Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_482/2023  
 
 
Arrêt du 31 octobre 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, présidente, Kiss et May Canellas. 
Greffier: M. O. Carruzzo. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
agissant par B.________ et C.________, 
recourante, 
 
contre  
 
D.________S.A., 
représenté par Me Loris Magistrini, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
contrat de bail, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 29 août 2023 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel (CACIV.2023.44). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 25 octobre 2012, D.________S.A. a remis à bail à l'association A.________ un local commercial situé au... à.... Le loyer mensuel convenu s'élevait à 1'400 fr. 
D'entente entre les parties, l'association précitée a continué à stocker du matériel, dès l'automne 2013, après l'échéance de la durée initiale prévue par le bail moyennant le versement du même loyer que celui payé précédemment. Aucun contrat écrit n'a été passé à cet effet. 
Dès le 15 septembre 2014, un local commercial situé au..., à..., a été loué par D.________S.A. Selon le président de l'association A.________, B.________, ledit local lui a été remis à bail en vertu d'un contrat passé oralement entre la société précitée et lui-même. D'après D.________S.A., le bail conclu en 2012 perdurait et seul l'objet de celui-ci avait été modifié, les autres termes du contrat demeurant inchangés. 
Le 17 décembre 2019, D.________S.A. a mis l'association A.________ en demeure de lui payer un montant de 57'337 fr. 20 dans un délai de 30 jours en l'informant que, faute de paiement dans ce délai des arriérés de loyers réclamés, le bail serait résilié. 
A.________ n'ayant pas obtempéré, son bail a été résilié le 27 janvier 2020 pour le 29 février 2020 au moyen de la formule ad hoc. 
 
B.  
 
B.a. Après une procédure de conciliation infructueuse, D.________S.A. a saisi le Tribunal civil du Littoral et du Val-de-Travers, en date du 26 octobre 2020, d'une demande dirigée contre A.________. Elle concluait notamment à la condamnation de la défenderesse à lui verser la somme de 55'180 fr. à titre d'arriérés de loyers, intérêts en sus, au prononcé de la mainlevée définitive des oppositions formées par l'association concernée aux commandements de payer qui lui avaient été notifiés, à l'expulsion de la défenderesse et à ce que celle-ci soit tenue de lui verser la somme mensuelle de 1'400 fr. dès le 1er mars 2020 et jusqu'à la libération des locaux, à titre d'indemnité pour occupation illicite. Dans ses écritures, la demanderesse a allégué qu'un bail avait été conclu en 2012 avec la défenderesse, que c'était elle qui avait reçu l'ensemble des factures mensuelles pour les loyers sans jamais rien trouver à y redire et que c'était toujours elle qui s'était acquittée du loyer, y compris après le mois de septembre 2014.  
La défenderesse, qui a agi tout au long de la procédure de première instance par le truchement de son président B.________ sans avoir recours aux services d'un mandataire professionnel, a conclu au rejet de la demande. Elle a soutenu qu'un nouveau contrat de bail avait été conclu en septembre 2014 pour un loyer mensuel de 400 fr., lors d'une discussion sans témoins, et que seul son président revêtait à titre personnel, la qualité de locataire. 
Après un double échange d'écritures et la tenue de plusieurs audiences, l'autorité de première instance a rendu une ordonnance de preuves complémentaire, intégrée au procès-verbal de l'audience du 3 novembre 2022, par laquelle elle a rejeté divers moyens de preuve produits par la défenderesse au cours de cette audience. En bref, elle a estimé que la défenderesse aurait pu et dû les produire plus tôt. 
Statuant par jugement du 28 avril 2023, le tribunal de première instance a fait entièrement droit à la demande. En substance, il a considéré que la défenderesse n'avait fourni aucun élément à l'appui de son allégation selon laquelle un bail aurait été conclu entre la demanderesse et B.________, à titre personnel. Il a souligné que c'était la défenderesse qui s'était toujours acquittée du paiement d'un loyer de 1'400 fr. Au demeurant, si B.________ avait, comme il le prétendait, la volonté de payer personnellement les loyers dus, il aurait logiquement dû verser les montants correspondants en utilisant son propre compte et non pas celui de la défenderesse. L'autorité de première instance a ainsi jugé que le bail conclu initialement pour une durée déterminée ne s'était pas terminé le 14 septembre 2014 mais avait été reconduit pour une durée indéterminée, l'objet du bail ne portant plus sur un local commercial sis au... mais sur un espace situé... à compter de ce moment-là. 
 
B.b. Le 5 juin 2023, la défenderesse a appelé de cette décision auprès de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.  
Par arrêt du 29 août 2023, la cour cantonale a rejeté l'appel dans la mesure de sa recevabilité. Les motifs qui étayent cette décision seront mentionnés plus loin dans la mesure utile à la compréhension de l'unique grief dont elle est la cible. 
 
C.  
Le 28 septembre 2023, A.________ (ci-après: la recourante) a formé un recours en matière civile à l'encontre de cet arrêt. Elle conclut, en substance, à la réforme de la décision entreprise en ce sens qu'elle ne doit pas verser la moindre somme à D.________S.A. (ci-après: l'intimée). 
Le Tribunal fédéral n'a pas requis le dépôt d'une réponse au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont satisfaites sur le principe. Demeure réservé l'examen, sous l'angle de sa motivation, de l'unique grief soulevé par la recourante. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
Le complètement de l'état de fait ne relève pas de l'arbitraire; un fait non constaté ne peut pas être arbitraire, c'est-à-dire constaté de manière insoutenable. En revanche, si un fait omis est juridiquement pertinent, le recourant peut obtenir qu'il soit constaté s'il démontre qu'en vertu des règles de la procédure civile, l'autorité précédente aurait objectivement pu en tenir compte et s'il désigne précisément les allégués et les offres de preuves qu'il lui avait présentés, avec référence aux pièces du dossier (art. 106 al. 2 LTF; ATF 140 III 86 consid. 2). 
 
2.2. Dans son mémoire de recours, l'intéressée expose sa propre version des circonstances factuelles de la cause en litige sans se limiter aux seuls éléments de fait constatés par les juges précédents et ne respecte nullement les exigences rappelées ci-dessus applicables en matière de critique de l'état de fait respectivement de complètement des faits. La Cour de céans n'en tiendra dès lors pas compte.  
 
3.  
Dans un unique moyen, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir enfreint l'art. 56 du Code de procédure civile suisse (CPC; RS 272), en jugeant que le magistrat de première instance n'avait pas enfreint son devoir d'interpellation. 
 
3.1. Selon l'art. 56 CPC, le tribunal interpelle les parties lorsque leurs actes ou déclarations sont peu clairs, contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets et leur donne l'occasion de les clarifier ou de les compléter. Le devoir d'interpellation du juge constitue une atténuation de la maxime des débats, selon laquelle les parties doivent en principe alléguer les faits constituant le cadre du procès. Le but de l'art. 56 CPC est ainsi d'éviter qu'une partie ne soit déchue de ses droits parce que ses allégués de fait et ses offres de preuves sont affectés de défauts manifestes (ATF 146 III 413 consid. 4.2 et les références citées). De jurisprudence constante, le devoir d'interpellation du juge ne doit pas servir à réparer des négligences procédurales (ATF 146 III 413 consid. 4.2 et les références citées). L'intervention du juge ne doit pas non plus avantager unilatéralement une partie et aboutir à une violation du principe de l'égalité des armes (ATF 146 III 413 consid. 4.2 et les références citées). L'interpellation est limitée par le cadre du procès; le juge ne doit ainsi pas rendre les parties attentives à des faits qu'elles n'ont pas pris en considération, ni les aider à mieux présenter leur cause, ni leur suggérer des arguments pertinents (ATF 146 III 413 consid. 4.2 et les références citées).  
L'interpellation par le tribunal au sens de l'art. 56 CPC ne joue aucun rôle lorsqu'une partie n'offre aucun moyen de preuve pour une allégation déterminante (arrêts 4A_145/2016 du 19 juillet 2016 consid. 4.2; 4A_444/2013 du 5 février 2014 consid. 6.3.3). 
 
3.2. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale relève que la recourante n'a pas démontré que l'exercice par le premier juge de son devoir d'interpellation aurait pu conduire à une issue plus favorable pour elle, raison pour laquelle on pourrait considérer que l'intéressée ne dispose d'aucun intérêt à soulever le grief tiré de la violation de l'art. 56 CPC. Elle juge de toute manière le moyen en question infondé. Elle relève que les allégations de la recourante présentaient des contradictions et que le juge de première instance a fait son possible pour obtenir des précisions de la part de l'intéressée lors de l'interrogatoire de son président. Elle observe que la partie demanderesse a produit des factures ainsi que des preuves de paiement et des échanges de courriers électroniques qui ne paraissaient pas laisser la place à beaucoup d'interprétation afin de démontrer que les rapports contractuels n'existaient qu'entre les parties à la présente procédure. De son côté, l'intimée a produit tardivement une série de pièces. La cour cantonale estime que le premier juge n'avait pas à suggérer à la recourante de produire ces pièces plus rapidement ou de requérir l'audition d'autres témoins. En agissant de la sorte, le magistrat aurait, en effet, outrepassé son devoir d'interpellation.  
 
3.3. A l'encontre de cette motivation, la recourante se borne à soutenir que la cour cantonale aurait méconnu le fait que ses représentants ne disposent d'aucune formation juridique. Elle se contente par ailleurs d'affirmer que l'autorité précédente aurait effectué une interprétation trop restrictive de l'art. 56 CPC, sans nullement en faire la démonstration. Pour le reste, elle fait valoir qu'elle aurait pu, si le juge avait respecté son devoir d'interpellation, produire plus rapidement les pièces qu'elle a déposées et qui ont été jugées irrecevables et proposer d'autres moyens de preuve. En raisonnant de la sorte, elle perd toutefois de vue que le devoir d'interpellation du juge n'impose pas à un tribunal d'aider une partie à produire des preuves ou à en requérir la production (arrêts 5A_344/2015 du 29 février 2016 consid. 7.5 5A_921/2014 du 11 mars 2015 consid. 3.4.2 et les références citées).  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 109 al. 2 let. a LTF
La recourante, qui succombe, supportera les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée n'a pas droit à des dépens, dès lors qu'elle n'a pas été invitée à répondre au recours. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 31 octobre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : O. Carruzzo