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«AZA» 
U 284/98 Mh 
 
 
IIe Chambre 
composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, et Ferrari, Jaeger, suppléant; Decaillet, Greffier 
 
 
Arrêt du 1er mai 2000 
 
dans la cause 
M.________, recourant, représenté par B.________, avocat, 
 
contre 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, Lucerne, intimée, 
 
et 
Tribunal administratif du canton de Genève, Genève 
 
 
 
 
A.- a) M.________ a travaillé depuis le 6 septembre 1971 en qualité de soudeur au service de la société S.________. A ce titre, il était assuré contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : CNA). Le 20 septembre 1971, il a été renversé par un véhicule automobile auquel il n'avait pas accordé la priorité. La CNA a pris en charge le cas. Par décision du 19 octobre 1971, elle a toutefois réduit de 10 % les prestations pour soins et l'indemnité journalière allouées à l'assuré, motif pris que celui-ci avait provoqué son accident par une faute grave. 
M.________ a annoncé plusieurs rechutes à la CNA. Le cas évolua vers une périarthrite scapulo-humérale droite post-traumatique. En juin 1980, le docteur W.________, spécialiste en chirurgie orthopédique, a constaté une subluxation de l'épaule, qui fut réduite par voie opératoire le 14 janvier 1981. Depuis 1982, l'intéressé a travaillé en qualité de serrurier au service de la société R.________ SA. Il était toujours assuré pour le risque d'accidents auprès de la CNA. 
 
b) Le 11 juin 1990, M.________ a chuté et heurté un mur avec son épaule droite alors qu'il déchargeait une lourde porte métallique. Dans son rapport médical initial du 2 juillet 1990, le docteur G.________, neurochirurgien, a diagnostiqué une hernie discale L5-S1 foraminale droite post-traumatique. L'assuré fut hospitalisé du 13 au 22 juin 1990. 
A la suite d'une rechute annoncée le 28 août 1991, le docteur D.________ a diagnostiqué une sciatalgie gauche L5-S1 et une périarthrite de l'épaule droite post-traumatiques (rapport du 19 septembre 1991). Le 28 janvier 1992 le docteur H.________, médecin adjoint de la Clinique d'orthopédie de l'Hôpital cantonal universitaire, a procédé chirurgicalement à la libération des rotateurs externes et fixé la reprise du travail à 50 % depuis le 25 mai 1992. L'assuré a séjourné à la Clinique X.________ du 5 au 29 janvier 1993 et consulté différents médecins qui ont tous estimé à 50 % sa capacité de travail dans son activité. Le 12 janvier 1996, le docteur A.________, chirurgien et médecin d'arrondissement de la CNA, a procédé à l'examen médical final de l'assuré. Il a constaté que l'activité de serrurier n'était plus exigible contrairement à un travail de bureau autorisant de fréquents changements de position, des déplacements de faible importance et des pauses, avec un rendement diminué de 15 à 20 % au début. Il a estimé à 25 % l'atteinte à l'intégrité subie par l'assuré. 
Par décision du 20 janvier 1997, la CNA a alloué à M.________ une rente d'invalidité de 60 %, réduite de 5 % en raison des séquelles de l'accident survenu en 1971. Elle a fixé à 25 % l'indemnité pour atteinte à l'intégrité due pour les accidents de 1971 (10 %) et 1990 (15 %) et réduit de 10 % celle attribuée pour le premier. 
Le prénommé ayant formé opposition contre cette décision, la CNA a confié une expertise au docteur K.________, spécialiste en chirurgie orthopédique rattaché à sa division médicale. Selon le rapport du 16 janvier 1998 de ce médecin, le patient pouvait effectuer des travaux à hauteur de table, assis ou debout et n'exigeant pas le port de charges dépassant 5 à 10 kilos le bras éloigné du corps. Selon son estimation, l'influence de l'accident de 1971 sur l'invalidité est comprise entre 50 et 66 %. Par décision sur opposition du 21 janvier 1998, la CNA a confirmé sa précédente décision. 
L'assurance-invalidité a alloué à l'assuré une demirente d'invalidité dès le 1er janvier 1993, puis une rente entière à partir du 1er décembre 1994. 
 
B.- Par jugement du 1er septembre 1998, le Tribunal administratif de la République et du canton de Genève a partiellement admis le recours formé par l'assuré contre cette décision sur opposition, en ce sens qu'il a porté à 19 800 fr. le montant de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité. Pour le surplus, la juridiction cantonale a confirmé la décision sur opposition de la CNA. 
 
C.- M.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi d'une rente fondée sur un degré d'invalidité de 100 %, sans déduction. Il sollicite la mise en oeuvre d'une expertise médicale. 
La CNA conclut implicitement au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé. 
 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Le litige porte sur le degré d'invalidité fondant le droit à la rente du recourant et sur la fixation de la part imputable à chacun des accidents. 
 
2.- a) Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels applicables en matière d'évaluation de l'invalidité, de sorte qu'il peut y être renvoyé sur ce point (consid. 6). 
Le juge peut accorder valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins de la CNA aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférées aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'impartialité de l'expert (ATF 122 V 160 consid. 1c et les références citées). 
 
b) La Cour cantonale a considéré en bref que le recourant était en mesure de réaliser malgré ses handicaps un revenu minimal de 2950 fr. dans une activité adaptée. Dès lors que sans invalidité l'assuré percevrait un gain de 7380 fr. dans son métier de serrurier, elle a fixé son degré d'invalidité à 60 %. 
Le recourant reproche en particulier aux premiers juges l'importance prépondérante qu'ils ont attachée au rapport du docteur K.________ dans l'appréciation de l'incidence de ses deux accidents sur son état de santé actuel. Il soutient que ce médecin n'a pas tenu compte de ses plaintes ni de ses problèmes gastriques. Il ajoute que les documents médicaux du dossier ne permettaient pas à l'assureur-accidents de s'écarter de l'évaluation de l'invalidité à laquelle avait procédé l'assurance-invalidité. 
 
3.- a) En l'espèce, les premiers juges ont principalement fondé leur appréciation sur le rapport médical du docteur K.________. Les conclusions de ce document sérieusement motivées et exemptes de toute contradiction apparaissent pleinement convaincantes. En outre, il n'y a de raison de mettre en doute la valeur probante de ce rapport qui répond en tout point aux exigences de la jurisprudence en cette matière (ATF 125 V 353 consid. 3a et les références). Dans son rapport médical final du 16 janvier 1996, le docteur A.________ a du reste abouti à des conclusions similaires. Le docteur E.________ a certes conclu à l'incapacité totale de travail de son patient depuis le 1er décembre 1995, au motif particulier que celui-ci souffre de problèmes gastriques et d'une intolérance aux AINS. Ces affections étaient toutefois connues des médecins depuis 1993. Ceux-ci en avaient d'ailleurs tenu compte pour admettre que l'assuré pouvait travailler à 50 % dans son activité de serrurier. L'opinion du médecin traitant ne permet dès lors pas de remettre en cause les constatations des médecins précités. 
Nonobstant les affections consécutives à ses accidents, le recourant est ainsi encore en mesure d'exercer, notamment, une activité d'employé d'atelier, de cariste ou d'employé d'usine, dès lors que ces emplois ne nécessitent pas de lever les bras au-dessus de l'horizontale, autorisent la position assise ou debout et n'exigent pas le port de charges dépassant 5 à 10 kilos. Les revenus les plus bas qu'il pourrait retirer des activités précitées oscillent entre 3100 et 3800 fr. par mois, de sorte que le revenu d'invalide de 2950 fr. retenu par l'intimée n'est pas critiquable même s'il apparaît favorable à l'assuré. Au regard de son revenu non contesté comme serrurier de 7380 fr. par mois, il subit une perte de gain de 4430 fr.; son degré d'invalidité s'élève à 60 %. 
 
b) Le recourant a certes obtenu de l'assurance-invalidité une rente entière fondée sur un degré d'invalidité de 100 %. Néanmoins, à la date d'octroi de sa rente, le 1er décembre 1994, aucune pièce médicale du dossier n'attestait de son incapacité de travail totale. Il ressort au contraire des déclarations du recourant à un inspecteur de la CNA qu'il travaillait encore à 50 % pour son ancien employeur. Contrairement à la thèse soutenue par l'assuré, le taux d'invalidité retenu par l'assurance-invalidité ne saurait donc lier la CNA, faute d'être le fruit d'une évaluation conforme à l'art. 28 al. 2 LAI (Plädoyer, 1997, no 5 p. 61 consid. 2c; RCC 1987 p. 276 consid. 1a; MeyerBlaser, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung [IVG], p. 21 ad art. 4 LAI). 
 
4.- Le recourant s'oppose à la réduction de 5 % du montant de sa rente. 
 
a) Selon l'article 118 al. 2 let. c LAA, en cas de prestations d'assurance allouées pour un accident survenu avant l'entrée en vigueur de cette loi, les assurés sont soumis au nouveau droit en ce qui concerne, notamment, les rentes d'invalidité si le droit naît après l'entrée en vigueur de la présente loi. Ceci étant, si l'assuré a provoqué l'accident par une négligence grave, les prestations en espèce sont réduites (art. 37 al. 2 LAA, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1998, applicable en l'espèce). Conformément à la jurisprudence, le droit international de la sécurité sociale qui fait obstacle à une réduction de prestations d'assurance pour faute grave ne s'applique qu'en cas d'accidents et de maladies professionnels (ATF 121 V 42 consid. 2a; RAMA 1995 no U 232 p. 206 consid. 2b). 
 
b) En l'espèce, le droit à la rente du recourant est né le 1er octobre 1995. Dès lors, contrairement à l'opinion de l'intimée et des premiers juges, une réduction de la rente n'était admissible qu'en application des dispositions de la LAA et non de l'art. 98 al. 3 LAMA, en vigueur jusqu'au 31 décembre 1983. Il n'est pas contesté que l'accident de trajet dont a été victime le recourant en 1971 constituait un accident non professionnel, de sorte que le principe d'une réduction pour négligence grave ne saurait être critiqué, sous réserve toutefois de l'examen de l'incidence respective de chacun des accidents sur le taux d'invalidité de l'assuré. A cet égard, il ressort des constatations du docteur K.________ que l'accident dont a été victime le recourant en 1971 a eu une influence minimale de 50 % sur l'invalidité de l'intéressé. Le docteur A.________ a certes admis l'existence d'un état antérieur que l'on pouvait chiffrer à 30 %. Son évaluation portait toutefois exclusivement sur la question de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, de sorte qu'elle n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions du docteur K.________. 
Par décision du 19 octobre 1971, la CNA avait considéré qu'une réduction de 10 % de ses prestations était proportionnée à la gravité de la faute par laquelle l'assuré avait provoqué son premier accident. Il n'y a pas de motif d'apprécier autrement la gravité de la faute précitée, ce que ne conteste du reste pas le recourant. La réduction de 5 % (50 % x 10 %) de la rente d'invalidité allouée au recourant par l'intimée n'apparaît donc pas critiquable. Le recours est mal fondé. 
 
5.- Le recourant, qui succombe, ne saurait prétendre une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances 
 
p r o n o n c e : 
 
I. Le recours est rejeté. 
 
II. Il n'est pas perçu de frais de justice ni alloué de 
dépens. 
III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au 
Tribunal administratif de la République et du canton 
de Genève et à l'Office fédéral des assurances 
sociales. 
Lucerne, le 1er mai 2000 
 
Au nom du 
Tribunal fédéral des assurances 
Le Président de la IIe Chambre : 
 
 
 
 
 
Le Greffier :