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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
5A_474/2018  
 
 
Arrêt du 10 août 2018  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président, 
Marazzi et Bovey. 
Greffière : Mme Jordan. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Youri Widmer, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Robert Lei Ravello, avocat, 
intimée, 
 
Objet 
révision (mesures protectrices de l'union conjugale, entretien de la famille), 
 
recours contre l'arrêt de la Juge déléguée de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 30 avril 2018 (JS14.035920-180399 250). 
 
 
Faits :  
 
A.   
B.________ et A.________, tous deux de nationalité camerounaise, se sont mariés le 13 juin 2008 à Nyon. Selon le certificat de famille du 2 décembre 2016, deux enfants sont issues de cette union : C.________, née en 2008 et D.________, née en 2014. 
Les parties vivent séparées depuis l'automne 2014. 
 
B.   
Statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale le 14 novembre 2014, la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a notamment astreint A.________ à contribuer à l'entretien des siens à hauteur de 2'640 fr., allocations familiales en sus, pour les mois de novembre 2014 à février 2015 et de 3'090 fr. à compter du mois de mars 2015 (II). Elle a rendu l'ordonnance sans frais ni dépens (III), l'a déclarée immédiatement exécutoire, nonobstant appel ou recours (IV), et a rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (V). 
Le 12 mai 2015, sur appel de B.________, la Juge déléguée de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a réformé ce prononcé en ce sens que la contribution d'entretien mensuelle a été fixée à 13'400 fr. pour les mois de novembre 2014 à février 2015 et à 14'200 fr. dès le mois de mars 2015 (II). 
 
C.   
Dans le cadre de l'action en divorce introduite par B.________, statuant sur mesures provisoires le 17 octobre 2017 à la requête de A.________, la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne a suspendu, dès et y compris le 1 er août 2017, la contribution due pour l'entretien de l'épouse et des enfants. Par arrêt du 15 décembre 2017, la Juge déléguée du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel interjeté par B.________ contre ce prononcé.  
Dans l'intervalle, le 5 octobre 2017, A.________ a ouvert action en contestation de la filiation contre B.________ et l'enfant mineure née en 2014. Le 5 décembre 2017, le Centre Universitaire Romand de Médecine Légale (CURML) a rendu un rapport d'expertise - communiqué aux parties le 11 décembre 2017 - indiquant que A.________ n'était pas le père biologique de l'enfant. 
 
D.   
Par demande du 12 mars 2018, A.________ a principalement conclu à la révision du chiffre II de l'arrêt sur mesures protectrices du 12 mai 2015. Il a demandé que la contribution en faveur de C.________ soit arrêtée à 642 fr. 80, allocations familiales en sus, et celle en faveur de son épouse à 644 fr. 40, la première fois le 1 er novembre 2014. Il s'est notamment prévalu du rapport d'expertise du 5 décembre 2017 attestant du fait qu'il n'était pas le père biologique de l'enfant pour laquelle des aliments avaient été mis à sa charge.  
Le 30 avril 2018, la Juge déléguée de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a déclaré irrecevable la demande de révision, rejeté la demande d'assistance judiciaire du requérant et déclaré l'arrêt exécutoire. 
 
E.   
Par écriture du 4 juin 2018, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi " pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants ". Il sollicite en outre l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Des réponses n'ont pas été requises. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
L'arrêt de la Juge déléguée de la Cour d'appel civile déclarant irrecevable la demande de révision d'une ordonnance de mesures protectrices de l'union conjugale statuant sur l'entretien de la famille est une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière matrimoniale (art. 72 al. 1 LTF) par l'autorité cantonale ayant statué en dernière instance sur l'arrêt dont la révision est requise (art. 328 al. 1 CPC et art. 75 al. 2 let. a LTF; arrêt 5A_903/2015 du 22 décembre 2015 consid. 2). L'arrêt attaqué participe de la nature pécuniaire de la décision dont la rétractation est requise (arrêts 5A_903/2015 du 22 décembre 2015 consid. 2; 5A_382/2014 du 9 octobre 2014 consid. 1; 5A_289/2012 du 18 juin 2012 consid. 1.2, avec les références). La valeur litigieuse est supérieure au seuil de 30'000 fr. (art. 54 al. 1 let. a et 4 et 74 al. 1 let. b LTF). Le recours est en outre formé en temps utile (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 LTF) par une partie qui a pris part à la procédure devant l'autorité précédente et a un intérêt à son annulation ou à sa modification (art. 76 al. 1 LTF). Le recours en matière civile est donc en principe recevable. 
 
2.   
La décision portant sur la révision de mesures protectrices de l'union conjugale est considérée comme une décision de nature provisionnelle au sens de l'art. 98 LTF (arrêts 5A_903/2015 du 22 décembre 2015 consid. 2; 5A_240/2015 du 28 mai 2015 consid. 2; 5A_59/2012 du 26 avril 2012 consid. 1.2 non publié in ATF 138 III 382). Seule peut dès lors être invoquée à son encontre la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 133 III 393 consid. 5; 133 IV 286 consid. 1.4). 
 
3.  
 
3.1. La Juge déléguée de la Cour d'appel civile a considéré que l'arrêt rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale ne constituait pas une décision " entrée en force " au sens de l'art. 328 al. 1 CPC, dès lors que celles-là étaient revêtues d'une autorité de la chose jugée limitée. Quoique, dans son dispositif, elle ait déclaré la requête de révision irrecevable pour ce motif, elle a jugé dans ses considérants qu'eût-elle été recevable, elle aurait été rejetée.  
Elle a en effet notamment retenu - seul point encore contesté devant la Cour de céans - que le rapport d'expertise du 5 décembre 2017 établissant que le requérant n'était pas le père biologique de l'enfant n'était pas un motif de révision au sens de l'art. 328 al. 1 let. a CPC, ce moyen de preuve étant postérieur à l'arrêt dont la révision était requise. Elle a par ailleurs observé que le requérant avait ouvert action en désaveu le 5 octobre 2017, alors que la procédure de mesures provisionnelles - postérieure aux mesures protectrices faisant l'objet de la demande de révision - était encore pendante en première instance, sans pour autant invoquer cette circonstance dans le cadre de ladite procédure. Elle a encore noté que le rapport d'expertise avait été rendu et communiqué aux parties avant même que le juge délégué n'ait rendu son arrêt sur appel sur mesures provisionnelles et que rien n'indiquait qu'il n'aurait pas pu être porté à la connaissance dudit magistrat afin que celui-ci puisse (ou non) en tenir compte dans le cadre de son arrêt. 
Ce faisant, elle a adopté une motivation subsidiaire. 
 
3.2. Selon la jurisprudence, lorsque la décision attaquée comporte plusieurs motivations indépendantes dont chacune suffit à sceller le sort de la cause, il appartient au recourant, sous peine d'irrecevabilité, de démontrer que chacune d'entre elles est contraire au droit (parmi plusieurs : ATF 142 III 364 consid. 2.4; 138 I 97 consid. 4.1.4; 138 III 728 consid. 3.4; 136 III 534 consid. 2). Le caractère subsidiaire de l'une des motivations n'y change rien (ATF 139 II 233 consid. 3.2).  
 
3.3. En l'espèce, dans son argumentation, le recourant conteste tant les considérants qui ont conduit à l'irrecevabilité de sa demande de révision que ceux qui ont fondé son rejet.  
 
4.   
Le recourant soutient d'abord que l'autorité cantonale a gravement méconnu l'art. 328 CPC ainsi que la jurisprudence en déclarant irrecevable sa requête de révision. Il conteste que cette voie de droit ne soit pas ouverte contre un jugement rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale. Il reproche en outre à la Juge cantonale de s'être écartée sans motifs de sa propre jurisprudence et de celle du Tribunal cantonal vaudois en violation du principe de la légalité et de l'art. 5 Cst. 
Point n'est besoin de discuter plus avant cette question, dès lors que la Cour d'appel civile est aussi entrée en matière sur la demande de révision qu'elle a rejetée au terme d'une motivation subsidiaire qui résiste au grief d'arbitraire (cf. infra). 
 
5.   
S'agissant des considérations fondant le rejet de la requête de révision, le recourant fait grief à l'autorité cantonale d'avoir arbitrairement considéré que le rapport d'expertise établissant qu'il n'est pas le père biologique de l'enfant ne pouvait constituer un motif de révision au sens de l'art. 328 al. 1 let. a CPC parce qu'il avait été établi postérieurement à l'arrêt sur mesures protectrices. Il lui reproche d'avoir confondu la découverte de faits nouveaux et les faits ou moyens de preuve postérieurs à la décision dont la révision est requise. Il soutient que l'expertise établit un fait qui existait déjà lors de la procédure de mesures protectrices mais qui lui était alors inconnu et qu'il n'a découvert que postérieurement à cette procédure. Il lui était dès lors impossible d'invoquer ce moyen de preuve concluant à ce moment-là. Il prétend enfin que la Juge déléguée est tombée dans l'arbitraire en l'accusant de ne pas avoir invoqué la procédure en désaveu dans le cadre des mesures provisionnelles encore pendantes. Il affirme à cet égard qu'elle a " fait fausse route puisque lors du prononcé de mesures superprovisionnelles du 23 août 2017, la procédure en désaveu n'avait pas été introduite " et qu'il " n'était évidemment pas possible de faire état d'un fait encore inexistant ". 
 
5.1. Selon l'art. 328 al. 1 let. a CPC, une partie peut demander la révision de la décision entrée en force lorsqu'elle découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu'elle n'avait pu invoquer dans la procédure précédente, à l'exclusion des faits et moyens de preuve postérieurs à la décision. La jurisprudence pose cinq conditions en ce qui concerne les preuves concluantes [ou moyens de preuve concluants] (ATF 143 III 272 consid. 2.2) :  
 
1° Elles doivent porter sur des faits antérieurs (pseudo-nova), qu'ils aient été invoqués sans pouvoir être établis ou qu'ils n'aient pas été invoqués soit faute de preuve, soit parce que la partie les ignorait (fait antérieur inconnu). 
2° Elles doivent être concluantes, c'est-à-dire propres à entraîner une modification du jugement dans un sens favorable au requérant. 
3° Elles doivent avoir déjà existé lorsque le jugement a été rendu (plus précisément jusqu'au dernier moment où elles pouvaient encore être introduites dans la procédure principale); les moyens de preuve postérieurs sont expressément exclus (art. 328 al. 1 let. a in fine CPC et 123 al. 2 let. a in fine LTF). En effet, la révision a pour but de rectifier une décision en raison de lacunes ou d'inexactitudes dont elle était affectée au moment où elle a été rendue, et non en raison d'événements postérieurs, ce qui exclut les moyens de preuve dont la date est postérieure. 
4° Elles doivent avoir été découvertes seulement après coup. 
5° Le requérant n'a pas pu les invoquer, sans faute de sa part, dans la procédure précédente. 
 
5.2. En l'espèce, le recourant ne conteste pas que le moyen de preuve, à savoir l'expertise du 5 décembre 2017, qu'il invoque comme motif de révision a été établi postérieurement au dernier moment auquel il pouvait encore être administré dans la procédure précédente (sur ce moment : ATF 143 III 272 consid. 2.3.2). Partant, la condition n° 3 précitée n'était pas réalisée, le fait que la preuve ait été destinée à établir un fait antérieur important peu à cet égard. Au demeurant, l'admission de l'expertise comme moyen de preuve n'aurait pas été propre à entraîner une révision du jugement de mesures protectrices dans un sens favorable au requérant. En effet, si le rapport établit que le recourant n'est pas le père biologique de l'enfant, ce seul fait ne pourrait fonder une modification des aliments arrêtés en mesures protectrices. L'obligation d'entretien du père inscrit à l'état civil ne tombe, avec effet rétroactif au moment où elle a pris naissance, qu'avec la suppression du lien de filiation juridique par l'action en désaveu, le père inscrit à l'état civil disposant dès lors d'une prétention en enrichissement illégitime contre le père biologique (ATF 129 III 651 consid. 4 et 5.2; cf. aussi arrêt 5P.415/2004 du 5 janvier 2005 consid. 3.2.2). Cela étant, l'autorité cantonale n'a pas fait preuve d'arbitraire en considérant que l'expertise ne constituait pas un motif de révision valable.  
 
6.   
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté. Comme il était par ailleurs manifestement dénué de toute chance de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). Des réponses n'ayant pas été requises, il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire du recourant est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Juge déléguée de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 10 août 2018 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : von Werdt 
 
La Greffière : Jordan