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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_325/2022  
 
 
Arrêt du 30 janvier 2023  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Maillard et Abrecht. 
Greffière : Mme Castella. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par M e Olivier Subilia, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Direction générale de l'emploi et du marché du travail, 
rue Caroline 11, 1014 Lausanne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-chômage (indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 5 avril 2022 (ACH 53/21 - 53/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société A.________ SA (ci-après: la société) est une société anonyme de droit privé active dans le domaine du transport public de personnes, dont les actions sont détenues majoritairement par les communes et le canton de Vaud. 
Le 27 mars 2020, la société a transmis au Service de l'emploi du canton de Vaud (ci-après: le SDE) un préavis de réduction de l'horaire de travail (RHT) en raison des mesures officielles prises dans le cadre de la pandémie de coronavirus. Elle demandait l'octroi de l'indemnité en cas de RHT pour 405 employés pour la période allant du 1 er avril au 31 mai 2020, en évaluant à 21,10 % la perte de travail due, entre autres motifs, à la réduction de l'offre de transport entraînée par la généralisation de l'horaire du dimanche à tous les jours de la semaine.  
Après avoir soumis un questionnaire à la société, le SDE a rendu, le 11 juin 2020, une décision par laquelle il a rejeté la demande tendant au versement de l'indemnité en cas de RHT. La société s'est opposée à cette décision en produisant divers documents, notamment les conventions collectives de travail et conventions de subventionnement qui la liaient. 
Par décision du 5 février 2021, le SDE a rejeté l'opposition et a confirmé sa décision du 11 juin 2020. 
 
B.  
Par arrêt du 5 avril 2022, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le recours interjeté par la société contre la décision sur opposition du SDE du 5 février 2021. 
 
C.  
La société forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à sa réforme dans le sens de la reconnaissance de son droit à l'indemnité en cas de RHT dans son principe, la cause étant pour le surplus renvoyée au SDE pour qu'il procède au calcul des indemnités dues. A titre subsidiaire, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La Direction générale de l'emploi et du marché du travail du canton de Vaud, qui a remplacé le SDE à partir du 1 er juillet 2022, a conclu au rejet du recours. La cour cantonale et le Secrétariat d'État à l'économie (SECO) ont renoncé à se déterminer.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
Le Tribunal fédéral, qui est un juge du droit, fonde son raisonnement juridique sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 V 366 consid. 3.3) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 2 LTF). Si le recourant entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF); à défaut, un état de fait divergent de celui de la décision attaquée ne peut pas être pris en compte (ATF 145 V 188 consid. 2). 
 
3.  
Le litige porte sur le point de savoir si la juridiction cantonale a violé le droit fédéral en confirmant le refus de l'intimée d'octroyer à la recourante des indemnités en cas de RHT du 1er avril au 31 mai 2020. 
 
4.  
 
4.1. Selon l'art. 31 al. 1 LACI (RS 837.0), les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l'activité suspendue ont droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail lorsque: ils sont tenus de cotiser à l'assurance ou qu'ils n'ont pas encore atteint l'âge minimum de l'assujettissement aux cotisations AVS (let. a); la perte de travail doit être prise en considération (art. 32 LACI; let. b); le congé n'a pas été donné (let. c); la réduction de l'horaire de travail est vraisemblablement temporaire, et si l'on peut admettre qu'elle permettra de maintenir les emplois en question (let. d).  
L'art. 32 let. a et b LACI précise que la perte de travail est prise en considération lorsqu'elle est due à des facteurs d'ordre économique et est inévitable et qu'elle est d'au moins 10 % de l'ensemble des heures normalement effectuées par les travailleurs de l'entreprise. Pour les cas de rigueur, le Conseil fédéral règle la prise en considération de pertes de travail consécutives à des mesures prises par les autorités, à des pertes de clientèle dues aux conditions météorologiques ou à d'autres circonstances non imputables à l'employeur (art. 32 al. 3, première phrase, LACI). Le Conseil fédéral a ainsi notamment prévu à l'art. 51 al. 1 OACI (RS 837.02) que les pertes de travail consécutives à des mesures prises par les autorités, ou qui sont dues à d'autres motifs indépendants de la volonté de l'employeur, sont prises en considération lorsque l'employeur ne peut les éviter par des mesures appropriées et économiquement supportables ou faire répondre un tiers du dommage. 
 
4.2.  
 
4.2.1. Selon la jurisprudence, l'indemnité en cas de RHT est une mesure préventive au sens large: l'allocation de cette indemnité a pour but d'éviter le chômage complet des travailleurs - soit leurs congés ou leurs licenciements - d'une part et, d'autre part, de maintenir simultanément les emplois dans l'intérêt des employeurs aussi bien que des travailleurs. Or en règle générale, les conditions précitées du droit à l'indemnité en cas de RHT ne sauraient être remplies si l'employeur est une entreprise de droit public, faute pour celle-ci d'assumer un risque propre d'exploitation. Au contraire, les tâches qui lui incombent de par la loi doivent être exécutées indépendamment de la situation économique, et les impasses financières, les excédents de dépenses ou les déficits peuvent être couverts au moyen des deniers publics (recettes des impôts). Bien plus, il n'existe en général aucune menace de perdre son emploi là où les travailleurs ont la possibilité d'être déplacés dans d'autres secteurs, ainsi que cela est le cas dans les communautés ou établissements publics d'une certaine importance. En revanche, compte tenu des formes multiples de l'action étatique, on ne saurait de prime abord exclure que, dans un cas concret, le personnel des services publics remplisse les conditions du droit à l'indemnité en cas de RHT. Ce qui est déterminant en fin de compte, conformément à la finalité du régime de la prestation, c'est de savoir si, par l'allocation de l'indemnité en cas de RHT, un licenciement peut être évité (ATF 121 V 362 consid. 3a et les références).  
 
4.2.2. C'est à brève échéance que le versement de l'indemnité en cas de RHT doit pouvoir éviter un licenciement. En effet, ces indemnités ont un caractère préventif. Il s'agit de mesures temporaires. Le statut du personnel touché par la réduction de l'horaire de travail est dès lors décisif pour l'allocation de l'indemnité. Ainsi, là où ce personnel est au bénéfice d'un statut de fonctionnaire ou d'un statut analogue limitant les possibilités de licenciement que connaît le contrat de travail, ce statut fait échec à court terme - éventuellement à moyen terme - à la suppression d'emploi. Dans ce cas, les conditions du droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail ne sont pas remplies. L'exigence d'un risque économique à court ou moyen terme concerne aussi l'entreprise. Cela ressort notamment de l'art. 32 al. 1 let. a LACI, selon lequel la perte de travail n'est prise en considération que si elle est due à des facteurs d'ordre économique et qu'elle est inévitable. A l'évidence, cette condition ne saurait être remplie si l'entreprise ne court aucun risque propre d'exploitation, à savoir un risque économique où l'existence même de l'entreprise est en jeu, par exemple le risque de faillite ou le risque de fermeture de l'exploitation. Or si l'entreprise privée risque l'exécution forcée, il n'en va pas de même du service public, dont l'existence n'est pas menacée par un exercice déficitaire (ATF 121 V 362 précité consid. 3b et les références).  
 
4.3.  
 
4.3.1. Dans le cadre des mesures prises par le Conseil fédéral dans le domaine de l'assurance-chômage en lien avec la pandémie de coronavirus (Covid-19), le SECO a rédigé des directives destinées à préciser les conditions d'octroi des prestations de l'assurance-chômage dans ce contexte.  
Bien que les directives administratives ne lient en principe pas le juge, celui-ci est néanmoins tenu de les considérer dans son jugement, pour autant qu'elles permettent une interprétation des normes juridiques qui soit adaptée au cas d'espèce et équitable. Ainsi, si les directives administratives constituent une concrétisation convaincante des dispositions légales, le tribunal ne s'en départit pas sans motif pertinent. Dans cette mesure, il tient compte du but de l'administration tendant à garantir une application égale du droit (ATF 148 V 102 consid. 4.2; 146 V 224 consid. 4.4. et l'arrêt cité). En principe, il convient de tenir compte de la version qui était à la disposition de l'autorité de décision au moment de la décision (et qui a déployé un effet contraignant à son égard); des compléments ultérieurs peuvent éventuellement être pris en compte, notamment s'ils permettent de tirer des conclusions sur une pratique administrative déjà appliquée auparavant (cf. ATF 147 V 278 consid. 2.2 et les références). 
 
4.3.2. Sous l'intitulé "Préavis des fournisseurs de prestations publiques (employeurs publics, administrations, etc.) ", la directive du SECO 2020/8 du 1er juin 2022 (tout comme les directives suivantes) prévoit ce qui suit:  
 
"Le but de l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail est de préserver les emplois. L'objectif est d'éviter des licenciements à court terme, consécutifs à un recul temporaire de la demande de biens et de services, et la perte de travail qui en résulte (cf. également ATF 121 V 362 c. 3a). De manière générale, ce risque (immédiat) de disparition d'emplois concerne uniquement les entreprises qui financent la fourniture de prestations exclusivement avec les revenus ainsi perçus ou avec des fonds privés. Contrairement aux entreprises privées, les fournisseurs de prestations publiques ne supportent pas de risque entrepreneurial ou de risque de faillite parce qu'ils doivent mener à bien les tâches qui leur ont été confiées par la loi indépendamment de la situation économique. Les éventuels problèmes de liquidités, les dépenses supplémentaires ou même les pertes résultant de l'activité de l'entreprise sont couverts par des moyens publics, qu'il s'agisse de subventions ou d'autres moyens financiers. Il n'existe pas dans ces cas de risque de disparition d'emplois. En vertu du mandat des fournisseurs de prestations publiques, considérant l'objectif visé par l'indemnité en cas de RHT, les prestataires n'ont globalement aucun droit à la RHT pour leurs travailleurs. Le versement de la RHT en cas de suspension temporaire de cette fourniture de prestations revient à répercuter les coûts du salaire sur le fonds de l'AC sans que le risque de licenciements à court terme pour ces entreprises publiques-privées, contre lequel se bat le législateur, ne soit avéré. 
Ces réflexions s'appliquent aussi bien aux employeurs de droit public-privé eux-mêmes (en ce qui concerne les employés de la Confédération, des cantons et des communes) qu'aux secteurs privatisés qui fournissent des prestations sur mandat d'une institution publique sur la base d'un accord. La RHT ne peut être accordée aux travailleurs employés par des fournisseurs de prestations publiques que si les travailleurs concernés sont exposés à un risque concret et immédiat de licenciement. Cela peut également concerner un secteur d'un prestataire seulement. Par exemple, une entreprise de transports peut comprendre à la fois un secteur d'exploitation pour lequel elle a droit à la RHT en cas de chute du chiffre d'affaires (p. ex. bus touristiques), et un secteur d'exploitation pour lequel aucun droit à la RHT n'existe (exploitation subventionnée d'un bus local). 
On considère qu'un risque immédiat et concret de disparition d'emplois est présent si, en cas de recul de la demande ou de réduction ordonnée de l'offre chez le mandataire, il n'existe pas de garantie que les coûts d'exploitation seront entièrement couverts, et si les entreprises concernées ont la possibilité de procéder à des licenciements immédiats dans l'objectif de faire baisser les coûts d'exploitation. Ces deux conditions doivent être cumulées. 
L'ACt [l'autorité cantonale compétente] est tenue de vérifier uniquement si un risque immédiat et concret de disparition d'emplois existe et si l'employeur est en mesure de justifier ce risque en présentant des documents appropriés. Il incombe donc aux entreprises qui fournissent des prestations publiques (Service Public) de justifier de manière plausible à l'ACt qu'en cas de perte de travail, un risque immédiat et concret de licenciements existe, à l'aide de documents adaptés (règlements du personnel, contrats de travail, mandats de prestations, concessions, CCT, etc.). Il n'est pas nécessaire de procéder à d'autres examens. L'introduction de la réduction de l'horaire de travail doit être refusée uniquement si les documents remis par l'employeur ne justifient pas un risque de disparition d'emplois à satisfaction de droit. 
Dans le cas d'une décision sur opposition, la réalisation des deux conditions du droit à l'indemnité susmentionnées (risque de disparition d'emplois concret et aucune couverture complète des coûts d'exploitation) doit être mentionnée clairement et explicitement sur le document justificatif comme motif." 
 
5.  
 
5.1. En l'espèce, la cour cantonale a dans un premier temps distingué la règlementation en matière de transport public régional de voyageurs de celle applicable en matière de transport urbain.  
S'agissant du transport régional, elle a relevé que les entreprises de transports publics soumettaient aux commanditaires des offres pour deux années d'horaires et y attestaient pour chaque ligne les coûts planifiés ainsi que les produits attendus issus de la vente de titres de transport; les commanditaires (Confédération et cantons) indemnisaient, selon une clé de répartition prédéfinie (art. 30 de la loi du 20 mars 2009 sur le transport de voyageurs [LTV; RS 745.1]), les coûts non couverts conformément aux offres (art. 28 al. 1 LTV). En cas d'écart entre les coûts planifiés et les produits, les excédents éventuels étaient attribués à raison d'au moins deux tiers à une réserve à affectation obligatoire. Cette réserve spéciale ne pouvait être utilisée que pour éponger d'éventuels futurs déficits (cf. art. 36 LTV). Pour l'année 2020, le déficit planifié s'élevait à 5'987'836 fr. et devait être pris en charge à hauteur de 47 % par la Confédération et de 53 % par le canton de Vaud (cf. art. 8 de la convention de subventionnement entre le canton de Vaud et la recourante relative à l'offre sur les prestations du secteur du trafic régional des voyageurs [TRV] et son indemnisation, applicable à la période d'horaire 2020/2021). 
En matière de transport urbain, la cour cantonale a relevé que les prestations de transport n'étaient pas indemnisées par la Confédération, mais par les cantons et les communes, en fonction de la législation spécifique à chaque canton. Dans le canton de Vaud, la participation cantonale était, conformément à l'art. 18 de la loi cantonale du 11 décembre 1990 sur la mobilité et les transports publics (LMTP; BLV 740.21), limitée à 50 % du déficit d'exploitation au plus, mais elle ne pouvait pas dépasser au maximum la somme des montants suivants: le 50 % des intérêts des emprunts, garantis par l'État et les communes; le 50 % des amortissements comptables des installations et équipements; et le 12,5 % des autres charges d'exploitation, y compris les intérêts sur les engagements courants. Le solde des coûts était à la charge des communes, après déduction de l'intégralité des recettes (cf. art. 17 LMTP). Pour l'année 2020, le déficit planifié s'élevait à 114'253'617 fr. et devait être pris en charge à hauteur de 29'094'951 fr. par le canton de Vaud, le solde étant à la charge des communes (cf. art. 5 de la convention de subventionnement entre le canton de Vaud et la recourante relative à l'offre sur les prestations du secteur du trafic local [urbain] des voyageurs et son indemnisation, applicable à l'année d'horaire 2020). Les lignes de trafic urbain en site propre, telles que les lignes B.________ et C.________, étaient assimilées, conformément à l'art. 7 al. 3 let. a LMTP, aux lignes de trafic régional. D'après l'art. 15 al. 1 LMTP, les communes participaient à raison de 30 % à la subvention d'exploitation des lignes de trafic régional, le solde étant à la charge de l'Etat. Pour l'année 2020, le déficit planifié s'élevait à 32'107'624 fr. et devait être pris en charge à hauteur de 22'475'337 fr. par le canton de Vaud et de 9'632'287 fr. par les communes (cf. art. 5 et 13 de la convention de subventionnement entre le canton de Vaud et la recourante relative à l'offre sur les prestations du secteur urbain en site propre des voyageurs pour les métros et son indemnisation, applicable à l'année d'horaire 2020). 
 
5.2. Dans un second temps, la juridiction cantonale a retenu que les mesures de lutte contre le coronavirus et la déclaration de la "situation extraordinaire" conformément à la loi du 28 septembre 2012 sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme (loi sur les épidémies, LEp; RS 818.101) avaient eu des incidences massives sur les transports publics; en raison de la recommandation urgente du Conseil fédéral de rester à la maison et de limiter autant que possible la mobilité, la demande en offres de transports publics avait subi une baisse allant jusqu'à 80 % (cf. Message du 12 août 2020 concernant la loi urgente sur le soutien des transports publics durant la crise du COVID-19, FF 2020 6493, 6498). En outre, d'après le rapport de gestion 2020 de la recourante, celle-ci avait, dans le cadre des mesures d'endiguement du coronavirus, réduit son offre conformément aux recommandations des autorités fédérales et cantonales ainsi qu'aux directives prises par la branche, en adaptant l'ensemble de son offre de transports. Du 23 mars au 11 mai 2020, les horaires du dimanche avaient été appliqués à toutes les lignes, alors que les cadences du C.________ avaient été adaptées au gré de l'évolution de la circulation.  
Les premiers juges ont alors constaté que la réduction de l'offre de transports publics durant la période de confinement avait entraîné des pertes de recettes, lesquelles n'avaient plus permis aux entreprises de transports publics de couvrir les coûts fixes planifiés. Compte tenu des mécanismes de financement mis en place, il appartenait à la recourante elle-même s'agissant du transport public régional de voyageurs, respectivement au canton et aux communes s'agissant du transport urbain, de couvrir le déficit provoqué par cette chute de recettes. Dans la mesure où l'État et les communes subventionnaient des entités privées devant effectuer une tâche publique, ils devaient mettre à disposition les fonds nécessaires afin d'assurer leur équilibre financier. La cour cantonale a indiqué que l'on pouvait se demander si la recourante ne disposait pas d'une garantie de déficits plus étendue. Elle a toutefois laissé cette question indécise dans la mesure où l'on pouvait d'emblée considérer qu'il n'y avait pas de risque de fermeture de l'exploitation, ni de menace sur l'emploi. 
En effet, la cour cantonale a considéré que la recommandation urgente du Conseil fédéral de rester à la maison et de limiter autant que possible ses déplacements n'était pas de nature à remettre en cause, dans son principe, l'offre convenue avec les commanditaires (Confédération, canton et communes). Même si la durée des restrictions mises en place n'était pas prévisible, les activités de la recourante allaient nécessairement reprendre à plus ou moins court terme dans les limites convenues dans les conventions de prestations, dans la mesure où l'offre répondait aux besoins de la vie sociale et économique de la zone concernée. Aussi, les personnes touchées par les mesures de réduction de l'horaire de travail ne couraient aucun risque économique. Il ressortait du dossier qu'au moment du prononcé de la décision attaquée, la recourante n'avait d'ailleurs pas rendu vraisemblable qu'elle serait exposée à court terme à des pertes de revenus suffisamment importantes pour mettre en cause les emplois. Compte tenu des obligations auxquelles elle était tenue en vertu des conventions signées avec les commanditaires, elle n'avait objectivement pas la possibilité - même si les dispositions contractuelles applicables autorisaient en tout temps des licenciements pour motif économique - de procéder au licenciement de ses collaborateurs, au risque sinon de ne pas pouvoir remplir les mandats de prestations au moment où les restrictions d'activités seraient levées. En tout état de cause, une redéfinition de l'offre de prestations de la part des commanditaires, respectivement un ajustement des effectifs de la part de l'entreprise de transport, en raison d'un événement tel que la crise du coronavirus ne pourraient valoir que pour le futur et ne sauraient remettre en cause la validité des conventions en cours. 
 
6.  
 
6.1. La recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue, soulevant ainsi un grief de nature formelle qu'il convient d'examiner en premier lieu dans la mesure où il est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision attaquée indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 141 V 495 consid. 2.2 et les arrêts cités). Elle reproche à la juridiction cantonale d'avoir procédé, sous réserve de quelques changements, à un "copier/coller" de la partie en droit d'un arrêt cantonal (arrêt ACH 36/21 - 145/2021 du 28 juillet 2021) rendu dans une cause semblable, laquelle avait d'ailleurs justifié la suspension de la procédure de recours la concernant. Elle en déduit que ses déterminations sur la suite qu'elle entendait donner à la procédure ensuite de l'arrêt en question et dans lesquelles elle a critiqué ce même arrêt n'auraient absolument pas été prises en compte.  
 
6.2. Le droit d'être entendu, au sens invoqué par la recourante, impose à l'autorité le devoir de motiver sa décision afin que le justiciable puisse en saisir la portée et, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause. Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision (ATF 146 II 335 consid. 5.1; 143 III 65 consid. 5.2). Elle n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 142 II 154 consid. 4.2).  
En l'occurrence, les déterminations en question de la recourante, déposées le 21 octobre 2021, ont été résumées dans la partie en fait de l'arrêt attaqué. Cela étant, on peut d'emblée exclure que l'autorité précédente ait omis d'en prendre connaissance (cf., a contrario, arrêt 9C_439/2016 du 6 janvier 2017 consid. 3). Comme mentionné plus haut, l'autorité saisie n'a pas à s'exprimer sur tous les griefs soulevés, en particulier sur ceux qui ne lui paraissent pas pertinents, ou n'est pas tenue de le faire de façon expresse et circonstanciée. En l'espèce, on discerne clairement les motifs qui ont guidé l'arrêt entrepris (cf. consid. 5 supra) et, compte tenu de l'acte de recours, la recourante a bel et bien été en mesure d'en saisir la portée et de l'attaquer en connaissance de cause. Le point de savoir si les critiques soulevées dans ses déterminations du 21 octobre 2021 étaient ou non pertinentes relève du fond. Le grief tiré de la violation de son droit d'être entendue doit dès lors être écarté. 
 
7.  
 
7.1. Sur le fond, la recourante soutient qu'elle aurait droit à l'indemnité en cas de RHT. Elle invoque, d'une part, l'absence de garantie de déficit par les pouvoirs publics et, d'autre part, l'existence d'un risque concret pour les emplois.  
La recourante soutient que, contrairement aux causes à l'origine des arrêts 8C_558/2021 et 8C_559/2021 du 20 janvier 2022, ni la loi ni le texte des conventions de subventionnement applicables en l'espèce n'imposeraient une garantie de déficit, les subventions n'étant pas liées au coût effectif d'exploitation. 
Ensuite, la recourante critique le raisonnement des juges cantonaux, en tant que ceux-ci ont retenu qu'elle n'aurait pas rendu vraisemblable l'exposition, à court terme, à des pertes de revenus suffisamment importantes pour mettre en cause les emplois, alors qu'ils ont admis que la réduction de l'offre avait entraîné des pertes de recettes qui n'avaient plus permis aux entreprises de transports publics de couvrir les coûts fixes en matière d'infrastructure et de personnel. En outre, la juridiction cantonale considérerait à tort qu'il serait objectivement impossible de ne pas respecter un mandat de prestation publique, contrairement à un autre mandat de droit privé. Ce point de vue serait manifestement inexact sous l'angle de la clausula rebus sic stantibus. La recourante conteste qu'en raison de leur mandat de droit public, les entreprises de transports publics n'auraient pas la possibilité de réduire leur masse salariale. Selon elle, l'existence de subventions et d'un mandat de service public ne constituerait pas en soi un obstacle dirimant à l'obtention de l'indemnité en cas de RHT. 
 
7.2. Comme on l'a vu (cf. consid. 4 supra), les entreprises qui fournissent des prestations publiques ne sont pas en tant que telles exclues du cercle des potentiels bénéficiaires du droit à l'indemnité en cas de RHT. Pour ces entreprises, on reconnaît un risque de disparition d'emplois si, en cas de recul de la demande ou de réduction de l'offre chez le mandataire, il n'existe pas de garantie que les coûts d'exploitation seront entièrement couverts, et si les entreprises concernées ont la possibilité de procéder à des licenciements à brève échéance dans l'objectif de faire baisser les coûts d'exploitation. En l'espèce, si la réduction du temps de travail du personnel roulant et technique touche des secteurs de la recourante dans lesquels il n'y a pas de garantie d'une couverture complète des coûts d'exploitation, celle-ci supporterait, comme toute entreprise privée, un risque d'exploitation ou de faillite correspondant, auquel une telle entreprise ferait face par des licenciements (cf. arrêt 8C_769/2021 du 3 mai 2022 consid. 6, qui concerne également une entreprise de transport public). Or, dans l'arrêt entrepris, la cour cantonale n'a pas clairement tranché la question de la couverture des coûts d'exploitation, en tout cas s'agissant du trafic régional. Elle a en effet retenu à cet égard qu'il appartenait à la recourante de couvrir le déficit provoqué par la chute des recettes, tout en évoquant la possibilité d'une garantie de déficit plus étendue. En outre, le fait de percevoir des subventions ne signifie pas encore que les coûts d'exploitation sont entièrement couverts par les pouvoirs publics (cf. arrêt 8C_157/2022 du 8 septembre 2022 consid. 3.4.1). Enfin, la possibilité de procéder à des licenciements à brève échéance s'examine non pas au regard de la main d'oeuvre nécessaire pour fournir les prestations publiques selon l'offre soumise aux commanditaires, mais au regard de la règlementation applicable au personnel (cf. consid. 4.3.2 supra). L'arrêt attaqué ne dit rien à ce propos quand bien même la recourante a produit la documentation appropriée dans le cadre de son opposition. La cour cantonale a donc violé le droit fédéral en niant le droit de la recourante aux indemnités en cas de RHT sans instruire et examiner de manière approfondie l'étendue de la couverture des frais d'exploitation par les pouvoirs publics ainsi que les possibilités concrètes de résiliation sur la base du régime applicable au personnel.  
 
7.3. Vu ce qui précède, il n'est pas nécessaire d'examiner plus avant le dernier grief de la recourante, selon lequel le refus de la prestation constituerait un transfert illicite des charges entre la Confédération et les cantons. Quant au fait que le Conseil fédéral a, par le biais de l'ordonnance du 20 mars 2020 sur les mesures dans le domaine de l'assurance-chômage en lien avec le coronavirus (RS 837.033), provisoirement étendu le droit aux indemnités en cas de réduction de l'horaire de travail à des catégories d'employés ne courant pas de risque de licenciement, il ne saurait signifier qu'un droit à l'indemnité en cas de RHT doit être reconnu à la recourante indépendamment de la réalisation des conditions matérielles d'octroi de la prestation, comme l'a relevé à juste titre la cour cantonale.  
 
8.  
Par conséquent, le recours doit être partiellement admis et la cause renvoyée à la juridiction cantonale pour qu'elle prenne une nouvelle décision après avoir examiné le droit aux prestations sur la base d'un examen complet des questions déterminantes (cf. consid. 7.2 supra). 
En ce qui concerne la répartition des frais judiciaires et des dépens, le renvoi de la cause pour nouvel examen et décision revient à obtenir gain de cause au sens des art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF (ATF 141 V 281 consid. 11.1; 137 V 210 consid. 7.1 et les références). Bien qu'elle succombe, l'intimée ne peut pas se voir imposer des frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF; ATF 133 V 640 consid. 4.5). La recourante a droit à une indemnité de dépens à la charge de l'intimée (art. 68 al. 1 LTF), laquelle sera fixée en tenant compte de l'activité déployée par son mandataire dans deux causes parallèles similaires (cf. causes 8C_322/2022 et 8C_328/2022). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. L'arrêt de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 5 avril 2022 est annulé et la cause lui est renvoyée pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Le recours est rejeté pour le surplus. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
L'intimée versera à la recourante la somme de 1500 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud et au Secrétariat d'État à l'économie (SECO). 
 
 
Lucerne, le 30 janvier 2023 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Castella