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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_198/2022  
 
 
Arrêt du 30 mai 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Stadelmann, Moser-Szeless, Beusch et Scherrer Reber. 
Greffier : M. Cretton. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par M e Elio Lopes, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité 
du canton de Fribourg, 
route du Mont-Carmel 5, 1762 Givisiez, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (rente d'invalidité; calcul), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 18 mars 2022 (608 2021 173). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, ressortissant portugais, a travaillé dans son pays d'origine de 1973 à 1983 et en Suisse depuis 1985, où il s'est installé en mars 1989. L'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après: l'office AI) lui a octroyé une rente entière d'invalidité dès le 1er janvier 2018. Sa rente s'élevait à 1'592 fr. par mois (à partir du 1er septembre 2021). Elle était calculée en fonction d'un revenu annuel moyen déterminant de 48'756 fr., d'une durée de cotisations de 30 années et 8 mois, ainsi que de l'échelle de rente 37 (décision du 15 septembre 2021). 
 
B.  
Saisie d'un recours de l'assuré qui reprochait à l'office AI de ne pas avoir pris en compte ses périodes de cotisations accomplies au Portugal, la II e Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg l'a rejeté (arrêt du 18 mars 2022). 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont il demande l'annulation. Il conclut principalement à l'allocation d'une rente entière d'un montant mensuel de 1'893 fr. depuis le 1er septembre 2021 et, subsidiairement, au renvoi de la cause à la Cour cantonale ou à l'office AI afin que son droit d'être entendu soit respecté et pour qu'ils examinent si une application de la Convention de sécurité sociale du 11 septembre 1975 entre la Suisse et le Portugal lui est plus favorable et, le cas échéant, pour qu'ils effectuent un nouveau calcul tenant compte des périodes de cotisations au Portugal et rendent une nouvelle décision. Plus subsidiairement encore, il requiert l'octroi d'une rente entière d'invalidité d'un montant mensuel supérieur à 1'592 fr., calculé sur la base d'une échelle de rente supérieure à l'échelle 37, depuis le 1er septembre 2021. 
Se référant aux considérants de l'arrêt attaqué, l'administration conclut implicitement au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par cette dernière (art. 105 al. 1 LTF). Cependant, il peut rectifier les faits ou les compléter d'office s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant ne peut critiquer les faits que s'ils ont été constatés de façon manifestement inexacte ou contraire au droit et si la correction d'un tel vice peut influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). 
 
2.  
Le litige porte sur le calcul de la rente d'invalidité allouée au recourant, plus particulièrement sur la prise en compte, dans le calcul de sa rente à partir du 1er septembre 2021, des périodes de cotisations accomplies au Portugal. 
 
3.  
 
3.1. Le recourant est un ressortissant d'un Etat partie à l'Accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP; RS 0.142.112.681). Il a exercé des activités salariées en Suisse et est au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité suisse. Le litige relève ainsi - cela n'est pas contesté - de la coordination européenne des systèmes nationaux de sécurité sociale.  
 
3.2. Jusqu'au 31 mars 2012, les Parties à l'ALCP appliquaient entre elles le Règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté (RO 2004 121; ci-après: le règlement n° 1408/71). Une décision n° 1/2012 du Comité mixte du 31 mars 2012 (RO 2012 2345) a actualisé le contenu de l'Annexe II à l'ALCP avec effet au 1 er avril 2012. Il a été prévu, en particulier, que les Parties appliqueraient désormais entre elles le Règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, modifié par le Règlement (CE) n° 988/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 (ci-après: le règlement n° 883/2004; RS 0.831.109.268.1).  
 
3.3. Le droit du recourant à une rente d'invalidité est en l'espèce né le 1er janvier 2018, après l'entrée en vigueur du règlement n° 883/2004. Ratione temporis, le présent cas doit ainsi être tranché à la lumière de ce règlement.  
 
4.  
 
4.1. Au préalable, il convient de rappeler qu'avec l'entrée en vigueur simultanée de l'ALCP et du règlement n° 1408/71 le 1er juin 2002, la coordination des régimes de sécurité sociale entre la Suisse et le Portugal était passée d'un système de convention dite de type A à un système de convention dite de type B. Le premier système était celui dans lequel l'invalide qui en remplit les conditions reçoit une seule rente d'invalidité versée par l'assurance à laquelle il était affilié lors de la survenance de l'invalidité en fonction de la totalité des périodes de cotisations, y compris celles accomplies dans l'autre pays. Tel était le cas de la Convention de sécurité sociale du 11 septembre 1975 entre la Suisse et le Portugal (ci-après: la Convention entre la Suisse et le Portugal; RS 0.831.109.654.1). Le second système était celui dans lequel l'invalide qui a cotisé successivement dans les deux Etats perçoit une rente partielle de chacun des pays concernés calculée au pro rata des périodes d'assurance accomplies.  
 
4.2. Sous le titre "Relation entre le présent règlement et d'autres instruments de coordination", l'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 prévoit:  
 
"Dans son champ d'application, le présent règlement se substitue à toute convention de sécurité sociale applicable entre les Etats membres. Toutefois, certaines dispositions de conventions de sécurité sociale que les Etats membres ont conclues avant la date d'application du présent règlement restent applicables, pour autant qu'elles soient plus favorables pour les bénéficiaires ou si elles découlent de circonstances historiques spécifiques et ont un effet limité dans le temps. Pour être maintenues en vigueur, ces dispositions doivent figurer dans l'annexe II. Il sera précisé également si, pour des raisons objectives, il n'est pas possible d'étendre certaines de ces dispositions à toutes les personnes auxquelles s'applique le présent règlement." 
 
4.3. Sous le régime du règlement n° 1408/71, le Tribunal fédéral a rappelé que l'art. 20 ALCP prévoyait la suspension des conventions bilatérales entre la Suisse et les Etats parties. Selon cet article, sauf disposition contraire découlant de l'annexe II, les accords de sécurité sociale bilatéraux entre la Suisse et les Etats membres de la Communauté européenne étaient suspendus dès l'entrée en vigueur du présent accord, dans la mesure où la même matière était réglée par le présent accord. Le Tribunal fédéral a par ailleurs retenu que sa jurisprudence rendue sous le régime du règlement n° 1408/71 (ATF 133 V 329) n'excluait pas qu'un assuré fût mis au bénéfice d'une disposition plus favorable d'une convention bilatérale de sécurité sociale, pour autant qu'il eût exercé son droit à la libre circulation avant l'entrée en vigueur de l'ALCP (ATF 142 V 112).  
Dans ce dernier cas, le Tribunal fédéral a examiné la situation d'un ressortissant portugais qui résidait en Suisse depuis 1989, avait bénéficié d'une rente entière de l'assurance-invalidité suisse pour la période du 1er octobre 1997 au 30 avril 1999 et percevait une demi-rente de l'assurance-invalidité suisse depuis le 1er janvier 2009. Il a jugé que les périodes de cotisations accomplies par l'assuré au Portugal avant son arrivée en Suisse devaient être prises en compte dans le calcul de sa demi-rente pour autant que cette solution fût plus favorable à l'assuré. Il s'est fondé sur l'ATF 133 V 329 selon lequel il y avait lieu de reprendre le principe de l'application des dispositions plus favorables d'une convention bilatérale de sécurité sociale, tel que dégagé par la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE; devenue entre-temps la Cour de justice de l'Union européenne [CJUE]; arrêt du 7 février 1991, Rönfeldt, C-227/89, Rec. 1991, p. I-323, précisé par l'arrêt du 9 novembre 1995, Thévenon, C-475/93, Rec. 1995, p. I-3813). Selon la CJCE, l'application du règlement n° 1408/71 ne devait pas conduire à la perte des avantages de sécurité sociale résultant de conventions de sécurité sociale en vigueur entre deux ou plusieurs Etats membres et intégrées à leur droit national. Autrement dit, le travailleur qui avait exercé son droit à la libre circulation des personnes ne devait pas être pénalisé du fait des règlements communautaires par rapport à la situation qui aurait été la sienne si elle avait été régie par la seule législation nationale. La jurisprudence européenne reposait aussi sur l'idée que l'intéressé était en droit, au moment où il avait exercé son droit à la libre circulation, d'avoir une confiance légitime dans le fait qu'il pourrait bénéficier des dispositions de la convention bilatérale (arrêt du 5 février 2002, Kaske, C-277/99, Rec. 2002 p. I-1261, point 27). Le principe selon lequel l'application de la réglementation européenne de coordination ne devait pas entraîner la diminution (ou la perte) des avantages de sécurité sociale prévus par des conventions de sécurité sociale a été développé à partir de l'arrêt Petroni (arrêt de la CJCE du 24 octobre 1975, Petroni, 24/75 Rec. p. 1149; cf. arrêt Rönfeldt précité, point 26). Dans cet arrêt, la CJCE a reconnu que les dispositions du règlement n° 1408/71 ne pouvaient pas être appliquées de manière à priver un travailleur migrant du bénéfice d'une prestation résultant de la seule législation nationale ou à réduire son montant. La doctrine parle à cet égard du "principe Petroni" (ARNO BOKELOH, Das Petroni-Prinzip des Europäischen Gerichtshofes, ZESAR 03/12 p. 121 ss; cf. aussi SEAN VAN RAEPENBUSCH, Les rapports entre le Règlement [CEE] n° 1408/71 et les conventions internationales dans le domaine de la sécurité sociale des travailleurs circulant à l'intérieur de la communauté, Cahiers de droit européen 1991, p. 449 ss).  
 
5.  
 
5.1. Dans l'ATF 142 V 112, le Tribunal fédéral a relevé que l'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 reprenait le principe de l'application des conventions de sécurité sociale plus favorables (cf. art. 7 par. 2 let. c du règlement n° 1408/71), que les dispositions plus favorables de ces conventions devaient figurer à l'annexe II du règlement pour être maintenues en vigueur et que l'annexe II ne contenait aucune disposition concernant les relations entre la Suisse et le Portugal. Il a laissé ouverte la question de savoir si la jurisprudence de l'ATF 133 V 329 (cf. consid. 4.3 supra) et la jurisprudence européenne sur laquelle elle se fondait demeuraient applicables sous le régime du règlement n° 883/2004 dans la mesure où l'assuré avait droit quoi qu'il en soit au maintien de sa situation acquise au 31 mars 2012.  
 
5.2. Le recourant se prévaut de l'application des dispositions de la Convention entre la Suisse et le Portugal en vertu de la jurisprudence publiée aux ATF 142 V 112. Comme il est en l'occurrence un ressortissant portugais qui a exercé son droit à la libre circulation en travaillant en Suisse dès 1985 (avant l'entrée en vigueur de l'ALCP) et dont le droit à une rente entière de l'assurance-invalidité suisse est né le 1er janvier 2018 (après l'entrée en vigueur du règlement n° 883/2004), il convient de répondre à la question laissée ouverte dans l'ATF 142 V 112.  
Il s'agit donc de déterminer s'il y a lieu de tenir compte, ou non, des périodes de cotisations accomplies au Portugal conformément à l'art. 12 de la Convention entre la Suisse et le Portugal. 
 
5.3.  
 
5.3.1. Comme mentionné (cf. consid. 4.2 et 5.1 supra), l'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 reprend le principe de l'applicabilité des dispositions plus favorables des conventions bilatérales de sécurité sociale sous réserve que ces dispositions figurent à l'annexe II. Cette annexe ne contient aucune disposition maintenue en vigueur dans les relations entre la Suisse et le Portugal. Le fait que le règlement n° 883/2004 est une convention de type B (cf. consid. 4.1 supra) et que l'annexe II ne maintient pas en vigueur des dispositions entre la Suisse et le Portugal a conduit les premiers juges à exclure l'application de la Convention entre la Suisse et le Portugal et la prise en considération des périodes de cotisations accomplies au Portugal dans le calcul de la rente de l'assurance-invalidité suisse.  
 
5.3.2. L'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 remplace l'art. 6 du règlement n° 1408/71 qui, en relation avec l'art. 7 par. 2 let. c dudit règlement, prévoyait que nonobstant la substitution du règlement n° 1408/71 à toute convention de sécurité liant exclusivement deux ou plusieurs Etats membres (let. a), les dispositions de conventions de sécurité sociale mentionnées à l'annexe III restaient applicables. L'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 prend en considération la jurisprudence de la CJCE rendue sous l'empire du règlement précédent, puisqu'il prévoit expressément la condition (alternative) selon laquelle, pour rester applicables, les dispositions de conventions de sécurité sociale doivent être "plus favorables pour les bénéficiaires" (Heinz-Dietrich Steinmeyer, in Europäisches Sozialrecht, 8e éd. 2022, n° 5 ad art. 8 du règlement n° 883/2004, p. 188).  
Les principes dégagés dans l'arrêt Rönfeldt ont été résumés par la CJUE de la manière suivante (arrêt du 22 janvier 2015, Balazs, C-401/13 et C-432/13, points 34 s. et 38) : nonobstant les termes des art. 6 et 7 par. 2 sous c) du règlement n° 1408/71 - dont l'exigence selon laquelle les dispositions conventionnelles restant en vigueur doivent figurer à l'annexe III de ce règlement -, les conventions bilatérales de sécurité sociale continuent à s'appliquer à certaines conditions, même en l'absence de mention à ladite annexe. Ainsi, les dispositions des conventions bilatérales continuent à s'appliquer dans le cas de travailleurs migrants après l'entrée en vigueur du règlement n° 1408/71, indépendamment du point de savoir si elles figurent ou non à l'annexe III de ce règlement, lorsque cette application est plus favorable au travailleur, pour autant que celui-ci ait fait usage de son droit à la libre circulation avant l'entrée en vigueur de ce règlement (arrêt du 9 novembre 1995, Thévenon, C-475/93, Rec. 1995, p. I-3813). A l'inverse, la CJUE a nié l'application de ces principes lorsque le ressortissant d'un Etat membre a quitté le territoire de celui-ci pour un autre Etat membre plusieurs années avant que l'accord bilatéral de sécurité sociale ait été conclu, la personne concernée ne pouvant avoir de confiance légitime dans le fait qu'elle pourrait bénéficier des dispositions de l'accord bilatéral, celui-ci n'ayant pas encore été conclu à la date de leur retour dans son pays d'origine (arrêt Balazs cité, point 42).  
L'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 comprend la même exigence relative aux dispositions conventionnelles devant figurer à l'annexe II du règlement que l'art. 7 par. 2 let. c du règlement n° 1408/71, à laquelle la CJUE - et à sa suite le Tribunal fédéral - a jugé qu'il y avait lieu de déroger dans les circonstances particulières précisées dans l'arrêt Rönfeldt. L'entrée en vigueur de l'art. 8 par. 1 du règlement n° 883/2004 n'a donc rien changé au principe de l'applicabilité des conventions de sécurité sociale plus favorables dans un cas concret, pour autant que les conditions précitées soient réalisées. Les principes dégagés dans l'arrêt Rönfeldt restent applicables sous l'empire du règlement n° 883/2004 (Bernhard Spiegel, in Europäisches Sozialrecht, 8e éd. 2022, n° 4 ad art. 87 et 87a du règlement n° 883/2004, p. 657; dans ce sens, Heinz-Dietrich Steinmeyer, op. cit., n° 11 ad art. 8 du règlement n° 883/2004, p. 189; BOKELOH, op. cit., p. 127; TIMO ZEISKE, Das Statut sozialer Sicherheit bei grenzüberschreitender Arbeitnehmerentsendung, Münster 2016, éd. MV Wissenschaft, p. 117 s.).  
 
5.3.3. Cette solution s'appuie également, de manière plus générale, sur l'objectif de l'adoption du règlement n° 883/2004. Celui-ci a remplacé le règlement n° 1408/71 à partir du 1er avril 2012 (cf. consid. 3.2 supra). Les motifs qui ont conduit à son adoption montrent qu'il trouve également sa source dans l'art. 42 du Traité instituant la Communauté européenne et vise donc toujours à éliminer les obstacles à la libre circulation des personnes pouvant résulter de l'absence de coordination des régimes nationaux de sécurité sociale (cf. ATF 133 V 329 consid. 8.6). Cet objectif a en outre été confirmé, voire renforcé. Il ressort effectivement du considérant 3 du préambule du règlement n° 883/2004 que ce dernier a été édicté et adopté en vue de remplacer le règlement n° 1408/71 (dont les nombreuses modifications et mises à jour, qui visaient à tenir compte non seulement des développements intervenus au niveau communautaire, y compris des arrêts de la CJCE, mais également des modifications apportées aux législations nationales, avaient contribué à rendre les règles communautaires de coordination complexes et lourdes) en le modernisant et en le simplifiant. Cela était essentiel à la réalisation de l'objectif de la libre circulation des personnes.  
Dans ces circonstances, la jurisprudence développée sous le régime du règlement n° 1408/71 concernant l'applicabilité des dispositions des conventions bilatérales plus favorables reste applicable sous le régime du règlement n° 883/2004. Le remplacement des art. 6 et 7 du premier règlement par l'art. 8 du second n'a en effet entraîné aucune modification substantielle. L'objectif poursuivi par la réglementation, à savoir l'élimination la plus complète possible des obstacles à la libre circulation des personnes pouvant résulter de l'absence de coordination des régimes nationaux de sécurité sociale, n'a pas été modifié avec l'entrée en vigueur du nouveau règlement. Par conséquent, un assuré, qui a exercé son droit à la libre circulation avant l'entrée en vigueur de l'ALCP et dont le droit à une rente de l'assurance-invalidité suisse est né après l'entrée en vigueur du règlement n° 883/2004, peut bénéficier d'une disposition plus favorable d'une convention bilatérale de sécurité sociale aussi sous le régime du règlement n° 883/2004. 
 
5.4. Ni l'office intimé ni la juridiction cantonale n'ont examiné le point de savoir si le système de la Convention entre la Suisse et le Portugal est plus favorable au recourant que le système du règlement n° 883/2004. A cet égard, le Tribunal fédéral a considéré que le point de savoir quel système était plus favorable à l'assuré nécessitait un calcul comparatif fondé sur des informations dont l'obtention ne soulevait guère de difficultés pratiques pour les autorités compétentes suisses qui pouvaient s'appuyer sur l'entraide administrative prévue dans les relations transfrontalières dans le domaine de la sécurité sociale (art. 7 de l'Arrangement administratif du 24 septembre 1976 fixant les modalités d'application de la Convention de sécurité sociale du 11 septembre 1975 entre la Suisse et le Portugal [RS 0.831.109.654.12]; art. 84 du règlement n° 1408/71; art. 76 ss du règlement n° 883/2004; art. 2 ss du Règlement [CE] n° 987/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d'application du règlement n° 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale [RS 0.831.109.268.11]; ATF 142 V 112 consid. 4.5). En conséquence, il convient d'annuler l'arrêt attaqué ainsi que la décision administrative litigieuse et de renvoyer la cause à l'administration pour qu'elle complète l'instruction sur ce point et rende une nouvelle décision. Il n'y a pas lieu de se prononcer sur les autres griefs de l'assuré.  
 
6.  
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires et les dépens doivent être mis à la charge de l'office intimé (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF). La cause est renvoyée à la juridiction cantonale pour nouvelle décision sur les frais et les dépens de la procédure antérieure (art. 67 et 68 al. 5 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. L'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, II e Cour des assurances sociales, du 18 mars 2022 et la décision de l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg du 15 septembre 2021 sont annulés. La cause est renvoyée à l'office AI pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision. Le recours est rejeté pour le surplus. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.  
L'intimé versera au recourant la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
La cause est renvoyée au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, II e Cour des assurances sociales, pour nouvelle décision sur les frais et les dépens de la procédure antérieure. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, II e Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 30 mai 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Cretton