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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_349/2024  
 
 
Arrêt du 19 décembre 2024  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Heine et Viscione. 
Greffier : M. Ourny. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Me Jean-Michel Duc, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
AXA Assurances SA, 
General-Guisan-Strasse 40, 8400 Winterthour, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (procédure de première instance; condition de recevabilité), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 2 mai 2024 (AA 93/22 - 40/2024). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.B.________ est l'unique associé gérant, avec signature individuelle, de la société A.________ Sàrl (ci-après aussi: la société), active dans la gestion administrative pour entreprises et particuliers. C.B.________ (ci-après: l'assurée), née en 1991, fille de B.B.________, a été engagée par la société comme assistante de direction à compter du 1 er mars 2018. L'assurée a été victime d'un accident le 13 juin 2021 et s'est plainte depuis lors de douleurs lombaires. AXA Assurances SA (ci-après: AXA) a pris en charge le cas. Le 22 mars 2022, celle-ci a informé par téléphone B.B.________ que les frais du cas de sa fille seraient pris en charge jusqu'au 16 septembre 2021 et qu'ensuite, le cas relèverait de la maladie; l'attention du prénommé était en outre attirée sur la possibilité de déposer une opposition motivée contre la décision à venir.  
 
A.b. Par décision du 23 mars 2022, AXA a mis un terme à ses prestations (paiement de l'indemnité journalière et du traitement médical) avec effet au 16 septembre 2021, motif pris qu'après cette date, le lien de causalité entre l'accident et les troubles de l'assurée ne pouvait plus être admis au degré de la vraisemblance prépondérante. Cette décision a été notifiée à l'assurée par courrier postal le 25 mars 2022.  
 
A.c. Le 24 mars 2022, AXA a envoyé un courriel à la société, à l'adresse électronique de B.B.________, dont la teneur était la suivante:  
 
"Assurance-accidents obligatoire selon la LAA - Notre référence xxx 
Personne assurée: C.B.________ - Événement du 13.06.2021 
Preneur d'assurance: A.________ Sàrl 
Monsieur, 
En notre qualité d'assureur-accidents obligatoire, nous avons examiné notre obligation de verser des prestations pour l'événement du 13 juin 2021. À titre d'information, nous vous communiquons un extrait de notre décision du 23 mars 2022. 
Dispositif  
1. L'assurance-accidents met un terme au versement de ses prestations au 16 septembre 2021. 
2. En application de l'art. 11 al. 1, let. b de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales (OPGA), l'effet suspensif est retiré pour tout recours éventuel. 
Si vous avez des questions, n'hésitez pas à nous contacter. Nous vous fournirons volontiers de plus amples informations. 
Avec nos meilleures salutations 
D.________ 
+41 52 yyy 
sinistre@axa.ch 
AXA 
Case postale 357 
8401 Winterthur 
www.axa.ch " 
 
A.d. Par courriel du 24 mai 2022, B.B.________ a, au nom de la société, manifesté son opposition à la décision du 23 mars 2022. Par décision sur opposition du 13 juillet 2022, AXA a déclaré l'opposition irrecevable pour tardiveté; le délai d'opposition avait commencé à courir le 25 mars 2022, soit le lendemain de la notification régulière par voie électronique, et était arrivé à échéance - compte tenu des féries judiciaires - le dimanche 8 mai 2022, le terme devant être reporté au 9 mai 2022.  
 
B.  
Saisie d'un recours de la société contre la décision sur opposition du 13 juillet 2022, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud l'a rejeté par arrêt du 2 mai 2024. 
 
C.  
A.________ Sàrl interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'intimée afin qu'elle "rende sans délai une décision formelle motivée et munie des voies de droit, statuant sur les droits de l'assurée". 
L'intimée conclut au rejet du recours. La cour cantonale se réfère purement et simplement à son jugement. L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer. La recourante a répliqué et l'intimée a dupliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le point de savoir si la juridiction cantonale a confirmé à bon droit la décision sur opposition de l'intimée du 13 juillet 2022 déclarant irrecevable l'opposition formée par la recourante contre la décision du 23 mars 2022.  
 
2.2. Un litige qui porte sur le refus de l'assurance-accidents d'entrer en matière sur une opposition constitue une décision de nature procédurale et ne concerne pas en soi l'octroi ou le refus de prestations en espèces (JOHANNA DORMANN, in Basler Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 3 e éd., 2018, n.b.p. 185 ad art. 105 LTF; arrêt 8C_245/2022 du 7 septembre 2022 consid. 2.2 et l'arrêt cité). Par conséquent, l'exception prévue à l'art. 105 al. 3 LTF, qui doit être interprétée de manière restrictive (ATF 140 V 136 consid. 1.2.2), ne s'applique pas, indépendamment du fait que l'octroi ou le refus de prestations en espèces peut dépendre de la solution de la question litigieuse (ATF 135 V 412 consid. 1.2.1). Le Tribunal fédéral est donc lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF a contrario) et ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte (art. 105 al. 2 LTF), à savoir arbitraire (ATF 149 II 337 consid. 2.3; 148 V 366 consid. 3.3; 145 V 188 consid. 2).  
 
3.  
 
3.1. Selon l'art. 49 al. 1 LPGA (RS 830.1), l'assureur doit rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles l'intéressé n'est pas d'accord. L'art. 49 al. 3 LPGA dispose que les décisions indiquent les voies de droit (1 re phrase); elles doivent être motivées si elles ne font pas entièrement droit aux demandes des parties (2 ème phrase); la notification irrégulière d'une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l'intéressé (3 ème phrase). Aux termes de l'art. 51 LPGA, les prestations, créances et injonctions qui ne sont pas visées à l'art. 49 al. 1 peuvent être traitées selon une procédure simplifiée (al. 1); l'intéressé peut exiger qu'une décision soit rendue (al. 2). L'art. 52 al. 1 LPGA prévoit que les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues, à l'exception des décisions d'ordonnancement de la procédure.  
 
3.2.  
 
3.2.1. S'agissant du délai pour contester un acte de l'administration, la jurisprudence distingue selon qu'il s'agit de la clôture du cas signifiée de manière informelle ou d'un décompte d'indemnités journalières. Dans la première éventualité, le délai pour faire part de son désaccord est d'un an car, sur cette question, l'administration aurait dû obligatoirement statuer par le biais d'une décision écrite (art. 49 al. 1 LPGA; voir aussi l'art. 124 OLAA [RS 832.202]; cf. ATF 134 V 145 consid. 5.3.2; 132 V 412 consid. 4). La situation est en revanche différente dans la seconde éventualité, à savoir lorsque l'intéressé veut contester une communication pouvant faire l'objet d'une procédure simplifiée en vertu de l'art. 51 al. 1 LPGA. Contre une communication effectuée conformément au droit sous la forme simplifiée, il est possible d'exiger une décision écrite dans un délai de réflexion, qui, selon les circonstances, peut être supérieur au délai légal de 30 jours mais qui ne saurait cependant dépasser plusieurs mois (ATF 134 V 145 consid. 5.3.1). Aussi, ce délai doit-il être fixé à 3 mois ou 90 jours à compter de la communication d'un décompte d'indemnité journalière (arrêt 8C_789/2012 du 16 septembre 2013 consid. 4.1 et les arrêts cités).  
 
3.2.2. L'art. 49 al. 3 LPGA, à teneur duquel la notification irrégulière d'une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l'intéressé, consacre un principe général du droit qui concrétise la protection constitutionnelle de la bonne foi et les garanties conférées par l'art. 29 al. 1 et 2 Cst. (arrêt 9C_239/2022 du 14 septembre 2022 consid. 5.1; cf. ATF 145 IV 259 consid. 1.4.4; 144 II 401 consid. 3.1). Cependant, la jurisprudence n'attache pas nécessairement la nullité à l'existence de vices dans la notification: la protection des parties est suffisamment garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité. Il y a lieu d'examiner, d'après les circonstances du cas concret, si la partie intéressée a réellement été induite en erreur par l'irrégularité de la notification et a, de ce fait, subi un préjudice. Il convient à cet égard de s'en tenir aux règles de la bonne foi qui imposent une limite à l'invocation du vice de forme (ATF 150 II 26 consid. 3.5.4; 139 IV 228 consid. 1.3; 122 I 97 consid. 3a/aa). En vertu de ce principe, l'intéressé est tenu de se renseigner sur l'existence et le contenu de la décision dès qu'il peut en soupçonner l'existence, sous peine de se voir opposer l'irrecevabilité d'un éventuel moyen pour cause de tardiveté (ATF 139 IV 228 consid. 1.3).  
 
4.  
En l'espèce, les premiers juges ont retenu que dans la mesure où une décision formelle au sens de l'art. 49 al. 1 LPGA avait été rendue le 23 mars 2022 par l'intimée, la jurisprudence concernant le délai pour contester un acte de l'administration (cf. consid. 3.2.1 supra) ne s'appliquait pas. La recourante ne disposait donc pas d'un délai d'un an à réception du courriel de l'intimée du 24 mars 2022 pour manifester son désaccord. 
En revanche, la communication du dispositif de la décision précitée par courriel, sans motivation et sans mention des voies de droit, ne respectait pas les exigences de l'art. 49 al. 1 et 3 LPGA et était partante constitutive d'une notification irrégulière, ce qui n'était pas contesté par l'intimée. Cela étant, les informations obtenues par B.B.________, seul associé gérant de la recourante, étaient imputables à celle-ci. Or le prénommé avait reçu le 22 mars 2022 un appel téléphonique de l'intimée l'informant que le cas de sa fille serait pris en charge jusqu'au 16 septembre 2021. Lors de cet entretien téléphonique, il avait par ailleurs été rendu attentif au fait qu'il était possible de faire opposition à la décision. Le lendemain, l'intimée avait rendu une décision dans ce sens, qui avait été notifiée à l'assurée le 25 mars 2022. Le 24 mars 2022, l'intimée avait transmis à la recourante, par courriel, le dispositif de cette décision. Lorsqu'il avait reçu ce courriel, B.B.________ connaissait le contenu de la décision et les voies de droit qui lui avaient été mentionnées deux jours plus tôt par téléphone. En outre, il avait manifestement pris connaissance de la décision notifiée à sa fille, puisqu'il l'avait produite à l'appui de son opposition le 24 mai 2022. Il avait du reste admis ne pas avoir respecté le délai d'opposition et ne prétendait pas avoir pris connaissance du courriel du 24 mars 2022 à une date ultérieure. 
Les juges cantonaux en ont conclu que même si la notification, le 24 mars 2022, de la décision du 23 mars 2022 à la recourante avait été irrégulière, le délai pour faire opposition avait bien pris fin trente jours plus tard. La notification irrégulière n'avait entraîné aucun préjudice pour la recourante et avait atteint son but. Le délai pour faire opposition était bien arrivé à échéance le 9 mai 2022, de sorte que l'opposition du 24 mai 2022 était tardive. 
 
5.  
 
5.1. Se plaignant d'une constatation manifestement inexacte des faits et d'une violation de l'art. 49 al. 1 LPGA, la recourante reproche aux juges précédents d'avoir considéré que le courriel du 24 mars 2022 s'apparentait à une décision formelle irrégulièrement notifiée, et non à une communication dans le cadre d'une procédure simplifiée. Une telle communication pouvant être contestée dans un délai d'une année, elle aurait agi en temps utile et l'intimée aurait été tenue de rendre une décision formelle, et non une décision sur opposition. La recourante expose que le courriel du 24 mars 2022 constituerait un simple extrait de décision ne contenant ni motivation ni indication des voies de droit. La communication du simple dispositif de la décision, par courrier électronique, devrait être interprétée comme une volonté de l'intimée de procéder - à tort - par la voie de la procédure simplifiée. La recourante soutient qu'à défaut d'avoir pu prendre connaissance de la motivation de la décision, elle n'aurait pas été en mesure de motiver une éventuelle opposition. Elle ajoute ne pas être dotée d'un service juridique, de sorte qu'elle n'aurait pas été apte à identifier l'irrégularité de l'intimée. En signifiant son désaccord le 24 mai 2022, elle aurait respecté le délai d'une année fixé par la jurisprudence pour contester le refus de prestations.  
 
5.2.  
 
5.2.1. Il n'est pas contesté que la décision du 23 mars 2022, qui contient notamment une motivation et l'indication de la voie de droit, a été valablement notifiée à l'assurée le 25 mars 2022. Ce faisant, l'intimée a rendu à juste titre une décision au sens de l'art. 49 LPGA puisqu'elle a mis un terme à ses prestations. Par courriel du 24 mars 2022, elle a communiqué à la recourante un extrait de cette décision, à savoir son dispositif. Dès lors qu'au moment de l'envoi de ce courriel, une décision formelle avait d'ores et déjà été émise, ce à quoi la recourante a d'ailleurs été rendue attentive, on ne saurait considérer que celle-ci disposait, en application de la jurisprudence (cf. consid. 3.2.1 supra), d'un délai d'une année pour exiger qu'une décision écrite au sens de l'art. 49 al. 1 LPGA soit rendue. Il s'agit donc bien, comme retenu par le tribunal cantonal, d'un cas de notification irrégulière d'une décision, l'intimée ayant transmis à la recourante le seul dispositif de sa décision, sans motivation ni indication de la voie de droit, de surcroît par courrier électronique.  
 
5.2.2. En ce qui concerne l'absence de préjudice causé par la notification irrégulière, le raisonnement des premiers juges peut également être confirmé. Le courriel adressé à la recourante le 24 mars 2022 renvoyait expressément à la décision du 23 mars 2022, régulièrement notifiée à l'assurée le 25 mars 2022. Il ressortait clairement de ce courriel que seul un extrait de cette décision était transmis à la recourante. B.B.________, seul représentant de la recourante, avait par ailleurs été averti deux jours plus tôt qu'une décision mettant fin aux prestations allait être rendue et qu'il serait possible de s'y opposer. À réception du courriel du 24 mars 2022, le prénommé savait donc qu'une décision avait été rendue le jour précédent, que l'intimée mettait un terme aux prestations au 16 septembre 2021 et qu'il était possible de s'opposer à cette décision. Conformément aux règles de la bonne foi, il était tenu de se renseigner sans délai sur le contenu de la décision en question, en vue notamment de prendre connaissance de la motivation et de la voie de droit. Pour ce faire, il pouvait s'adresser à l'assurée - à savoir sa fille -, qui était en possession de la décision dans son intégralité dès le 25 mars 2022, ou à l'intimée, qui aurait été en mesure de lui faire parvenir la décision complète. Dans ces conditions, la cour cantonale a confirmé à juste titre qu'en ne s'opposant à la décision du 23 mars 2022 que le 25 mai 2022, la recourante pouvait se voir opposer l'irrecevabilité de son opposition pour cause de tardiveté. Le point - débattu dans le cadre de l'échange d'écritures - de savoir quand B.B.________ a effectivement eu connaissance de la décision notifiée à sa fille peut demeurer indécis, dès lors que l'intéressé était quoi qu'il en soit tenu de se renseigner dès le 24 mars 2022. Il s'ensuit que l'arrêt cantonal ne prête pas le flanc à la critique, que ce soit sous l'angle de l'établissement des faits - que le Tribunal fédéral n'examine que sous l'angle de l'arbitraire (cf. consid. 2.2 supra) - ou de l'application du droit.  
 
6.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 19 décembre 2024 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
Le Greffier : Ourny