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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_232/2022  
 
 
Arrêt du 4 octobre 2022  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Stadelmann et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bürgisser. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Gilles-Antoine Hofstetter, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, 
avenue du Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 31 mars 2022 (AI 152/21 - 109/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, né en 1988, a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité en décembre 2012. Il y indiquait souffrir de lé sions nerveuses et vasculaires des tendons de la main droite à la suite d'une chute survenue le 4 novembre 2011. Par décision du 10 juillet 2013, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a nié le droit de l'assuré à une rente et à des me sures professionnelles. 
En janvier 2015, l'assuré, désormais père d'un enfant (né en 2014), a présenté une nouvelle demande de prestations. Après que A.________ a contesté le projet du 8 mai 2018 par lequel l'office AI l'informait qu'il entendait lui octroyer une rente entière d'invalidité du 1 er avril 2014 au 28 février 2017, l'administration a confié la réalisation d'une expertise rhumatologique et psychiatrique au Centre B.________. Dans leur appréciation consensuelle, les experts ont conclu que, du point de vue rhumatologique, l'assuré présentait une pleine capacité de travail dans une activité adaptée au plus tard deux ans après l'accident du 4 novembre 2011 et que du point de vue psychiatrique, une pleine capacité de travail de l'assuré était exigible au moins depuis 2015 (rapport du 16 décembre 2019). Par décision du 4 mars 2021, l'office AI a octroyé à l'assuré une rente entière d'invalidité du 1 er avril 2014 au 31 mars 2016, assortie d'une rente pour enfant dès le 1 er mai 2014.  
 
B.  
Statuant le 31 mars 2022 sur le recours formé par l'assuré contre cette décision, le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, l'a rejeté. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt. Il conclut principalement à sa réforme en ce sens qu'un droit à une rente entière d'invalidité lui est reconnu dès le 1 er avril 2014. Subsidiairement, il requiert l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause pour nouvelle instruction et/ou décision dans le sens des considérants.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut pas être pris en considération. 
 
2.  
 
2.1. En instance fédérale, le litige a trait au maintien du droit du recourant à une rente entière de l'assurance-invalidité au-delà du 31 mars 2016.  
 
2.2. L'arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs notamment à la notion d'invalidité (art. 7 et 8 al. 1 LPGA en relation avec l'art. 4 al. 1 LAI) et à son évaluation (art. 16 LPGA et art. 28a LAI), à l'examen des rentes temporaires d'invalidité sous l'angle de la révision du droit aux prestations durables ( art. 17 LPGA, art. 88a RAI; ATF 131 V 164 consid. 2.2), ainsi qu'à la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 125 V 351 consid. 3) et à la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA). Il suffit d'y renvoyer, tout en précisant qu'ont été rappelées les dispositions légales dans leur version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021, applicable en l'espèce dans la mesure où la décision litigieuse a été rendue avant cette date (à cet égard, cf. notamment ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les références).  
 
3.  
En se fondant sur l'expertise du Centre B.________, à laquelle elle a accordé une pleine valeur probante, la juridiction cantonale a constaté que, du point de vue psychiatrique, il n'y avait plus de limitation de la capacité de travail depuis 2015 et que sur le plan somatique, la capacité de travail dans une activité adaptée était entière au plus tard deux ans après l'accident survenu le 4 novembre 2011 (avec un délai d'accou tumance de trois mois nécessaire pour permettre l'utilisation de la main droite comme main de secours). Partant, elle a considéré qu'il était exigible de l'assuré qu'il mette en oeuvre sa capacité de travail résiduelle début 2016 et confirmé le droit à une rente entière d'invalidité du 1 er avril 2014 au 31 mars 2016.  
 
4.  
 
4.1. Dans un premier grief, le recourant invoque plusieurs vices qui entacheraient l'expertise diligentée par l'office AI. Il allègue en parti culier que l'expert psychiatre aurait manifesté un parti pris à son encontre, au motif qu'il aurait notamment constaté de manière inexacte sa "théâtralité", son "handicap largement imaginaire [...]", ainsi qu'une "motivation [...] en termes de reprise d'activité professionnelle [...] abolie". L'assuré soutient également que l'expertise serait "totalement irréaliste" en tant qu'elle se distancierait des "appréciations fouillées" du docteur C.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie et médecin traitant du recourant et qu'il serait "hasardeux" qu'un expert examine en 2019 une capacité de travail exigible à compter de fin 2015. Le recourant fait également valoir que dans la mesure où l'expert ne parlait pas français, il aurait rendu une expertise "totalement déconnectée de la réalité" et dépourvue de force probante, puisqu'il se serait notamment fondé sur une documentation médicale rédigée dans une langue qu'il n'était pas en mesure de comprendre.  
 
4.1.1. L 'argumentation du recourant sur la prévention de l'expert psychiatre, sur laquelle le Tribunal fédéral peut se prononcer librement (arrêt 9C_410/2019 du 18 mai 2020 consid. 4.2 et les références), ne peut pas être suivie. Il convient en effet de rappeler que des cir constances indiquant une exagération (telles qu'une amplification des symptômes ou un caractère revendicateur), ainsi que l'éventuel manque de motivation de l'assuré constituent des éléments décisifs pour évaluer la pertinence du diagnostic; l'expert était ainsi fondé, sans s'exposer à un reproche de prévention, à examiner les déclarations du recourant sur ces aspects, afin d'en tirer des conclusions quant au caractère invalidant du trouble analysé (cf. arrêt 9C_179/2022 du 24 août 2022 consid. 6.2 et la référence; sur le rôle de l'expert psychiatre, ATF 145 V 361 consid. 4.3).  
 
4.1.2. Le recourant ne saurait non plus être suivi lorsqu'il soutient que l'expertise psychiatrique serait dépourvue de valeur probante, en se référant à l'opinion de son psychiatre traitant. On rappellera en effet qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4), on ne saurait mettre en cause les conclusions d'une exper tise médicale du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contraire, sauf si ceux-ci font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour mettre en cause les conclusions de l'expertise (arrêt 9C_459/2019 du 5 novembre 2019 consid. 4). Or dans le cas d'espèce, les premiers juges ont dûment exposé les raisons pour lesquelles ils ont accordé une pleine force probante aux conclusions de l'expert ps ychiatre et n'ont pas suivi l'avis du docteur C.________, ainsi que celles pour lesquelles ils ont conclu que le second n'apportait aucun élément probant pour remettre en doute l'appré ciation étayée et convaincante du premier. En ce qu'il se contente d'indiquer que les appréciations de l'expert psychiatre sont notamment "irréaliste[s]", "surréaliste[s]" ou "contre-factuel[les]", le recourant ne démontre pas en quoi les constatations de la juridiction cantonale seraient manifestement inexactes, pas plus qu'il ne critique concrètement le raisonnement qu'elle a suivi. Il s'ensuit qu' il n'y a pas lieu de s'écarter des conclusions de l'expert psychiatre qui, du reste, pouvait évaluer la capacité de travail de l'assuré sur une période remontant à plusieurs années dans le passé, par une appréciation rétrospective de la situation à l'aide des données du dossier et de l'examen de la personne concernée (cf. arrêt 9C_291/2018 du 3 août 2018 consid. 5.1).  
 
4.1.3. Enfin, s'agissant du grief relatif à la langue dans laquelle l'expertise a été conduite, il convient de rappeler, comme le souligne du reste le recourant lui-même, qu'il n'existe pas de droit incondition nel à la réalisation d'un examen médical dans la langue maternelle de l'assuré (arrêt 9C_262/2015 du 8 janvier 2015 consid. 6 et les références). Ceci dit, le recourant ne démontre nullement que la compréhension linguistique entre lui-même et l'expert psychiatre n'était pas, en présence d'une interprète, suffisante pour garantir une expertise revêtant un caractère à la fois complet, compréhensible et concluant. De plus, l'expert psychiatre était en mesure de comprendre les différents rapports médicaux de langue française figurant au dossier, puisqu'il les a mentionnés et résumés dans le rapport d'expertise. Il a de plus, à titre d'exemple, écarté par une analyse détaillée le diagnostic d'état de stress post-traumatique posé par le psychiatre traitant du recourant, démontrant qu'il maîtrisait la langue dans laquelle son confrère s'était exprimé.  
 
4.2. Le recourant reproche en outre à la juridiction cantonale d'avoir retenu de manière arbitraire qu'il avait recouvré une capacité de travail entière dans une activité adaptée à fin 2015 sur le plan somatique et d'avoir confirmé la fin du droit aux prestations au 31 mars 2016, sans égard à une "période de réadaptation pourtant attestée et préconisée par les experts". Il se réfère à cet égard au rapport du docteur D.________, spécialiste en chirurgie et médecin d'arrondissement de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), du 15 juin 2016. Il fait en outre valoir que son "indispensable réinsertion" aurait dû conduire l'intimé à reporter le délai d'exigibilité fixé par les experts.  
Contrairement à ce qu'affirme le recourant, le docteur D.________ a indiqué que la situation de l'assuré, au jour de la rédaction de son rapport le 15 juin 2016, n'avait pas beaucoup évolué par rapport à ses observations à la fin de l'année 2015 et que rien ne s'opposait à l'exercice d'une activité adaptée à temps plein dans une activité légère, et ce nonobstant l'intervention chirurgicale de février 2016. En outre, en confirmant l'exigibilité de la capacité entière de travail dans une activité adaptée à partir du début de l'année 2016, la juridiction cantonale a tenu compte d'un délai d'accoutumance de trois mois pour permettre un renforcement de l'utilisation de la main droite comme main de secours, tel que préconisé par les experts. En effet, l'expert somaticien avait attesté d'une capacité de travail entière dans une activité adaptée au plus tard deux ans après l'accident du 4 novembre 2011, sous réserve de périodes d'incapacité de travail de quelques mois liées aux interventions chirurgicales postérieures (en février 2016 et mars 2017). Dès lors que la juridiction cantonale a retenu sans arbitraire qu'une activité adaptée était exigible depuis début 2016, il ne se justifie pas, comme le demande le recourant, de "reporter le délai d'exigibilité fixé par les experts". En effet, le droit à une rente de l'assurance-invalidité prend naissance selon les conditions prévues aux art. 28 et 29 LAI, sans que la loi ne consacre un délai pour chercher un emploi adapté (arrêt 8C_39/2020 du 19 juin 2020 consid. 4.3 et les références) ou pour se réhabituer au travail. 
 
4.3. Le recourant reproche également à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire en retenant à titre d'exemple d'une activité exigible le métier d'agent de sécurité, ce qui ne serait pas réaliste au vu de ses limitations fonctionnelles (manipulation de charges jusqu'à 10 kg, rarement, la main droite pouvant être utilisée comme main de secours).  
Il convient d'admettre que, compte tenu des limitations fonctionnelles constatées par la juridiction cantonale, le marché du travail équilibré (sur cette notion, cf. arrêt 9C_597/2018 du 18 janvier 2019 consid. 5.2) offre au recourant un éventail suffisamment large d'activités qui sont accessibles, telles que des tâches de surveillance, de vérification ou de contrôle (cf. arrêt 9C_701/2009 du 1er mars 2010 consid. 3.3; voir aussi arrêt 9C_241/2021 du 18 novembre 2021 consid. 6.2). Dès lors, la question de savoir si, en particulier, l'activité d'agent de sécurité mentionnée par l'intimé dans sa décision du 4 mars 2021 peut être raisonnablement exigée peut demeurer ouverte, dans la mesure où il ne s'agit que d'un exemple d'activité et que la cour cantonale a considéré à bon droit que le recourant pouvait exploiter sa pleine capacité de travail dans une activité légère et adaptée. 
 
5.  
Il suit de ce qui précède que le recours est mal fondé. 
 
6.  
Le recourant, qui succombe, supportera les frais afférents à la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 4 octobre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Bürgisser