arrêt cantonal en ce sens que sa demande de récusation contre M e B.________ soit admise et que la décision de nomination du 21 décembre 2022 de celui-ci soit annulée. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et à ce que la cause soit renvoyée au Tribunal cantonal pour qu'il statue à nouveau dans le sens des considérants.  
Le Tribunal cantonal vaudois s'est référé à une précision de sa jurisprudence sur la qualification d'autorité administrative de la commission cantonale de recours instaurée par l'art. 45 de la loi vaudoise sur les impôts communaux du 5 décembre 1956 (LICom; rs/VD 650.11). 
Après que la Commission communale de recours a conclu au rejet du recours et que la Municipalité s'est brièvement déterminée, la contribuable a déposé des observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office (art. 29 al. 1 LTF) et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 144 II 184 consid. 1; 143 IV 357 consid. 1). 
 
1.1. Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure (art. 90 LTF), ainsi que contre les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation (art. 92 LTF).  
 
1.2. Une décision porte sur une demande de récusation lorsqu'elle tranche la question de la récusation d'un membre de l'autorité, tel qu'un juge. Doit en outre être assimilée à une décision sur une demande de récusation au sens de l'art. 92 LTF toute décision qui se prononce séparément sur la composition régulière de l'autorité qui entend statuer ensuite sur le fond; il s'agit en effet d'une question préliminaire qui doit être définitivement liquidée sans attendre la suite de la procédure (arrêt 8C_452/2020 du 7 octobre 2021 consid. 1.3 et les références).  
 
1.3. L'arrêt cantonal confirme la décision du 4 février 2023 de l'intimée, par laquelle celle-ci a rejeté la demande de récusation déposée par la contribuable contre l'avocat externe. En l'occurrence, cet avocat ne fait pas formellement partie de la Commission communale de recours et n'avait pas vocation à agir, selon les constatations cantonales, en qualité d'expert dans le cadre de l'administration des preuves au sens de l'art. 34 de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; rs/VD 173.36). Selon les juges cantonaux, il était plutôt appelé à "conseiller [la Commission communale de recours] dans le traitement du recours" et son rôle pouvait tout au plus "s'apparenter à celui d'un greffier". Il ressort de ces constatations que l'avocat externe était amené à participer, même indirectement, à la préparation de la décision à venir. Par conséquent, il s'agit d'une cause ayant trait à une demande de récusation en lien avec la composition régulière de l'autorité qui entend statuer ensuite sur le fond. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le recours en vertu de l'art. 92 LTF.  
 
2.  
 
2.1. Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. L'intimée perd de vue ces principes en présentant, à l'appui de sa réponse adressée au Tribunal fédéral, des pièces qu'elle n'a pas produites en instance cantonale et qui concernent en particulier le processus de nomination de l'avocat externe, ainsi qu'un courrier adressé à la Municipalité en lien avec la demande de prise en charge par cette dernière des honoraires de cet avocat. En effet, ces pièces ne résultent pas de l'arrêt attaqué et l'intimée n'explique pas pour quels motifs elle n'a pas été en mesure de les produire en instance cantonale; elles sont donc irrecevables (cf. ATF 143 V 19 consid. 1.2).  
Il en va de même des pièces produites par la recourante en lien avec la procédure cantonale l'opposant sur le fond à la Municipalité d'Aigle, dont elle ne déduit au demeurant aucun grief. 
 
2.2. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Toutefois, et conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la violation de droits fondamentaux ainsi que celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et motivé de façon claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 143 IV 500 consid. 1.1; 142 III 364 consid. 2.4).  
Sauf exceptions non réalisées en l'espèce (cf. art. 95 let. c, d et e LTF), on ne peut invoquer la violation du droit cantonal en tant que telle devant le Tribunal fédéral. Il est néanmoins possible de faire valoir que son application consacre une violation du droit fédéral, comme l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.) ou la garantie d'autres droits constitutionnels (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 142 III 153 consid. 2.5; 140 III 385 consid. 2.3). Le recourant doit formuler de tels griefs de manière conforme aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF qui viennent d'être exposées (ATF 143 I 321 consid. 6.1; 143 II 283 consid. 1.2.2; 139 I 229 consid. 2.2). 
 
2.3. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).  
 
3.  
Le litige porte sur le point de savoir si le Tribunal cantonal était en droit de confirmer la décision du 4 février 2023 de la Commission communale de recours, par laquelle elle a rejeté la demande de récusation contre M e B.________. Dans ce cadre, la recourante remet également en cause la composition régulière de cette commission, cet aspect étant étroitement lié à celui de la récusation de l'avocat externe.  
 
4.  
 
4.1. En se référant à sa jurisprudence (arrêt FI.2018.0133 du 30 octobre 2018), la juridiction cantonale a considéré que la Commission communale de recours - prévue par l'art. 45 LICom - ne constituait pas une autorité judiciaire, de sorte que les art. 30 Cst. et 6 CEDH ne lui étaient pas applicables. Par conséquent, le recours à un avocat externe pour assister la Commission communale de recours n'était pas critiquable, puisque celui-ci ne faisait pas partie de la composition de l'autorité. De plus, dès lors que la nomination de l'avocat externe s'inscrivait dans le cadre de "l'organisation du travail de la commission", celle-ci pouvait, sans violer le droit d'être entendu des parties, se dispenser d'attirer leur attention sur cette nomination. Tout au plus, pour les juges cantonaux, le rôle exercé par l'avocat externe pouvait "s'apparenter à celui d'un greffier". En tout état de cause, la recourante avait été informée de cette nomination à l'occasion de la consultation du dossier, de sorte que son droit d'être entendue n'avait pas été violé. Pour le surplus, la Municipalité n'avait pas été consultée et n'était pas intervenue dans le cadre du processus de sélection de l'avocat externe, de sorte qu'il n'existait pas de motif de prévention à l'égard de celui-ci. Le fait que les honoraires de l'avocat étaient réglés directement par l'intermédiaire de la Municipalité en raison d'un "besoin pratique" (puisque la Commission communale de recours ne disposait pas d'une autonomie financière) ne constituait pas davantage un motif de prévention.  
 
4.2. A l'encontre de ce raisonnement, la recourante fait d'abord valoir que la Commission communale de recours constitue un "tribunal" au sens des art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH. En ayant recouru, sans base légale, aux services d'un avocat externe "dont les pouvoirs [étaient], selon procuration, aussi étendus que diffus", cette autorité aurait violé les garanties procédurales découlant de ces normes. De plus, l'avocat mandaté serait assimilable à un "juge de l'ombre" pouvant influencer, sans légitimité, l'intimée en faveur d'une des parties; cela serait d'autant plus vrai que ses honoraires sont pris en charge par la partie adverse, soit la Municipalité. Pour la recourante, son droit d' être entendue consacré à l'art. 29 Cst. aurait également été violé puisqu'elle n'avait pas été consultée avant que la décision de nomination de M e B.________ ne fût prise.  
 
4.3. Pour sa part, la Commission communale de recours relève principalement que le mandat confié visait à garantir "une procédure irréprochable" au regard "de la mission légale" qui lui est confiée et qu'à aucun moment elle n'avait entendu "agir dans l'ombre". En outre, elle ne disposait pas d'une autonomie budgétaire de sorte qu'elle avait demandé à la Municipalité de régler, par le truchement de la bourse communale, les factures qu'il appartenait à celle-ci de contrôler.  
 
5.  
 
5.1. Dans un arrêt 2C_797/2013 du 8 juillet 2014 (consid. 8), le Tribunal fédéral a considéré que l'art. 30 Cst. s'appliquait pour statuer sur la composition de la Commission communale de recours en matière d'impôts de la Commune de Ballaigues, instituée conformément à l'art. 45 al. 1 LICom (infra consid. 5.4.2). Il ressortait en effet de l'exposé des motifs de la LICom, dont il sera question ci-après (consid. 6.1.2 infra), que la commission communale de recours instaurée par le droit cantonal n'avait pas de fonction politique mais bien une véritable fonction juridictionnelle. L'élection des membres de la commission communale de recours par le conseil communal de la Commune de Ballaigues ne violait pas l'art. 30 Cst.  
Nonobstant ces considérations - qui ne sont pas fondées sur un examen approfondi des caractéristiques d'une commission communale de recours en matière d'impôts - et compte tenu du raisonnement de la cour cantonale, qui se réfère à sa propre jurisprudence postérieure à l'arrêt précité du Tribunal fédéral, ainsi que des conclusions et motifs du recours, il convient de traiter de manière détaillée la question de savoir si la Commission communale de recours en matière de taxes et d'impôts communaux de la Commune d'Aigle constitue un tribunal au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. 
 
5.2. Il convient d'emblée de relever que l'art. 6 par. 1 CEDH ne trouve pas application dans les procédures fiscales qui ne revêtent pas un caractère pénal (ATF 140 I 68 consid. 9.2 et les références), comme c'est le cas en l'espèce. Partant, les griefs invoqués par la recourante en se fondant sur cette disposition doivent être écartés. Elle ne prétend du reste pas que la protection du droit conventionnel serait plus étendue que celle de l'art. 30 al. 1 Cst. au regard des violations qu'elle allègue dans son mémoire de recours. Elle ne démontre pas non plus que les garanties générales de procédure, prévues par l'art. 27 de la Constitution du Canton de Vaud du 14 avril 2003 (Cst./VD; RS 131.231), iraient au-delà de celles de l'art. 30 Cst. Partant, c'est à la lumière de cette disposition constitutionnelle qu'il y a lieu d'examiner les questions litigieuses.  
 
5.3. Aux termes de l'art. 30 al. 1 Cst., toute personne dont la cause doit être jugée dans une procédure judiciaire a droit à ce que sa cause soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. Les tribunaux d'exception sont interdits.  
Selon la jurisprudence, est considérée comme un "tribunal" au sens de cette disposition une autorité qui tranche des litiges en rendant des décisions motivées et contraignantes, fondées sur la loi et le droit, à l'issue d'une procédure ordonnée et équitable de nature judiciaire. Cette autorité ne doit pas nécessairement être intégrée à la structure judiciaire ordinaire de l'Etat; elle doit cependant, par son organisation, sa composition, le mode de nomination de ses membres, la durée de leurs fonctions, son insensibilité aux influences extérieures et l'apparence qu'elle présente, être indépendante et impartiale tant envers d'autres autorités qu'envers les parties. Outre les caractéristiques d'indépendance et d'impartialité, il est inhérent à la nature d'un tribunal que celui-ci établisse lui-même les faits pertinents et leur applique les règles du droit au cours d'une procédure conforme à l'Etat de droit, qui aboutisse à une décision contraignante pour les parties. Le tribunal doit jouir d'un pouvoir d'examen complet en fait et en droit (ATF 142 III 732 consid. 3.3 et les références; 139 III 98 consid. 4.2 et les références). 
Selon la doctrine, une autorité judiciaire au sens de l'art. 30 Cst. est caractérisée, d'un point de vue fonctionnel, par son activité juridictionnelle et, du point de vue de son organisation, par son indépendance institutionnelle (RHINOW et al., Öffentliches Prozessrecht, 4e éd. 2021, § 7 n. 463; KIENER/KÄLIN/WYTTENBACH, Grundrechte, 3e éd. 2018, § 31 n. 46). Est déterminante une appréciation de l'ensemble des différents éléments pertinents (GEROLD STEINMANN/BENJAMIN SCHINDLER/DAMIAN WYSS, in Die schweizerische Bundesverfassung, St. Galler Kommentar, 4e éd. 2023, n. 6 et 8 ad art. 30; d'un autre avis, selon lequel la nature fonctionnelle est prépondérante, BOHNET, in Commentaire romand, Constitution fédérale, 2021, n. 3 et 25 ss ad art. 30). 
 
5.4.  
 
5.4.1. En droit cantonal vaudois, l'article premier de la loi vaudoise du 28 février 1956 sur les communes (LC; rs/VD 175.11) désigne les différentes autorités communales comme suit: le conseil général ou communal, la municipalité et le syndic. L'art. 40e LC prévoit qu'il existe au sein du conseil général et du conseil communal différents types de commissions: il s'agit de commissions instituées par la loi, des commissions de surveillance, des commissions ad hoc, ainsi que des commissions thématiques. Conformément à l'art. 40g al. 1 LC, le règlement du conseil définit le mode de désignation des membres des commissions et de leur président. L'al. 2 de cette disposition précise que les commissions délibèrent à huis clos.  
 
5.4.2. L'art. 45 al. 1 LICom impose à chaque commune d'instituer une Commission communale de recours de trois membres au moins, nommés par le conseil communal ou général au début de chaque législature pour la durée de celle-ci. L'al. 2 de cette disposition prévoit que sous réserve des articles 5 et 44 LICom, cette commission peut être saisie d'un recours contre toute décision prise en matière d'impôts ou taxes communaux et de taxes spéciales. Selon l'art. 46 al. 1 LICom, le recours s'exerce conformément à la loi sur la procédure administrative. Conformément à l'art. 47 LICom, dont le titre marginal s'intitule "audition du recourant", la Commission communale de recours convoque le recourant et ordonne toutes mesures d'instructions qu'elle juge nécessaires. En outre, aux termes de l'art. 47a al. 1 LICom, les dispositions de la loi sur les impôts directs cantonaux (loi du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux [LI; rs/VD 642.11]) relatives au droit de recours s'appliquent par analogie au recours contre les décisions de la commission communale de recours. La municipalité a la qualité pour recourir contre les décisions de la commission communale de recours. Pour le surplus, la loi sur la procédure administrative est applicable. C'est à celle-ci que renvoie également l'art. 199 LI, selon lequel le recours au Tribunal cantonal s'exerce conformément à la loi sur la procédure administrative.  
 
5.5. Selon l'art. 37 du règlement du Conseil communal d'Aigle (RCC), adopté le 27 mars 2014 et approuvé par la Cheffe du département cantonal compétent le 3 juin 2014, les commissions sont formées de cinq, sept ou neuf membres et sont composées en tenant compte d'une représentation équitable des divers groupes politiques représentés au Conseil communal.  
 
6.  
Pour la juridiction cantonale, la Commission communale de recours est composée de membres du Conseil communal de sorte qu'elle ne dispose pas vis-à-vis de cet organe d'une indépendance institutionnelle. Partant, cette autorité ne peut pas être considérée comme un "tribunal" au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. (cf. arrêt du Tribunal cantonal FI.2018.0133 du 30 octobre 2018 consid. 3c et les références). Quoiqu'en dise la recourante, l'appréciation des premiers juges est conforme au droit et doit être suivie pour les motifs qui suivent. 
 
6.1.  
 
6.1.1. Le rôle de la Commission communale de recours, qui est considérée comme l'une des commissions instituées par la loi au sens de l'art. 40e LC (cf. DAVID EQUEY, La réforme de la loi vaudoise sur les communes, in RDAF 2013 I p. 239), est clairement circonscrit par la loi. Elle est compétente pour statuer sur les recours contre toute décision prise en matière d'impôts ou taxes communaux et de taxes spéciales (sous réserve des art. 5 et 44 de la LICom), en vertu de l'art. 45 al. 2 LICom. Sa fonction diffère par ailleurs de celle d'une commission typiquement parlementaire, comme la commission de gestion ou la commission des finances (cf. art. 40e et 40f LC). Elle se distingue également de par sa nature d'une commission ad hoc ou thématique, qui est prévue à l'art. 40e LC (sur la typologie des différentes commissions du législatif communal en droit vaudois, cf. DAVID EQUEY, op. cit., p. 239 ss; le même, Aspects juridiques de l'institution communale en droit vaudois - la répartition des attributions entre autorités communales et le pouvoir de contrôle du conseil sur l'activité de la municipalité en droit vaudois, in RDAF 2010 hors série, p. 46 ss). Dès lors, la Commission communale de recours n'a aucune compétence ou fonction politique, mais bien une fonction juridictionnelle (arrêt 2C_797/2013 du 8 juillet 2014 consid. 8.1; DAVID EQUEY, Les impositions communales en droit vaudois, in RDAF 2012 II p. 176, selon lequel ladite commission constitue véritablement une autorité juridictionnelle).  
 
6.1.2. Selon les considérations de l'instance précédente, en ce qui concerne la fonction des commissions communales de recours pour les impôts communaux, l'exposé des motifs relatif au projet de la LICom indiquait que l'institution d'une voie de recours à la commission communale de recours en matière d'impôts était justifiée, afin de garantir au contribuable une justice indépendante (cf. arrêt du Tribunal cantonal FI.2018.0133 du 30 octobre 2018 consid. 3c). A l'occasion d'une révision de l'art. 45 LICom en 1989, le législateur cantonal vaudois a indiqué vouloir maintenir la procédure de recours établie par la loi du 5 décembre 1956 sur les impôts communaux "telle qu'elle existe actuellement si ce n'est que le Tribunal administratif sera substitué, en seconde instance de recours, à la commission cantonale" (Bulletin du Grand Conseil vaudois, automne 1989, p. 547). On peut en déduire que le législateur vaudois entendait instituer une voie de recours préalable au niveau communal, avant que les causes ne puissent être portées devant une juridiction cantonale "en seconde instance".  
Le législateur cantonal n'a toutefois pas précisé plus avant dans quelle mesure il entendait conférer auxdites commissions communales de recours le rôle d'un véritable tribunal ou s'il s'agissait de permettre aux communes d'instaurer une autorité chargée d'examiner sans trop de formalités une décision avec laquelle le contribuable n'était pas d'accord, comme l'aurait fait une autorité chargée de traiter une opposition et dont la décision peut être portée devant un tribunal. 
En tout état de cause, l'aspect fonctionnel reposant sur l'activité juridictionnelle de la Commission communale de recours en lien avec l'intention du législateur, même renforcé par la mise en place d'une procédure organisée et transparente que celle-ci doit appliquer (cf. art. 47a LICom et le renvoi aux règles de la LPA-VD), n'est pas suffisant pour lui reconnaître la qualité d'une autorité judiciaire au sens de l'art. 30 Cst., compte tenu des autres éléments qu'il convient encore de prendre en considération. 
 
6.2.  
 
6.2.1. Sous l'angle de l'indépendance institutionnelle, on rappellera tout d'abord que l'une des fonctions importantes du droit à être jugé par un tribunal indépendant et impartial au sens de l'art. 30 Cst. est de concrétiser et de développer le principe de la séparation des pouvoirs qui, à cet égard, n'a pas de portée propre (ATF 140 I 271 consid. 8.4.2; 132 I 229 consid. 9.2). Le droit à un tribunal indépendant implique que le justiciable puisse soumettre sa cause à un tribunal qui soit à l'abri de pressions extérieures, à même de statuer sans recevoir d'instructions ou de recommandations (ATF 132 I 229 consid. 9.2 et la référence). Il doit prévenir en particulier une emprise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire (ATF 140 I 271 consid. 8.4.2; 124 I 255 consid. 5b/aa).  
 
6.2.2. Il est constant que les membres de la Commission communale de recours (les commissaires) sont élus parmi les membres du parlement communal et par celui-ci, soit le Conseil communal d'Aigle. Sous un angle général et abstrait, même si une incompatibilité entre une fonction au sein de cette commission et au sein de l'organe législatif communal n'est pas prévue (cf. art. 143 al. 1 Cst./VD en relation avec l'art. 141 al. 1 Cst./VD), la double fonction exercée par les membres de la Commission communale de recours s'oppose à la reconnaissance d'une indépendance institutionnelle au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. Si, par le passé, l'aspect de l'indépendance institutionnelle a été apprécié de manière assez large, certains cantons admettant qu'une personne siège au parlement cantonal tout en exerçant la fonction de juge à titre principal ou comme suppléant (KURT EICHENBERGER, Die richterliche Unabhängigkeit als staatsrechtliches Problem, Berne 1960, p. 230 s.), une telle approche ne correspond plus aux conceptions actuelles, fondées sur les garanties constitutionnelles prévues depuis de nombreuses années par les art. 29a et 30 Cst. (sur l'amélioration de la protection juridique prévue par la Constitution fédérale du 18 avril 1999, voir FF 1997 I 511, ch. 231.4; sur l'historique des art. 29a et 30 Cst., BOHNET, in Commentaire romand, Constitution fédérale, 2021, n. 16 ss ad art. 30; STEINMANN/SCHINDLER/WYSS, op. cit., n. 1 ss ad art. 29a Cst. et n. 1 ss ad art. 30 Cst.).  
Compte tenu de l'importance de l'indépendance institutionnelle, l'exercice de "doubles fonctions" comme membre du parlement et membre d'une autorité judiciaire est en principe prohibée, du moins lorsque ces fonctions concernent le même niveau de structure étatique. Le juge qui serait également membre d'un parlement, où il exerce une fonction politique, en vertu du mandat électif, également en tant que représentant d'une certaine tendance politique, apparaîtra difficilement comme indépendant, alors qu'il a adopté les normes qu'il s'agit d'appliquer ou d'examiner dans son activité juridictionnelle (REGINA KIENER, Richterliche Unabhängigkeit, Berne 2001, p. 250 s.). En l'occurrence, dès lors que les membres de la Commission communale de recours (les commissaires) ont également comme attribution, en tant que membres du Conseil communal d'Aigle, de délibérer sur le projet d'arrêté d'imposition (cf. art. 17 ch. 4 RCC), on ne saurait reconnaître qu'ils disposent, sous l'angle général et abstrait, d'une indépendance institutionnelle au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. lorsqu'ils ont à se prononcer sur un recours contre "toute décision prise en matière d'impôts ou taxes communaux et de taxes spéciales" (sous réserve des art. 5 et 44 LICom; cf. art. 45 al. 2 LICom). 
 
6.3. Du point de vue organisationnel, il existe également des éléments incompatibles avec une qualification de tribunal au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. La Commission communale de recours est composée de sept membres et d'une greffière (cf. le site Internet de la Commune d'Aigle, https://www.aigle.ch, sous Autorités, officiel/Conseil communal/Commissions, consulté le 9 août 2023). Si elle s'organise toute seule (art. 40 RCC) et délibère à huis clos (art. 45 § 1 RCC), elle prend toutefois ses décisions à la majorité absolue des membres présents - un quorum de quatre membres devant être atteint (cf. art. 45 § 1 RCC) - avec, en cas d'égalité des voix, le vote prépondérant du président (cf. art. 45 § 2 RCC). Or de telles modalités de prise de décision sont très inhabituelles pour un tribunal au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. Pour celui-ci, la jurisprudence exige qu'en cas de quorum, la loi doit prévoir dans quelles situations la composition normale de l'autorité judiciaire peut ne pas être respectée (arrêts 1C_7/2021 du 26 mars 2021 consid. 4.4 et la référence; 1C_610/2014 du 24 juillet 2015 consid. 3.3). Par ailleurs, s'il est usuel qu'une autorité judiciaire rende sa décision à l'unanimité ou à la majorité de ses membres, il n'est pas concevable, du point de vue de l'indépendance personnelle, que l'un d'entre eux, dût-il assumer la fonction de la présidence, ait une voix prépondérante par rapport aux autres.  
S'ajoute à cela que la rémunération des commissaires est fixée une fois par année par le Conseil communal, à l'instar des autres commissions du pouvoir législatif communal (cf. art. 17 ch. 14 RCC). Sous l'angle de l'indépendance organisationnelle, un tel mode de rémunération s'écarte du système usuel de rémunération des membres d'une autorité judiciaire, où le salaire est fixé par avance pour toute la durée de la législature (soit plusieurs années consécutives) dans le cadre d'un budget propre au tribunal. 
 
6.4. En conclusion, la Commission communale de recours ne peut pas être considérée comme un tribunal au sens de l'art. 30 al. 1 Cst. Elle exerce certes une fonction juridictionnelle mais à titre d'autorité qui peut être qualifiée d'administrative - nonobstant son intégration dans le pouvoir législatif communal -, dans la mesure où elle est appelée à rendre des décisions fondées sur le droit public. Le grief tiré de la violation de l'art. 30 al. 1 Cst. est mal fondé, seules les exigences de l'art. 29 Cst. s'appliquant à l'intimée.  
 
7.  
 
7.1. Sous l'angle des exigences prévues par l'art. 29 Cst., la recourante invoque uniquement une violation de son droit d' être entendue prévu à l'al. 2 de la disposition. Elle cite également les art. 27 al. 2 Cst./VD et 34 LPA-VD tout en admettant qu'ils ont la même portée que l'art. 29 al. 2 Cst., de sorte que son argumentation sera examinée sous l'angle de la norme constitutionnelle fédérale.  
 
7.2. La recourante soutient qu'elle aurait dû être consultée avant que la décision de nomination de M e B.________ ne fût prise.  
 
7.2.1. Dans la mesure où la contribuable invoque, dans le cadre de son droit d'être entendue, que la décision reviendrait à nommer "un juge de l'ombre" et à violer l'art. 30 Cst., son grief tombe à faux, puisque l'intimée n'est pas soumise aux exigences prévues par cette disposition (consid. 6 supra).  
C'est le lieu d'ajouter que la Commission communale de recours est tenue de respecter les garanties générales de procédure prévues par l'art. 29 al. 1 Cst., qui n'impose pas l'indépendance et l'impartialité comme maxime d'organisation (ATF 140 I 326 consid. 5.2 et les références). A la suite des premiers juges, on ne voit pas que, sous cet angle, le mandat confié par l'intimée à un tiers extérieur pour l'assister dans la procédure serait problématique à ce stade. Ce tiers, qui n'est pas un membre de la Commission communale de recours, n'est pas autorisé à participer à la décision qu'elle est appelée à rendre. Son rôle ne peut pas aller au-delà de celui d'un conseiller qui assiste ladite commission dans les travaux préparatoires en vue du prononcé de la décision, ce que souligne du reste celle-ci en indiquant qu'il s'agit d'un "mandat de conseil" qui se concentre "sur la garantie d'une procédure irréprochable". Il va sans dire que la Commission communale de recours ne peut en aucun cas déléguer le pouvoir de décision au mandataire externe, puisqu'il lui appartient à elle seule, de par la loi, de se prononcer sur le recours qui lui a été soumis selon les modalités prévues par celle-ci. Une telle délégation de la tâche juridictionnelle administrative requerrait un fondement légal qui fait défaut en l'occurrence. Pour ce motif déjà, le parallèle qu'a fait la juridiction cantonale avec la position d'un greffier-juriste n'est pas correct, puisque la fonction et les attributions de celui-ci - dont en principe le droit de faire usage de sa voie consultative - reposent sur des règles claires de l'organisation judiciaire ( comp. ATF 115 Ia 224 consid. 7b; cf. aussi ATF 124 I 255 consid. 3c/aa). Etant donné que l'intimée ne dispose apparemment pas de collaborateurs juridiques susceptibles de l'appuyer dans certaines tâches préparatoires, elle est en droit de recourir aux services d'un mandataire juridique externe, ce qui ne constitue pas une démarche inhabituelle pour une autorité administrative. Dès lors que ce mandataire n'a pas de compétence décisionnelle et en l'absence de tout indice que le rôle que lui attribue l'intimée dépasserait celui de conseiller pour les travaux préparatoires à la décision, il n'y a pas d'atteinte aux garanties de l'art. 29 al. 1 Cst. (comp. quant à la récusation en cas d'absence de pouvoir décisionnel, arrêt 2C_37/2010 du 14 juin 2010 consid. 3.5). 
 
7.2.2. Pour le reste, la juridiction cantonale a retenu que la recourante n'avait pas à être entendue par l'intimée quant à son intention de mandater l'avocat externe et qu'en tout état de cause, la contribuable avait été informée du mandat en cause au moment où elle a consulté le dossier auprès de la Commune, le 23 janvier 2023.  
Sous l'angle de l'art. 29 al. 2 Cst., la recourante se limite à affirmer "qu'il n'y a aucune guérison du vice du simple fait qu['elle] a appris incidemment la nomination d'un juge de l'ombre", puisqu'elle aurait été privée d'obtenir des réponses à des questions sur le rôle du mandataire. Or elle ne discute pas sérieusement - et quoi qu'il en soit de manière suffisamment motivée (consid. 2.2 supra) - la guérison, devant le Tribunal cantonal, de la prétendue violation de son droit d'être entendue commise par l'intimée (sur les conditions d'une réparation de la violation du droit d'être entendue, cf. ATF 145 I 167 consid. 4.4). Au demeurant, son argumentation porte une fois encore sur la participation "d'un juge de l'ombre", qui n'est pas pertinente. De plus, on ne voit pas que le droit d'être entendu imposerait à une autorité administrative d'avertir les parties d'un mandat qu'elle compterait confier à un tiers pour l'assister dans certaines de ses tâches. Le grief est mal fondé. 
 
8.  
 
8.1. La recourante fait encore valoir une violation des art. 30 al. 1 Cst., 27 al. 1, 28 al. 1 Cst./VD et 9 al. 1 let. e LPA-VD, en requérant la récusation de M e B.________.  
 
8.2. Dans la mesure où la contribuable entend d'abord remettre en cause la compétence de la Commission communale de recours de mandater un tiers externe et critique le rôle de celui-ci en tant que magistrat (au sens de l'art. 30 al. 1 Cst.), son argumentation a déjà été traitée (respectivement consid. 7.2.1 et consid. 6 supra).  
Ensuite, la recourante voit une apparence de prévention dans le fait que les honoraires de l'avocat externe seront pris en charge par la Municipalité, soit sa partie adverse. Or selon les constatations de la juridiction cantonale, qui lient le Tribunal fédéral (consid. 2.3 supra), la transmission des factures du mandataire à la Municipalité répond à un besoin pratique dès lors que la Commission communale de recours ne dispose pas de ressources financières. Ces modalités de facturation ne suffisent pas à admettre une apparence de prévention, puisqu'elles reposent sur des raisons budgétaires objectives et impliquent l'intervention de la Municipalité uniquement en tant que service de paiement. Il appartiendra à la Commission communale de recours, en sa qualité de mandant, de vérifier les factures qui lui seront soumises, en fonction des instructions et du cadre du mandat qu'elle a définies. Pour le reste, les affirmations de la recourante quant à l'avantage que retirerait la Municipalité du "cheval de Troie" que représenterait l'avocat externe sont dénuées de tout fondement. 
En définitive, c'est à juste titre que la juridiction cantonale a nié un motif de récusation de l'avocat externe. 
 
9.  
Il résulte de ce qui précède que le recours est en tout point mal fondé. 
 
10.  
Vu l'issue de la procédure, la recourante supportera les frais judiciaires y afférents (art. 66 al. 1 LTF). La Commune d'Aigle n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Municipalité d'Aigle et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public. 
 
 
Lucerne, le 19 septembre 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Bürgisser