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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_321/2022  
 
 
Arrêt du 10 mars 2023  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Heine et Abrecht. 
Greffière : Mme Betschart. 
 
Participants à la procédure 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Division juridique, Fluhmattstrasse 1, 6002 Lucerne, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-accidents, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 12 avril 2022 (A/81/2021 ATAS/331/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1957, est au bénéfice d'une formation de plâtrier-peintre. Il a travaillé à son compte au sein de l'entreprise B.________ Sàrl en qualité d'entrepreneur du bâtiment et était à ce titre assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) contre le risque d'accidents professionnels et non professionnels. Le 29 février 2008, il est tombé dans les escaliers et s'est blessé au genou droit. Cet évènement a nécessité une arthroscopie du genou droit avec méniscectomie partielle interne ainsi qu'une ablation de kyste arthrosynovial par voie externe. La CNA a pris en charge le cas. L'assuré a repris le travail dès janvier 2009 à 50 %, principalement dans une activité de bureau. Le 12 octobre 2009, la CNA a clos le cas et a octroyé à l'assuré une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 20 %.  
 
A.b. Le 25 novembre 2011, l'assuré a glissé sur un escabeau et a chuté sur son genou droit. L'IRM (imagerie par résonance magnétique) du 30 novembre 2011 a mis en évidence une gonarthrose et une contusion des tissus mous sans fracture, qui ont d'abord été traitées conservativement. L'évolution ayant été défavorable, l'assuré a notamment subi par la suite une intervention chirurgicale consistant en la pose d'une prothèse totale du genou droit le 25 mai 2016 ainsi qu'un changement de cette prothèse le 25 septembre 2019.  
 
A.c. Parallèlement à la procédure devant l'assurance-accidents, l'assuré a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité. L'Office cantonal d'assurance invalidité (ci-après : l'OAI) lui a octroyé une mesure de réadaptation sous forme de formation certifiante de gestionnaire de stock, achevée en juin 2015. Par la suite, l'OAI a nié le droit à une rente de l'assurance-invalidité, se fondant sur un taux d'invalidité de 35 %.  
 
A.d. Le 27 janvier 2017, l'assuré a chuté dans la rue et est tombé sur son épaule gauche. Cet évènement a entrainé une lésion du tendon du sous-scapulaire qui a nécessité une réinsertion chirurgicale le 7 mai 2018. Dans son rapport du 27 avril 2019, le docteur C.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie et médecin d'arrondissement de la CNA, a considéré que sur le plan de l'épaule, le cas était stabilisé. Pour les seules suites de cet évènement, ce praticien attestait une capacité de travail entière, sans baisse de rendement, dans une activité réalisée indifféremment en position assise et debout, avec un port de charges ponctuel limité à 5 kg à gauche, en évitant les mouvements portant en hauteur le membre supérieur gauche ainsi que les mouvements de rotation répétée de l'épaule. Il estimait l'atteinte à l'intégrité à 7 %.  
 
A.e. Le 2 juin 2020, le docteur D.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie et médecin d'arrondissement de la CNA, a procédé à un examen final pour ce qui concerne le genou droit. Il a conclu que le cas serait stabilisé en septembre 2020 et que l'assuré disposait d'une pleine capacité dans une activité adaptée, soit dans un travail totalement sédentaire en position essentiellement assise avec simplement quelques pas de déplacement au sein d'un bureau, sans montée et descente d'escaliers, de piétinement et à fortiori d'échelles. En outre, le 30 juillet 2020, ce praticien a estimé à 46 % l'atteinte à l'intégrité présentée par l'assuré à la suite des atteintes au genou droit et à l'épaule gauche. Par courrier du 3 juillet 2020, la CNA mis fin au paiement des soins médicaux et de l'indemnité journalière avec effet au 30 septembre 2020.  
 
A.f. Par décision du 9 septembre 2020, confirmée sur opposition le 21 décembre 2020, la CNA a alloué à l'assuré une rente d'invalidité fondée sur un taux de 34 % à compter du 1er octobre 2020 ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité fondée sur un taux de 46 %.  
 
B.  
Par arrêt du 12 avril 2022, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève a admis le recours formé par l'assuré contre cette décision sur opposition, qu'elle a réformée en ce sens que l'assuré avait droit à une rente d'invalidité fondée sur un taux d'invalidité de 45 % dès le 1er octobre 2020. 
 
C.  
La CNA interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à sa réforme dans le sens de la confirmation de la décision sur opposition du 21 décembre 2020. 
L'assuré conclut implicitement au rejet du recours. Le tribunal cantonal et l'Office fédéral de la santé publique ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique d'office le droit fédéral (art. 106 al. 1 LTF), sous réserve des exigences de motivation figurant à l'art. 106 al. 2 LTF. A moins que la décision attaquée contienne des vices juridiques manifestes, il s'en tient aux arguments juridiques soulevés dans le recours (cf. art. 42 al. 1 et 2 LTF; ATF 135 II 384 consid. 2.2.1; 134 III 102 consid. 1.1). Toutefois, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs de l'autorité précédente ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4). Il n'est pas tenu de revoir les questions de droit qui ne sont plus soulevées devant lui (ATF 140 V 136 consid. 1.1). 
 
3.  
 
3.1. Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale a violé le droit fédéral en reconnaissant à l'intimé le droit à une rente fondée sur un taux d'invalidité de 45 % au lieu du taux de 34 % retenu par la recourante. Est litigieux uniquement l'abattement de 25 % (au lieu de 10 %) opéré par la cour cantonale sur le revenu d'invalide devant être pris en compte pour la comparaison des revenus prescrite à l'art. 16 LPGA.  
 
3.2. Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF). L'art. 105 al. 2 LTF habilite le Tribunal fédéral à rectifier ou à compléter l'état de fait, de sa propre initiative ou sur requête des recourants. Quoiqu'il ait tout intérêt à user de cette faculté avec modération, cette solution se justifie afin d'éviter les conséquences disproportionnées d'un renvoi systématique de l'affaire à l'instance précédente lorsque l'état de fait peut être corrigé de manière très simple; l'intérêt des parties à une résolution rapide et définitive l'emporte alors sur le principe de la souveraineté des autorités précédentes à l'égard des faits, qui demande qu'en règle générale, le Tribunal fédéral renvoie l'affaire pour complément d'instruction (art. 107 al. 2 LTF; cf. arrêt 8C_171/2021 du 14 décembre 2021 consid. 2 avec les références, in SVR 2022 UV n° 22 p. 89).  
 
4.  
 
4.1. L'arrêt entrepris expose de manière complète les dispositions légales régissant le droit aux prestations de l'assurance-accidents, notamment à une rente d'invalidité (art. 6 al. 1, art. 18 al. 1 et art. 19 al. 1 LAA), ainsi que les principes jurisprudentiels concernant l'établissement des revenus sans et avec invalidité dans le cadre de la comparaison des revenus prescrite à l'art. 16 LPGA pour déterminer le taux d'invalidité. Il suffit donc d'y renvoyer.  
 
4.2. En ce qui concerne l'étendue de l'abattement, on rappellera que la mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération. Il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3; 126 V 75 précité consid. 5b/bb; arrêts 8C_175/2020 du 22 septembre 2020 consid. 3.3; 8C_766/2017 du 30 juillet 2018 consid. 8.3.1, in: SVR 2019 UV n° 5 p. 18).  
Le point de savoir s'il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d'autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral (ATF 146 V 16 consid. 4.2; 142 V 178 consid. 2.5.9). En revanche, l'étendue de l'abattement sur le salaire statistique dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation, qui est soumise à l'examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d'appréciation de manière contraire au droit, soit a commis un excès positif ("Ermessensüberschreitung") ou négatif ("Ermessensunterschreitung") de son pouvoir d'appréciation ou a abusé ("Ermessensmissbrauch") de celui-ci (ATF 146 V 16 consid. 4.2; 137 V 71 consid. 5.1), notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n'usant pas de critères objectifs (ATF 135 III 179 consid. 2.1; 130 III 176 consid. 1.2). 
Contrairement au pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, celui de l'autorité judiciaire de première instance n'est pas limité dans ce contexte à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative ("Angemessenheitskontrolle"). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans un cas concret, a adoptée dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. A cet égard, le tribunal des assurances sociales ne peut pas, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l'administration; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 précité consid. 5.2 et l'arrêt cité). 
 
4.3. On ajoutera par ailleurs que si, en raison de son âge, l'assuré ne reprend pas d'activité lucrative après l'accident ou si la diminution de la capacité de gain est due essentiellement à son âge avancé, les revenus de l'activité lucrative déterminants pour l'évaluation du taux d'invalidité sont ceux qu'un assuré d'âge moyen dont la santé a subi une atteinte de même gravité pourrait réaliser, selon les termes de l'art. 28 al. 4 OLAA.  
 
4.3.1. Cette disposition vise deux situations: Premièrement, elle s'applique si l'assuré, en raison de son âge, ne reprend plus d'activité lucrative après l'accident (variante I). Les conditions de cette variante sont remplis lorsque l'assuré dispose, au terme du traitement médical, d'une capacité de travail résiduelle au moins partielle, mais ne la met plus en valeur à cause de son âge. La deuxième situation est celle où l'atteinte à la capacité de gain a principalement pour origine l'âge avancé de l'assuré (variante II). Cette variante est également applicable lorsque l'âge avancé n'est pas un facteur qui a une incidence sur l'exigibilité, mais qu'il est malgré tout un obstacle à la mise en valeur de la capacité résiduelle de gain, notamment parce qu'aucun employeur n'est disposé à engager un employé présentant des atteintes à la santé pour un laps de temps très court avant l'ouverture de son droit à une rente de l'AVS (ATF 148 V 419 consid. 7.2 et les références).  
 
4.3.2. L'assuré qui remplit l'un ou l'autre cas de figure ne touchera alors une rente d'invalidité que dans la mesure où une telle rente serait octroyée dans les mêmes conditions à un assuré d'âge moyen présentant les mêmes capacités professionnelles et les mêmes aptitudes personnelles. Ce système repose sur la considération qu'une même atteinte à la santé peut entraîner chez une personne âgée des répercussions bien plus importantes sur la capacité de gain que chez une personne d'âge moyen pour diverses raisons (difficultés de reclassement ou de reconversion professionnels, diminution des capacités d'adaptation et d'apprentissage), alors que l'âge en tant que tel n'est pas une atteinte à la santé dont l'assureur-accidents doit répondre (ATF 122 V 418 consid. 3a; arrêt 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.1). Il s'agit d'empêcher l'octroi de rentes d'invalidité qui comporteraient, en fait, une composante de prestation de vieillesse, la rente de l'assurance-accidents ayant un caractère viager. L'âge moyen est de 42 ans ou, du moins, se situe entre 40 et 45 ans, tandis que l'âge avancé est d'environ 60 ans; il ne s'agit toutefois que d'un ordre de grandeur et non d'une limite absolue (ATF 122 V 418 consid. 1b; arrêt 8C_205/2016 du 20 juin 2016 consid. 3.4). La comparaison des revenus d'un assuré d'âge moyen comprend aussi bien le revenu sans invalidité que le revenu d'invalide (sur le tout : ATF 148 V 419 consid. 7.2 et les références; arrêt 8C_196/2022 du 20 octobre 2022 consid. 6.2).  
 
5.  
 
5.1. Vu l'âge avancé de l'intimé de plus de 63 ans au moment de la naissance du droit à la rente, la recourante a appliqué, dans sa décision du 9 septembre 2020, l'art. 28 al. 4 OLAA et a évalué le taux d'invalidité sur la base des revenus que pourrait réaliser un assuré d'âge moyen ayant subi une atteinte à la santé de même gravité. Elle a ainsi retenu un revenu de valide de 98'226 fr. Pour la fixation du revenu d'invalide, elle a pris comme base le niveau de compétence 2 pour un homme de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2018 (indexé à 2020 et adapté à l'horaire hebdomadaire normal de travail de la branche économique de 41.7 h), a opéré un abattement de 10 % pour tenir compte des limitations fonctionnelles de l'intimé et a ainsi obtenu un gain de 64'752 fr. De la comparaison des deux revenus résultait un taux d'invalidité de 34 %. Dans la décision sur opposition du 21 décembre 2020, elle a considéré en substance que le taux d'abattement de 10 % tenait suffisamment compte des limitations fonctionnelles et de la situation personnelle de l'intimé, un marché du travail équilibré offrant de nombreuses possibilités de mettre en valeur sa capacité de travail résiduelle à un travailleur comme l'intimé, qui disposait d'une expérience et d'une formation qualifiante.  
 
5.2.  
 
5.2.1. La cour cantonale a considéré que, malgré sa capacité de travail entière dans une activité adaptée, l'intimé était lourdement limité dans la mesure où très peu d'activités pouvaient être envisagées. En effet, seules des activités de type administratif semblaient envisageables, lesquelles ne devaient au demeurant pas nécessiter de déplacement de plus de quelques pas dans un bureau (sans devoir monter des escaliers ou des échelles). Cependant, les tâches administratives requéraient d'ordinaire de pouvoir se déplacer ou faire quelques activités manuelles debout ou assis. Il fallait dès lors imaginer une activité de bureau dans un établissement adapté à une personne qui ne pouvait que très peu se mouvoir et qui était empêchée de faire des activités de type administratif exigeant certaines tâches manuelles même légères.  
Le niveau de compétence 2 de l'ESS, appliqué par la recourante, correspondait à des tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données et les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules. Or au vu des limitations fonctionnelles que présentait l'intimé, on devait exclure de cette liste la vente (puisque l'intimé ne pouvait pas piétiner ou se déplacer), les soins (qui comprenaient des activités lourdes ou légères et des activités debout) ainsi que les services de sécurité et la conduite de véhicules (qui étaient prohibés par les limitations du genou). Seules restaient envisageables le traitement des données et les tâches administratives, voire l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, sauf s'il s'agissait d'une activité manuelle même légère ou dans une position autre qu'assise. 
Les possibilités concrètes pour l'intimé de retrouver un emploi dans le secteur administratif, soit un domaine qui n'était pas le sien avant ses accidents, apparaissaient également restreintes. S'il était vrai que l'intimé s'était occupé dans le cadre de la gestion de son entreprise des aspects administratifs (à raison de 15 % avant l'accident, selon ses propres indications), force était cependant de prendre en compte qu'il avait exercé principalement une activité manuelle de plâtrier-peintre, seule activité pour laquelle il disposait d'une formation professionnelle. Il avait en outre exposé qu'avant son accident, il avait été assisté d'une secrétaire et d'une fiduciaire pour les tâches administratives et, lorsqu'il avait été empêché de reprendre son activité manuelle de peintre, il avait eu des difficultés à gérer le travail de bureau en raison de lacunes en informatique. Enfin, quand son entreprise s'était approchée de la faillite et qu'il ne pouvait plus employer de secrétaire, li avait encore pu compter sur l'aide de son ex-compagne dans ce domaine. Son expérience en matière de travail administratif apparaissait ainsi peu étendue. Partant, même sur un marché du travail équilibré, l'éventail des activités accessibles à l'intimé était très limité en raison de ses limitations médicales, de sorte qu'un abattement entrait en considération. 
 
5.2.2. Quant aux autres éléments de la situation personnelle de l'intimé, les juges cantonaux ont constaté que ce dernier avait certes tenté de s'adapter après son premier accident en faisant davantage de travail administratif dans son entreprise, mais qu'il n'avait plus pu retravailler depuis 2011 à cause de son état de santé et avait ainsi été éloigné du monde du travail depuis plus de dix ans. La formation en informatique qu'il avait suivie grâce à l'OAI n'était par ailleurs pas à elle seule susceptible de compenser les désavantages compétitifs liés à ses limitations et à son âge avancé (63 ans lors de la décision contestée), et ce d'autant moins dans les quelques emplois administratifs qui seraient théoriquement adaptés à son état de santé.  
 
5.2.3. Cela étant, les limitations fonctionnelles et la situation personnelle de l'intimé auraient des effets pénalisants au niveau salarial aux yeux d'un potentiel employeur. Ce dernier devrait accepter d'engager un homme approchant la retraite, n'ayant plus pu travailler depuis de nombreuses années et n'ayant que peu de formation et d'expérience dans le domaine administratif, étant plâtrier-peintre de formation, ainsi que de nombreuses limitations d'ordre médical. Il se justifiait dès lors de retenir l'abattement maximal de 25 %, ce qui menait à un taux d'invalidité de 45 %.  
 
5.3. La recourante soutient qu'en procédant à un abattement de 25 % sur le revenu d'invalide, la cour cantonale aurait commis un excès positif de son pouvoir d'appréciation, violant ainsi le droit fédéral. En effet, les critères retenus par les premiers juges pour motiver l'augmentation de l'abattement, soit l'âge avancé de l'intimé, son long éloignement du marché du travail et l'absence de qualifications dans le niveau de compétence 2, ne justifieraient pas un abattement dans le cas d'espèce.  
 
6.  
 
6.1. Par rapport à la question de l'abattement à cause de l'âge, le Tribunal fédéral a retenu dans un arrêt récent qu'un tel abattement ne peut pas être envisagé lorsqu'on est en présence d'un cas d'application de l'art. 28 al. 4 OLAA (ATF 148 V 149 consid. 8.5). Comme l'intimé était âgé de plus de 63 ans et se trouvait ainsi à moins de deux ans de l'âge de la retraite AVS au moment déterminant de la naissance du droit à la rente d'invalidité, l'application de l'art. 28 al. 4 OLAA par la recourante n'apparaît pas critiquable en l'espèce. Il en résulte, comme on vient de le dire, qu'un abattement à cause de l'âge ne saurait être retenu.  
 
6.2. Concernant les éléments d'expérience et de formation professionnelles, la recourante reproche implicitement à la cour cantonale d'avoir établi les faits de manière incomplète voire incorrecte. En effet, les premiers juges ont retenu que la formation en tant que gestionnaire de stock octroyée par l'OAI n'aurait duré que du 1er mai au 8 août 2015. Toutefois, la recourante fait observer à juste titre que cette formation a commencé en 2014 déjà et a fini en juin 2015, ce qui ressort du protocole d'entretien du case management de la recourante avec l'intimé et une collaboratrice de l'OAI du 7 mai 2015, des protocoles d'entretien avec l'intimé du 19 juin et du 25 août 2015 ainsi que du courrier de l'OAI du 2 juillet 2015 confirmant la "prolongation" de la formation certifiante de gestionnaire de stock du 1er mai au 8 juin 2015. Au vu de cette formation, qui se joint à la longue expérience professionnelle acquise par l'activité administrative au sein de sa propre entreprise, un abattement supplémentaire pour manque d'expérience voire de formation professionnelle s'avère injustifié.  
 
6.3. Quant au long éloignement du marché du travail qu'évoquent implicitement les juges cantonaux, il ne s'agit pas là d'un facteur d'abattement au sens de la jurisprudence (cf. arrêts 9C_55/2018 du 30 mai 2019 consid. 4.3; 9C_273/2019 du 18 juillet 2019 consid. 6.3; ATF 126 V 75 consid. 5b/aa et bb).  
 
6.4. En conclusion, seules les limitations fonctionnelles de l'assuré justifient un abattement. Or, si l'assuré est limité dans les travaux lourds et moyens, il dispose d'une pleine capacité de travail dans les travaux légers ne nécessitant pas beaucoup de déplacements et le port de charges de plus de 5 kg. De telles limitations sont tout à fait compatibles avec une activité dans le domaine administratif, activité dans laquelle l'intimé dispose d'une formation et d'une longue expérience professionnelle. L'abattement de 10 % opéré par la recourante ne prête ainsi pas le flanc à la critique et c'est à tort que les premiers juges, substituant leur propre appréciation à celle de la recourante, ont augmenté ce taux à 25 %.  
 
7.  
Vu ce qui précède, le recours doit être admis. L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'elle obtienne gain de cause, la recourante n'a pas droit à une indemnité de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 12 avril 2022 est annulé et la décision sur opposition de la CNA du 21 décembre 2020 est confirmée. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 10 mars 2023 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Betschart