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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_106/2014  
   
   
 
 
 
Arrêt du 10 novembre 2014  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Mathys, Président, Jacquemoud-Rossari, Oberholzer, Rüedi 
et Brahier Franchetti, Juge suppléante. 
Greffière : Mme Kistler Vianin. 
 
Participants à la procédure 
B.X.________, 
représenté par Me Jacques Michod, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud,  
intimé. 
 
Objet 
Fixation de la peine (crime manqué de meurtre, mise 
en danger de la vie d'autrui, agression), 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale 
du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
du 6 septembre 2013. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 1er février 2013, le Tribunal criminel de l'arrondissement du Nord vaudois a reconnu B.X.________ coupable de crime manqué de meurtre, de mise en danger de la vie d'autrui, d'agression, de tentative de séquestration et d'enlèvement, d'infraction à la LStup, de délit et de contravention à la LArm. Il l'a condamné à une peine privative de liberté de huit ans, sous déduction de la détention préventive déjà subie, et a prononcé une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution à défaut de paiement de l'amende étant de trois jours. 
 
B.   
Par jugement du 6 septembre 2013, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel de B.X.________ et l'appel joint du Ministère public vaudois. 
 
Elle a retenu les faits suivants: 
 
B.a. Le 31 octobre 2011, dans la soirée, à C.________, Y.________ a gagné un montant de 5000 fr. en jouant au Tactilo dans un bar. Il a alors pris contact par téléphone avec une connaissance, A.X.________, pour tenter de lui revendre le billet gagnant. Le procédé devait permettre à Y.________ d'éviter de déclarer ce montant aux services sociaux dont il dépendait et d'obtenir plus rapidement de l'argent cash. Les deux intéressés ont convenu de se rencontrer pour discuter du prix de rachat. Un rendez-vous a été fixé devant le poste de gendarmerie de C.________, endroit choisi par Y.________ pour se prémunir d'éventuels actes de violence de la part de A.X.________ et de son frère.  
 
B.b. Sur place, la discussion n'a finalement pas porté sur la remise du billet de Tactilo, mais sur une ancienne dette de 900 fr. que Y.________ avait à l'égard de A.X.________. Presque immédiatement, A.X.________ et son frère B.X.________, qui l'accompagnait, se sont mis à frapper Y.________ à coups de poing, puis l'ont mis à terre avant de le frapper à coups de poing et de pied pendant plusieurs minutes. Ils l'ont ensuite saisi, l'un par les jambes, l'autre du côté de la tête, et ont tenté de l'enfermer dans le coffre de leur véhicule dans le but de l'emmener discuter chez son père. Y.________ s'est débattu et a finalement pu s'enfuir. Les multiples lésions subies par ce dernier ont été constatées dans un rapport établi le 1er novembre 2011.  
 
Pour ces faits, A.X.________ et son frère B.X.________ ont été reconnus coupables d'agression et de tentative de séquestration et d'enlèvement. 
 
B.c.  
 
B.c.a. Après s'être échappé, Y.________ a appelé le 117 au moyen de son téléphone portable. Son appel a été enregistré. L'opérateur de la police a toutefois présumé qu'il s'agissait de voies de fait uniquement et a renvoyé Y.________ chez lui en lui demandant de déposer une plainte le lendemain au poste de police de C.________. Peu après 21 heures, Y.________, endolori et sonné, a rencontré, par hasard, D.________ et E.________, qui avaient passé la soirée à boire au "F.________", à C.________. Il leur a exposé ce qui s'était passé avec les frères X.________. Tous trois ont décidé que l'affaire n'en resterait pas là. Ils se sont alors rendus à G.________ à bord du véhicule Mercedes conduit par D.________. Dans le véhicule se trouvait un bâton en bois. Durant le trajet, Y.________ a téléphoné à A.X.________ pour lui annoncer qu'il se rendait à G.________, accompagné de deux autres personnes, pour en " découdre ". Arrivé devant le domicile de la famille X.________ à G.________, D.________ a hurlé le nom de A.X.________ et des insultes en albanais. Personne n'est toutefois sorti. D.________ a alors convaincu E.________ de casser la vitre d'un véhicule parqué, qu'il pensait appartenir à la famille X.________, au moyen du bâton en bois se trouvant dans la Mercedes. E.________ s'est exécuté et a abandonné dans l'habitacle de la voiture le bâton en bois. Les trois hommes ont alors quitté les lieux en voiture en direction de la gare de G.________. Dès cet instant, ils se trouvaient mains nues.  
 
B.c.b. Un peu plus tard, les trois prénommés sont revenus à bord de leur véhicule en direction de la maison des frères X.________. Ils ont passé à proximité de ce logement à une vitesse réduite. Alors qu'ils circulaient ainsi, A.X.________, muni d'une arme de poing qui n'a pas été retrouvée, a fait feu en direction de la Mercedes à au moins une reprise. Quant à B.X.________, qui portait un pistolet Beretta 92S calibre 9 mm, il a lui aussi pointé son arme en direction de la Mercedes et a tiré à plusieurs reprises contre l'habitacle à une distance très proche du véhicule, de l'ordre de un à trois mètres. D.________ a été gravement atteint au niveau de la poitrine, mais a néanmoins réussi à continuer à conduire. B.X.________ est ensuite monté dans un véhicule non identifié, arrivé quelques dizaines de secondes après le départ de la Mercedes. La Mercedes a été prise en chasse et une course-poursuite s'est engagée, à tombeau ouvert. Quatre à cinq coups de feu ont encore été tirés sur la Mercedes qui a été touchée à plusieurs reprises. La course-poursuite a cessé lorsque le chargeur du Beretta a été vide.  
 
 B.X.________ a été reconnu coupable de crime manqué de meurtre et de mise en danger de la vie d'autrui à raison de ces faits. 
 
C.   
Contre le jugement cantonal, B.X.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouveau jugement. A titre subsidiaire, il conclut à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est mis au bénéfice des art. 47 et 48 let. c CP et que la peine est réduite à une quotité compatible avec l'octroi du sursis, sursis qui lui est accordé. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Dénonçant la violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir exposé les raisons qui l'ont conduite à ne pas prendre en considération la chute de A.X.________ lors du deuxième passage de la Mercedes. 
 
1.1. Selon la jurisprudence, une autorité se rend coupable d'une violation du droit d'être entendu si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 133 III 235 consid. 5.2 p. 248). Elle n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 138 IV 81 consid. 2.2 p. 84).  
 
1.2. Dans son appel, le recourant reprochait au tribunal de première instance d'avoir occulté certains éléments essentiels dans l'appréciation de sa culpabilité. Il exposait s'être trouvé dans un état de panique, car il avait vu son frère tomber et pensait qu'il était blessé. La cour cantonale a répondu à ce grief, en expliquant que le recourant avait au contraire agi avec détermination et sang froid. Elle a exposé les raisons qui l'ont conduite à cette conclusion. Le recourant l'a du reste parfaitement compris puisqu'il conteste ce raisonnement sous l'angle de l'arbitraire.  
 
2.   
Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir retenu, de manière arbitraire, la chute de A.X.________ et son incidence sur son attitude. Il expose avoir vu son frère tomber et avoir pensé que les occupants de la Mercedes lui avaient tiré dessus lors de leur deuxième passage. Il se trouvait donc dans un état de stress intense, réagissant à une expédition punitive qui mettait en danger sa vie et celle de ses proches. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral est un juge du droit. Il ne peut revoir les faits établis par l'autorité précédente que si ceux-ci l'ont été de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire arbitraire (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356). On peut renvoyer, sur la notion d'arbitraire, aux principes maintes fois exposés par le Tribunal fédéral (voir par ex: ATF 140 III 16 consid. 2.1 p. 18 s.; 138 III 378 consid. 6.1 p. 379). En bref, pour qu'il y ait arbitraire, il ne suffit pas que la décision attaquée apparaisse discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat. Le grief d'arbitraire doit être invoqué et motivé de manière précise (art. 106 al. 2 LTF). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 139 II 404 consid. 10.1 p. 445).  
 
2.2. La cour cantonale n'a pas méconnu la chute de A.X.________ (cf. jugement attaqué p. 51 à propos du recours de A.X.________). Elle a toutefois admis que, malgré cette chute, le recourant ne se trouvait pas dans un état de panique. Elle a exposé les raisons qui l'ont conduite à écarter un tel état: la famille X.________ était prévenue du premier passage de la Mercedes par le téléphone passé par Y.________ à A.X.________; elle s'attendait en outre au deuxième passage de la Mercedes, tel qu'il en ressort de l'appel téléphonique passé par A.X.________ à la Centrale d'engagement et de transmission de la police cantonale (ci-après: CET) et par le fait que le recourant était monté chercher une arme à feu; les frères X.________ sont restés à l'extérieur après le premier appel effectué par A.X.________ au CET au lieu de rester cloîtrés chez eux; le recourant a enfin été pris en charge par un conducteur non identifié pour pourchasser la Mercedes (jugement attaqué p. 47 s.). En retenant sur la base de l'ensemble de ces éléments que le recourant n'avait jamais perdu son sang froid mais riposté avec force et agressivité, la cour cantonale n'a pas fait preuve d'arbitraire.  
 
3.   
Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir retenu la circonstance atténuante définie à l'art. 48 let. c CP. 
 
Par son argumentation, le recourant fait valoir que la chute de son frère a causé un état de stress et de panique. Par cette argumentation, il s'écarte de l'état de fait du jugement cantonal, qui retient que le recourant a agi avec détermination, ne perdant jamais son sang froid et ripostant avec force et agressivité (jugement attaqué p. 48). Cette constatation de fait lie la cour de céans (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celle-ci n'ait été établie de façon manifestement inexacte ou arbitraire. Or, comme vu sous consid. 2.2, tel n'est pas le cas. 
 
Au vu des faits retenus par la cour cantonale, le recourant n'a manifestement pas agi en proie à une émotion violente que les circonstances rendaient excusables ou dans un état de profond désarroi (art. 48 let. c CP). La cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral, en écartant la circonstance atténuante de l'émotion violente ou du désarroi. Le grief soulevé doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
4.   
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Le recourant qui succombe devrait supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 10 novembre 2014 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Mathys 
 
La Greffière : Kistler Vianin