Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_144/2023
Arrêt du 4 septembre 2023
Ire Cour de droit civil
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Kiss, juge présidant, Rüedi et May Canellas.
Greffier: M. O. Carruzzo.
Participants à la procédure
1. A.a.________,
2. A.b.________,
tous deux représentés par Mes Nicolas Gillard et Adrian Veser, avocats,
ainsi que par Me Bernhard Berger, avocat,
recourants,
contre
1. X.________,
2. Z.________,
toutes deux représentées par Mes Laurent Hirsch et Célian Hirsch, avocats,
intimées,
1. A.c.________,
représenté par Mes Fabrice-Robert Tissot et Patrick Pithon, avocats,
2. A.d.________,
représenté par Me François Roux, avocat,
ainsi que par Me Quentin Lagier, avocat,
3. A.e.________,
représenté par Mes Antoine Eigenmann, Géraldine Chapus-Rapin et Pierre-Jean Douvier, avocats,
4. Y.________ SA,
5. U.________ SA,
toutes deux représentées par Mes Guillaume Tattevin et Gina Auciello, avocats,
Objet
arbitrage international,
recours en matière civile contre la sentence sur la compétence rendue le 31 janvier 2023 par un Tribunal arbitral avec siège à Genève (no 300526-2021).
Faits :
A.
A.a. A.c.________, né en (...), est un ingénieur géologue et un homme d'affaires, domicilié en Suisse. Il est marié à A.f.________. Les époux A.________ ont eu quatre enfants. A.a.________ et A.b.________, nés en (...), sont leurs deux fils jumeaux aînés. A.d.________ et A.e.________, nés en (...), sont leurs deux fils jumeaux cadets.
Durant de nombreuses années, Mes B.________, C.________ et D.________ont été les avocats de A.c.________.
A.b. A.c.________ a fondé un groupe de sociétés (ci-après: le groupe) en vue de fournir des prestations en matière d'exploration et de forages pétroliers, sous le pavillon de la société de droit français V.________ créée en (...). Ledit groupe est constitué de diverses structures juridiques, en particulier d'entités panaméennes et de fondations néerlandaises; l'objectif de ce montage est notamment l'optimisation fiscale.
A.c. La société néerlandaise Z.________, laquelle détient l'entier du capital-actions de la filiale de droit néerlandais X.________, fait partie dudit groupe. A.d.________ siège au sein du conseil d'administration des deux sociétés précitées. En décembre 2019, il a acquis la nue-propriété de l'intégralité du capital-actions de Z.________ La validité dudit transfert fait l'objet de procédures pendantes devant les tribunaux néerlandais.
A.d. Y.________ SA et U.________ SA sont deux sociétés du groupe incorporées au Panama. A.c.________ est membre du conseil d'administration de ces deux entités. Ses quatre enfants et son épouse siègent également au sein du conseil d'administration de Y.________ SA. L'avocate C.________ est également administratrice des deux sociétés précitées.
A.e. En 2005 et en 2010, A.c.________ a cédé ses participations dans la société V.________. Le produit de cette double cession a transité, sous forme de dividendes, vers X.________ et Z.________ pour un montant total d'environ 217 millions d'euros (EUR).
Sous l'impulsion de A.c.________, il a été décidé que ces fonds seraient utilisés pour constituer un " trésor de guerre " au moyen d'investissements diversifiés afin de contrebalancer les risques liés au secteur pétrolier et de prévoir une réserve en cas de crise. Un " pôle agricole " et un " pôle pétrole " ont ainsi été créés, dont la gestion opérationnelle a été confiée respectivement aux jumeaux aînés et aux jumeaux cadets.
A.f. A.c.________ et ses quatre fils se sont rencontrés à plusieurs reprises dans le cadre d'un "C onseil de famille ", lequel a été officialisé en septembre 2011, afin de donner un cadre plus formel aux réunions de ses cinq membres et d'assurer des rencontres régulières, dont l'objectif était notamment de définir les grandes lignes stratégiques du groupe. Auparavant, des rencontres informelles entre A.c.________ et ses quatre fils avaient déjà eu lieu pour discuter notamment d'investissements et de la gestion du groupe.
Entre le 15 septembre 2011 et le 22 mars 2016, le Conseil de famille s'est réuni au moins à 17 reprises. L'accord dudit conseil était nécessaire pour toute décision d'investissement dépassant 15'000'000 de dollars américains (USD).
Dans un procès-verbal du Conseil de famille du 28 février 2013, A.c.________ a tenu à souligner que tout lui appartenait et qu'il décidait seul de la gestion du groupe. Dans un document signé de sa main et établi en prévision d'une réunion fixée le 11 mars 2014, il a précisé qu'il gardait le pouvoir sur l'ensemble des fondations et de ses actifs, mais acceptait une forme de collaboration ouverte, dans le cadre de la gestion, avec ses quatre fils.
A.g. Le 18 juin 2010, X.________ et une autre société panaméenne du groupe, W.________ - dont les administrateurs sont A.c.________, E.________ et F.________ et qui n'a aucune activité commerciale ni employés ni locaux - ont conclu un contrat, intitulé " Loan Agreement " (ci-après: le premier contrat de prêt), en vertu duquel la première s'est engagée à prêter à la seconde un montant de 80'000'000 EUR, cette somme devant être versée en plusieurs tranches, la première d'entre elles s'élevant à 66'500'000 EUR. Le prêt, octroyé pour une durée de sept ans, renouvelable de deux ans en deux ans, portait intérêts à un taux LIBOR + 0,5 % par an, payables en une fois au remboursement du capital. Ledit contrat a été signé par A.c.________, l'avocate C.________ et A.d.________ pour X.________, et par E.________ et F.________ pour W.________.
Le 23 juin 2010, W.________ s'est engagée à accorder une ligne de crédit de 100'000'000 EUR à une autre société panaméenne du groupe, à savoir P.________ SA. Une première tranche de 66'500'000 EUR devait être versée conformément aux instructions de l'emprunteuse. Les montants avancés portaient intérêts à un taux annuel de 6 %, payables en une fois au remboursement du capital. Le contrat était conclu pour une durée de quatre ans, renouvelable de six mois en six mois. Il a été signé par E.________ et F.________ pour W.________, et par A.c.________ pour P.________ SA.
Le 24 juin 2010, P.________ SA et Y.________ SA ont conclu un contrat, intitulé " Loan Agreement ", en vertu duquel la première s'est engagée à prêter à la seconde un montant de 66'500'000 EUR, portant intérêts à 7,5 % l'an, payables en une fois au remboursement du capital. Ce prêt, octroyé pour une période de quatre ans, renouvelable de six mois en six mois, a été signé par A.c.________ pour P.________ SA et par A.e.________ pour Y.________ SA.
Le 30 juin 2011, P.________ SA et Y.________ SA ont conclu un contrat, intitulé " Loan Agreement ", en vertu duquel la première s'est engagée à prêter à la seconde un montant de 73'500'000 EUR, portant intérêts à 7,5 % l'an, payables en plusieurs tranches ou en une fois au remboursement du capital. Ce prêt, octroyé pour une période de quatre ans, renouvelable de six mois en six mois, a été signé par A.c.________ pour P.________ SA et par A.e.________ pour Y.________ SA.
Le 28 septembre 2011, Z.________ et W.________ ont conclu un contrat, intitulé " Loan Agreement " (ci-après: le quatrième contrat de prêt), en vertu duquel la première s'est engagée à prêter à la seconde un montant de 60'000'000 EUR, lequel devait être versé en plusieurs tranches dont une première s'élevant à 9'000'000 EUR. Le prêt, octroyé pour une période de sept ans, renouvelable de deux ans en deux ans, portait intérêts à un taux LIBOR + 0,5 % par an, payables en plusieurs échéances ou en une fois au remboursement du capital. Il a été signé par deux administrateurs néerlandais et A.d.________ pour Z.________ et par E.________ et F.________ pour W.________.
Le 29 novembre 2011, W.________ s'est engagée à prêter à P.________ SA un montant de 40'000'000 EUR, portant intérêts à 6 % l'an, payables en plusieurs échéances ou en une fois au remboursement du capital. Ce prêt, octroyé pour une période de quatre ans et demi, renouvelable de deux ans en deux ans, a été signé par E.________ et F.________ pour W.________. La copie dudit contrat versée à la procédure ne portait aucune signature pour le compte de P.________ SA.
Les cinq contrats de prêt étaient soumis au droit suisse. Ils contenaient une clause d'arbitrage identique, prévoyant un siège à Genève et l'application du Règlement suisse d'arbitrage international. Ladite clause visait tout différend découlant du contrat concerné ou en rapport avec celui-ci ("... Any dispute, controversy or claim arsing (sic) out of or in relation to this agreement including the validity, invalidity, breach or termination thereof, shall be resolved by arbitration... ").
A.h. Dès les premières réunions officielles du Conseil de famille en 2011, d'importantes tensions ont éclaté entre les enfants de A.c.________ au sujet notamment de la répartition des avoirs du groupe entre les deux pôles d'investissements.
Les rapports entre les membres de la fratrie A.________ se détériorant de plus en plus, des discussions relatives à un projet de scission du patrimoine du groupe ont été initiées dès la fin de l'année 2012. L'idée était de répartir les avoirs de manière équitable entre les membres de la famille, la gestion et le patrimoine du pôle agricole et du pôle pétrole devant revenir respectivement aux jumeaux aînés et aux jumeaux cadets, tandis que A.c.________ et son épouse conserveraient les actifs immobiliers. Les discussions se sont poursuivies jusqu'en 2015 mais n'ont pas abouti. Les quatre fils de A.c.________ ont aussi envisagé de signer, en 2015, une " Charte de famille ", qui tendait notamment à leur confier la gestion de pôles économiques indépendants, mais ce projet est resté sans suite.
Les tensions entre les enfants de A.c.________ ne se sont toutefois pas atténuées. Ainsi, le 28 avril 2015, A.e.________ a fait valoir que les relevés comptables du groupe révélaient une utilisation des richesses du groupe à des fins personnelles par ses frères aînés.
Dans un courrier adressé le 5 octobre 2015 à son avocat B.________, A.c.________ s'est déclaré favorable à l'idée de confier la gestion du groupe à des tiers et a exprimé la nécessité d'apprécier la gestion effectuée jusque-là par ses deux fils aînés, notamment quant aux fonds confiés et à leurs dépenses personnelles.
Durant l'année 2016, A.a.________ et A.b.________ se sont engagés à rembourser un montant de l'ordre de 4'000'000 EUR, bien que les modalités et les destinataires dudit versement n'aient jamais été clairement définis et que les pièces produites n'indiquent pas si le remboursement était lié aux contrats de prêt précités.
A.i. Par courrier du 16 mai 2016 signé par A.d.________ et l'avocate C.________, X.________ a demandé à W.________ de lui communiquer un plan de remboursement des montants versés en exécution du premier contrat de prêt.
Par lettre du 21 juin 2016 signée par A.c.________, W.________ a répondu qu'elle n'était pas en mesure de le faire, car les fonds prêtés avaient été avancés à d'autres entités du groupe et investis par ces dernières.
A.j. Par contrat du 14 janvier 2021, P.________ SA a cédé à W.________ la créance qu'elle détenait à l'encontre de Y.________ SA résultant du deuxième contrat de prêt. A.c.________ a signé ledit contrat pour toutes les parties à celui-ci.
Par contrat signé en janvier 2021, à une date indéterminée, Y.________ SA s'est engagée à céder à W.________ la créance d'un montant de 29'064'674 EUR qu'elle détenait à l'encontre de U.________ SA. A.c.________ a signé ledit contrat pour toutes les parties à celui-ci.
Par contrat du 14 janvier 2021 (ci-après: le contrat de reprise de dettes), Y.________ SA et U.________ SA se sont engagées solidairement, aux côtés de W.________, à répondre des dettes de cette dernière envers X.________ en vertu du premier contrat de prêt (d'un montant de 72'124'309 EUR avec intérêts) et à l'égard de Z.________ selon le quatrième contrat de prêt (d'un montant de 19'936'000 EUR avec intérêts). A.c.________ a signé ledit contrat pour toutes les parties à celui-ci. Ledit contrat était soumis au droit suisse et contenait une clause d'arbitrage identique à celles figurant dans les cinq contrats de prêt précités. Il a été communiqué le 2 février 2021 à X.________ et à Z.________
Les trois contrats précités ont été présentés pour signature en janvier 2021 à A.c.________ par son avocate C.________.
A.k. Dans un courrier du 21 mai 2015 signé par A.a.________, A.b.________ et A.d.________, ceux-ci ont fait part à Me B.________ de leur inquiétude quant à la faiblesse croissante de leur père, voire à sa perte de capacité à prendre des décisions qui engageaient le groupe.
En avril 2019, A.e.________ a requis des autorités monégasques qu'elles instituent une mesure de protection en faveur de son père. Dans le cadre de cette procédure, A.e.________ et A.d.________ ont indiqué que leur père souffrait d'une altération de sa mémoire depuis plusieurs années ainsi que d'un diabète sévère ayant contribué à l'altération de ses facultés physiques et mentales depuis 2013. Après avoir transmis aux autorités helvétiques, en décembre 2019, un avis de situation de danger concernant A.c.________, le Tribunal de première instance de la Principauté de Monaco s'est déclaré incompétent, le prénommé ayant déplacé sa résidence dans l'établissement médico-social S.________ dans le canton de (...) en septembre 2019.
Lors d'un rendez-vous tenu le 16 octobre 2019 en présence de A.f.________ et des conseils de A.c.________, ceux-ci ont préconisé de faire établir une attestation confirmant que le prénommé était bien capable de discernement, en particulier pour prendre des décisions relatives à son patrimoine.
Donnant suite à un courrier du 18 septembre 2019 dans lequel la Juge de paix du district de (...) indiquait avoir entendu A.c.________, lequel lui semblait avoir conservé sa capacité de discernement, les médecins de S.________ dans leur rapport du 9 janvier 2020, ont relevé que l'intéressé présentait, sur le plan neurocognitif, un discours cohérent, mais parfois répétitif avec quelques oublis. En cas de nécessité d'approfondir ce point, ils envisageaient la possibilité d'effectuer un bilan neurocognitif, par exemple dans une clinique de la mémoire.
Plusieurs certificats et rapports médicaux ont été établis par la suite au sujet des capacités neurocognitives de A.c.________.
Le 7 février 2020, l'avocate C.________ a sollicité du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) une évaluation neuropsychologique de A.c.________, indiquant que celui-ci y était favorable et que cette demande visait à rassurer son entourage et à savoir si son état lui permettait encore de prendre des décisions de gestion ordinaire de son patrimoine. Le 10 février 2020, le CHUV a transmis cette demande au Centre Leenards de la Mémoire. Le 7 mai 2021, le Dr. H.________ dudit Centre a confirmé à la Juge de paix du district de (...) que l'intéressé avait été évalué et qu'un bilan initial avait été établi le 3 septembre 2020. Il a indiqué qu'un bilan complémentaire par IRM cérébrale et tests neuropsychologiques avait été prévu, puis mis en suspens probablement en lien avec les mesures sanitaires liées au coronavirus, et que lesdits examens avaient été reprogrammés.
Par décision du 2 septembre 2021, la Justice de paix du district de (...) a prononcé l'institution d'une curatelle de portée générale à l'endroit de A.c.________ et a nommé l'avocat G.________ en qualité de curateur. A cet égard, elle a notamment tenu compte de ce que le prénommé, selon un certificat médical établi le 9 janvier 2020 par les médecins de S.________ souffrait de quelques oublis malgré un discours cohérent et avait besoin d'aide pour la majorité des activités de base de la vie quotidienne. Elle a relevé que, dans son rapport du 14 juin 2021, la psychologue K.________ avait mis en évidence chez A.c.________ un déficit sévère en mémoire épisodique verbale, associé à une désorientation spatio-temporelle, des lacunes en mémoire autobiographique, des imprécisions en mémoire collective/sémantique, ainsi qu'un dysfonctionnement exécutif modéré à sévère sur le plan cognitif, se traduisant par un défaut d'incitation verbale, de programmation gestuelle, d'inhibition et possiblement de flexibilité mentale, ainsi qu'une fragilité de la mémoire à court terme visuo-spatiale. A rigueur de ces constats, la psychologue K.________ avait conclu à des troubles d'origine neurodégénérative de type Alzheimer avec une éventuelle composante vasculaire. Pour aboutir à la solution retenue par elle, l'autorité judiciaire vaudoise a également pris en considération une lettre manuscrite du 27 avril 2021, dans laquelle A.f.________ avait notamment indiqué que son époux ne se souvenait plus d'avoir signé des transactions pour plusieurs dizaines de millions d'euros en janvier 2021. Elle a aussi tenu compte des considérations émises par le Dr. H.________ du Centre Leenards de la Mémoire. Ledit spécialiste, qui avait déjà mentionné, dans un rapport du 30 octobre 2020, que A.c.________ avait obtenu un score de 19/30 sur l'échelle MoCA (" Montreal Cognitive Assessement ") montrant des signes d'atteinte exécutive et de la mémoire épisodique verbale, a exposé, dans un rapport établi le 16 août 2021, que le prénommé présentait des " troubles cognitifs évoluant de manière insidieuse depuis plus d'une année " et souffrait de troubles neurocognitifs à prédominance mnésique et exécutifs dans le cadre d'une maladie d'Alzheimer cliniquement probable ainsi que d'une atteinte vasculaire et se trouvait désorienté dans le temps. Selon ce médecin, l'ensemble de ces troubles, qu'il qualifiait de majeurs, étaient susceptibles d'altérer les capacités de raisonnement et d'appréciation de l'intéressé, surtout pour des questions complexes comme la gestion de ses avoirs.
Le recours interjeté le 1er novembre 2021 par A.e.________ à l'encontre de cette décision a été rejeté par arrêt du 19 mai 2022 de la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal vaudois.
B.
B.a. Le 4 février 2021, X.________ et Z.________, se fondant sur les clauses d'arbitrage insérées dans les premier et quatrième contrats de prêt (ci-après: les prêts ou les contrats de prêt litigieux) ainsi que dans le contrat de reprise de dettes, ont introduit une procédure d'arbitrage dirigée contre A.c.________, A.a.________, A.b.________, A.d.________, A.e.________, Y.________ SA et U.________ SA. Les demanderesses entendaient obtenir le remboursement des montants avancés en vertu desdits contrats de prêt.
Un Tribunal arbitral de trois membres a été constitué, conformément au Règlement suisse d'arbitrage international, sous l'égide du
Swiss Arbitration Centre, et son siège fixé à Genève.
Le 19 avril 2021, A.a.________ et A.b.________ ont contesté la validité des clauses compromissoires invoquées par les demanderesses et la compétence du Tribunal arbitral à leur endroit. A.c.________ a lui aussi soulevé l'exception d'incompétence. Y.________ SA et U.________ SA ont en fait de même le 8 décembre 2021.
Le Tribunal arbitral a décidé de scinder la procédure et d'examiner, dans un premier temps, sa compétence pour connaître du litige divisant les parties.
Après avoir recueilli les déterminations des parties et tenu une audience consacrée à l'examen de sa compétence, le Tribunal arbitral a rendu, le 31 janvier 2023, une sentence sur la compétence dans le dispositif de laquelle il s'est déclaré compétent pour connaître des prétentions élevées à l'encontre de tous les défendeurs.
B.b. Les motifs qui étayent cette sentence peuvent être résumés comme il suit.
Après une brève introduction (sentence, n. 2-26), le Tribunal arbitral décrit la procédure, telle qu'elle a été conduite sous son autorité (sentence, n. 27-303), avant de résumer les faits principaux de la cause en litige (sentence, n. 304-436). Après quoi, il expose les arguments qui ont été avancés par les différentes parties défenderesses et par les sociétés demanderesses (sentence, n. 437-542).
Procédant ensuite à l'examen de sa compétence, le Tribunal arbitral détaille les questions qu'il doit résoudre à cet égard (sentence, n. 547-553), puis résume les principaux faits pertinents pour les besoins de son analyse (sentence, n. 554). Se penchant tour à tour sur les différents arguments avancés pour remettre en cause sa compétence, il considère que la procédure arbitrale n'a pas été initiée par un
falsus procurator (sentence, n. 555-562). Il écarte ensuite l'objection d'incompétence fondée sur la prétendue incapacité de discernement de A.c.________ au moment de la signature de la clause d'arbitrage insérée dans le contrat de reprise de dettes (sentence, n. 563-592). Il estime, par ailleurs, que les clauses d'arbitrage figurant dans les contrats de prêt litigieux ne sont pas illicites, en soulignant que le caractère prétendument illicite de l'objet desdits contrats n'est pas établi à ce stade et en précisant que, de toute manière, les parties auxdits contrats ont mutuellement et valablement exprimé leur accord pour soumettre tout litige y relatif à l'arbitrage sans égard à la validité des contrats principaux (sentence, n. 593-618). Le Tribunal arbitral rejette, dans la foulée, la thèse selon laquelle la clause d'arbitrage figurant dans le contrat de reprise de dettes serait viciée pour cause de dol (sentence, n. 619-640). Il retient, à titre de conclusion intermédiaire, que tant les clauses d'arbitrage figurant dans les prêts litigieux que celle insérée dans le contrat de reprise de dettes sont valables, raison pour laquelle le Tribunal arbitral est compétent pour connaître des prétentions élevées à l'encontre des défenderesses Y.________ SA et U.________ SA, lesquelles ont signé la convention de reprise de dettes (sentence, n. 641 s.).
Poursuivant le fil de leur raisonnement, les arbitres sont d'avis que les autres défendeurs peuvent être attraits à la procédure, nonobstant le fait qu'ils n'ont pas signé les contrats contenant les clauses d'arbitrage précitées. A cet égard, ils relèvent que les défendeurs A.d.________ et A.e.________ ont reconnu la compétence du Tribunal arbitral à leur égard et, partant, exprimé leur adhésion aux clauses d'arbitrage concernées (sentence, n. 645 s.). En ce qui concerne A.c.________, A.a.________ et A.b.________, le Tribunal arbitral, statuant à la majorité de ses membres, considère qu'ils ont, par leur comportement, manifesté leur volonté réelle d'être liés par les clauses d'arbitrage en question (sentence, n. 694-716).
C.
Le 6 mars 2023, A.a.________ et A.b.________ (ci-après: les recourants) ont formé un recours en matière civile, assorti d'une requête de mesures provisionnelles, à l'encontre de cette sentence. Ils concluent à son annulation et à ce que le Tribunal fédéral constate l'incompétence du Tribunal arbitral pour statuer sur les prétentions élevées à leur encontre.
Le même jour, A.c.________, d'une part, ainsi que Y.________ SA et U.________ SA, d'autre part, ont également interjeté un recours au Tribunal fédéral contre ladite sentence (causes 4A_146/2023 et 4A_148/2023).
Par ordonnance du 22 mars 2023, la demande de sûretés en garantie des dépens présentée par X.________ et Z.________ (ci-après: les intimées) a été admise. Les recourants ont versé le montant de 30'000 fr. dans le délai qui leur avait été imparti à cet effet.
En tête de leur réponse, les intimées ont conclu au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
Dans sa réponse, A.d.________ a proposé le rejet du recours.
Au terme de sa réponse, A.e.________ a conclu au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
A.c.________ a déclaré se rallier aux conclusions du recours.
Y.________ SA et U.________ SA ont indiqué s'en remettre à justice quant au sort du recours.
Le Tribunal arbitral s'est référé à sa sentence.
La requête de mesures provisionnelles a été admise par ordonnance du 5 juin 2023, la procédure arbitrale étant ainsi suspendue à l'égard des recourants jusqu'à droit jugé sur le recours formé par eux.
Les recourants ont déposé une réplique spontanée, suscitant le dépôt d'une duplique de la part des intimées.
Considérant en droit :
1.
D'après l'art. 54 al. 1 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée. En l'occurrence, celle-ci a été rendue en français. Le Tribunal fédéral rendra, par conséquent, son arrêt en français.
2.
Le recours en matière civile est recevable contre les sentences touchant l'arbitrage international aux conditions fixées par les art. 190 à 192 de la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP; RS 291), conformément à l'art. 77 al. 1 let. a LTF.
Le siège du Tribunal arbitral se trouve à Genève. L'une des parties au moins n'avait pas son domicile respectivement son siège en Suisse au moment déterminant. Les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont donc applicables (art. 176 al. 1 LDIP).
3.
3.1. En matière d'arbitrage, le recours reste en principe purement cassatoire (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui exclut l'application de l'art. 107 al. 2 LTF). Toutefois, lorsque le litige porte sur la compétence d'un tribunal arbitral, il a été admis, par exception, que le Tribunal fédéral pouvait constater lui-même la compétence ou l'incompétence (ATF 136 III 605 consid. 3.3.4; 128 III 50 consid. 1b).
La conclusion des recourants tendant à ce que le Tribunal fédéral constate lui-même l'incompétence du Tribunal arbitral pour statuer sur les prétentions élevées à leur encontre est dès lors recevable.
3.2. Pour le reste, qu'il s'agisse de l'objet du recours, de la qualité pour recourir et du délai de recours, aucune de ces conditions de recevabilité ne fait problème en l'espèce. Rien ne s'oppose donc à l'entrée en matière. Demeure réservé l'examen de la recevabilité, sous l'angle de leur motivation, des différents griefs soulevés par les intéressés.
4.
4.1. Un mémoire de recours visant une sentence arbitrale doit satisfaire à l'exigence de motivation telle qu'elle découle de l'art. 77 al. 3 LTF en liaison avec l'art. 42 al. 2 LTF et la jurisprudence relative à cette dernière disposition (ATF 140 III 86 consid. 2 et les références citées). Cela suppose que la partie recourante discute les motifs de la sentence entreprise et indique précisément en quoi elle estime que l'auteur de celle-ci a méconnu le droit (arrêt 4A_522/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.1). La partie recourante ne pourra le faire que dans les limites des moyens admissibles contre ladite sentence, à savoir au regard des seuls griefs énumérés à l'art. 190 al. 2 LDIP lorsque l'arbitrage revêt un caractère international. Au demeurant, comme cette motivation doit être contenue dans l'acte de recours, elle ne saurait user du procédé consistant à prier le Tribunal fédéral de bien vouloir se référer aux allégués, preuves et offres de preuve contenus dans les écritures versées au dossier de l'arbitrage. De même se servirait-elle en vain de la réplique pour invoquer des moyens, de fait ou de droit, qu'elle n'avait pas présentés en temps utile, c'est-à-dire avant l'expiration du délai de recours non prolongeable (art. 100 al. 1 LTF en liaison avec l'art. 47 al. 1 LTF), ou pour compléter, hors délai, une motivation insuffisante (arrêt 4A_34/2016 du 25 avril 2017 consid. 2.2).
4.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits constatés dans la sentence attaquée (cf. art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter d'office les constatations des arbitres, même si les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ou en violation du droit (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui exclut l'application de l'art. 105 al. 2 LTF). Les constatations du tribunal arbitral quant au déroulement de la procédure lient aussi le Tribunal fédéral, qu'elles aient trait aux conclusions des parties, aux faits allégués ou aux explications juridiques données par ces dernières, aux déclarations faites en cours de procès, aux réquisitions de preuves, voire au contenu d'un témoignage ou d'une expertise ou encore aux informations recueillies lors d'une inspection oculaire (arrêt 4A_322/2015 du 27 juin 2016 consid. 3 et les références citées).
La mission du Tribunal fédéral, lorsqu'il est saisi d'un recours en matière civile visant une sentence arbitrale internationale, ne consiste pas à statuer avec une pleine cognition, à l'instar d'une juridiction d'appel, mais uniquement à examiner si les griefs recevables formulés à l'encontre de ladite sentence sont fondés ou non. Permettre aux parties d'alléguer d'autres faits que ceux qui ont été constatés par le tribunal arbitral, en dehors des cas exceptionnels réservés par la jurisprudence, ne serait plus compatible avec une telle mission, ces faits fussent-ils établis par les éléments de preuve figurant au dossier de l'arbitrage (arrêt 4A_386/2010 du 3 janvier 2011 consid. 3.2).
5.
L'art. 186 al. 3 LDIP prévoit qu'en général, le tribunal arbitral statue sur sa compétence par une décision incidente. Cette disposition exprime certes une règle, mais celle-ci ne présente aucun caractère impératif et absolu, sa violation étant d'ailleurs dépourvue de sanction (arrêt 4A_222/2015 du 28 janvier 2016 consid. 3.1.2 et les références citées). Le tribunal arbitral y dérogera s'il estime que l'exception d'incompétence est trop liée aux faits de la cause pour être jugée séparément du fond (ATF 143 III 462 consid. 2.2; 121 III 495 consid. 6d).
Si le tribunal arbitral, examinant la question de la compétence à titre préalable, se déclare incompétent, mettant ainsi un terme à la procédure, il prononce une sentence finale (ATF 143 III 462 consid. 3.1).
Lorsqu'il écarte une exception d'incompétence, par une sentence séparée, il rend une décision incidente (art. 186 al. 3 LDIP), quel que soit le nom qu'il lui donne (ATF 143 III 462 consid. 2.2; arrêt 4A_414/2012 du 11 décembre 2012 consid. 1.1). En vertu de l'art. 190 al. 3 LDIP, cette décision, que les parties doivent entreprendre immé-diatement (ATF 130 III 66 consid. 4.3), ne peut être attaquée devant le Tribunal fédéral que pour les motifs tirés de la composition irrégulière (art. 190 al. 2 let. a LDIP) ou de l'incompétence (art. 190 al. 2 let. b LDIP) du tribunal arbitral. Les griefs visés à l'art. 190 al. 2 let. c à e LDIP peuvent aussi être soulevés contre les décisions incidentes au sens de l'art. 190 al. 3 LDIP, mais uniquement dans la mesure où ils se limitent strictement aux points concernant directement la composition ou la compétence du tribunal arbitral (ATF 143 III 462 consid. 2.2; 140 III 477 consid. 3.1; 140 III 520 consid. 2.2.3).
6.
Dans un premier moyen, les recourants, invoquant l'art. 190 al. 2 let. b LDIP, reprochent aux arbitres d'avoir admis, à tort, leur compétence pour connaître des prétentions élevées à leur encontre. A cet égard, ils font valoir que le Tribunal arbitral, statuant à la majorité de ses membres, a étendu de manière injustifiée la portée des clauses d'arbitrage figurant dans les contrats de prêt litigieux sur la base d'une application erronée de la théorie de l'immixtion. Avant d'examiner la recevabilité et, le cas échéant, les mérites des critiques formulées par les intéressés, il sied de rappeler certains principes et d'exposer la motivation du Tribunal arbitral sur le problème litigieux.
6.1. Saisi du grief d'incompétence, le Tribunal fédéral examine librement les questions de droit, y compris les questions préalables, qui déterminent la compétence ou l'incompétence du tribunal arbitral (ATF 146 III 142 consid. 3.4.1; 133 III 139 consid. 5; arrêt 4A_618/2019 du 17 septembre 2020 consid. 4.1). Il ne revoit cependant l'état de fait à la base de la sentence attaquée - même s'il s'agit de la question de la compétence - que si l'un des griefs mentionnés à l'art. 190 al. 2 LDIP est soulevé à l'encontre dudit état de fait ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux (cf. art. 99 al. 1 LTF) sont exceptionnellement pris en considération dans le cadre de la procédure du recours en matière civile (ATF 144 III 559 consid. 4.1; 142 III 220 consid. 3.1; 140 III 477 consid. 3.1; 138 III 29 consid. 2.2.1).
6.2. Selon l'art. 190 al. 2 let. b LDIP, la sentence peut être attaquée lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent. Le tribunal est compétent lorsque la cause peut faire l'objet d'un arbitrage en vertu de l'art. 177 LDIP, que la convention d'arbitrage est valable à la forme et au fond d'après l'art. 178 LDIP et que la cause est visée par cette convention, toutes ces conditions étant indissociables (ATF 133 III 139 consid. 5).
6.2.1. Du point de vue formel, la convention d'arbitrage est valable si elle est passée en la forme écrite ou par tout autre moyen permettant d'en établir la preuve par un texte.
Le texte doit contenir les éléments essentiels de la convention d'arbitrage (ATF 142 III 239 consid. 3.3.1; 138 III 29 consid. 2.2.3 et les références citées).
6.2.2. S'agissant du fond, la convention d'arbitrage est valable, selon l'art. 178 al. 2 LDIP, si elle répond aux conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat principal, soit encore le droit suisse. La disposition citée consacre trois rattachements alternatifs
in favorem validitatis, sans aucune hiérarchie entre eux, à savoir le droit choisi par les parties, le droit régissant l'objet du litige (
lex causae) et le droit suisse en tant que droit du siège de l'arbitrage (ATF 129 III 727 consid. 5.3.2).
6.3. Lorsqu'il examine s'il est compétent pour trancher le différend qui lui est soumis, le tribunal arbitral doit résoudre, entre autres questions, celle de la portée subjective de la convention d'arbitrage, qualifiée aussi d'extension de la clause à des tiers non-signataires. Il lui appartient ainsi de déterminer quelles sont les parties liées par cette convention et de rechercher, le cas échéant, si un ou des tiers qui n'y sont pas désignés entrent néanmoins dans son champ d'application (ATF 147 III 107 consid. 3.1.1; 145 III 199 consid. 2.4). Cette question de compétence
ratione personae, qui relève du fond, doit être résolue à la lumière de l'art. 178 al. 2 LDIP (ATF 147 III 107 consid. 3.1.1; 145 III 199 consid. 2.4; 134 III 565 consid. 3.2; arrêt 4A_64/2022 du 18 juillet 2022 consid. 6.3.2).
En vertu du principe de la relativité des obligations contractuelles, la convention d'arbitrage incluse dans un contrat ne lie en principe que les cocontractants (ATF 147 III 107 consid. 3.3.1; 145 III 199 consid. 2.4). L'exigence de forme posée par l'art. 178 al. 1 LDIP ne s'applique qu'à la convention d'arbitrage elle-même, soit à l'accord par lequel les parties initiales ont manifesté leur volonté réciproque et concordante de compromettre. Autre est toutefois la question de savoir si des tiers entrent dans le champ d'application d'une convention formellement valable, bien qu'ils ne l'aient pas signée et n'y soient pas mentionnés (ATF 129 III 727 consid. 5.3.1).
Dans un certain nombre d'hypothèses, comme la cession de créance, la reprise (simple ou cumulative) de dette ou le transfert d'une relation contractuelle, le Tribunal fédéral admet de longue date qu'une convention d'arbitrage peut obliger même des personnes qui ne l'ont pas signée et qui n'y sont pas mentionnées (ATF 147 III 107 consid. 3.3.1; 145 III 199 consid. 2.4; 129 III 727 consid. 5.3.1; arrêt 4A_528/2019 du 7 décembre 2020 consid. 3.1). En outre, le tiers qui s'immisce dans l'exécution du contrat contenant la convention d'arbitrage est réputé avoir adhéré, par actes concluants, à celle-ci si l'on peut inférer de cette immixtion sa volonté d'être partie à la convention d'arbitrage (ATF 147 III 107 consid. 3.3.1; 145 III 199 consid. 2.4; 134 III 565 consid. 3.2; 129 III 727 consid. 5.3.2; arrêt 4A_528/2019, précité, consid. 3.1 et les références citées). Cette jurisprudence est fondée sur les règles de la bonne foi; elle permet de déduire du comportement d'une partie la volonté d'adhérer à un contrat qu'elle n'a pas signé et de se soumettre à la clause arbitrale qui y figure; dans cette mesure, des circonstances postérieures à la conclusion de la convention d'arbitrage peuvent être prises en considération (arrêts 4A_528/2019, précité, consid. 3.1; 4A_450/2013 du 7 avril 2014 consid. 3.5.4). On ne saurait toutefois admettre à la légère une telle volonté. La jurisprudence relève de manière générale qu'il faut avoir égard à la nature particulière de la convention d'arbitrage. La renonciation à la justice étatique implique en particulier une restriction importante des voies de recours, qui ne doit pas être admise facilement (ATF 140 III 134 consid. 3.2; 129 III 675 consid. 2.3). En d'autres termes, la volonté de se soumettre à l'arbitrage doit ressortir de façon claire et non équivoque (ATF 140 III 367 consid. 2.2.2).
6.4. Dans la sentence attaquée, le Tribunal arbitral constate que la volonté réelle des membres de la famille A.________ était de soumettre d'éventuels litiges survenant entre eux à la voie de l'arbitrage. Examinant si cette volonté d'avoir, de manière générale, recours aux tribunaux arbitraux pour régler leurs différends vise également les litiges en lien avec les contrats de prêt litigieux, il considère, à la majorité de ses membres, que tant A.c.________ que ses quatre fils ont manifesté leur volonté réelle d'être liés par les clauses d'arbitrage insérées dans lesdits contrats de prêt.
A cet égard, le Tribunal arbitral relève que les fonds prêtés à W.________., laquelle est une société n'exerçant aucune activité et ne possédant ni employés ni locaux, ne lui étaient pas destinés puisqu'ils devaient transiter par diverses entités du groupe, au moyen de prêts en cascade, jusqu'à Y.________ SA et U.________ SA. Il observe que les contrats de prêt litigieux ne faisaient aucun sens d'un point de vue commercial, étant donné qu'aucun prêteur ne serait disposé à prêter des sommes si importantes à une " coquille vide " sans la moindre garantie. Le Tribunal arbitral observe qu'il apparaît vraisemblable, à ce stade de la procédure, qu'une partie des fonds qui ont fait l'objet de prêts en cascade a ensuite été remise à diverses sociétés détenues et contrôlées par les fils A.________ ainsi qu'à ceux-ci et à leur mère personnellement. Ces montants ont notamment été utilisés dans des placements immobiliers. Une partie de ces fonds a vraisemblablement servi à couvrir des dépenses personnelles des membres de la famille A.________, y compris des quatre fils de A.c.________.
Le Tribunal arbitral retient que les recourants n'ont pas pris part à la négociation ou à la rédaction des contrats de prêt litigieux, ni n'ont communiqué d'accord formel à ce sujet. Cependant, il apparaît, selon lui, invraisemblable que ceux-ci n'aient pas participé aux discussions familiales relatives à l'objectif des prêts en question et à l'utilisation des sommes prêtées. Le Tribunal arbitral souligne qu'il apparaît, en outre, à tout le moins vraisemblable que les recourants ont par la suite bénéficié, directement ou indirectement, d'une partie au moins des fonds concernés. Dans ces conditions, la majorité du Tribunal arbitral considère que tant A.c.________ que ses quatre fils avaient connaissance de la structure mise en place afin de constituer un " trésor de guerre " même s'ils n'avaient pas nécessairement tous formellement donné leur accord à ces prêts au moment de leur conclusion et qu'ils n'en connaissaient pas forcément tous les détails. Le Tribunal arbitral estime, ainsi, que les prêts litigieux constituent des transferts internes au sein du patrimoine de la famille A.________ et que les signataires desdits contrats sont des instruments juridiques mis en place pour les besoins de la gestion du patrimoine familial.
Pour la majorité du Tribunal arbitral, les recourants ne pouvaient pas ignorer l'existence des instruments juridiques leur ayant permis de toucher, à titre personnel ou par le truchement de sociétés dont ils assumaient la gestion, des montants de l'ordre de plusieurs millions, ni ignorer que ces fonds avaient été transférés par les intimées à W.________ sur la base de contrats de prêt comportant des clauses d'arbitrage, ce d'autant que l'insertion de telles clauses était usuelle dans les relations contractuelles nouées au sein du groupe. De plus, les prêts litigieux octroyés à W.________ ainsi que la question de leur remboursement ont été expressément discutés entre les membres de la famille au plus tard en 2015, dans le cadre des réflexions relatives à un potentiel redressement fiscal en France. Lors d'une réunion du Conseil de famille tenue le 14 janvier 2015, il a en effet été question de vendre les biens immobiliers achetés pour un montant de l'ordre de 90 millions d'euros à l'aide des fonds initialement remis à W.________. Dans ce contexte, les recourants se sont opposés à la vente desdits biens qu'ils occupaient alors avec leur famille. En outre, la question du remboursement, notamment par les recourants, d'une partie des fonds perçus entre 2010 et 2015 a fait l'objet de plusieurs discussions familiales dès 2015.
Les recourants ont ainsi été impliqués dans l'exécution des prêts litigieux, car ils ont pris part aux décisions relatives aux investissements à réaliser grâce aux fonds concernés, ils ont bénéficié personnellement d'une partie de ces fonds et ont participé activement aux discussions relatives au remboursement des prêts dans le contexte de la procédure fiscale française allant même jusqu'à s'opposer à ce que les biens immobiliers acquis grâce aux fonds en question soient vendus pour permettre le remboursement. L'immixtion des recourants dans l'exécution des contrats de prêt litigieux démontre ainsi que ceux-ci ont " manifesté leur volonté réelle d'être liés par les clauses arbitrales " contenues dans lesdits contrats de prêt (sentence, n. 694-715).
6.5. Dans leurs écritures, les recourants déplorent le caractère désordonné des considérations juridiques émises par le Tribunal arbitral. Ils font grief à la majorité d'avoir appliqué de manière erronée la théorie de l'immixtion. A cet égard, ils soutiennent que le Tribunal arbitral a visiblement jugé, à tort, que la simple connaissance de la provenance des fonds litigieux était suffisante pour reconnaître qu'ils s'étaient immiscés dans l'exécution des contrats de prêt litigieux. Ils estiment que l'analyse effectuée par la majorité est lacunaire et ne respecte pas les principes posés par la jurisprudence pour étendre la portée d'une clause d'arbitrage à des tiers non-signataires. Les recourants s'emploient ensuite à démontrer qu'ils ne se sont pas immiscés dans l'exécution des contrats de prêt litigieux. Sur ce point, ils font valoir qu'une éventuelle immixtion lors de la conclusion desdits contrats n'est pas décisive selon la jurisprudence et relèvent qu'ils n'ont de toute manière participé ni à leur rédaction, ni à leur signature. Ils contestent ensuite le fait qu'une implication de leur part dans les décisions relatives aux investissements à réaliser grâce aux fonds prêtés puisse constituer une immixtion dans l'exécution des contrats de prêt litigieux. A leur avis, la circonstance selon laquelle ils auraient retiré un bénéfice personnel des fonds prêtés ne permet pas de conclure qu'ils se sont immiscés dans l'exécution des contrats de prêt litigieux. Les recourants soulignent également que leur prétendue participation active dans les discussions relatives au remboursement des prêts litigieux reposerait sur un unique élément factuel, alors que le Tribunal arbitral a reconnu, par ailleurs, que les modalités et destinataires de ces remboursements n'avaient jamais été clairement définis.
Les intéressés font aussi valoir qu'il n'existe aucun élément établissant que les intimées auraient cru, de bonne foi, qu'ils avaient la volonté d'être liés par les clauses d'arbitrage litigieuses. A cet égard, ils relèvent que la sentence entreprise est totalement muette sur ce point. Les recourants critiquent enfin un passage de la sentence attaquée dans lequel le Tribunal arbitral indique que sa décision sur la compétence " (...) f ait également du sens puisqu'elle permettra de trancher, dans le cadre du fond, un litige qui semble envenimer les relations entre les enfants de M. A.c.________ depuis plusieurs années et qu'aucune des Parties n'a établi qu'une autre juridiction, étatique ou arbitrale, serait compétente pour le trancher " (sentence, n. 716). Selon eux, le Tribunal arbitral ne saurait s'arroger une sorte de " compétence par défaut ", en " offrant " ses services à certaines parties qui ne le veulent pas, sous prétexte qu'il estimerait qu'aucune autre juridiction ne semblerait compétente pour trancher un litige.
6.6. Tel qu'il est présenté, le grief considéré ne saurait prospérer.
On peut d'emblée légitimement s'interroger sur le point de savoir si les critiques formulées par les recourants sont recevables. Il ressort en effet du passage de la sentence attaquée consacré à l'examen de la compétence du Tribunal arbitral à l'égard des recourants que les arbitres ont considéré, à la majorité, que les intéressés avaient "manifesté leur volonté réelle" d'être liés par les clauses d'arbitrage litigieuses (sentence, n. 714). Or, la constatation de la réelle intention des parties relève du domaine des faits et lie, partant, le Tribunal fédéral (ATF 132 III 626 consid. 3.1; 131 III 606 consid. 4.1). Aussi bien, en argumentant comme ils le font, les recourants s'en prennent au résultat de l'interprétation subjective effectuée par le Tribunal arbitral, point qui échappe en principe à la connaissance du Tribunal fédéral.
Quoi qu'il en soit, même à supposer que l'argumentation développée par les recourants soit recevable, la solution retenue par le Tribunal arbitral résiste aux critiques dont elle est la cible. Il ressort, en effet, des constatations de fait qui lient la Cour de céans que les recourants ont pris une part active aux discussions relatives au remboursement des prêts litigieux et qu'ils se sont même opposés à ce que les biens immobiliers, acquis grâce aux fonds en question, qu'ils occupaient avec leur famille, soient vendus pour permettre le remboursement desdits prêts. Sur la base des éléments factuels mis en exergue dans la sentence, le comportement adopté par les intéressés - et singulièrement le rôle joué par eux dans les discussions relatives au remboursement des prêts litigieux - pouvait objectivement s'interpréter comme l'expression de leur volonté d'être liés par les clauses d'arbitrage insérées dans les contrats de prêt litigieux. Les arguments avancés par les recourants dans leurs écritures, soigneusement contredits par leurs adversaires, ne modifient en rien cette conclusion.
7.
Dans un second moyen, les recourants dénoncent diverses violations de leur droit d'être entendus (art. 190 al. 2 let. d LDIP). A cet égard, ils reprochent aux arbitres d'avoir ignoré certains arguments destinés à contester leur compétence.
7.1. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d LDIP, un devoir minimum pour le tribunal arbitral d'examiner et de traiter les problèmes pertinents. Ce devoir est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le tribunal arbitral ne prend pas en considération des allégués, arguments, preuves et offres de preuve présentés par l'une des parties et importants pour la sentence à rendre. Il incombe à la partie soi-disant lésée de démontrer, dans son recours dirigé contre la sentence, en quoi une inadvertance des arbitres l'a empêchée de se faire entendre sur un point important. C'est à elle d'établir, d'une part, que le tribunal arbitral n'a pas examiné certains des éléments de fait, de preuve ou de droit qu'elle avait régulièrement avancés à l'appui de ses conclusions et, d'autre part, que ces éléments étaient de nature à influer sur le sort du litige (ATF 142 III 360 consid. 4.1.1 et 4.1.3). Si la sentence passe totalement sous silence des éléments apparemment importants pour la solution du litige, c'est aux arbitres ou à la partie intimée qu'il appartiendra de justifier cette omission dans leurs observations sur le recours (ATF 133 III 235 consid. 5.2; arrêts 4A_542/2021 du 28 février 2022 consid. 5.1; 4A_618/2020 du 2 juin 2021 consid. 4.2). Ceci dit, les arbitres n'ont pas l'obligation de discuter tous les arguments invoqués par les parties; ils ne sauraient se voir reprocher, au titre de la violation du droit d'être entendu en procédure contradictoire, de n'avoir pas réfuté, même implicitement, un moyen objectivement dénué de toute pertinence (ATF 133 III 235 consid. 5.2).
C'est le lieu de rappeler que le grief tiré de la violation du droit d'être entendu ne doit pas servir, pour la partie qui se plaint de vices affectant la motivation de la sentence, à provoquer par ce biais un examen de l'application du droit de fond (ATF 142 III 360 consid. 4.1.2).
7.2. Dans leur mémoire de recours, les intéressés font valoir qu'ils ont allégué toute une série d'éléments visant à démontrer:
- qu'ils n'ont eu connaissance ni de l'existence ni du contenu des contrats de prêt litigieux;
- qu'ils ignoraient la provenance des fonds perçus personnellement ou par le truchement de sociétés dont ils avaient le contrôle;
- que certaines conclusions figurant dans le rapport établi le 7 avril 2022 par l'experte O.________ concernant les flux de trésorerie entre les diverses sociétés du groupe et les membres de la famille A.________ étaient erronées ou lacunaires.
Or, selon les recourants, le Tribunal arbitral aurait indiqué " qu'ils n'avaient apporté aucun élément de preuve " sur ces points, ce qui serait manifestement faux. En ignorant totalement leurs moyens, il se serait dès lors rendu coupable d'un déni de justice.
7.3. Semblable argumentation tombe à faux.
Comme le soulignent à bon droit les intimées dans leur réponse, sans être du reste contredites par les recourants, le Tribunal arbitral n'a jamais indiqué que ceux-ci n'avaient apporté aucun élément de preuve mais a seulement considéré qu'ils n'avaient fourni " aucun moyen de preuve probant " (sentence, n. 709). Les termes utilisés par les arbitres démontrent que ceux-ci ont bel et bien pris en considération les éléments avancés par les recourants mais qu'ils ne les ont pas jugés suffisants pour retenir les faits allégués par eux. Il apparaît ainsi que le Tribunal arbitral a procédé à une appréciation des preuves disponibles pour opérer certaines constatations de fait critiquées. Sous le couvert d'une prétendue violation de leur droit d'être entendus, les recourants s'en prennent en réalité à la motivation des arbitres et leur reprochent d'avoir étendu la portée des clauses d'arbitrage litigieuses, ce qui n'est pas admissible. Au demeurant, il sied de rappeler que les recourants ne sauraient obtenir des explications sur chaque détail du raisonnement tenu par les arbitres. En l'occurrence, il appert de la motivation retenue par le Tribunal arbitral que celui-ci n'a de toute évidence pas jugé décisifs les arguments susmentionnés avancés par les recourants. Il s'ensuit le rejet du moyen examiné.
8.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les recourants, qui succombent, seront, dès lors, condamnés solidairement à payer les frais de la procédure fédérale ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ). Ils verseront en outre, solidairement entre eux, une indemnité à titre de dépens aux intimées, créancières solidaires, ainsi qu'à A.d.________ et à A.e.________ ( art. 68 al. 1 et 4 LTF ). L'indemnité allouée aux intimées sera prélevée sur les sûretés fournies par les recourants. A.c.________, qui a soutenu le recours, ainsi que Y.________ SA et U.________ SA, lesquelles s'en sont remises à justice, n'ont pas droit à des dépens.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 25'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux.
3.
Les recourants sont condamnés solidairement à verser aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de 30'000 fr. à titre de dépens, laquelle sera prélevée sur les sûretés déposées à la Caisse du Tribunal fédéral. Les recourants verseront en outre, solidairement entre eux, à A.d.________ et A.e.________ une indemnité de 30'000 fr. chacun.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux recourants, aux intimées, aux parties intéressées et au Tribunal arbitral avec siège à Genève.
Lausanne, le 4 septembre 2023
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant : Kiss
Le Greffier : O. Carruzzo