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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_468/2022  
 
 
Arrêt du 28 novembre 2023  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Maillard, Heine, Viscione et Métral. 
Greffière : Mme von Zwehl. 
 
Participants à la procédure 
Société anonyme A.________, 
représentée par 
Service d'assistance juridique et conseils (SAJEC) Fédération des Entreprises Romandes, Me David Ternande, 
recourante, 
 
contre  
 
Office cantonal de l'emploi du canton de Genève, Service juridique, 
rue des Gares 16, 1201 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-chômage (indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 9 juin 2022 (A/452/2021 ATAS/523/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. La société anonyme A.________ (ci-après: la société) exploitait l'hôtel cinq étoiles B.________ à Genève. Cet hôtel comprend 109 chambres, dont 22 suites, un restaurant, un service traiteur, un service de restauration en chambre, cinq salons séminaires et banquets, un Bar-Lounge ainsi qu'un Spa.  
 
A.b. Le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a qualifié la situation en Suisse en lien avec l'épidémie de coronavirus (COVID-19) de "situation extraordinaire" au sens de l'art. 7 de la loi fédérale du 28 septembre 2012 sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme (Loi sur les épidémies; LEp; RS 818.101) et a pris par voie d'ordonnance une série de mesures visant à protéger la population. En particulier, à partir de cette date, il a interdit toutes les manifestations publiques ou privées, décidé la fermeture des magasins, marchés, restaurants, bars, établissements de divertissements et de loisirs à l'exception notamment des magasins d'alimentation et des établissements de santé, établi un contrôlé renforcé aux frontières et interdit partiellement l'entrée sur le sol helvétique. Dès le 11 mai 2020, les magasins et les marchés ont pu rouvrir; s'agissant des règles en matière d'entrée et de séjour en Suisse, un assouplissement n'était envisagé par le Conseil fédéral que si l'évolution de la situation épidémiologique le permettait.  
 
A.c. En raison des mesures officielles prises, la société a déposé le 16 mars 2020 deux préavis de réduction de l'horaire du travail (RHT) concernant 119 employés sur un total de 147 à un taux de 80 %. Après avoir obtenu une décision favorable de l'Office cantonal de l'emploi (ci-après: l'OCE) pour la période du 16 mars au 31 mai 2020 (décision du 31 mars 2020 corrigée le 8 avril 2020), la société a présenté le 9 mai 2020 un nouveau préavis de RHT touchant 135 employés au même taux que précédemment pour la période du 1er juin au 31 décembre 2020.  
 
A.d. Par lettre du 28 mai 2020, la société a averti l'ensemble de son personnel qu'elle envisageait de procéder à un licenciement collectif à compter du mois de juillet 2020 touchant la quasi totalité des contrats de travail, soit approximativement 130 postes sur les 141 que comptait alors l'hôtel. En conséquence, elle ouvrait une période de consultation des travailleurs jusqu'au vendredi 12 juin 2020. Dans ce délai, les collaborateurs étaient invités à faire part de toutes les propositions ou idées qui pourraient améliorer la situation, éviter les congés ou en limiter le nombre, ainsi qu'en atténuer les conséquences. Les suggestions devaient être soumises par écrit. Les raisons invoquées étaient en substance les effets catastrophiques de la crise sanitaire du COVID-19 sur l'activité et le chiffre d'affaires de l'hôtel.  
L'OCE a été informé parallèlement de ce projet de licenciement collectif. 
 
A.e. Saisie par le syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (ci-après: SIT), la Chambre des relations collectives de travail de la République et canton de Genève, après avoir pris acte des difficultés économiques auxquelles l'hôtel se trouvait confronté en raison de la pandémie, a émis le 24 juin 2020 la recommandation de conclure un accord de réengagement du personnel licencié et de négocier rapidement tout autre élément susceptible d'améliorer la situation.  
 
A.f. La société a prolongé plusieurs fois le délai de consultation, fixant le terme de celle-ci au 1er juillet 2020. Afin de permettre aux collaborateurs d'élaborer d'éventuelles propositions, elle leur a communiqué des données chiffrées résumant la situation actuelle de l'établissement en comparaison à celle de l'année précédente ainsi que la confirmation de l'arrêt du projet de travaux dans l'enceinte de l'hôtel. A la demande du SIT, elle a également transmis un tableau anonymisé des données personnelles et salariales de tous les collaborateurs, tout en soulignant qu'elle estimait à 478'000 fr. par mois la masse salariale restant à sa charge si l'ensemble des employés éligibles au chômage partiel en bénéficiaient durant une éventuelle cessation complète des activités de l'hôtel.  
 
A.g. Dans un courrier du 8 juillet 2020 adressé au SIT, la société a passé en revue les propositions reçues et a procédé à un examen détaillé de leur viabilité. Après avoir exposé les raisons pour lesquelles elle estimait impossible de les mettre en place, elle a indiqué que le conseil d'administration, sur la base du constat qu'aucune solution ne pouvait être retenue pour éviter les licenciements de l'ensemble des employés ou en limiter l'impact, avait pris la décision difficile de fermer l'hôtel le 31 août 2020. Les licenciements interviendraient durant le mois de juillet 2020 et concerneraient 130 employés au total; les 11 employés restants étaient au bénéfice d'un contrat de durée déterminée ou avaient vu leur contrat résilié avant le début de la procédure de licenciement collectif; 8 employés, membres de la direction et cadres, dont la présence était nécessaire pour assurer le suivi de la résiliation des contrats du personnel et la fermeture de l'établissement, seraient licenciés dans un second temps.  
La société en a informé l'OCE par courrier du même jour. 
 
A.h. Le 28 août 2020, l'OCE a rendu une décision par laquelle il a refusé la demande d'indemnités en cas de RHT que la société avait déposée le 9 mai 2020. Celle-ci s'est opposée à cette décision en concluant au versement des prestations pour les mois de juin et juillet 2020. A la demande de l'OCE, elle a produit une attestation selon laquelle aucune assemblée générale n'avait eu lieu et que la décision de fermer l'hôtel avait été prise à la suite d'échanges par visioconférence entre le conseil d'administration et la direction de l'hôtel les 6 et 7 juillet 2020.  
Le 7 janvier 2021, l'OCE a écarté l'opposition et confirmé sa décision initiale. Il a considéré qu'au plus tard le 28 mai 2020, la société avait déjà pris la décision de fermer et de procéder à un licenciement collectif; même si la procédure de consultation était destinée à permettre aux employés de proposer d'autres solutions, cette procédure ne pouvait pas empêcher la fermeture d'un établissement décidée par un employeur. 
 
B.  
La société a déféré la décision sur opposition du 7 janvier 2021 devant la Chambre des assurances sociales de la Cour de Justice de la République et canton de Genève (ci-après: la cour cantonale). Elle a requis une comparution personnelle des parties et l'audition de témoins. 
La cour cantonale a tenu une audience le 28 avril 2022 au cours de laquelle elle a entendu les parties ainsi que trois témoins, à savoir C.________, D.________ et E.________, respectivement ancien membre du conseil d'administration, ancien directeur et ancienne responsable des ressources humaines de la société. 
Par arrêt du 9 juin 2022, la cour cantonale a rejeté le recours. 
 
C.  
La société interjette un recours en matière de droit public, en concluant à la réforme de l'arrêt cantonal dans le sens de la reconnaissance d'un droit à l'indemnité en cas de RHT pour la période allant du 1er juin au 31 juillet 2020. 
L'OCE conclut au rejet du recours. Le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est donc limité ni par les arguments de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
 
3.  
Est litigieux le point de savoir si la cour cantonale a violé le droit fédéral en confirmant le refus de l'intimé d'octroyer à la recourante des indemnités en cas de RHT pour la période du 1er juin au 31 juillet 2020. Plus particulièrement, la question soulevée par le présent litige a trait à la condition prévue par la lettre d de l'art. 31 al. 1 LACI (RS 837.0). 
 
4.  
 
4.1. Le droit à l'indemnité en cas de RHT ne peut être accordé que si la RHT est vraisemblablement temporaire et que l'on peut admettre qu'elle permettra de maintenir les emplois en question (art. 31 al. 1 let. d LACI). Le caractère temporaire de la RHT doit être admis s'il est prévisible, avec une certaine vraisemblance, que l'employeur pourra retrouver un plein emploi dans un délai raisonnable (THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2e éd. 2016, n° 472, p. 2407 s.). L'autorité examine cette condition en fonction de ce qu'elle est en mesure de connaître au moment où elle statue: l'examen est donc prospectif (BORIS RUBIN, Assurance-chômage et service public de l'emploi, éd. 2019, n° 618, p. 129 et note de bas de page 594; THOMAS NUSSBAUMER, ibid.). Elle doit présumer qu'une perte de travail sera vraisemblablement temporaire et que les emplois pourront être maintenus tant qu'il n'existe pas d'éléments concrets qui permettraient d'aboutir à une conclusion contraire (ATF 121 V 373 consid. 2a; 111 V 384 ss consid. 2b). A cet effet, il y a lieu de prendre en compte l'ensemble des circonstances, à savoir l'évolution conjoncturelle et l'évolution dans la branche concernée, la rentabilité et les liquidités de l'entreprise, le carnet de commande, la prospection de nouveaux clients, les sources de financement, la situation concurrentielle, etc. (BORIS RUBIN, op. cit., n° 619, p. 129).  
 
4.2. En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a émis des directives adressées aux organes d'exécution de l'assurance-chômage pour uniformiser leur pratique. En matière de RHT, le chiffre B23 du bulletin LACI RHT établi par le SECO prévoit ceci:  
 
"Lorsque des indices concrets laissent présumer que la RHT n'est qu'une étape préliminaire à une fermeture programmée de l'entreprise (ouverture de la faillite, liquidation concordataire), la condition du caractère temporaire de la perte de travail et du maintien des emplois n'est pas ou plus remplie. Lorsque la caisse de chômage apprend l'imminence de la fermeture d'une entreprise, elle doit suspendre le versement de l'indemnité, même si la RHT a été approuvée, et soumettre le cas à l'ACt [autorité cantonale]. Si l'examen approfondi révèle que la fermeture de l'entreprise n'a pas eu lieu et n'est pas davantage prévue, l'ACt est tenue d'avertir la caisse de chômage que la perte de travail est toujours à considérer comme provisoire. Si les autres conditions que la caisse de chômage doit vérifier sont remplies, cette dernière annule à nouveau la suspension des versements. Dans le cas contraire, la suspension des versements est maintenue. Pour pouvoir juger d'une fermeture prévisible de l'entreprise, il doit y avoir des indices évidents (par exemple procès-verbaux des séances du conseil d'administration ou décisions prises par la direction), sur la base desquels il est manifeste que l'entreprise a prévu de cesser ses activités. L'ACt doit annuler la décision jusqu'alors positive concernant l'indemnité en cas de RHT une fois que la fermeture de l'entreprise a été décidée (révision procédurale ou reconsidération). La restitution des indemnités en cas de RHT peut uniquement être demandée pour la période à partir de laquelle la décision positive a été annulée." 
 
4.3. Durant la pandémie de coronavirus, des mesures spécifiques ont été introduites dans le domaine de la RHT qui divergent partiellement des règles prévues dans la LACI et l'OACI. Elles ne sont toutefois pas en tant que telles déterminantes pour le présent litige, sauf à dire que le délai de préavis de 10 jours de l'art. 36 al. 1 LACI - auquel il avait été dérogé entre le 17 mars et le 31 mai 2020 (ordonnance COVID-19 assurance-chômage du 20 mars 2020 entrée en vigueur avec effet rétroactif au 17 mars 2020 [RS 837.033]) - s'appliquait à nouveau à partir du 1er juin 2020 (modification du 20 mai 2020 [RO 2020 1777]; voir également le chiffre 2.13 de la directive 2020/12 du SECO).  
 
5.  
Se référant à la procédure prévue au chiffre B23 du bulletin LACI RHT, la cour cantonale a considéré que si l'OCE avait immédiatement donné une suite favorable à la demande de RHT du 9 mai 2020, il aurait été fondé à suspendre le versement des prestations dès le 28 mai 2020 - date à laquelle la société lui avait communiqué son projet de procéder à un licenciement collectif -, et ensuite à rendre une décision de reconsidération annulant la précédente décision positive. Dans le cas d'espèce, l'OCE avait certes procédé autrement en différant la prise de décision par rapport à la demande d'indemnités présentée par la société jusqu'à droit connu sur la fermeture de l'entreprise. Selon la cour cantonale, ce faisant, l'OCE était toutefois parvenu au même résultat que ce que préconisait la directive précitée, à savoir prendre une décision en connaissance de cause de la fermeture de l'entreprise. Il était dès lors vain de tenter d'établir à quel moment exactement la société avait pris la décision de fermer l'hôtel. Par ailleurs, dès lors que l'OCE avait rendu sa décision le 28 août 2020, une appréciation prospective des circonstances ne se justifiait plus. 
 
6.  
La recourante invoque une violation de l'art. 31 al. 1 let. d LACI ainsi que de la jurisprudence du Tribunal fédéral en la matière. 
Elle fait valoir que la cour cantonale a totalement inversé la logique législative et jurisprudentielle en entérinant le procédé suivi par l'OCE consistant à attendre l'issue de la procédure de consultation et à rendre une décision "rétrospective" sur la base de circonstances "établies" et non pas "vraisemblables". Cela revenait à supprimer la condition de la vraisemblance du caractère temporaire de la RHT posée par l'art. 31 al. 1 let. d LACI et à admettre qu'une analyse rétrospective des circonstances était possible, ce qui était contraire à la jurisprudence et à la doctrine. Par ailleurs, la procédure d'examen des conditions légales par l'autorité cantonale était censée être menée rapidement. Or, la prise de décision était intervenue pratiquement quatre mois après le dépôt du préavis de RHT. La recourante critique également l'approche préconisée par le SECO dans ses directives, dont elle conteste la conformité avec le système légal, et relève que, selon un arrêt C 292/03 du 2 novembre 2004, la circonstance qu'un employeur envisage un licenciement collectif ne fait pas obstacle à la vraisemblance du caractère temporaire de la perte de travail. Au demeurant, le but de la consultation des travailleurs était également le maintien des emplois. 
Finalement, la recourante soutient qu'une analyse prospective des circonstances à prendre en considération au moment de sa demande de RHT aurait conduit à lui reconnaître un droit à l'indemnité. En effet, la rentabilité de la société était bonne: comme l'avait déclaré le témoin C.________, les résultats d'exploitation de l'année 2019 avaient été positifs et jugés satisfaisants par le propriétaire de l'hôtel. Malgré la situation liée à la crise sanitaire, les liquidités de la société étaient suffisantes; aucun salaire n'était resté impayé. Les réservations de chambre pour 2020 et 2021 s'étaient poursuivies jusqu'à l'annonce de la procédure de consultation en juillet 2020; les occupants louant des chambres à l'année étaient restés dans l'hôtel. Il n'existait donc aucun indice évident ou manifeste indiquant que l'hôtel allait cesser son activité dans le contexte de la pandémie avant que le conseil d'administration n'ait pris la décision définitive de fermer l'hôtel et de licencier son personnel le 7 juillet 2020. 
 
7.  
 
7.1. Selon le système mis en place par la loi, la procédure d'octroi de l'indemnité en cas de RHT comporte une première phase à l'issue de laquelle l'autorité cantonale compétente doit formellement statuer sur le principe de l'ouverture du droit à l'indemnité, soit en l'admettant, soit en la refusant (BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, éd. 2014, ad art. 36 al. 4 LACI n° 20 p. 376). C'est la procédure de préavis RHT et d'examen des conditions du droit de l'art. 36 LACI. L'obligation prévue pour l'employeur de soumettre un préavis pour obtenir l'indemnité en faveur de ses travailleurs doit permettre à l'autorité cantonale d'examiner si celui-ci a rendu plausible que les conditions dont dépend le droit à la prestation sont réunies, ce qu'il est tenu de justifier dans le préavis (cf. art. 36 al. 1 et al. 3 LACI); l'autorité cantonale peut exiger tous les documents utiles à cet effet par l'employeur, qui a une obligation de collaborer. A titre exceptionnel et en présence de doutes sérieux, l'autorité peut user de la possibilité de demander une analyse de l'entreprise (BORIS RUBIN, ibid., ad art. 31 al. 1bis LACI). En règle générale, la procédure se veut rapide pour que l'employeur puisse en connaître l'issue avant le début de la RHT et prendre ses dispositions en cas de décision défavorable (ATF 110 V 334 consid. d). L'autorité cantonale doit en principe rendre sa décision à l'intérieur du délai de préavis de l'art. 36 al. 1 LACI (THOMAS NUSSBAUMER, op. cit., no 514, p. 2420). Lorsqu'elle s'oppose au versement de l'indemnité, dans chaque cas, elle en informe l'employeur et la caisse que celui-ci a désignée (cf. art. 36 al. 4 LACI).  
Compte tenu de ce qui précède, il n'est pas discutable que la manière de procéder de l'intimé n'est pas conforme au système de la loi et que celui-ci aurait dû statuer avant le 1er juin 2020 en fonction des circonstances qu'il était en mesure de connaître à ce moment-là (voir consid. 4.1 supra). Contrairement au raisonnement de la cour cantonale, on ne saurait pas non plus considérer que la procédure légale est respectée en appliquant par substitution de motifs le procédé prévu par le chiffre B23 du bulletin LACI RHT. En effet, celui-ci se rapporte à la situation où l'autorité cantonale a déjà approuvé le principe du droit à l'indemnité RHT et où la caisse de chômage apprend l'imminence d'une fermeture d'entreprise en cours de versement de la prestation, ce qui ne correspond pas à l'état de fait retenu par la cour cantonale. Pour juger du droit à l'indemnité en cause, il faut bien plutôt se placer au moment où l'intimé aurait dû rendre sa décision, soit juste avant le début de la période de RHT annoncée dans le préavis (soit au plus tard le 31 mai 2020), l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 let. d LACI devant se faire en tenant compte de toutes les circonstances existant au moment pertinent et sur la base d'une analyse prospective de la situation. 
 
7.2.  
 
7.2.1. Il est constant que le 28 mai 2020, la recourante a annoncé qu'elle envisageait de procéder à un licenciement collectif touchant la quasi-totalité de son personnel et qu'elle ouvrait une procédure de consultation des travailleurs prévue par l'art. 335f CO. Ce fait étant à prendre en considération, il convient donc d'examiner si, compte tenu du licenciement collectif projeté et de la situation dans laquelle se trouvait alors la recourante, la condition du caractère temporaire de la RHT et du maintien des rapports de travail était ou non encore vraisemblable à partir du 1er juin 2020. On complétera sur ce point, en application de l'art. 105 al. 2 LTF, les constatations manifestement incomplètes de la cour cantonale (voir consid. 7.2.3 ci-après).  
 
7.2.2. L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif (cf. art. 335d CO) est tenu de consulter la représentation des travailleurs ou, à défaut, les travailleurs (art. 335f al. 1 CO). L'obligation d'entamer la procédure de consultation ne naît pas déjà quand l'employeur songe de loin à l'éventualité d'un licenciement collectif; elle existe dès que l'employeur envisage concrètement une telle mesure (CHRISTIAN BRUCHEZ/GIUSEPPE DONATIELLO/JEAN CHRISTOPHE SCHWAAB, in: Commentaire du droit du travail, éd. 2022, ad art. 335f CO, n° 10, p. 830). Le but de la consultation des travailleurs, qui est de droit relativement impératif, est de rechercher un accord avec les travailleurs en vue d'éviter tout ou partie du licenciement collectif ou d'en atténuer les conséquences (RÉMY WYLER/BORIS HEINZER, Droit du travail, 4e éd. 2019, p. 678). Elle doit donc avoir lieu avant que l'employeur ne prenne la décision définitive de procéder au licenciement collectif (ATF 137 III 27 consid. 4.3; 123 III 176 consid. 4a). La collaboration entre employeur et représentation des travailleurs doit respecter les règles de la bonne foi, ce qui implique que l'employeur examine les propositions formulées par les travailleurs, même s'il n'a pas l'obligation d'en tenir compte; il ne peut se contenter de mettre en oeuvre la procédure, tout en sachant d'emblée qu'il n'entrera en matière sur aucune des propositions qui pourraient lui être faites (RÉMY WYLER/BORIS HEINZER, op. cit., p. 679).  
 
7.2.3. En l'occurrence, bien que la cour cantonale ait estimé vain d'établir à quel moment la décision de fermeture de l'hôtel et de licenciement collectif avait été prise, le dossier ne contient aucun élément laissant à penser que la recourante aurait procédé à une consultation purement formelle de son personnel. Pour autant, dans la situation de crise sanitaire et de ses effets sur la marche des affaires de l'hôtel telle que la direction de l'hôtel l'avait elle-même évaluée à l'époque et qui l'a conduite à envisager la fermeture de l'hôtel, on peut difficilement admettre comme vraisemblable que les emplois menacés pouvaient être maintenus. La probabilité que la recourante eût renoncé en tout ou en partie aux licenciements projetés à l'issue de la procédure de consultation apparaît notablement plus faible que l'hypothèse contraire, même si cela n'était pas exclu. En effet, comme cela ressort de sa lettre du 28 mai 2020 annonçant la mesure, le taux de vacance de l'hôtel approchait 90 % et la chute du chiffre d'affaires était telle que les coûts supportés par l'établissement dépassaient ses revenus pour une durée indéterminée nonobstant les mesures déjà mises en place (RHT); les salaires, maintenus à 100 % au mois de mars 2020, ne pouvaient plus l'être à partir d'avril 2020. Mais surtout, aux yeux de la direction, les perspectives de reprise d'activité avaient été jugées quasiment nulles à court et moyen terme en raison de la fermeture des frontières et des difficultés rencontrées par les compagnies aériennes qui empêchaient la venue de la clientèle de l'hôtel. Quoi qu'en dise la recourante, en dépit d'une année 2019 satisfaisante et des liquidités encore existantes, les éléments précités constituent des indices suffisants pour conclure que dans le contexte de la pandémie et des incertitudes qui en résultaient, la décision de fermer l'hôtel se verrait vraisemblablement confirmée. A cet égard, le cas de la recourante n'est pas du tout comparable à celui qui a donné lieu à l'arrêt C 292/03.  
Il y a lieu dès lors de constater que les conditions de l'art. 31 al. 1 let. d LACI n'étaient plus remplies à partir du 1er juin 2020, de sorte que l'arrêt attaqué peut être confirmé dans son résultat. 
 
8.  
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais de justice, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève et au Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO). 
 
 
Lucerne, le 28 novembre 2023 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : von Zwehl