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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
9C_531/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 11 mai 2017  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales Pfiffner, Présidente, Glanzmann et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
Caisse de compensation du canton du Jura, 
Rue Bel-Air 3, 2350 Saignelégier, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, 
représentée par Me Baptiste Allimann, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-vieillesse et survivants (restitution de prestations), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, du 1er juillet 2016. 
 
 
Faits :  
 
A.   
La Caisse de compensation du canton du Jura (ci-après: la caisse de compensation) a octroyé à B.________, née en 1992, une rente d'orpheline de père avec effet au 1 er novembre 2011 (décision du 11 novembre 2011). La prestation a été versée sur le compte bancaire de A.________, le parent survivant, et régulièrement reconduite.  
Après avoir découvert que l'enfant majeur percevait un revenu en cours de formation supérieur à celui pris en compte dans la décision du 11 novembre 2011, la caisse de compensation a tout d'abord suspendu les versements dès le 1 er octobre 2014 (communication du 19 septembre 2014), puis supprimé le droit de B.________ à la prestation à partir du 1 er janvier 2013 (décision du 6 février 2015). Dans la même décision, la caisse de compensation a réclamé à A.________ la restitution de la somme de 19'656 fr. correspondant aux prestations versées à tort à sa fille de janvier 2013 à septembre 2014. Au vu du désaccord exprimé par A.________, la caisse de compensation a maintenu sa position (décision sur opposition du 10 juin 2015).  
 
B.   
Statuant le 1 er juillet 2016, le Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, a admis le recours formé par A.________ et annulé la décision sur opposition du 10 juin 2015.  
 
C.   
La caisse de compensation forme un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle demande l'annulation. Elle conclut au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour qu'elle statue sur les "autres conditions de la restitution des prestations versées à tort". 
L'intimée conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales conclut à l'admission du recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération (art. 97 al. 1 LTF).  
 
1.2. En principe, le recours en matière de droit public doit contenir des conclusions réformatoires. Contrairement aux affirmations de l'intimée, la conclusion en renvoi prise par la recourante est recevable, car elle n'est pas purement cassatoire au regard de la motivation du recours. Au demeurant, au vu des constatations de l'autorité précédente portant sur le seul cercle des personnes tenues à restitution, le Tribunal fédéral ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur l'ensemble des conditions de la restitution des prestations en cause. Il convient dès lors d'entrer en matière sur le recours.  
 
2.   
Compte tenu des conclusions et motifs du recours, le litige porte sur le point de savoir si l'intimée peut être recherchée en restitution des prestations versées en faveur de sa fille majeure (de janvier 2013 à septembre 2014). 
 
3.  
 
3.1. La juridiction cantonale a retenu que seul le bénéficiaire des rentes d'orphelin pouvait être soumis à l'obligation de restituer les prestations allouées indûment. En tant que tiers n'assumant pas la responsabilité de l'usage conforme des prestations en cause, l'intimée apparaissait en particulier comme ayant simplement fait office de "bureau d'encaissement".  
 
3.2. Invoquant une violation des art. 25 LPGA et art. 2 OPGA (RS 830.11), la recourante affirme que le parent survivant qui perçoit une rente d'orphelin d'un enfant majeur ne fait pas office de "bureau d'encaissement". Au contraire, les rentes lui sont versées en raison de son obligation de subvenir à l'entretien de l'enfant en formation (art. 277 al. 2 CC).  
 
4.  
 
4.1. Les prestations indûment touchées doivent être restituées (art. 25 al. 1, 1 ère phrase, LPGA, en lien avec l'art. 1 al. 1 LAVS). Selon l'art. 2 al. 1 OPGA, l'obligation de restituer incombe au bénéficiaire des prestations allouées indûment ou à ses héritiers (let. a), aux tiers ou aux autorités à qui ont été versées des prestations en espèces pour qu'elles soient utilisées conformément à leur but, au sens de l'art. 20 LPGA ou des dispositions des lois spéciales, à l'exception du tuteur (let. b) et aux tiers ou aux autorités à qui ont été versées après coup des prestations indues, à l'exception du tuteur (let. c). Les prestations allouées indûment pour un enfant mineur qui n'ont pas été versées à cet enfant et qui ne sont pas restituables en vertu de l'al. 1, let. b ou c, doivent être restituées par les personnes qui disposaient de l'autorité parentale au moment de leur versement (art. 2 al. 2 OPGA).  
 
4.2. L'art. 25 al. 1 LPGA reprend la réglementation antérieure à l'entrée en vigueur de la LPGA, telle qu'explicitée par la jurisprudence (ATF 130 V 318 consid. 5.2 p. 319). Interprétant l'ancien art. 47 al. 1 LAVS (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002), le Tribunal fédéral a jugé que le parent survivant qui a reçu une rente d'orphelin à laquelle l'enfant - même majeur - n'avait pas droit est tenu à restitution (arrêts H 12/68 du 9 mai 1968 consid. 3a, publié in RCC 1968 p. 510, et H 92/64 du 30 décembre 1964 consid. 2, publié in RCC 1965 p. 360). Il convient en effet d'assimiler, en ce qui concerne la restitution des prestations versées à tort, le parent qui a encore un devoir d'entretien à l'égard d'un enfant majeur à un représentant légal.  
 
4.3. Il n'y a pas lieu de s'écarter de cette jurisprudence. La rente d'orphelin - dont l'ayant droit est l'enfant - remplace le revenu professionnel du parent décédé et n'a pas pour but d'enrichir l'enfant, mais de compenser les difficultés financières liées à la disparition d'un parent (voir ATF 142 V 226 consid. 6.2 p. 231). Il s'agit donc d'une ressource (au sens de l'art. 276 al. 3 CC; arrêt 5A_149/2011 du 6 juillet 2011 consid. 3.3.1 et les références), qui doit être retranchée du coût d'entretien de l'enfant (art. 276 al. 2 CC).  
En l'espèce, la rente d'orphelin a été versée directement à l'intimée et c'est elle qui a touché les prestations. Elle en a bénéficié dès lors qu'elle n'a, d'une part, pas reversé les rentes à sa fille, mais en a gardé une partie pour l'entretien de celle-ci (en tout cas jusqu'au 1er octobre 2013; recours cantonal, p. 12). Cela ressort des pièces versées au dossier en instance cantonale qui permettent au Tribunal fédéral de compléter les faits sur ce point (supra consid. 1.1). D'autre part, elle a directement bénéficié des versements effectués en faveur de sa fille dans la mesure où elle aurait dû s'acquitter, en fonction de sa capacité financière, des frais d'entretien et de formation auxquels la rente d'orphelin a été affectée. Contrairement à ce que soutient l'autorité précédente, A.________ n'a dès lors pas perçu la prestation comme un simple service d'encaissement (p. ex. une banque) ou de paiement (à ce sujet, voir ATF 110 V 14 consid. 2b p.14). C'est à tort, par conséquent, que les premiers juges ont admis le recours cantonal au motif que l'intimée ne pouvait être tenue personnellement à restitution des rentes d'orphelin en cause. 
 
4.4. Ensuite de ce qui précède, le jugement entrepris doit être annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle reprenne l'examen de la cause au regard des aspects litigieux de la restitution sur lesquels elle ne s'était pas prononcée.  
 
5.   
Vu l'issue du litige, les frais afférents à la présente procédure seront supportés par l'intimée qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis. La décision du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, du 1 er juillet 2016 est annulée. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants.  
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 11 mai 2017 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Pfiffner 
 
Le Greffier : Bleicker