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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_485/2022  
 
 
Arrêt du 19 août 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Ryter. 
Greffier : M. Rastorfer. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Office cantonal de la population et des migrations du canton de Genève, route de Chancy 88, 1213 Onex, 
intimé. 
 
Objet 
Refus de prolongation de l'autorisation de 
séjour et renvoi de Suisse, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 10 mai 2022 (ATA/491/2022). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
A.________, ressortissante brésilienne née en 1959, a épousé en 2007, au Portugal, un ressortissant de ce pays, et a de ce fait obtenu la nationalité portugaise. En janvier 2015, elle est entrée en Suisse pour y rejoindre son époux, lequel y résidait depuis 2013. A cette occasion, elle a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour UE/AELE au titre du regroupement familial, valable jusqu'au 7 janvier 2020. Aucun enfant n'est né de cette union. 
En février 2017, le mari de A.________ a annoncé aux autorités son départ définitif de Suisse à destination du Portugal. En juillet 2017, le divorce des époux a été prononcé. 
Depuis son arrivée en Suisse, A.________ n'a travaillé que sporadiquement et pour une rémunération modique. Elle a ainsi été employée par des sociétés de nettoyage du 16 juillet au 24 août 2018 pour un salaire horaire de 18 fr. 95 à un taux d'occupation de 34%, du 24 au 25 juin 2019 pour un salaire total de 343 fr. 80, et du 1er juillet 2019 jusqu'à une date indéterminée pour un salaire mensuel de 826 fr. Depuis le 1er octobre 2020, elle effectue hebdomadairement deux heures de ménage et deux heures de gardiennage de chiens pour le compte de particuliers, pour un revenu global de 400 fr. par mois. L'intéressée émarge à l'aide sociale depuis le 1er mars 2017 pour un montant total de 128'700 fr. au 27 juin 2020, qui a passé à près de 180'000 fr. au 10 mai 2022. 
 
2.  
Par décision du 24 septembre 2020, l'Office cantonal de la population et des migrations du canton de Genève (ci-après: l'Office cantonal) a notamment refusé de prolonger l'autorisation de séjour de A.________ et a prononcé son renvoi de Suisse. 
A.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève qui, par jugement du 9 juillet 2021, a rejeté le recours. L'intéressée a contesté ce prononcé auprès de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice). Par arrêt du 10 mai 2022, la Cour de justice a rejeté le recours. 
 
 
3.  
Contre l'arrêt du 10 mai 2022, A.________ déclare former un "recours" au Tribunal fédéral. Elle conclut, sous suite de frais, outre à l'octroi de l'effet suspensif, à l'annulation de l'arrêt attaqué et à ce que son autorisation de séjour soit renouvelée. 
Par ordonnance du 16 juin 2022, la Présidente de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la demande d'effet suspensif. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
4.  
La recourante a déclaré former un "recours" au Tribunal fédéral. Cette désignation imprécise ne saurait lui nuire, à condition que le recours remplisse les exigences légales de la voie de droit qui lui est ouverte (ATF 138 I 367 consid. 1.1). 
 
4.1. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. En l'occurrence, dès lors qu'elle possède la nationalité portugaise, la recourante peut, en principe et à première vue, prétendre à un titre de séjour en Suisse en vertu de l'ALCP (RS 0.142.112.681; cf. ATF 136 II 177 consid. 1.1). Cela suffit pour que son recours échappe à la clause d'irrecevabilité de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, la question de savoir si les conditions d'un tel droit sont effectivement réunies relevant du fond (cf. ATF 139 I 330 consid. 1.1). Le recours ne tombe en outre sous le coup d'aucune autre clause d'irrecevabilité figurant à l'art. 83 LTF. Partant, la voie du recours en matière de droit public est ouverte.  
 
4.2. En revanche, en tant que la recourante invoque l'art. 20 OLCP (RS 142.203), son recours en matière de droit public est irrecevable. Cette disposition, qui prévoit des dérogations aux conditions d'admission, tombe sous le coup de l'art. 83 let. c ch. 5 LTF (arrêts 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 11; 2C_330/2022 du 12 mai 2022 consid. 4.3 et l'arrêt cité), de sorte que seul un recours constitutionnel subsidiaire est ouvert. Or, l'intéressée ne fait pas valoir d'intérêt juridique protégé ni ne formule de griefs formels équivalant à un déni de justice en lien avec l'art. 20 OLCP. Il n'y a partant pas lieu d'entrer en matière sur le recours s'agissant de cette disposition, même en tant que recours constitutionnel subsidiaire (cf. arrêts 2C_195/2014 du 12 janvier 2015 consid. 1.2, non publié in ATF 141 II 1; 2C_433/2021 du 21 octobre 221 consid. 1.3 et les arrêts cités).  
 
4.3. Sous réserve de ce qui précède, les autres conditions de recevabilité sont réunies (cf. art. 42, 82 let. a, 86 al. 1 let. d et al. 2, 89 al. 1, 90 et 100 al. 1 LTF), si bien qu'il convient d'entrer en matière.  
 
5.  
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Pour ce faire, il statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst., et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 142 II 355 consid. 6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il ne peut être tenu compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (cf. ATF 145 V 188 consid. 2). 
 
5.1. En l'occurrence, la recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir considéré que, parce qu'elle n'avait pas indiqué le montant de ses expectatives de rentes de vieillesse, celles-ci devaient être modestes. L'intéressée se limite toutefois à affirmer qu'une telle supposition ne correspond pas à la réalité, sans néanmoins en démontrer l'arbitraire, notamment en apportant des preuves ou indices positifs des périodes d'assurance qu'elle aurait accomplies avant son entrée en Suisse. Une telle façon de procéder ne répond pas aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF. Au demeurant, si l'on se base sur la faible rémunération, la durée limitée et le caractère irrégulier des emplois que l'intéressée a occupés durant son séjour en Suisse, il n'apparaît pas insoutenable de retenir que ses expectatives de rentes apparaissent modestes.  
 
5.2. Pour le reste, en tant que la recourante soutient que c'est sur la base d'une appréciation arbitraire des preuves que les juges cantonaux ont retenu qu'elle ne pouvait pas se prévaloir du statut de travailleuse communautaire salariée ou, à tout le moins, de personne en recherche d'emploi, elle ne s'en prend pas tant à l'appréciation des faits qu'à leur qualification juridique et soulève ainsi une question de droit que le Tribunal fédéral examinera ci-après (cf. infra consid. 6).  
 
5.3. Le Tribunal fédéral appliquera ainsi le droit sur la seule base des faits retenus par l'autorité précédente.  
 
6.  
Sur le fond, la recourante invoque une violation des art. 4 et 6 ALCP. Elle considère que c'est à tort que la Cour de justice a confirmé qu'elle ne pouvait pas se prévaloir du statut de travailleuse respectivement de personne en recherche d'emploi pour prétendre à la prolongation de son séjour en Suisse sur la base de l'ALCP et que, au vu de sa dépendance à l'aide sociale, elle ne pouvait également pas invoquer la réglementation du séjour des personnes n'exerçant pas une activité lucrative pour demeurer dans ce pays. 
 
6.1. En premier lieu, il convient de mentionner que, dans la mesure où la recourante n'est plus mariée à un ressortissant européen, c'est à juste titre qu'elle n'invoque pas l'art. 7 let. d ALCP en lien avec l'art. 3 par. 1 et 2 annexe I ALCP pour prétendre à la prolongation de son autorisation de séjour (cf. ATF 144 II 1 consid. 3.1). C'est également à juste titre qu'elle ne se prévaut pas de l'art. 50 LEI (RS 142.20), dès lors que son ex-époux, duquel dérive son droit de séjour, a quitté la Suisse en février 2016 (cf. ATF 144 II 1 consid. 4).  
 
6.2. La Cour de justice a correctement rappelé les bases légales applicables (en particulier les art. 4 et 6 ALCP, les art. 2 par. 1, 6 par. 1 et 24 par. 1 annexe I ALCP, et l'art. 23 al. 1 OLCP) ainsi que la jurisprudence relative à la qualité de travailleur salarié et au droit de demeurer pour les personnes n'exerçant pas d'activité lucrative (p. ex. ATF 141 II 1 consid. 2; 135 II 265 consid. 3.7; arrêts 2C_439/2018 du 7 mai 2019 consid. 4; 2C_79/2018 du 15 juin 2018 consid. 4.1.2). Il peut donc y être renvoyé (art. 109 al. 3 LTF).  
 
6.3. La Cour cantonale a en outre procédé a une analyse convaincante de la situation d'espèce.  
 
6.3.1. Les juges précédents ont en effet retenu que, depuis son arrivée en Suisse en 2015 jusqu'au moment de l'arrêt attaqué, la recourante avait certes occupé divers emplois, mais seulement durant quelques semaines. En tout état de cause, elle n'avait jamais exercé un emploi durant une année complète. L'intéressée admet d'ailleurs, dans son recours, n'avoir eu "que des emplois de courte durée". Les revenus qu'elle était parvenue à percevoir étaient par ailleurs très faibles. Ils n'avaient ainsi pas dépassé, en juin 2019, le montant de 343 fr., et les heures de ménage et de garde de chiens qu'elle effectuait depuis octobre 2020 ne lui permettaient que de réaliser un salaire mensuel total de 400 fr. Sous cet angle, force est d'admettre que les activités lucratives exercées par la recourante ont toujours été tellement réduites et peu rémunératrices qu'elles doivent clairement, selon la jurisprudence, être tenues pour marginales et accessoires (cf. ATF 141 II 1 consid. 2.2.4; arrêt 2C_897/2017 du 31 janvier 2018 consid. 4.2.2 et les arrêts cités). Le fait que la recourante ait dû, en tant que personne seule, recourir aux prestations de l'aide sociale depuis le 1er mars 2017 atteste au demeurant que l'ensemble des activités exercées ne lui permettaient pas de gagner sa vie. Par conséquent, c'est à juste titre que la Cour de justice a retenu que l'intéressée ne pouvait pas se prévaloir du statut de travailleuse salariée au sens de l'art. 6 annexe I ALCP, en ce que celui-ci requiert l'exercice d'une activité lucrative réelle et effective.  
 
6.3.2. Dans la mesure où la recourante n'avait, à tout le moins depuis le 1er mars 2017, pas exercé d'activité réelle et effective, c'est également à juste titre que l'autorité précédente a considéré qu'elle avait dépassé le délai raisonnable de six mois (prolongeable d'une année au plus) prévu par l'art. 2 al. 1 Annexe I ALCP pour trouver un emploi, de sorte qu'elle ne pouvait également pas bénéficier d'un droit à séjourner en Suisse sur la base de cette disposition.  
 
6.3.3. On ne peut enfin que rejoindre les juges précédents lorsqu'ils retiennent que l'intéressée, dès lors qu'elle dépend de l'aide sociale de manière continue depuis le 1er mars 2017, ne remplit manifestement pas les conditions pour obtenir une autorisation de séjour pour les personnes n'exerçant pas une activité économique au sens de l'art. 24 annexe I ALCP. On relèvera d'ailleurs que la dette sociale de la recourante n'a jamais cessé d'augmenter, s'élevant déjà à 128'700 fr. au 27 juin 2020 pour atteindre près de 180'000 fr. au moment de l'arrêt attaqué, si bien que c'est vainement que l'intéressée prétend ne pas être totalement à la charge de l'Etat.  
 
6.3.4. Au surplus, on relèvera que la recourante, en ce qu'elle a atteint l'âge de 62 ans révolus en février 2021 et peut ainsi prétendre au versement anticipé d'une rente de vieillesse (cf. art. 40 al. 1 LAVS; RS 831.10), ne saurait toutefois en inférer un quelconque droit à demeurer en Suisse selon l'art. 4 annexe I ALCP en lien avec l'art. 2 par. 1 let. a du règlement (CEE) 1251/70, dès lors l'application de ces dispositions présuppose que le ressortissant communautaire puisse se prévaloir de la qualité de travailleur - et partant de l'exercice d'une activité lucrative réelle et effective - au moins durant les 12 derniers mois avant d'atteindre l'âge lui permettant de faire valoir des droits à une pension vieillesse (cf. ATF 146 II 145 consid. 3.2.12). Or, comme on l'a vu (cf. supra 6.3.1), tel n'est pas le cas en l'espèce.  
 
6.4. Dans ces conditions, c'est à juste titre que les juges précédents ont confirmé que la recourante ne pouvait déduire aucun droit de l'ALCP pour obtenir la prolongation de son autorisation de séjour.  
 
7.  
Pour le reste, c'est en vain que l'intéressée se prévaut de la durée de son séjour en Suisse pour prétendre à demeurer en Suisse. Une telle durée, inférieure à dix ans, n'est pas de nature à lui conférer un droit à l'octroi d'une autorisation de séjour en Suisse sous l'angle du droit au respect de la vie privée garanti par l'art. 8 CEDH (cf. ATF 144 I 266 consid. 3.9). Quant à la dépression, la pathologie respiratoire chronique et les problèmes digestifs dont elle souffre, rien n'indique que ceux-ci ne pourront pas être pris en charge de manière appropriée au Portugal, pays dont elle a la nationalité. Il n'apparaît pas plus qu'une réintégration dans ce pays, voire au Brésil, pays dans lesquels elle a vécu de nombreuses années et dont elle parle la langue, devrait être considérée comme insurmontable. 
 
8.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable, en application de la procédure de l'art. 109 LTF. Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires, qui seront toutefois fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).  
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, fixés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'Office cantonal de la population et des migrations du canton de Genève, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, et au Secrétariat d'Etat aux migrations. 
 
 
Lausanne, le 19 août 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : H. Rastorfer