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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_336/2023  
 
 
Arrêt du 12 juillet 2024  
I  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Hohl et May Canellas. 
Greffière : Mme Raetz. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Philippe Ducor, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Établissements B.________, 
représentés par Me Daniel Kinzer, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
responsabilité médicale, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 16 mai 2023 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/1100/2021, ACJC/644/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le Dr C.________, spécialiste en ophtalmologie et ophtalmo-chirurgie, exerçait notamment à titre indépendant dans son cabinet médical privé à Fribourg, le D.________. Dans le cadre de cette activité, il était assuré auprès de A.________ SA.  
Les Établissements B.________ étaient assurés auprès d'une autre assurance. Selon la police d'assurance responsabilité civile, étaient assurées les personnes exerçant une activité au sein des Établissements B.________. 
 
A.b. Le 8 décembre 1999, les Établissements B.________ et D.________ ont signé une convention de collaboration (ci-après: la convention), ayant entre autres pour objet le développement de la chirurgie réfractive cornéenne au sein des Établissements B.________.  
Cette convention prévoyait notamment que le médecin responsable du D.________, soit le Dr C.________, s'engageait à traiter sa clientèle en matière de chirurgie réfractive de la cornée " exclusivement au sein des Établissements B.________ " (art. 3 al. 5). Les Établissements B.________ répondaient seuls des dommages causés à des tiers par D.________, soit pour lui son médecin délégué dans le cadre de l'activité que celui-ci déployait " au sein des Établissements B.________ " (art. 6 al. 1). A cet effet, l'assurance responsabilité civile des Établissements B.________ couvrait les dommages causés par D.________ (art. 6 al. 2). Demeurait réservée l'éventuelle action récursoire des Établissements B.________ contre D.________ (art. 6 al. 3). Les consultations et forfaits par intervention étaient facturés par les Établissements B.________; les montants facturés étaient répartis entre D.________ et les Établissements B.________ par application analogique du règlement sur l'activité privée des Établissements B.________; les montants dus au D.________ ne l'étaient qu'une fois encaissés par les Établissements B.________ (art. 9 al. 1, 2 et 4). 
 
A.c. E.________ (ci-après: le patient), souffrant d'une forte myopie, a pris contact avec D.________. Par courrier du 11 mai 2000 à l'entête du D.________, le Dr C.________ lui a transmis des documents.  
 
A.d. Par lettre du 22 juin 2000, les Établissements B.________ ont indiqué au Dr C.________ que les patients qui allaient être opérés aux Établissements B.________ le 28 juin 2000 étaient exemptés à titre exceptionnel de l'obligation de verser un dépôt, au vu du fait que ces premiers patients provenaient de son cabinet de Fribourg, où ils bénéficiaient d'une consultation pré- et postopératoire de sa part. " Pour des questions financières et de responsabilité civile de l'institution ", ils procéderaient " à l'enregistrement de ces patients et à la facturation de l'opération ".  
 
A.e. Le 29 juin 2000, le patient s'est rendu au D.________ pour une consultation. Le Dr C.________ a préconisé une intervention " Lasik ".  
 
A.f. Par courriel du 17 juillet 2000, les Établissements B.________ ont indiqué au Dr C.________ avoir informé leur hiérarchie du fait qu'une partie de l'activité de consultation continuait d'être effectuée au D.________, contrairement à ce qui avait été convenu dans la convention. Il était décidé de continuer la mise en place de la chirurgie réfractive cornéenne au sein des Établissements B.________ et de revoir les objectifs financiers en conséquence, au vu de la nouvelle donnée concernant l'activité réalisée à Fribourg (50 % des consultations totales). Un point de situation devait être fait à la fin du mois d'août 2001.  
 
A.g. Le Dr C.________ a opéré le patient le 10 janvier 2001 de l'oeil droit et le 31 janvier 2001 de l'oeil gauche dans les locaux des Établissements B.________. Le patient a été enregistré dans la base de données des Établissements B.________ le 10 janvier 2001. Ces deux interventions ont été facturées par les Établissements B.________.  
 
A.h. Le suivi postopératoire a été effectué par le Dr C.________ au D.________. Les opérations n'ont pas eu le résultat escompté et le patient a subi des séquelles.  
 
A.i. Par courrier du 29 novembre 2002, le patient a indiqué au Dr C.________ que, selon les experts consultés, une opération " Lasik " n'aurait pas dû être effectuée sur lui. Il l'invitait à annoncer son cas à son assurance responsabilité civile. Le Dr C.________ a répondu qu'il avait cessé toute activité depuis mai 2002 et que dans le cadre de sa collaboration avec les Établissements B.________, toute action en justice devait être intentée auprès d'eux.  
Le 10 décembre 2002, le Dr C.________ a transmis le cas aux Établissements B.________ au motif que, dans le cadre de leur collaboration, ces derniers assumaient les dommages causés à des tiers. Par courrier du 17 décembre 2002, les Établissements B.________ ont informé qu'ils n'étaient concernés par ce litige que pour les actes médicaux qui s'étaient déroulés dans leurs locaux, conformément à la convention. Ils ont maintenu leur position le 20 février 2003, en soulignant que les problèmes liés à l'indication opératoire et/ou à l'information donnée au patient résultaient de la consultation au D.________ à Fribourg. Leur responsabilité ne pouvait donc pas être mise en cause. 
Par courrier du 25 février 2003, le Dr C.________ a répondu qu'il avait été convenu que les consultations des patients qui avaient pris contact avec D.________ pouvaient être pratiquées au sein de ce dernier. 
 
A.j. Le Dr C.________ est décédé le... 2003, laissant pour seule héritière son épouse F.________.  
 
A.k. A.________ SA et l'assurance responsabilité civile des Établissements B.________ ont mis en oeuvre une expertise, laquelle a révélé que la décision de recourir à une chirurgie " Lasik " dans le cas du patient n'était pas défendable. Le Dr C.________ n'avait pas effectué toutes les mesures nécessaires.  
 
A.l. Par acte déposé le 24 juin 2009 auprès du Tribunal d'arrondissement de la Sarine à Fribourg, le patient a assigné en paiement la veuve du Dr C.________ pour un montant de 100'000 fr. à titre de tort moral. Il a fait valoir que le Dr C.________ était seul responsable de son dommage, à l'exclusion des Établissements B.________, puisqu'il lui avait indiqué à tort qu'une opération " Lasik " était réalisable. Il a limité sa demande au tort moral afin d'obtenir un jugement sur la question de la responsabilité, l'assureur du Dr C.________, A.________ SA, considérant que les Établissements B.________ étaient responsables.  
Ce litige a été dénoncé aux Établissements B.________, lesquels ont refusé d'intervenir. 
Par jugement du 27 juin 2012, le Tribunal d'arrondissement de la Sarine a condamné la veuve du Dr C.________ à verser au patient la somme totale de 126'940 fr., et a réservé le droit du patient d'introduire une nouvelle action pour le solde du dommage. Se fondant sur une expertise judiciaire, le tribunal a retenu que la responsabilité du Dr C.________ était engagée sur la base de l'art. 398 al. 2 CO, compte tenu du contrat de soins conclu avec le patient. Le Dr C.________ avait commis une erreur de diagnostic et non de traitement, les interventions ayant été exécutées dans les règles de l'art. Le choix d'une intervention " Lasik ", compte tenu des caractéristiques du patient, constituait une faute de la part du médecin, tout comme l'absence de renseignement adéquat. Le lien de causalité entre le dommage subi par le patient et l'erreur de diagnostic était réalisé. Ce jugement est devenu définitif et exécutoire. 
 
A.m. Une nouvelle action en paiement introduite par le patient à l'encontre de la veuve du Dr C.________ a abouti à une transaction judiciaire, entérinée par décision du tribunal du 27 juin 2019, selon laquelle A.________ SA, au nom de la veuve du Dr C.________, s'engageait à verser au patient le montant total de 2'050'000 fr.  
 
A.n. A.________ SA a versé au patient les montants précités. Ce dernier et la veuve du Dr C.________ ont cédé à A.________ SA leurs droits éventuels à l'encontre des Établissements B.________.  
 
B.  
 
B.a. Par acte du 30 avril 2021, A.________ SA a saisi le Tribunal de première instance du canton de Genève d'une demande en paiement à l'encontre des Établissements B.________ pour la somme totale de 2'321'333 fr. 05 avec intérêts, correspondant notamment aux montants versés au patient, à ses frais médicaux non remboursés, aux frais de défense de la veuve du Dr C.________ et d'expertise extrajudiciaire.  
Le Tribunal a entendu plusieurs témoins. 
Par jugement du 30 août 2022, le Tribunal a débouté A.________ SA de sa demande en paiement. Il a retenu que la consultation du 29 juin 2000 au D.________, effectuée hors des Établissements B.________, n'était pas couverte par le régime de responsabilité de la convention. Par ailleurs, le Tribunal d'arrondissement de la Sarine avait considéré que le Dr C.________ avait engagé sa responsabilité pour des faits survenus uniquement lors de cette consultation. Ces faits n'étaient donc pas couverts. 
 
B.b. Par arrêt du 16 mai 2023, statuant sur l'appel formé par A.________ SA, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement entrepris et débouté les parties de toutes autres conclusions.  
 
C.  
A.________ SA (ci-après: la recourante) a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral à l'encontre de cet arrêt. Elle a conclu à sa réforme en ce sens que les Établissements B.________ soient condamnés à lui verser le montant total de 2'321'333 fr. 05 avec intérêts. Subsidiairement, elle a conclu à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Dans leur réponse, les Établissements B.________ (ci-après: les intimés) ont conclu au rejet du recours. 
La cour cantonale s'est référée à son arrêt. 
La recourante a déposé une réplique spontanée, ne suscitant pas de duplique des intimés. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF) et au délai de recours (art. 100 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
En matière d'appréciation des preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution serait envisageable, voire préférable (ATF 136 III 552 consid. 4.2). 
 
2.2. Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Eu égard, toutefois, à l'exigence de motivation qu'impose l'art. 42 al. 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 140 III 115 consid. 2). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2).  
 
3.  
Il n'est pas contesté que le Dr C.________ a violé envers le patient son devoir de diligence en lui conseillant une intervention inadaptée, ainsi que son devoir d'information en lui fournissant des renseignements lacunaires, lors de la consultation préopératoire du 29 juin 2000 au D.________ à Fribourg. Il n'est pas non plus contesté que les opérations pratiquées en janvier 2001 par le Dr C.________ au sein des Établissements B.________ ont été réalisées selon les règles de l'art. 
Est en revanche litigieux le point de savoir si la responsabilité des Établissements B.________ est engagée pour la consultation au D.________ et/ou les interventions effectuées au sein des Établissements B.________. 
 
4.  
Sous le chapitre intitulé " En fait ", la recourante explique reprendre ses allégués de première instance et d'appel, qui compléteraient l'état de fait retenu par la cour cantonale, sans le contredire. Un tel exposé des faits ne satisfait manifestement pas aux exigences prévalant devant le Tribunal fédéral (cf. consid. 2.1 supra), puisque la recourante ne démontre notamment pas, pour chaque fait, en quoi il serait susceptible d'influencer l'issue du litige. Cet exposé n'a ainsi pas à être pris en considération.  
 
5.  
Ensuite, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir faussement interprété la convention liant les parties s'agissant du régime de responsabilité applicable à la consultation du 29 juin 2000 au D.________. Elle dénonce une constatation inexacte des faits au sens de l'art. 97 al. 1 LTF et une violation de l'art. 18 CO, de même que de l'art. 97 al. 1 CO
 
5.1. Pour déterminer si un contrat a été conclu, quels en sont les cocontractants et quel en est le contenu, le juge doit interpréter les manifestations de volonté des parties (ATF 144 III 93 consid. 5.2; arrêt 4A_180/2022 du 5 juillet 2022 consid. 4.2).  
Selon les règles d'interprétation des contrats déduites de l'art. 18 CO, le juge doit tout d'abord rechercher la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. Si le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises ou, au contraire, qu'elles ne se sont pas comprises, il s'agit de constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral, à moins qu'elles ne soient manifestement inexactes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les références citées). 
Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties, il doit interpréter leurs comportements selon le principe de la confiance (interprétation objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit, que le Tribunal fédéral examine librement (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les références citées). 
 
5.2. La cour cantonale a relevé qu'aux termes de l'art. 3 al. 5 de la convention, les parties s'étaient entendues sur le fait que la prise en charge des patients pour la chirurgie réfractive de la cornée devait exclusivement être effectuée dans les locaux des Établissements B.________ ( " au sein des Établissements B.________ "). Cette convention ayant pour but que le Dr C.________ transmette ses connaissances aux Établissements B.________, ladite prise en charge comprenait manifestement aussi les consultations. En continuant à recevoir des patients en consultation au D.________, le Dr C.________ n'avait pas respecté les termes de la convention, ce que les Établissements B.________ avaient relevé dans leur courriel du 17 juillet 2000, tout en acceptant provisoirement cette situation, un point devant être effectué en août 2001.  
La cour cantonale a ajouté que l'art. 6 al. 1 de la convention prévoyait que la responsabilité des Établissements B.________ était engagée pour tous les dommages causés à des tiers par D.________, soit pour lui le Dr C.________, dans le cadre de l'activité que celui-ci déployait " au sein des Établissements B.________ ". Cette terminologie était identique à celle employée à l'art. 3 al. 5 précité, qui était comprise par les parties comme " dans les locaux " des Établissements B.________. 
Selon la cour cantonale, la consultation du 29 juin 2000 avait certes été effectuée dans le cadre de l'activité du Dr C.________ au sens de la convention, mais pas dans les locaux des Établissements B.________ et ce contrairement aux termes de celle-ci. Le fait que les Établissements B.________ avaient accepté provisoirement qu'une partie des consultations s'effectue au D.________ ne permettait pas encore de retenir que les parties étaient convenues d'une modification de la convention concernant le régime de responsabilité prévu à l'art. 6 al. 1. En effet, aucun élément du dossier ne permettait de retenir que les Établissements B.________ auraient accepté d'engager leur responsabilité également pour les consultations effectuées hors de leurs locaux par le Dr C.________ et sur la base d'un contrat de mandat de soins conclu exclusivement avec lui, comme ce qui avait été le cas avec le patient. La propre assurance responsabilité civile des Établissements B.________ ne couvrait d'ailleurs que les personnes déployant une activité au sein des Établissements B.________. 
La correspondance des Établissements B.________ des 22 juin et 17 juillet 2000 ne permettait pas de retenir qu'ils auraient étendu leur responsabilité en ce sens. Le témoin G.________, administrateur aux Établissements B.________, avait d'ailleurs expliqué que le courrier du 22 juin 2000 indiquait le contraire, soit que les patients reçus en consultation au D.________ étaient sous la responsabilité du Dr C.________ et ce, tant qu'ils n'étaient pas enregistrés dans le logiciel des Établissements B.________. Or, le patient n'avait été enregistré dans ce logiciel que le 10 janvier 2001, le jour de sa première opération. 
Le fait que le Dr C.________ ait, par courrier du 10 décembre 2002, transmis les doléances du patient aux Établissements B.________ ne permettait pas non plus de retenir qu'ils auraient convenu d'un élargissement de la responsabilité de ces derniers aux consultations effectuées au D.________. Au contraire, dans leur courrier du 17 décembre 2002, les Établissements B.________ ont répondu que leur responsabilité n'était engagée que pour les actes médicaux exécutés dans leurs locaux, ce que le Dr C.________ n'avait pas contesté. 
Par ailleurs, le Dr C.________ avait lui-même facturé et encaissé les montants dus pour la consultation du 29 juin 2000 au D.________ et ce, contrairement à ce que les parties avaient prévu à l'art. 9 al. 1 de la convention. Le fait que le Dr C.________ aurait procédé lui-même à cette facturation afin de réduire " le risque de ducroire ", qu'il supportait selon l'art. 9 al. 4, n'était pas déterminant et ne pouvait modifier ce qui précédait. 
Compte tenu de l'ensemble des circonstances, la cour cantonale a considéré que les parties à la convention avaient la réelle et commune intention de n'engager la responsabilité des Établissements B.________ que pour les actes effectués dans leurs locaux. Il n'était pas établi, et peu convaincant, que les Établissements B.________ auraient accepté d'engager leur responsabilité pour les faits intervenus lors de la consultation du 29 juin 2000 réalisée hors de leurs locaux, sur la base d'un contrat de mandat conclu exclusivement entre le patient et le Dr C.________, de plus facturée par ce dernier et pour lesquels ils n'avaient reçu aucune rémunération. 
 
5.3. Les juges cantonaux sont parvenus à déterminer la réelle et commune intention des parties, à savoir que le régime de l'art. 6 al. 1 de la convention, prévoyant la responsabilité des Établissements B.________, ne s'appliquait que pour les actes réalisés dans leurs locaux. Ce faisant, ils ont constaté un fait, soit la volonté subjective des parties. Il appartenait ainsi à la recourante de démontrer l'arbitraire de cette constatation. Or, dans une large mesure, elle se contente d'opposer sa propre appréciation à celle des juges cantonaux, sans parvenir à faire la démonstration d'un tel arbitraire, pour autant qu'elle l'ait valablement invoqué.  
En particulier, elle répète à de nombreuses reprises que comme les parties étaient convenues de modifier la convention quant au lieu des consultations, les Établissements B.________, s'ils entendaient changer le régime de responsabilité prévu, devaient le préciser expressément, notamment dans leur correspondance des 22 juin et 17 juillet 2000. Cette simple affirmation ne permet pas de démontrer que les considérations opérées par les juges cantonaux seraient insoutenables. Leur raisonnement est détaillé, convaincant et prend en compte de nombreux éléments du dossier. La recourante soutient que deux points n'étaient pas pertinents, soit les termes de la police d'assurance des Établissements B.________ et le fait que les consultations avaient été effectuées sur la base d'un contrat de mandat. On ne voit toutefois pas en quoi cet argument mettrait en évidence un quelconque arbitraire dans l'appréciation fouillée des juges cantonaux. 
La recourante leur reproche également d'avoir retenu que le Dr C.________ n'avait pas contesté le courrier du 17 décembre 2002 des Établissements B.________. Toutefois, contrairement à ce qu'elle semble soutenir, le fait qu'il avait décliné sa responsabilité par courrier - antérieur - du 10 décembre 2002 ne lui est d'aucun secours, tout comme le fait qu'il avait cessé ses activités dès mai 2002 ou que, après son décès, ses " successeurs " avaient ensuite contesté la position des Établissements B.________. De plus, il ne s'agissait pour les juges cantonaux que d'un élément parmi d'autres. 
L'analyse des juges cantonaux en lien avec la facturation par le Dr C.________ de la consultation au D.________ n'est pas non plus critiquable. A cet égard, la recourante se limite à reprendre son grief lié au " risque de ducroire ", peu concluant, et à se fonder sur des généralités, d'ailleurs non constatées. La référence au règlement sur l'activité privée des Établissements B.________ figurant à l'art. 9 al. 2 de la convention n'y change rien. 
La recourante allègue aussi que les déclarations du témoin G.________ seraient dépourvues de toute crédibilité. Elle se base cependant encore une fois sur des faits qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale, sans pour autant demander valablement un complément de l'état de fait à cet égard, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur ce point. Ces faits n'apparaissent au demeurant même pas sous le chapitre " En fait " du recours. 
En définitive, la cour cantonale n'a pas versé dans l'arbitraire en retenant que la réelle et commune intention des parties était que le régime de l'art. 6 al. 1 de la convention, lequel prévoyait la responsabilité des Établissements B.________, s'appliquait seulement pour l'activité déployée en leur sein. Ainsi, sa déduction selon laquelle la responsabilité des Établissements B.________ ne s'étendait pas à la consultation du 29 juin 2000 qui s'est déroulée au D.________ n'est pas critiquable. 
 
6.  
La recourante soutient encore que les interventions elles-mêmes, pratiquées conformément aux règles de l'art en janvier 2001 par le Dr C.________ au sein des Établissements B.________, étaient des actes illicites, car effectuées sans le consentement éclairé du patient. S'agissant de la causalité, ce sont bien ces interventions qui ont causé une atteinte à l'intégrité corporelle du patient. En considérant qu'elles n'avaient pas constitué des actes illicites entraînant la responsabilité des Établissements B.________ sur la base de la convention, la cour cantonale a violé les art. 28 al. 2 CC et 97 al. 1 CO. 
 
6.1. La cour cantonale a retenu que par jugement définitif du 27 juin 2012, le Tribunal d'arrondissement de la Sarine avait considéré que seul le Dr C.________ était responsable des dommages causés au patient sur la base du contrat de mandat de soins conclu entre eux; en effet, lors de la consultation du 29 juin 2000, le Dr C.________ avait violé son devoir de diligence en conseillant une intervention inadaptée, ainsi que son devoir d'information dans la mesure où les renseignements donnés au patient étaient lacunaires. Il ressortait également de l'expertise extrajudiciaire mise en oeuvre par les assureurs concernés que le Dr C.________ n'avait pas effectué les examens préliminaires correctement lors de cette consultation. Le Tribunal d'arrondissement de la Sarine avait ainsi considéré que le lien de causalité était donné entre le dommage subi par le patient et l'erreur de diagnostic du Dr C.________, étant précisé que les opérations des 10 et 31 janvier 2001 avaient été exécutées dans les règles de l'art. Le patient avait d'ailleurs motivé son action en justice à l'encontre de la veuve du Dr C.________ sur la base d'une erreur de diagnostic et non de traitement, considérant le Dr C.________ comme seul responsable à l'exclusion des Établissements B.________.  
La cour cantonale a relevé que l'illicéité de l'atteinte à l'intégrité corporelle reposait bien sur l'erreur de diagnostic survenue lors de la consultation du 29 juin 2000 et non sur les interventions en tant que telles, ce qui avait été définitivement tranché dans le jugement du Tribunal d'arrondissement de la Sarine. Or, cette consultation n'était pas couverte par le régime de responsabilité prévu par la convention, mais par l'assurance responsabilité civile du Dr C.________, soit A.________ SA. 
Dans ces circonstances particulières, le premier juge genevois avait considéré qu'il se justifiait d'effectuer une distinction entre l'activité de consultation et les opérations en elles-mêmes, ce qui n'était pas critiquable. 
Ainsi, le seul fait que les opérations sur le patient en janvier 2001 se soient déroulées dans les locaux des Établissements B.________ n'était pas déterminant et ne permettait pas de retenir la responsabilité de ces derniers. Par ailleurs, il n'était pas établi que le Dr C.________ aurait effectué des examens le jour des opérations ou qu'il aurait dû le faire, ce que A.________ SA soutenait de toute façon pour la première fois en appel, et partant de manière irrecevable. 
Dès lors, la cour cantonale a considéré que les Établissements B.________ ne pouvaient pas être tenus de rembourser à A.________ SA les frais afférents à l'indemnisation du patient. 
 
6.2. La recourante s'en prend tout d'abord aux considérations de la cour cantonale en lien avec le jugement rendu le 27 juin 2012 par le Tribunal d'arrondissement de la Sarine.  
Elle se fonde toutefois sur plusieurs faits non constatés par la cour cantonale, sans requérir valablement un complètement de l'état de fait à cet égard; ils n'apparaissent d'ailleurs pas sous le chapitre " En fait " de son recours. Pour le surplus, il convient de rappeler que le litige fribourgeois opposant le patient à la veuve du Dr C.________ a été dénoncé aux Établissements B.________ (art. 97 ss aCPC/FR; art. 404 al. 1 CPC), lesquels ont refusé d'intervenir. Ce jugement n'a autorité de chose jugée qu'entre les parties principales, soit ici entre le patient et la veuve du Dr C.________ (selon le régime identique des art. 78 ss CPC; cf. arrêt 4A_495/2022 du 17 août 2023 consid. 1.1). Il n'est pas directement opposable aux Établissements B.________, mais a valeur de moyen de preuve dans le procès ultérieur entre ces derniers et la veuve du Dr C.________ (soit pour elle, en l'espèce, A.________ SA), le résultat défavorable à celle-ci leur étant " opposable " (art. 77 en lien avec l'art. 80 CPC; ATF 142 III 40 consid. 3.2.1; arrêt 4A_495/2022 précité consid. 1.1). Or, la recourante n'invoque pas, ni a fortiori ne démontre, l'arbitraire en lien avec ce moyen de preuve et les constatations qu'il retient, comme il lui appartenait de le faire. Elle relève seulement que sont " ambiguës, voire trompeuses " les considérations de la cour cantonale selon lesquelles, d'une part, le jugement fribourgeois avait retenu que seul le Dr C.________ était responsable des dommages causés au patient, et d'autre part, le lien de causalité était donné entre l'erreur de diagnostic et le dommage, étant précisé que les opérations avaient été exécutées dans les règles de l'art. Ainsi, la recourante ne critique pas valablement ces considérations, même si elle soutient à raison que ce jugement n'exclut pas en soi que le dénoncé puisse être jugé responsable du dommage.  
 
6.3. Ensuite, la recourante soutient que le seul fait que les interventions ont été pratiquées sans le consentement éclairé du patient suffit pour retenir qu'elles constituent des actes illicites commis au sein des Établissements B.________, et que, sous l'angle du lien de causalité, seules ces interventions ont causé une atteinte à l'intégrité du patient.  
 
6.4.  
 
6.4.1. En ce qui concerne ce dernier point, la recourante perd de vue que, dans le cas particulier, la responsabilité respective du D.________ et des Établissements B.________ a été réglée par une convention de collaboration conclue entre les deux, la responsabilité des Établissements B.________ n'entrant en ligne de compte que pour l'activité du Dr C.________ déployée dans les locaux des Établissements B.________, comme cela a été constaté sans arbitraire par la cour cantonale (cf. consid. 5.3 supra). Or, l'erreur de diagnostic qui est à l'origine du dommage subi par le patient n'a pas été commise dans les locaux des Établissements B.________, mais lors de la consultation du 29 juin 2000 au D.________ de Fribourg.  
L'erreur de diagnostic, qui a causé le dommage, est imputable au médecin, qui a violé les règles de l'art et son devoir de diligence. Ce médecin disposait d'une assurance responsabilité civile pour ses activités au D.________. Le patient lui-même a introduit action contre ce médecin dans le canton de Fribourg, en se basant sur l'erreur de diagnostic de celui-ci et le considérant comme seul responsable. La recourante ne conteste pas valablement le lien de causalité retenu par le jugement fribourgeois et par l'arrêt attaqué de la cour cantonale genevoise entre l'erreur de diagnostic et le dommage. 
Quant aux opérations qui ont eu lieu aux Établissements B.________, elles ont été pratiquées conformément aux règles de l'art, ce qui n'est pas contesté, de sorte qu'aucune violation des règles de l'art ne peut être imputée aux Établissements B.________. 
Dans ces circonstances, il ne suffit pas d'invoquer que, sans ces opérations qui ont eu lieu aux Établissements B.________, le patient n'aurait pas subi de dommage. En effet, il ne suffit pas qu'il y ait causalité naturelle entre ces opérations et le dommage. Encore faut-il qu'il y ait un rapport de cause à effet entre le chef de responsabilité, soit un acte illicite ou une violation du devoir de diligence des Établissements B.________, et le dommage. 
 
6.4.2. Quant au reproche que les opérations auraient été pratiquées sans le consentement éclairé du patient, il est infondé. Dès lors que le médecin a commis une erreur de diagnostic, c'est en relation avec ce diagnostic qu'il avait un devoir d'information. Si ce diagnostic s'est révélé erroné par la suite, sa responsabilité est engagée de ce chef.  
 
7.  
Au vu de ce qui précède, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres arguments soulevés. 
 
8.  
Le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
Les frais judiciaires et les dépens seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 18'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera aux intimés une indemnité de 20'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 12 juillet 2024 
 
Au nom de la I re Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
La Greffière : Raetz