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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_1406/2019  
 
 
Arrêt du 19 mai 2020  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari, Muschietti, van de Graaf et Koch. 
Greffière : Mme Thalmann. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Erdem Keskes, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, 
intimé. 
 
Objet 
Faux dans les titres; droit d'indemnité, 
 
recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 29 octobre 2019 (CPEN.2019.30/ca). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 18 mars 2019, le Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers a reconnu B.B.________ coupable d'abus de confiance, de faux dans les titres et de violation d'une obligation d'entretien et l'a condamné à 12 mois de peine privative de liberté avec sursis pendant trois ans et à 3'226 fr. 50 de frais de justice. Il a également reconnu A.________ coupable de faux dans les titres et l'a acquitté des préventions d'abus de confiance et d'escroquerie. Il l'a condamné à 20 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, à une part des frais de justice arrêtée à 1'075 fr. et à une indemnité de dépens de 3'500 fr. pour les frais de défense de la partie plaignante. Il l'a enfin condamné à verser sur un compte bloqué du Tribunal régional du Littoral et du Val-de-Travers un montant de 20'000 fr. en vue de la liquidation du régime matrimonial des époux B.________. Le Tribunal de police a refusé qu'une indemnité au titre de l'art. 429 CPP soit allouée à A.________. 
 
B.  
Par jugement du 29 octobre 2019, la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a partiellement admis l'appel de A.________ et a annulé le jugement du 18 mars 2019 en tant qu'il le condamnait à verser un montant de 20'000 fr. sur un compte bloqué. La cour cantonale a confirmé le jugement du Tribunal de police pour le surplus. 
En résumé, la cour cantonale a retenu les faits suivants: 
 
B.a. En été 2009, les époux B.________ ont acquis ensemble le snack-bar C.________, sis avenue D.________ à E.________. Les époux ont conjointement exploité l'établissement jusqu'à leur séparation le 24 juin 2014. Le 5 janvier 2015, le snack-bar a été inscrit au registre du commerce au nom de B.B.________, en raison individuelle.  
 
B.b. Par contrat du 3 mars 2016, B.B.________ a vendu à A.________ le snack-bar C.________, avec son "infrastructure technique complète, comprenant notamment le mobilier, les appareils divers, l'agencement, les installations d'aération, le réfrigérateur à boissons, les tables et les chaises". Le contrat mentionnait que le prix de vente était de 10'000 fr., hors TVA et payables au comptant. Le contrat de vente a été préparé par la fiduciaire du vendeur, à la demande de celui-ci. Le prix de vente réel du snack-bar convenu entre B.B.________ et A.________ était de 150'000 fr. et non de 10'000 fr. comme mentionné dans le contrat.  
 
B.c. Le 25 avril 2016, F.B.________ a déposé plainte pénale contre B.B.________, à qui elle reprochait d'avoir vendu le snack-bar sans son accord, alors qu'elle était copropriétaire du mobilier et du matériel, qui plus est pour le prix de 150'000 fr., alors que le prix annoncé était de 10'000 francs.  
 
C.  
Contre ce dernier jugement cantonal, A.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement, à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est acquitté du chef de prévention de faux dans les titres et qu'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP d'un montant de 5'542 fr. 93 pour la procédure de première instance et d'un montant de 2'610 fr. 25 pour la procédure d'appel lui est allouée. Il conclut "en tout état de cause et subsidiairement aux conclusions" susmentionnées à ce qu'une indemnité de 3'500 fr. lui soit allouée pour ses frais de défense relative à la libération de cinq préventions. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour qu'elle l'acquitte du chef de prévention de faux dans les titres et qu'elle statue à nouveau sur la répartition des frais, des dépens et de l'indemnité au sens de l'art. 429 CPP pour la procédure cantonale. 
Invitée à se déterminer, la cour cantonale a renoncé à formuler des observations et se réfère aux considérants de son jugement. Le Ministère public a également renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant conteste sa condamnation pour faux dans les titres. Il soutient que le contrat litigieux ne constitue pas un faux intellectuel dans la mesure où il n'est pas doté d'une "valeur probante accrue" mais n'est qu'un simple mensonge écrit non punissable. 
 
1.1. Selon l'art. 251 ch. 1 CP, se rend coupable de faux dans les titres celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre. Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique et tous les signes destinés à prouver un tel fait (art. 110 al. 4 CP).  
L'art. 251 ch. 1 CP vise non seulement un titre faux ou la falsification d'un titre (faux matériel), mais aussi un titre mensonger (faux intellectuel). Il y a faux matériel lorsque l'auteur réel du document ne correspond pas à l'auteur apparent, alors que le faux intellectuel vise un titre qui émane de son auteur apparent, mais dont le contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 142 IV 119 consid. 2.1 p. 121; 138 IV 130 consid. 2.1 p. 134). Un simple mensonge écrit ne constitue pas un faux intellectuel. Le document doit revêtir une crédibilité accrue et son destinataire pouvoir s'y fier raisonnablement. Tel est le cas lorsque certaines assurances objectives garantissent aux tiers la véracité de la déclaration (ATF 144 IV 13 consid. 2.2.2 p. 14 s.; arrêts 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 8.3.1 non publié in ATF 145 IV 470; 6B_467/2019 du 19 juillet 2019 consid. 3.3.1). Il peut s'agir, par exemple, d'un devoir de vérification qui incombe à l'auteur du document ou de l'existence de dispositions légales, comme les art. 958a ss CO (art. 958 ss aCO) relatifs au bilan, qui définissent le contenu du document en question (ATF 141 IV 369 consid. 7.1 p. 376; 132 IV 12 consid. 8.1, p. 15; 126 IV 65 consid. 2a, p. 68; arrêt 6B_382/2011 du 26 septembre 2011 consid. 2.1). En revanche, le simple fait que l'expérience montre que certains écrits jouissent d'une crédibilité particulière ne suffit pas, même si dans la pratique des affaires il est admis que l'on se fie à de tels documents (arrêt 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 8.3.1 non publié in ATF 145 IV 470; ATF 142 IV 119 consid. 2.1 p. 121 et les références citées). Le caractère de titre d'un écrit est relatif. Par certains aspects, il peut avoir ce caractère, par d'autres non. La destination et l'aptitude à prouver un fait précis d'un document peuvent résulter directement de la loi, des usages commerciaux ou du sens et de la nature dudit document (arrêt 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 8.3.1 non publié in ATF 145 IV 470; ATF 142 IV 119 consid. 2.2 p. 122 et les références citées). 
 
1.1.1. De jurisprudence constante, la comptabilité commerciale et ses éléments (pièces justificatives, livres, extraits de compte, bilans ou comptes de résultat) sont, en vertu de la loi, propres et destinés à prouver des faits ayant une portée juridique. Ils ont une valeur probante accrue ou, autrement dit, offrent une garantie spéciale de véracité (ATF 141 IV 369 consid. 7.1 p. 376; 138 IV 130 consid. 2.2.1 p. 135 s.; 132 IV 12 consid. 8.1 p. 15; 129 IV 130 consid. 2.2 et 2.3 p. 134 ss). De tels documents dont le contenu est faux doivent dès lors être qualifiés de faux intellectuels.  
Selon une jurisprudence bien établie, un contrat dont le contenu est faux ne constitue en principe pas un titre car il ne bénéficie pas de la crédibilité accrue nécessaire (cf. ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc p. 69; 120 IV 25 consid. 3f p. 29; arrêts 6B_467/2019 du 19 juillet 2019 consid. 3.3.2; 6B_72/2015 du 27 mai 2015 consid. 1.5; 6B_184/2013 du 1er octobre 2013 consid. 6.6; 6B_382/2011 du 26 septembre 2011 consid. 2.2). En effet, un tel contrat prouve que deux personnes ont fait, de manière concordante, une déclaration de volonté déterminée, mais n'établit pas que les deux manifestations de volonté concordantes correspondent à la volonté réelle des stipulants. Il ne prouve ni l'absence de vice de la volonté ni l'inexistence d'une simulation. Ce n'est que s'il existe des garanties spéciales de ce que les déclarations concordantes des parties correspondent à leur volonté réelle, qu'un contrat en la forme écrite simple peut être qualifié de faux intellectuel (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc p. 68 s.; 120 IV 25 consid. 3f p. 29; arrêt 6B_472/2011 du 14 mai 2012 consid. 14.2). L'art. 251 CP a ainsi été jugé inapplicable à un contrat de vente dont certains éléments étaient faux (ATF 120 IV 25), à un contrat simulé utilisé par une partie pour obtenir un crédit (ATF 123 IV 61) ainsi qu'à un contrat de travail qui ne bénéficiait d'aucune garantie de véracité particulière (cf. notamment arrêts 6S.423/2003 du 3 janvier 2004 consid. 4.3 et 6S.375/2000 du 1er novembre 2000 consid. 2c). Le faux intellectuel dans les titres n'a pas non plus été admis s'agissant de deux déclarations relatives au financement de l'achat d'un appartement, documents dont le contenu était mensonger (ATF 125 IV 273 consid. 3b, p. 279 ss). 
Par ailleurs, plusieurs arrêts ont considéré qu'un certificat de salaire, respectivement un décompte de salaire, au contenu inexact ne constituait pas un titre (cf. ATF 118 IV 363 consid. 2 p. 364 ss; arrêts 6B_473/2016 du 22 juin 2017 consid. 4.2.1, publié in SJ 2018 I 181; 6B_72/2015 du 27 mai 2015 consid. 1.5; 6B_382/2011 du 26 septembre 2011 consid. 2.1; 6B_827/2010 du 24 janvier 2011 consid. 4.5.2 et les références citées; 6B_101/2009 du 14 mai 2009 consid. 3.3; 6S.423/2003 du 3 janvier 2004 consid. 4.3), même lorsqu'un notaire avait légalisé la signature de l'employeur apposée sur les certificats de salaire, lesquels avaient été produits dans une procédure judiciaire en Italie pour obtenir la levée de biens sous séquestre (cf. arrêt 6B_382/2011 du 26 septembre 2011 consid. 2.1). Enfin, une facture munie d'une quittance n'est pas dotée en soi, de par la loi, d'une garantie objective suffisante pour faire l'objet d'un faux intellectuel dans les titres (ATF 121 IV 131 consid. 2). Cependant, selon la jurisprudence, l'auteur peut se rendre coupable de faux intellectuel dans les titres lorsqu'une facture au contenu inexact est également destinée à servir au destinataire avant tout comme pièce comptable, si bien que sa comptabilité s'en trouve faussée (ATF 138 IV 130). Cet arrêt met en exergue une complicité entre l'auteur de la fausse facture et son destinataire qui va l'intégrer dans sa comptabilité (consid. 2.4.3 et 3.1). 
 
1.1.2. Enfin, la jurisprudence considère que certains documents possèdent une valeur probante accrue en raison de la fonction de la personne qui les établit - cette personne se trouvant dans une position comparable à celle d'un garant à l'égard des personnes induites en erreur (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc p. 68 s.; 121 IV 131 consid. 2c p. 135 s.; 120 IV 25 consid. 3f p. 29; arrêts 6B_1096/2015 du 9 décembre 2015 consid. 3.3; 6B_593/2009 du 14 septembre 2009 consid. 1.1.1; 6S.37/2007 du 19 avril 2007 consid. 8.2.2). Ainsi, la jurisprudence a reconnu comme des faux intellectuels dans les titres une feuille de maladie ou une facture mensongère, établie par un médecin, lequel bénéficie d'une position privilégiée et jouit de ce fait d'un rapport de confiance particulier existant avec la caisse-maladie (ATF 117 IV 165 consid. 2c p. 169 s; 103 IV 178 consid. 2 p. 184 s.; arrêt 6B_589/2009 du 14 septembre 2009 consid. 2.1.1) ainsi qu'une approbation écrite inexacte émanant d'un architecte chargé par le maître d'ouvrage de vérifier des factures (ATF 119 IV 54 consid. 2d/dd p. 58 s.; arrêts 6B_1096/2015 du 9 décembre 2015 consid. 3.3; 6S.99/2003 du 26 mai 2003 consid. 3.2.3). La jurisprudence a également reconnu que les confirmations d'état de compte émises par un organe dirigeant d'une succursale bancaire avaient une valeur probante accrue du fait de la confiance particulière dont jouissent les banques, lesquelles sont soumises à une législation spéciale et à des contrôles spécifiques (ATF 120 IV 361 consid. 2c p. 363 s.). Toutefois, le seul fait que le document mentionne ou soit matériellement rédigé par une personne qui jouit dans les faits d'un crédit particulier - comme un notaire - n'accroît pas sa valeur probante (cf. ATF 125 IV 273 consid. 3b p. 279 ss; DANIEL KINZER, in Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n° 69 ad art. 251 CP).  
 
1.2. En l'espèce, le contrat de vente litigieux constate faussement que le prix de vente du snack-bar C.________ était de 10'000 fr, alors que le prix réel était de 150'000 francs. On se trouve donc dans l'hypothèse d'un document qui émane de son auteur apparent, mais qui est mensonger dans son contenu. Il convient d'examiner si ce contrat est doté d'une garantie de véracité particulière et si, partant, il peut constituer un faux intellectuel.  
 
1.2.1. La cour cantonale a jugé que le but du vendeur, en mentionnant ce montant faux, très inférieur à la réalité, était de se prévaloir de ce contrat dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial afin de tromper son épouse. Celui-ci a d'ailleurs fait produire le contrat de vente par son mandataire, afin de soutenir, dans le cadre des discussions avec son épouse relatives à la liquidation du régime matrimonial, qu'il n'avait encaissé que 10'000 fr. pour la vente du commerce, ce montant-là devant être pris en considération pour la liquidation du régime. Selon la cour cantonale, le mandataire du vendeur avait d'ailleurs souligné que le contrat avait été préparé par la fiduciaire de l'époux. Le contrat de vente avait donc la crédibilité accrue exigée par la jurisprudence et était de nature à tromper l'épouse, même si celle-ci s'était méfiée.  
Pour arriver à la conclusion que le contrat litigieux constitue un faux intellectuel dans les titres, la cour cantonale, en se référant à une partie de la doctrine, cite deux exemples de contrats qui auraient une "valeur probante accrue", soit le contrat simulé établi aux fins d'obtenir un crédit et le contrat fabriqué pour tromper un tiers qui le considère comme une preuve (cf. jugement attaqué, p. 14). Ces deux cas ne ressortent pourtant pas de la jurisprudence du Tribunal fédéral. S'agissant du premier cas, dans un arrêt publié aux ATF 123 IV 61, le Tribunal fédéral a jugé que la fabrication et la présentation d'un contrat simulé dans le but d'obtenir un crédit ne réalisaient pas l'infraction de faux intellectuel dans les titres (ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc p. 68 s.). En ce qui concerne le second exemple, celui-ci est mentionné par un auteur de doctrine qui considère qu'un tel contrat "devrait constituer un faux intellectuel", comme cela est admis dans la conception française (cf. BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd., 2010, n° 153 ad art. 251 CP). 
 
1.2.2. Conformément à la jurisprudence susmentionnée (supra consid. 1.1), un contrat de vente conclu en la forme écrite simple, dont le contenu est faux, ne peut en principe pas faire l'objet d'un faux intellectuel dans les titres, faute de valeur probante accrue, dans la mesure où il n'existe pas de garanties spéciales selon lesquelles les déclarations concordantes des parties correspondent à leur volonté réelle (cf. aussi ATF 120 IV 25 consid. 3f p. 29; arrêts 6B_502/2009 du 7 septembre 2009 consid. 2.4; 6P.15/2007 du 19 avril 2007; DUPUIS ET AL., Petit commentaire, Code pénal, 2e éd. 2017, n° 40 ad art. 251 CP).  
 
1.2.3. En l'espèce, on ne voit pas quelles assurances objectives - découlant de la loi ou encore des usages commerciaux - auraient garanti aux tiers, en particulier à l'épouse du vendeur, la véracité du contenu du contrat litigieux. Le contrat est rédigé en la simple forme écrite sur un papier neutre, lequel comporte uniquement les noms et signatures du recourant et du vendeur. Or, le recourant et le vendeur - seuls signataires du contrat - n'étaient pas, vis-à-vis de l'épouse lésée, dans une position analogue à celle d'un garant au sens de la jurisprudence (à l'instar du médecin à l'égard de l'assurance ou de l'organe dirigeant d'une banque vis-à-vis de ses clients; cf. supra consid. 1.1.2). Par ailleurs, les signataires du contrat ne peuvent être considérés comme des tiers neutres (cf. ATF 125 IV 273 consid. 3b p. 279 ss; REMUND/BOSSARD/THORMANN, Le faux intellectuel dans le droit pénal économique, in Droit pénal économique, 2011, p. 283-305, p. 302 et CORBOZ, op. cit., n° 148 ad art. 251 CP).  
 
1.2.4. En outre, contrairement à ce que semble retenir l'instance précédente (cf. jugement attaqué, p. 17), le fait que le contrat ait été préparé par la fiduciaire du vendeur - ce que le mandataire du vendeur a indiqué à l'épouse de celui-ci lorsqu'il lui a transmis le contrat - ne constitue pas une garantie de ce que les déclarations concordantes des parties au contrat correspondaient à leur volonté réelle. En particulier, la fiduciaire - qui était apparemment mandatée par le vendeur - n'avait pas un devoir de vérification découlant de la loi ou de ses obligations contractuelles au sens de la jurisprudence précitée (cf. à ce sujet KINZER, op. cit., n° 70-71 ad art. 251 CP). A cet égard, il ressort du jugement attaqué que ce sont les parties qui ont indiqué à la fiduciaire que le prix de vente était de 10'000 fr. et qu'elles ne lui ont pas demandé de procéder à une estimation de la valeur du snackbar - ce qu'elle n'a dès lors pas fait (jugement attaqué, p. 4 et 16). Ainsi, le fait que le document ait été rédigé par la fiduciaire du vendeur ne suffit pas à conférer au contrat la valeur probante accrue exigée par la jurisprudence.  
 
1.2.5. Il reste enfin à déterminer si, comme le retient la cour cantonale, le fait que le contrat litigieux devait servir à tromper l'épouse du vendeur dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial suffit à admettre que le document constituait un faux intellectuel dans les titres. Ce raisonnement de la cour cantonale semble fondé sur une conception plus large du faux intellectuel défendue par une partie de la doctrine, selon laquelle il convient, pour déterminer si un document est probant, de se placer dans la situation du destinataire voulu et non pas se fixer sur la situation de l'auteur qui devrait être dans une position de quasi-garant (cf. dans ce sens, CORBOZ, op. cit., n° 142-143 ad art. 251 CP; BERNARD CORBOZ, Le faux dans les titres, RJB 131/1995, p. 534 ss, p. 575; PIERRE FERRAR i, La constatation fausse, RPS 112/1994, p. 153 ss, p. 167). Selon cette conception, il convient de déterminer si le destinataire voulu, en examinant objectivement le document, devait raisonnablement, sans imprudence, parvenir à la conclusion que le fait était prouvé et qu'il n'avait pas à procéder à d'autres vérifications (cf. CORBOZ, op. cit., n° 144 ad art. 251 CP; FERRARI, op. cit., p. 167).  
 
1.2.6. Une partie de la doctrine considère que l'arrêt publié aux ATF 138 IV 130 (cf. supra consid. 1.1.1 in fine) a pour effet d'étendre la punissabilité du faux dans les titres dans le sens de la conception plus large exposée ci-dessus (cf. notamment KINZER, op. cit., n° 84 ad art. 251 CP; sur cet arrêt, cf. aussi FELIX BOMMER, Die Strafrechtliche Rechtsprechung des Bundesgerichts im Jahr 2012, RJB 152/2016 p. 261 ss, p. 271 et CHRISTOF RIEDO/DONAT RIEDO, Strafbare Falschbeurkundung bei Rechnungsstellung, Baurecht BR 2013, p. 10-14).  
Dans plusieurs arrêts récents rendus postérieurement à l'arrêt publié aux ATF 138 IV 130, le Tribunal fédéral s'est penché sur la question de savoir si des contrats constituaient des faux intellectuels dans les titres. A titre d'exemple, il a jugé qu'un contrat de travail simulé pour obtenir une attestation de séjour n'avait pas une valeur probante accrue (arrêt 6B_72/2015 du 27 mai 2015 consid. 1.5 et 1.6), confirmant ainsi sa jurisprudence (cf. ATF 123 IV 61 consid. 5c/cc p. 68 s., dans lequel un contrat de vente simulé qui avait été utilisé pour obtenir un crédit a été considéré comme un simple mensonge écrit; cf. dans le même sens les arrêts 6S.423/2003 du 3 janvier 2004 consid. 4 et 6S.375/2000 du 1er novembre 2000 consid. 4.3, dans lesquels la qualité de faux intellectuel dans les titres a été niée s'agissant de contrats de travail dont le contenu était faux et que le recourant avait présentés devant le juge d'instruction, respectivement à une compagnie d'assurance). Le Tribunal fédéral a également jugé que des contrats qui avaient été établis dans le but d'accréditer auprès de l'autorité fiscale la thèse de l'existence de prêts n'étaient pas des titres; il a considéré que la jurisprudence développée dans l'arrêt publié aux ATF 138 IV 130 n'était pas applicable aux contrats litigieux dès lors qu'il n'était pas établi que ceux-ci avaient nécessairement été intégrés dans la comptabilité de la société destinataire, ni qu'ils avaient été créés dans ce but (arrêt 6B_184/2013 du 1er octobre 2013 consid. 6.7.2.). Dans un autre arrêt récent, le Tribunal fédéral a jugé qu'un faux contrat de reprise de biens, qui avait été utilisé auprès du représentant du bailleur afin de permettre un transfert de bail, ne pouvait pas être considéré comme un titre au sens de l'art. 251 CP à défaut de valeur probante accrue (arrêt 6B_467/2019 du 19 juillet 2019 consid. 3). 
 
1.2.7. Il découle de ce qui précède que la jurisprudence n'a pas élargi la portée de l'arrêt publié aux ATF 138 IV 130 et admis la théorie du seul destinataire pour l'infraction de faux dans les titres. Il s'ensuit que, dans le cas d'espèce, il n'y a pas lieu de s'écarter de la jurisprudence rendue sur les contrats simulés. En conséquence, le seul fait que le contrat litigieux a été rédigé afin d'être utilisé dans le cadre de discussions relatives à la liquidation du régime matrimonial avec l'épouse du vendeur ne permettait pas de conclure que ce document constituait un faux intellectuel dans les titres, nonobstant son caractère simulé.  
 
1.3. Il s'ensuit qu'à défaut de valeur probante accrue, le contrat litigieux ne pouvait pas être considéré comme un faux intellectuel dans les titres au sens de l'art. 251 CP. Pour ce motif, le recours doit être admis et le jugement attaqué annulé. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle prononce l'acquittement et statue sur les frais et indemnités.  
 
2.   
Pour des raisons d'économie de procédure, il convient de traiter le grief de violation de l'art. 429 CPP. Le recourant reproche aux autorités cantonales d'avoir violé l'art. 429 CPP en refusant de lui allouer une indemnité partielle pour ses frais de défense; il reproche également à la cour cantonale d'avoir violé son obligation de motiver. 
 
2.1. Aux termes de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Selon la jurisprudence, la question de l'indemnisation du prévenu (art. 429 CPP) doit être traitée en relation avec celle des frais (art. 426 CPP). Si le prévenu supporte les frais en application de l'art. 426 al. 1 ou 2 CPP, une indemnité est en règle générale exclue. En revanche, si l'Etat supporte les frais de la procédure pénale, le prévenu a en principe droit à une indemnité selon l'art. 429 CPP (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 p. 357). Si le prévenu est libéré d'un chef d'accusation et condamné pour un autre, il sera condamné aux frais relatifs à sa condamnation et aura respectivement droit à une indemnité correspondant à son acquittement partiel (arrêts 6B_80/2016 du 7 mars 2017 consid. 2.1; 6B_67/2016 du 31 octobre 2016 consid. 1.2 et les références citées; 6B_1034/2015 du 31 mars 2016 consid. 3.1.2; 6B_203/2015 du 16 mars 2016 consid. 1.2 et les références citées). La question essentielle est celle de savoir si l'autorité impute ou non les faits au prévenu (arrêt 6B_80/2016 du 7 mars 2017 consid. 2.1; MIZEL/RÉTORNAZ, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2019, n° 2 ad art. 429 CPP). Elle s'examine au regard de l'acte d'accusation et de ses éventuelles modifications, dans l'optique de déterminer si le prévenu a été formellement mis en accusation et quelles charges sont retenues à son encontre, le silence concernant certaines charges constituant un acquittement implicite ouvrant la voie de l'indemnisation (ibid.).  
 
2.2. En l'espèce, la cour cantonale a jugé que l'infraction de faux dans les titres pour laquelle le recourant devait être condamné concernait le même complexe de faits que celui de l'infraction pour laquelle il avait été acquitté. Ainsi, selon elle, les dépenses pour l'exercice des droits de la défense n'auraient pas été différentes si la prévention de complicité d'abus de confiance avait été d'emblée écartée.  
 
2.3. Le raisonnement de la cour cantonale ne saurait être suivi. Il ressort des jugements cantonaux que le recourant a été mis en accusation pour complicité d'abus de confiance, subsidiairement complicité d'escroquerie et faux dans les titres (cf. jugement attaqué, p. 9). Finalement, seule l'infraction de faux dans les titres a été retenue par les juges de première instance; il a été acquitté des chefs de prévention d'abus de confiance subsidiairement d'escroquerie (cf. jugement de première instance, p. 5). Il a été condamné à payer un quart des frais de justice, B.B.________ étant condamné à payer les trois quarts restants. Le recourant ne conteste plus la répartition des frais dans son recours.  
Force est ainsi de constater que le tribunal de première instance n'a condamné le recourant que pour une partie des faits qui lui étaient reprochés dans l'acte d'accusation (faux dans les titres), l'acquittant pour les autres faits visés par l'acte d'accusation relatifs à des infractions distinctes (abus de confiance, subsidiairement escroquerie; cf. jugement attaqué, p. 9 et jugement de première instance, p. 5). Dans ces conditions, en confirmant le rejet de la demande d'indemnisation du recourant, la cour cantonale a violé l'art. 429 CPP
Le recours doit dès lors également être admis sur ce point. Le jugement attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau sur la requête d'indemnisation du recourant. Cela rend sans objet le grief tiré de la violation du droit d'être entendu sur cette question. 
 
3.   
Le recours doit être admis. Le recourant qui obtient gain de cause ne supportera pas de frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et peut prétendre à une indemnité de dépens à la charge du canton de Neuchâtel (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis, le jugement attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le canton de Neuchâtel versera au recourant une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 19 mai 2020 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Thalmann