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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1199/2023  
 
 
Arrêt du 18 mars 2024  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys et von Felten. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représenté par Me Benjamin Grumbach, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
intimé. 
 
Objet 
Expulsion (art. 66a bis CP), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice 
de la République et canton de Genève, 
Chambre pénale d'appel et de révision, 
du 23 août 2023 (P/8503/2018 AARP/311/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 14 novembre 2022, le Tribunal de police du canton de Genève a reconnu A.A.________ coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 2 al. 2 et 3 CP), de contrainte (art. 181 CP), de menaces (art. 180 al. 1 et 2 let. a CP), de violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 al. 1 CP), de violations de domicile (art. 186 CP), d'insoumission à une décision de l'autorité (art. 292 CP) et de violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 al. 1 CP) et l'a condamné à une peine privative de liberté de huit mois, sous déduction de la détention avant jugement, peine assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de 1'000 francs. Le Tribunal de police a ordonné le maintien des mesures de substitution ordonnées le 11 juin 2021 par le Tribunal des mesures de contrainte jusqu'à l'entrée en force de son jugement et a condamné A.A.________ à payer, à titre de réparation du tort moral, 1'000 fr., avec intérêts à 5 % dès le 8 mars 2018, à B.________, 5'000 fr., avec intérêts à 5 % dès le 8 mars 2018, à C.A.________, 4'000 fr. avec intérêts à 5 % dès le 8 mars 2018, à D.A.________ et 3'000 fr., avec intérêts à 5 % des le 8 mars 2018, à E.A.________. 
 
B.  
Statuant par arrêt du 23 août 2023 sur les appels de A.A.________ et du ministère public, ainsi que sur l'appel joint de B.________, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice du canton de Genève a partiellement admis l'appel du ministère public ainsi que l'appel joint de B.________, et rejeté pour l'essentiel l'appel de A.A.________. Elle a réformé le jugement de première instance en ce sens que A.A.________ a été déclaré coupable de lésions corporelles simples, de contrainte, de tentative de contrainte, de menaces, de tentative de violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, de violations de domicile, d'insoumission à une décision de l'autorité et de violation du devoir d'assistance ou d'éducation et condamné à une peine privative de liberté de deux ans, avec sursis et délai d'épreuve de cinq ans, ainsi qu'à une amende de 1'000 francs. Elle a ordonné l'expulsion de Suisse de A.A.________ pour une durée de trois ans ainsi que le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) et a levé les mesures de substitution ordonnées le 11 juin 2021 avec effet immédiat. Les condamnations du recourant en paiement d'indemnités à titre de réparation du tort moral en faveur des parties plaignantes sont demeurées inchangées. Enfin, elle a statué sur les frais et dépens. 
En bref, il en ressort les faits suivants. 
 
B.a. A.A.________, né en 1984, est ressortissant bosnien, détenteur d'une autorisation d'établissement. Il est arrivé en Suisse en 2006 au moment de son mariage avec B.________ en 2006. Trois enfants, C.A.________, née en 2007, D.A.________, née en 2009 et E.A.________, né en 2013, sont issus de leur union. Leur divorce a été prononcé le 17 août 2021. A.A.________ a eu deux enfants, nés respectivement en 2019 et en 2020, avec sa nouvelle compagne avec laquelle il n'est pas marié. Ses deux plus jeunes enfants vivent avec leur mère en Bosnie Herzégovine. Il se dit titulaire d'un diplôme d'électricien. Il travaille en Suisse depuis 15 ans (au moment du jugement de première instance) et est actuellement employé en qualité de nettoyeur à F.________ depuis 2012.  
 
B.b. Le 8 mars 2018, au domicile familial, A.A.________ a saisi par les cheveux sa fille D.A.________ et l'a fait tomber au sol avant de la frapper avec le câble du chargeur du téléphone portable, au prétexte que cette dernière ne voulait pas lire le Coran. Il lui a occasionné les blessures suivantes: une lésion érythémateuse en région para-vertébrale de 3 cm de diamètre, deux lésions de griffures de 3 cm chacune, un hématome de 4 cm de diamètre au niveau du genou droit, un hématome circulaire de 1 cm de diamètre au niveau de la cuisse droite.  
Dans les mêmes circonstances, il a asséné un coup au visage de son épouse, B.________, alors que cette dernière s'était interposée entre lui et leur fille D.A.________. Il a occasionné à son épouse un fort saignement de la bouche, ainsi qu'un hématome de 2 cm de diamètre au niveau du côté droit des lèvres supérieure et inférieure. 
 
B.c. Depuis une date indéterminée en 2010, jusqu'au mois de septembre 2018, A.A.________ a cherché à restreindre la liberté d'action de son épouse, B.________, en confisquant son téléphone portable, en contrôlant ses communications, ses déplacements et ses relations, ainsi qu'en tentant de limiter les contacts avec sa famille.  
 
B.d. En septembre 2018, à la sortie des locaux du Service de protection des mineurs (SPMi), après le placement en foyer de leurs enfants le 13 septembre 2018, A.A.________ a menacé son épouse, B.________, de la jeter par la fenêtre si elle retournait dans l'appartement familial, l'effrayant de la sorte.  
 
B.e. Le 21 septembre 2020, lors d'un entretien téléphonique avec l'intervenante en protection de l'enfant au SPMi, A.A.________ a menacé de venir mettre une bombe au foyer de ses enfants si on ne lui permettait pas de voir ces derniers ce week-end-là, alors que ce n'était pas prévu.  
 
B.f. Le 8 mars 2018, au domicile familial, A.A.________ a contraint son épouse B.________ à se rendre dans la chambre à coucher avec leurs trois enfants, en menaçant B.________ de recevoir d'autres coups si elle n'obéissait pas.  
 
B.g. Les 17 février, 12 et 17 mars 2021, A.A.________ a pénétré sans droit dans les locaux du foyer où ses enfants étaient placés, alors qu'il savait qu'il lui était interdit d'y pénétrer et que, par décision du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE) du 8 mars 2021, il lui avait été fait interdiction, sous la menace de l'art. 292 CP, d'approcher ses enfants à moins de 200 mètres.  
 
B.h. Les 17 avril et 16 mai 2021, A.A.________ s'est rendu au domicile de son ex-épouse où se trouvaient leurs trois enfants, violant ainsi la décision susmentionnée.  
 
B.i. Depuis une date indéterminée, jusqu'au mois de mai 2021, A.A.________ a adopté un comportement propre à mettre en danger le développement psychique de ses trois enfants, C.A.________, D.A.________ et E.A.________, étant précisé qu'en raison de ce comportement, C.A.________, D.A.________ et E.A.________ ont souffert d'un fort conflit de loyauté. C.A.________ a souffert de troubles émotionnels de l'enfance, d'angoisses dépressives d'abandon et de perte, avec un fond d'anxiété anticipatoire. D.A.________ a présenté des troubles mixtes des conduites et des émotions, un vécu traumatique avec des images parentales déficitaires, des angoisses d'abandon et de perte ainsi qu'une anxiété de fond. Enfin, E.A.________ a souffert de troubles émotionnels de l'enfance, de troubles réactionnels de l'attachement de l'enfance et d'une perturbation émotionnelle avec une agitation psychomotrice importante.  
 
C.  
A.A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut principalement à la réforme de l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 23 août 2023 "en tant qu'il ordonne l'expulsion de Monsieur A.A.________ de Suisse", subsidiairement à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire ainsi que l'octroi de l'effet suspensif. 
 
D.  
Par courrier du 12 octobre 2023, la Présidente de la I re Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a informé A.A.________ que sa demande d'effet suspensif était sans objet, dès lors que le recours en matière pénale contre un prononcé d'expulsion déploie de lege un tel effet (cf. art. 103 al. 2 let. b LTF par analogie).  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant conclut à la réforme de l'arrêt entrepris "en tant qu'il ordonne l'expulsion de Monsieur A.A.________ de Suisse". En cela, il ne fait que répéter le dispositif dudit arrêt sans indiquer comment il devrait être modifié. Il ne prend pas, dans cette mesure, de conclusions réformatoires. Or il y a lieu de rappeler que des conclusions purement cassatoires ne sont en principe pas suffisantes dans le cadre d'un recours en matière pénale au Tribunal fédéral (art. 107 al. 2 LTF). On comprend néanmoins, à la lecture du mémoire de recours, que le recourant demande qu'il soit renoncé à ordonner son expulsion de Suisse. Il sied en conséquence de ne pas se montrer trop formaliste et d'entrer en matière sur le recours (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3; arrêt 2C_284/2016 du 20 janvier 2017 consid. 1.3, non publié in ATF 143 II 57; cf. aussi arrêts 6B_1313/2023 du 4 décembre 2023 consid. 3; 6B_507/2021 du 1er septembre 2021 consid. 1). 
 
2.  
Le recourant conteste la décision d'expulsion ordonnée sur le fondement de l'art. 66a bis CP
 
2.1. Aux termes de l'art. 66a bis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à quinze ans si, pour un crime ou un délit non visé à l'art. 66a CP, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l'objet d'une mesure au sens des art. 59 à 61 ou 64 CP.  
L'expulsion facultative prévue à l'art. 66a bis CP n'est pas conditionnée à une peine de durée minimale, le législateur ayant souhaité permettre au juge d'ordonner des expulsions en raison d'infractions de moindre gravité, en particulier pour les cas de délits - par exemple le vol - répétés ou de "tourisme criminel" (arrêts 6B_325/2022 du 22 mai 2023 consid. 1.1; 6B_1398/2022 du 12 mai 2023 consid. 3.1; 6B_693/2020 du 18 janvier 2021 consid. 7.1.1 et les arrêts cités). 
Comme toute décision étatique, le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité, ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst. Il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse. Une telle pesée des intérêts répond également aux exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH concernant les ingérences dans la vie privée et familiale (arrêts 6B_325/2022 précité consid. 1.1; 6B_1398/2022 précité consid. 3.1; 6B_1005/2020 du 22 décembre 2020 consid. 1.1 et les arrêts cités). L'examen de la proportionnalité suppose une prise en compte de la nature et de la gravité de la faute, du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, du comportement de l'auteur durant cette période, de la durée de son séjour en Suisse, de la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination et du préjudice que l'intéressé et sa famille auraient à subir du fait de la mesure (cf. ATF 139 I 16 consid. 2.2.1 p. 19; 135 II 377 consid. 4.3 p. 381; arrêts 6B_325/2022 précité consid. 1.1; 6B_1005/2020 précité consid. 1.1). 
Par ailleurs, un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 144 II 1 consid. 6.1; 139 I 330 consid. 2.1 et les références citées). Les relations familiales visées par l'art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (cf. ATF 144 II 1 consid. 6.1; 135 I 143 consid. 1.3.2; arrêts 6B_1029/2023 du 22 février 2024 consid. 4.3; 6B_1162/2023 du 20 décembre 2023 consid. 1.3; 6B_122/2023 du 27 avril 2023 consid. 1.1.3). En l'absence de ménage commun avec son enfant et de relations personnelles entretenues de manière régulière, la seule présence en Suisse de l'enfant du condamné ne permet en principe pas de considérer qu'il existe une atteinte à la vie familiale au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH et, par conséquent, que son expulsion l'expose à une situation personnelle grave (arrêts 6B_1029/2023 précité consid. 4.3; 6B_1162/2023 précité consid. 1.3; 6B_1187/2022 du 23 août 2023 consid. 1.4). 
Il convient également de tenir compte de l'intérêt fondamental de l'enfant (art. 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 [CDE; RS 0.107]) à pouvoir grandir en jouissant d'un contact étroit avec ses deux parents (ATF 144 I 91 consid. 5.2 et les références), étant précisé que, sous l'angle du droit des étrangers, cet élément n'est pas prépondérant par rapport aux autres et que l'art. 3 CDE ne saurait fonder une prétention directe à l'octroi ou au maintien d'une autorisation (ATF 144 I 91 consid. 5.2; 140 I 145 consid. 3.2; arrêts 2C_484/2023 du 23 janvier 2024 consid. 2; 6B_1461/2022 du 22 mars 2023 consid. 1.4.2). 
Enfin, la jurisprudence rendue en droit des étrangers retient que la révocation de l'autorisation d'établissement d'un étranger qui séjourne depuis longtemps en Suisse doit se faire avec une retenue particulière, mais n'est pas exclue en cas d'infractions graves ou répétées, même en présence d'un étranger né en Suisse et qui y a passé l'entier de sa vie. On tiendra alors particulièrement compte de l'intensité des liens de l'étranger avec la Suisse et des difficultés de réintégration dans son pays d'origine (ATF 144 IV 332 consid. 3.3.3; arrêts 6B_325/2022 précité consid. 1.1; 6B_1005/2020 précité consid. 1.1). 
 
2.2. La cour cantonale a considéré qu'il existait un intérêt public important à l'expulsion du recourant, compte tenu de la peine prononcée, des atteintes répétées à des biens juridiques particulièrement importants et de la nature des infractions.  
L'autorité précédente a relevé que l'intérêt privé du recourant était également important. Il vivait en Suisse depuis plus de 15 ans et ses trois premiers enfants vivaient également dans ce pays, dont ils détenaient la nationalité par leur mère. Le recourant jouissait d'un emploi qui lui permettait de subvenir à ses propres besoins et à ceux de sa nouvelle famille vivant en Bosnie; il ne contribuait toutefois plus à l'entretien de ses trois aînés depuis la naissance d'un premier enfant en Bosnie. S'il vivait en Suisse depuis plus de dix ans, son intégration ne pouvait être considérée comme complète dans la mesure où il ne parlait toujours que très imparfaitement le français et avait eu besoin de recourir aux services d'un interprète tout au long de la procédure. Il n'avait pas non plus établi de liens particuliers avec la Suisse en dehors de son cercle professionnel et familial. 
La cour cantonale a souligné que le recourant avait exprimé à plusieurs reprises le souhait de retourner vivre en Bosnie. Quand bien même son divorce avait été prononcé, ce qui lui permettrait de se prévaloir du regroupement familial pour faire venir sa nouvelle famille en Suisse, celle-ci vivait toujours dans ce pays où il lui rendait visite chaque mois. Enfin, s'il n'avait pas été dépendant de l'assistance sociale, il ne subvenait néanmoins pas aux besoins de sa famille, puisque son ancienne épouse pourvoyait seule (par le truchement de prestations de l'AI dont elle était bénéficiaire) à l'entretien de leurs trois enfants. On ne pouvait dès lors pas parler d'une indépendance financière complète. De surcroît, le recourant avait été condamné pour des infractions commises au détriment de ses trois premiers enfants de façon répétée et ne disposait que d'un droit de visite limité avec eux. Son rôle de figure paternelle était compromis par les infractions commises et la longue séparation qui s'en était suivie. Dans ces conditions, il n'était pas habilité à se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour rester en Suisse. Les liens du recourant avec la Bosnie, où vivent ses deux derniers enfants et sa nouvelle compagne, étaient ainsi tout aussi voire plus forts et entraient en concurrence avec ses liens en Suisse. Il y disposait d'un logement et de la possibilité d'y exercer une activité lucrative aux côtés de son père. Son intérêt à rester en Suisse semblait bien plus lié aux possibilités d'y réaliser un revenu plus confortable, comme il l'avait expliqué en déclarant sans vergogne vouloir "profiter du chômage". 
Ainsi, la cour cantonale a estimé que si la relation avec trois de ses cinq enfants et les perspectives professionnelles du recourant en Suisse constituaient certes un intérêt privé au maintien de son droit de séjour en Suisse, cet intérêt devait être relativisé au vu de ses liens forts avec son pays d'origine et, surtout, il n'était pas prépondérant par rapport à l'intérêt public qui commandait de prononcer son expulsion. 
La cour cantonale a encore indiqué que les filles du recourant avaient exprimé, par la voix de leur curateur, leurs objections au prononcé de cette mesure. Elle a cependant considéré que celles-ci étaient soumises à un important conflit de loyauté et que, compte tenu de leur âge, elles pouvaient, comme leur frère, maintenir les liens avec leur père par les moyens de communication modernes. Leurs objections n'étaient ainsi pas de nature à faire obstacle au prononcé de l'expulsion mais il en était tenu compte dans la fixation de la durée de l'expulsion, arrêtée au minimum légal de trois ans (arrêt entrepris, consid. 4.4 pp. 29-31). 
 
2.3. Le recourant conteste que l'intérêt public à son expulsion puisse être qualifié d'important. En effet, en assortissant sa peine d'un sursis complet, la cour cantonale avait reconnu qu'il ne représentait pas de danger pour la sécurité publique. De surcroît, son casier judiciaire était vierge. Il était ainsi disproportionné d'expulser un délinquant primaire alors que le risque de récidive était très faible.  
S'il est vrai que le recourant n'avait encore jamais fait l'objet d'une condamnation pénale, il demeure qu'il a été reconnu coupable, dans la présente procédure, d'atteintes répétées à l'intégrité physique et psychique de son ex-épouse et de leurs enfants commises pendant plusieurs années. Plus précisément, il ressort de l'arrêt entrepris que les violations répétées du devoir d'assistance et d'éducation (notamment manque de soins médicaux et exposition à des actes de violence) se sont étendues sur trois ans. Les conséquences sur le développement des enfants ont été particulièrement graves puisqu'ils ont dû être placés pendant plus de trois ans et présentent tous les trois différents troubles. Le recourant n'a eu de cesse de répéter ses comportements en dépit des injonctions et mises en garde de nombreux intervenants. En ce qui concerne son ex-épouse, la période pénale s'étend de 2010 à septembre 2018. Le recourant a ainsi démontré s'être profondément ancré dans un comportement de contrôle et de maltraitance à l'égard de ses proches. 
Par ailleurs, selon les constatations cantonales qui lient le Tribunal fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF), le recourant a fait montre d'une absence totale de prise de conscience. Il a ainsi rejeté l'essentiel de la faute sur ses enfants, son ex-épouse et les différents intervenants. Son déni ressort encore du dernier rapport de thérapie, étant souligné qu'il refuse d'investir la mesure de soin ordonnée par le Tribunal des mesures de contrainte, ainsi que de son attitude lors des débats d'appel. 
La cour cantonale a constaté que le bénéfice du sursis était acquis au recourant dans la mesure où le prononcé en ce sens du premier juge n'avait pas été remis en cause dans l'appel joint du ministère public (arrêt entrepris, consid. 3.6 p. 26). Celui-ci a toutefois conclu à ce que le délai d'épreuve, fixé pour une durée de deux ans par le premier juge, soit porté à cinq ans, soit le délai maximal prévu par la loi, ce que la cour cantonale a estimé justifié, compte tenu en particulier du jeune âge des enfants du recourant. Dans ce contexte, il est faux d'affirmer, comme le fait ce dernier, que la cour cantonale a retenu une absence de pronostic défavorable dans l'examen de l'octroi du sursis, l'autorité d'appel n'ayant en réalité pas été amenée à se prononcer sur ce point. L'augmentation de la durée du délai d'épreuve témoigne en revanche des inquiétudes nourries par la cour cantonale en ce qui concerne le comportement futur du recourant. Elle a également choisi de sanctionner l'ensemble des infractions commises par une peine privative de liberté, considérant que le prononcé d'une peine pécuniaire n'était pas de nature à le dissuader de commettre de nouvelles infractions. 
Ainsi, au regard de la nature et de la gravité des infractions retenues, lesquelles se sont inscrites dans la durée et ont notamment gravement porté préjudice au développement de trois enfants, conjuguées à l'absence complète de prise de conscience du recourant, qui rejette la faute sur autrui et n'est pas preneur de la thérapie ordonnée à titre de mesure de substitution, il était justifié de retenir que l'intérêt public à l'éloignement du prénommé était important. 
 
3.  
 
3.1. Sous l'angle de son intérêt privé à demeurer en Suisse, le recourant rappelle les éléments relatifs à sa situation dans ce pays, soit qu'il est détenteur d'une autorisation d'établissement, réside en Suisse depuis 17 ans, y travaille depuis près de 16 ans et n'a jamais dépendu de l'aide sociale. Il souligne que ses trois premiers enfants résident en Suisse, pays dont ils ont la nationalité, et que, plus largement, son centre de vie se trouve sur le territoire helvétique. Enfin, ses filles avaient exprimé leurs objections au prononcé d'une mesure d'expulsion à l'encontre de leur père. La mesure violait dès lors les art. 5 al. 2 et 36 Cst., ainsi que les art. 8 CEDH et 3 CDE.  
 
3.2. Le recourant n'expose pas en quoi la cour cantonale, qui a tenu compte de ces éléments dans son appréciation du principe de la proportionnalité, aurait accordé un poids insuffisant à ceux-ci, et tel n'apparaît pas être le cas. Il ne remet pas davantage en cause les constatations factuelles de la cour cantonale dont il ressort que la nouvelle compagne du recourant et ses deux plus jeunes enfants vivent en Bosnie Herzégovine, qu'il y dispose d'un logement ainsi que de la possibilité d'y exercer une activité lucrative aux côtés de son père, et qu'il a lui-même envisagé de retourner s'établir dans son pays d'origine. Ces éléments tendent à relativiser considérablement son intérêt à rester en Suisse.  
Le recourant se contente par ailleurs d'invoquer la garantie de l'art. 8 CEDH mais ne motive nullement l'application de cette disposition au cas d'espèce. Il n'élève en particulier aucune critique à l'encontre de l'arrêt attaqué dont il ressort qu'il n'est pas fondé à se prévaloir de l'art. 8 CEDH dans la mesure où il ne dispose pas d'un droit de garde sur ses enfants, mais uniquement d'un droit de visite limité. Son grief est dès lors insuffisamment motivé, partant irrecevable (cf. art. 106 al. 2 LTF). Pour le surplus, comme l'a relevé à juste titre la cour cantonale et contrairement aux dénégations du recourant, celui-ci pourrait continuer à entretenir des relations personnelles avec ses enfants par les moyens de communication modernes et par des visites et/ou vacances hors de Suisse. Enfin, la cour cantonale a tenu compte de la présence de trois des cinq enfants du recourant en Suisse en fixant la durée de l'expulsion au minimum légal de trois ans, étant au demeurant rappelé que l'art. 3 CDE ne confère pas un droit de présence sur le territoire. 
En définitive, les considérations cantonales quant au prononcé de l'expulsion ne sont pas critiquables et il peut y être entièrement renvoyé. 
Compte tenu de ce qui précède, les intérêts publics à l'expulsion l'emportent sur l'intérêt privé de l'intéressé à demeurer en Suisse. Le recourant ne remet pas en cause la durée de l'expulsion, ni l'inscription de celle-ci dans le SIS, points qu'il n'y a dès lors pas lieu d'examiner plus avant. Partant, l'autorité précédente n'a pas méconnu l'art. 66a bis CP, ni violé le principe de la proportionnalité en prononçant l'expulsion du recourant pour la durée minimale prévue par la loi, soit trois ans. 
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 18 mars 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Musy