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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_859/2022  
 
 
Arrêt du 20 septembre 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, 
Hänni, Hartmann et Ryter. 
Greffier : M. Wiedler. 
 
Participants à la procédure 
Société suisse de radiodiffusion et télévision SRG SSR idée suisse, 
Service juridique, Giacomettistrasse 1, 3000 Berne 31, représentée par Me Jamil Soussi, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
A.A.________ et B.A.________, 
intimés. 
 
Objet 
Emission télévisée "Mise au Point" du 14 novembre 2021, reportage intitulé "La haine 
avant la votation sur la loi Covid", 
 
recours contre la décision b.915 de l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière 
de radio-télévision du 23 juin 2022. 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 14 novembre 2021, la RTS a diffusé dans le cadre de l'émission "Mise au Point" un reportage intitulé "La haine avant la votation sur la loi Covid" (ci-après: le reportage). D'une durée de 13 minutes et 47 secondes, il a abordé la problématique de la dégradation du climat politique dans le cadre de la campagne de votation sur la loi Covid et des attaques virulentes subies par les politiciens protagonistes de cette campagne. En substance, il en ressort ce qui suit. 
Dans l'introduction du reportage, le présentateur annonce: "Encore deux semaines avant la votation sur la loi Covid et la campagne a déjà atteint un niveau d'agressivité inédit. Le principe du pass sanitaire est très controversé et les protagonistes de cette campagne se retrouvent assaillis de messages de haines, parfois de menaces [...]". 
Puis, la voix off de la journaliste en charge du reportage indique: "Ils l'ont rebaptisée place de la liberté. La Suisse centrale a débarqué à Fribourg pour une nouvelle manifestation. Les opposants à la loi Covid mènent campagne. Et ce samedi-là ils espèrent un maximum de monde pour fustiger la gestion de la pandémie par les autorités". 
C.________ du "Réseau choix vaccinal" prend la parole: "Le climat est extrêmement tendu, on a les militants sur le terrain en train de mettre des bâches, mettre des panneaux qui se font insulter. C'est vrai qu'on est assez inquiets par rapport à ce climat qui pour nous découle vraiment de ce durcissement, de ces mesures qui incitent les gens à la haine, à la violence, à la délation." D.________, conseillère communale à U.________, introduite dans le reportage comme une fervente opposante au pass sanitaire, soutient: "Le citoyen qui n'est pas content de ce qu'il se passe qui se sent vraiment opprimé, il va peut-être aller insulter un politicien ou une certaine prise de position, mais il y a la même chose à l'inverse, et là c'est beaucoup plus professionnalisé". La voix off ajoute que "dans un camp comme dans l'autre, l'impression de vivre quelque chose d'inédit en Suisse". 
La parole est également donnée à E.________, ministre valaisan de la santé, qui a reçu des menaces graves suite à sa participation à un débat de l'émission "Infrarouge": "Oui des menaces de mort. On n'est vraiment pas habitués à ça en Suisse [...]. Ça dépasse tout, ça n'a pas sa place dans notre pays [...]". La voix off précise que "la sécurité activée pour E.________ implique une surveillance dorénavant plus accrue lors de ses déplacements [...]". La voix off poursuit en indiquant qu'à Fribourg, la police a sécurisé le bureau et le domicile de la conseillère d'Etat, dans le Jura elle a renforcé la surveillance des réseaux sociaux, à Neuchâtel les entrées du château ont été sécurisées". 
La parole est ensuite donnée à F.________, conseiller d'Etat genevois en charge de la santé, qui n'a pas non plus été épargné par les insultes. Il affirme qu'"il y en a un qui m'a mis sur Facebook. J'ai eu des attaques y compris une présentation avec des images trafiquées me présentant comme un dictateur de la dernière guerre [...] on a enfin trouvé la personne [...] qui finalement s'est excusée [...]. C'est vrai que l'agressivité suisse alémanique face aux mesures qui sont prises est, d'après mes constats, beaucoup plus grande qu'en Suisse romande. Là, c'est vraiment des insultes" (art. 105 al. 2 LTF). 
Une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux contenant des attaques sexistes et des menaces à l'encontre de G.________, conseillère d'Etat zurichoise chargée de la santé, est montrée à l'écran. Ensuite, le journaliste affirme que H.________, conseiller national valaisan, en a aussi "fait les frais". "Cet été déjà, il lançait un appel unanime pour que tout le monde se vaccine. ll s'est pris une volée de bois vert", ajoute le journaliste. 
"Retour à Fribourg chez les Amis de la Constitution", annonce la voix off. "On tient à faire bonne figure face aux flots d'insultes et de menaces que dénoncent les élus...", disent-ils. I.________, co-président des Amis de la Constitution, soutient que "à l'intérieur des Amis de la Constitution évidemment nous avons une charte que nous appliquons et quand quelqu'un déborde on le recadre [...] Quand il y avait par exemple la ligne rouge qui était franchie par le Conseil fédéral du 8 septembre en vue du pass sanitaire, il y a eu une augmentation de virulence. C'est une conséquence de ces actes, on ne peut pas prendre le citoyen, la population suisse, pour des gens immatures". 
Enfin, est interviewé J.________, chef de la sécurité des élus et du Conseil fédéral à Fedpol. La voix off relève que, du côté des ministères publics, on confirme que des condamnations continuent d'être rendues suite aux plaintes déposées par des élus. Elle précise: "En Valais, deux auteurs de menaces de mort à l'encontre de E.________ ont été identifiés, l'affaire suit son cours". En fin de reportage, la voix off conclut: "Ce qui est très suisse en revanche c'est de pouvoir voter deux fois en l'espace de six mois sur la loi Covid". 
 
B.  
En date du 28 février 2022, A.A.________ et B.B.________, soutenus par plusieurs signataires d'une "plainte populaire", ont formé une plainte auprès de l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (ci-après: l'Autorité de plainte) contre le reportage précité. Ils ont invoqué à l'appui de leur plainte une violation des dispositions régissant la programmation télévisuelle et en particulier du principe de pluralité des opinions. Selon eux, le reportage contesté insinuait que les opposants à la loi Covid étaient les (seuls) responsables de la dégradation du climat politique dans le cadre de la campagne de votation portant sur cette loi. 
Par décision du 23 juin 2022, notifiée aux parties le 21 septembre 2022, l'Autorité de plainte a admis la plainte contre le reportage de l'émission "Mise au Point" du 14 novembre 2021, dans la mesure où elle était recevable, l'émission litigieuse ne respectant pas le principe de pluralité des opinions, et a invité la Société suisse de radiodiffusion SRG SSR idée suisse (ci-après: la SSR) à lui fournir les mesures propres à remédier à la violation constatée dans un délai de 60 jours à compter de la notification de sa décision, respectivement dans un délai de 30 jours à compter de son entrée en force. 
 
C.  
La SSR dépose un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral. Elle conclut à la réforme de la décision du 23 juin 2022 de l'Autorité de plainte en ce sens que la plainte formée par A.A.________ et B.B.________ est rejetée. Subsidiairement, elle requiert l'annulation de cette décision et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
A.A.________ et B.B.________ (ci-après: les intimés) déposent des observations. Ils mettent en cause la qualité pour recourir de la SSR et demandent que la décision attaquée soit confirmée. L'Autorité de plainte conclut au rejet du recours, dans la mesure de sa recevabilité, et renvoie aux considérants de la décision attaquée, qu'elle maintient intégralement. La recourante se détermine sur les observations des intimés. 
Le Tribunal fédéral a délibéré sur le présent recours en séance publique le 20 septembre 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 148 I 160 consid. 1). 
 
1.1. L'acte attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) concernant le contenu d'une publication rédactionnelle (cf. art. 94 de la loi fédérale du 24 mars 2006 sur la radio et la télévision [LRTV; RS 784.40]), rendue par l'Autorité de plainte (art. 86 al. 1 let. c LTF et 99 al. 3 LRTV), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte.  
 
1.2. Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF), par la recourante, destinataire de la décision litigieuse, qui la sanctionne pour avoir diffusé un reportage contraire à l'art. 4 LRTV, et qui a donc qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF (cf. arrêt 2C_738/2012 du 27 novembre 2012 consid. 1.1), n'en déplaise aux intimés. Il convient dès lors d'entrer en matière.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (cf. art. 95 let. a et b et 106 al. 1 LTF). Toutefois, les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrue (cf. art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit indiquer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (ATF 146 I 62 consid. 3; 142 II 369 consid. 2.1; 141 I 36 consid. 1.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2; 142 II 355 consid. 6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
3.  
Dans la décision attaquée, l'Autorité de plainte a considéré que la publication rédactionnelle litigieuse ne respectait pas le principe de pluralité des opinions découlant de l'art. 4 al. 4 LRTV
Au considérant 8.1 de la décision litigieuse, l'instance inférieure a constaté tout d'abord que le contenu de la votation sur la loi Covid n'était pas au centre du reportage contesté; il ne s'agissait pas d'un reportage type dans le cadre des votations. Elle a cependant retenu que le sujet du reportage, soit la hausse des insultes et des menaces subies par les divers politiciens protagonistes de cette campagne de votation, était clairement et directement ancré dans le débat sur la future votation sur la loi Covid. Par ailleurs, l'Autorité de plainte a souligné que l'introduction du reportage mentionnait explicitement: "Encore deux semaines avant la votation sur la loi Covid", puis plus avant: "A quinze jours de la votation (...) ". Selon la décision attaquée, le thème du reportage, diffusé deux semaines avant le scrutin, était ainsi susceptible d'influencer la formation de l'opinion du public à l'approche de la votation sur la loi Covid. 
Dans ce contexte, l'Autorité de plainte a retenu que le principe de pluralité des opinions s'appliquait de manière accrue et commandait que tous les protagonistes de cette campagne de votation puissent faire entendre leur point de vue. Or, l'émission litigieuse n'a pas donné la parole aux politiciens opposés à la loi Covid et n'a pas détaillé les insultes et menaces subies par les opposants à la loi Covid. L'émission s'est limitée à détailler les violences subies par les politiciens soutenant la loi Covid et a ainsi véhiculé l'impression que les opposants à cette loi étaient les seuls responsables de la dégradation de l'ambiance politique dans le cadre de la campagne de votation. Ce faisant, la recourante a violé son obligation de diligence journalistique accrue requise en période de votations. 
 
4.  
La recourante se plaint d'un établissement inexact des faits et d'une appréciation arbitraire des preuves. 
 
 
4.1. Il y a arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'établissement des faits ou l'appréciation des preuves si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (cf. ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 144 II 281 consid. 3.6.2). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3) et en quoi la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (cf. supra consid. 2.2).  
 
4.2. La recourante fait valoir que l'état de fait de la décision attaquée est arbitraire en tant qu'il retient que le sujet du reportage litigieux, soit la hausse des insultes et des menaces subies par les politiciens protagonistes de la campagne de votation de la loi Covid, était "clairement et directement" ancré dans le débat sur la future votation concernant cette loi. D'après l'intéressée, le thème spécifique du reportage était un fait d'actualité, à savoir que le débat politique en Suisse s'était considérablement envenimé et non la votation en elle-même. Elle précise que la démarche journalistique consistait à s'interroger sur le risque pour la sécurité de certains élus, ainsi que sur les risques d'une éventuelle menace pour le débat démocratique dans le cadre d'un scrutin populaire. Dans la décision attaqué, après avoir retenu que le sujet du reportage litigieux traitait directement de la votation, l'instance précédente a considéré que l'exigence de pluralité découlant de l'art. 4 al. 4 LRTV s'appliquait de manière renforcée.  
 
4.3. Pour établir ce lien direct, les juges précédents ont souligné la proximité temporelle entre le reportage et la votation, qui a eu lieu deux semaines après la diffusion de l'émission, et la thématique du reportage. En effet, dans l'émission, il est fait, à plusieurs reprises, allusion à la votation à venir. Son titre lui-même "La haine avant la votation sur la loi Covid" la place dans le contexte de la votation. Ces éléments factuels qui ressortent du reportage (cf. supra let. A) ne sauraient être tenus pour arbitraires. Les griefs de la recourante sont ainsi mal fondés. Il convient encore de relever que, contrairement à ce que soutient la recourante, l'appréciation de l'émission en fonction de son contenu et des circonstances l'entourant ne relève pas de l'établissement des faits, mais de l'application de l'art. 4 LRTV (cf. arrêts 2C_710/2021 du 29 mars 2023 consid. 5 prévu à la publication; 2C_112/2021 du 2 décembre 2021 consid. 4 à 7), dont le Tribunal fédéral revoit librement l'application. En conséquence, cette problématique sera traitée dans le cadre du grief de la recourante portant sur l'art. 4 al. 4 LRTV (cf. infra consid. 5).  
Le grief d'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves est partant mal fondé sur ce point. 
 
4.4. Pour la même raison, la critique de la recourante à teneur de laquelle elle se plaint de l'arrêt attaqué en tant qu'il retient, de manière arbitraire selon elle, que "le reportage a véhiculé l'impression que les opposants à la loi Covid étaient les seuls responsables de la dégradation de l'ambiance politique dans le cadre de la campagne de votation" doit également être écartée, en ce qu'elle relève de l'application de l'art. 4 al. 4 LRTV.  
 
4.5. La recourante soutient encore que l'Autorité de plainte a arbitrairement constaté les faits en partant du postulat infondé qu'il existait des politiciens opposés à la loi Covid qui auraient également été victimes d'injures et de menaces au cours de la campagne de votation. D'après la recourante, dans cette campagne de votation, ce sont exclusivement les politiciens partisans de la loi qui ont été la cible de menaces et d'insultes. Toujours selon elle, les journalistes qui ont réalisé le reportage litigieux n'ont eu connaissance d'aucun élément laissant à penser que des politiciens opposés à la loi Covid auraient subi le même traitement.  
L'établissement des faits ne prête pas flanc à la critique sur ce point non plus. Quoi qu'en dise la recourante, la décision attaquée ne part pas du postulat qu'il existait des politiciens opposés à la loi Covid qui auraient également été victimes d'injures et de menaces au cours de la campagne de votation. En effet, la décision attaquée reproche uniquement au reportage litigieux de ne pas fournir des informations permettant aux téléspectateurs de se faire une image équilibrée de la détérioration du climat politique, ce qui - comme vu précédemment -, n'est pas une question d'établissement des faits, mais de droit. 
Le grief d'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves doit partant être rejeté sur ce point. 
 
4.6. Il découle de ce qui précède que le grief d'établissement inexact des faits et d'appréciation arbitraire des preuves, mal fondé, doit être écarté. Le Tribunal fédéral statuera dès lors exclusivement sur la base des faits constatés dans l'arrêt attaqué.  
 
5.  
La recourante fait valoir que c'est à tort que l'Autorité de plainte a retenu que le reportage litigieux ne respectait pas l'art. 4 al. 4 LRTV. Elle invoque également une violation de l'art. 10 CEDH
 
5.1. Sous l'angle du droit international, la liberté d'expression et l'autonomie des programmes sont protégées par l'art. 10 CEDH, ainsi que par l'art. 19 al. 1 du Pacte ONU II (cf. ATF 137 I 340 consid. 3.3; arrêts 2C_386/2015 du 9 mai 2016 consid. 2.3; 2C_738/2012 du 27 novembre 2012 consid. 4.1).  
 
5.1.1. La liberté d'expression garantie par l'art. 10 CEDH comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Cette disposition n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations. L'art. 10 par. 2 CEDH précise que l'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.  
Dans l'arrêt Monnat contre Suisse, Requête n° 73604701, du 21 septembre 2006, la CourEDH a rappelé, en se référant à sa jurisprudence, que l'art. 10 par. 2 CEDH ne laisse guère de place pour des restrictions à la liberté d'expression dans le domaine du discours politique ou de questions d'intérêt général et qu'elle doit faire preuve de la plus grande attention lorsque les mesures prises ou sanctions infligées par les autorités nationales sont de nature à dissuader les médias de participer à la discussion de problèmes d'un intérêt général légitime (§ 58). Elle a cependant précisé qu'en raison des "devoirs et responsabilités" inhérents à l'exercice de la liberté d'expression, la garantie que l'art. 10 CEDH offre aux journalistes en ce qui concerne les comptes rendus sur des questions d'intérêt général est subordonnée à la condition que les intéressés s'expriment de bonne foi et fournissent des informations fiables et précises dans le respect de l'éthique journalistique (§ 67).  
 
5.1.2. Selon la jurisprudence, l'art. 10 CEDH impose aussi à l'Etat des obligations positives. Il n'existe en effet pas de démocratie sans pluralisme et le libre jeu du débat politique se trouve au coeur même de la notion de société démocratique (cf. arrêt CourEDH Associazione politica nazionale lista Marco Pannella c. Italie, Requête n° 66984/14 du 31 août 2021, § 68 ss et les références). Dès lors, il est indispensable pour le bon fonctionnement de la démocratie que [le système de radiotélédiffusion publique] diffuse des informations et des commentaires impartiaux, indépendants et neutres et qu'il fournisse en outre un forum de discussion publique dans le cadre duquel un éventail aussi large que possible d'opinions et de points de vue puissent s'exprimer" (arrêts de la CourEDH Associazione politica nazionale lista Marco Pannella c. Italie, op. cit., § 73; Manole et autres c. Moldova, Requête n°13936/02 du 17 septembre 2009, § 101). Ceci est d'autant plus vrai à l'approche des élections et des votes (cf. arrêt de la CourEDH Associazione politica nazionale lista Marco Pannella c. Italie, op. cit., § 74 et la référence). L'exercice réel et effectif de la liberté d'expression ne dépend donc pas simplement du devoir de l'Etat de s'abstenir de toute ingérence, mais peut exiger qu'il prenne, en droit ou en pratique, des mesures positives de protection. Compte tenu de l'importance des enjeux dans le cadre de l'art. 10 CEDH, l'Etat doit être l'ultime garant du pluralisme (arrêt de la CourEDH Manole et autres c. Moldova, op. cit., § 99). Dans le domaine de la diffusion audiovisuelle, ces principes imposent à l'Etat l'obligation de garantir d'une part l'accès du public, par l'intermédiaire de la télévision et de la radio, à des informations impartiales et exactes ainsi qu'à une pluralité d'opinions et de commentaires reflétant notamment la diversité des opinions politiques dans le pays, et d'autre part la protection des journalistes et des autres professionnels des médias audiovisuels contre les entraves à la communication de ces informations et commentaires (arrêt de la CourEDH Manole et autres c. Moldova, op. cit., § 100; cf. également arrêt de la CourEDH NIT S.R.L. c. République de Moldova, Requête n° 28470/12, du 5 avril 2022, § 192).  
 
5.2. En droit interne, l'art. 17 al. 1 Cst. garantit la liberté de la presse, de la radio et de la télévision, ainsi que les autres formes de diffusion de productions et d'informations ressortissant aux télécommunications publiques. La télévision jouit d'une autonomie dans la conception de ses programmes (art. 93 al. 3 Cst.). Cette protection s'étend à l'ensemble du processus de production et de publication des programmes. Ce principe vise tant les recherches effectuées par les journalistes que leur élaboration, leur rédaction, et la manière dont ils sont finalement publiés. Cela implique pour le programmateur le droit de choisir librement ses sujets et de les traiter comme il le souhaite, même de manière critique. Il peut également choisir librement les personnes qu'il interroge (cf. CHRISTIAN BOVET/JEREMY BACHARACH, in Commentaire romand de la Constitution fédérale, 2021, n° 28 ad art. 93 Cst.; DENIS BARRELET/STÉPHANE WERLY, Droit de la communication, 2e éd. 2011, n° 239 ss). Mais l'art. 93 al. 2 Cst. pose également certaines restrictions quant aux objectifs et aux buts de cette autonomie, qui doivent être pris en compte par le diffuseur: "La radio et la télévision contribuent à la formation et au développement culturel, à la libre formation de l'opinion et au divertissement. Elles prennent en considération les particularités du pays et les besoins des cantons. Elles présentent les événements de manière fidèle et reflètent équitablement la diversité des opinions".  
 
5.3. En matière de diffusion de programmes, les principes et droits constitutionnels susmentionnés sont en particulier concrétisés par la LRTV. L'art. 4 LRTV "Exigences minimales quant au contenu des programmes" exige à son alinéa 1 que toute émission respecte les droits fondamentaux (cf. aussi art. 35 al. 2 Cst.) et prévoit à son alinéa 2 que "les émissions rédactionnelles ayant un contenu informatif doivent présenter les événements de manière fidèle et permettre au public de se faire sa propre opinion. Les vues personnelles et les commentaires doivent être identifiables comme tels". Il s'agit donc avant tout de présenter les faits de manière appropriée. A teneur de l'art. 4 al. 4, 1ère phrase LRTV enfin, "les programmes des concessionnaires doivent refléter équitablement, dans l'ensemble de leurs émissions rédactionnelles, la diversité des événements et des opinions". C'est ce qu'on appelle le principe de pluralité des opinions applicable aux concessionnaires. L'art. 6 LRTV prévoit que "les diffuseurs ne sont soumis à aucune directive des autorités fédérales, cantonales ou communales si le droit fédéral n'en dispose pas autrement" (al. 1). En outre, il garantit la liberté rédactionnelle des diffuseurs (al. 2). Selon l'art. 3a LRTV, la radio et la télévision sont indépendantes de l'Etat.  
Le principe est donc clairement la liberté dans la programmation - l'autonomie des programmes ( Programmautonomie). Les diffuseurs ne sont en aucun cas tenus de suivre des directives. La liberté de création est la plus large possible. A l'inverse, l'autorité de surveillance, l'Autorité de plainte, peut et doit intervenir de par la loi dans cette autonomie si notamment les principes fondamentaux de la présentation pluraliste des opinions sont enfreints (art. 93 al. 2 Cst.), et ce dans une mesure telle que cela constitue une violation du devoir de diligence incombant aux programmateurs.  
 
5.4. A ce propos, le Tribunal fédéral a jugé dans l'ATF 134 I 2 qu'une intervention de l'Etat, fondée sur le droit de surveillance, dans le processus pluraliste de formation de l'opinion publique doit reposer sur une pesée des intérêts entre la liberté de programmation du diffuseur, d'une part, et la liberté d'information du public d'autre part. Il n'y a pas de violation de l'obligation de diligence du point de vue du droit de la radiodiffusion dès lors qu'il est possible de constater après coup et indépendamment de toute pression temporelle qu'une contribution aurait pu être conçue différemment et de manière plus convaincante, mais seulement lorsque les exigences minimales du droit des programmes découlant de l'art. 4 LRTV sont violées (cf. arrêt précité consid. 3.2.2 et les références; cf. également ATF 132 II 290 consid. 2.2; 131 II 253 consid. 2.3; arrêt 2C_432/2022 du 31 octobre 2022 consid. 3.6 et les autres références citées).  
 
5.5. En l'espèce, l'autorité spécialisée a constaté la violation d'une de ces exigences minimales, à savoir le principe de pluralité des opinions. Il convient dès lors d'examiner le contenu de ce principe.  
 
5.5.1. Dans ses lignes directrices (consultables à l'adresse suivante : https://publizistische-leitlinien.srf.ch/anhang/), la recourante elle-même indique ce qui suit s'agissant du principe de pluralité. Le principe de pluralité, qui peut concerner plusieurs émissions, mais aussi une seule, vise à empêcher des tendances unilatérales de la radio et de la télévision dans leur ensemble. Celles-ci ne doivent notamment pas présenter exclusivement les opinions politiques ou sociales dominantes. Les programmes des radios et télévisions titulaires d'une concession doivent au contraire refléter globalement la diversité politique et idéologique. Exceptionnellement, le principe de pluralité s'applique aussi à certaines émissions ou publications, notamment lorsqu'elles sont diffusées dans le cadre d'élections ou de votations. Dans ce cas, le diffuseur titulaire d'une concession est soumis à un devoir de diligence accru pendant la période sensible précédant les élections et les votations, devoir qui doit être respecté d'autant plus strictement que le caractère électoral ou lié aux votations de l'émission ou de la publication est prononcé. Dans ce contexte, le principe de pluralité doit empêcher que la formation de l'opinion publique soit influencée unilatéralement et que le résultat des élections ou des votations soit ainsi éventuellement faussé.  
 
5.5.2. Le Tribunal fédéral s'est également prononcé sur le principe de pluralité. Il a ainsi retenu dans l'ATF 134 I 2 que ce principe tend à empêcher les tendances unilatérales dans la formation de l'opinion par la radio et la télévision. Il oblige le système médiatique audiovisuel dans son ensemble à refléter la diversité politique et idéologique et s'applique en premier lieu aux programmes dans leur ensemble. Pour des raisons de politique nationale et de respect de la démocratie directe, le principe de pluralité s'applique de manière plus stricte à l'approche des élections et des votations. Dans ce contexte, ce principe doit empêcher que la formation de l'opinion publique soit influencée unilatéralement et que le résultat des élections ou des votations soit éventuellement faussé. La liberté de vote et d'élection garantie par la Constitution comprend le droit à ce que le résultat d'une votation ne soit pas reconnu s'il n'exprime pas de manière fidèle et sûre la libre volonté des citoyens (cf. art. 34 Cst.). La décision des votants doit se fonder sur un processus de formation d'opinion aussi libre et complet que possible. Le mandat de prestation relevant du droit de la radiodiffusion exige donc également que l'accès aux médias audiovisuels soit accordé aux candidats et aux partis selon des critères objectifs. Plus le caractère électoral ou lié aux votations d'un reportage est marqué, plus les devoirs de diligence journalistique doivent être strictement respectés avant les décisions populaires concernées (cf. arrêt précité consid. 3.3.2 et les références).  
 
5.5.3. A cet égard, le Tribunal fédéral a précisé encore, concernant l'examen du devoir de diligence, que ce n'est pas l'appréciation subjective du diffuseur quant à la nature de l'émission ou à l'objectif de sa publication qui est déterminante, mais son impact sur le public évalué objectivement. Plus la prise de position à la radio ou à la télévision sur une élection ou une votation est diffusée à proximité temporelle du scrutin et plus elle a pour thématique l'objet du scrutin, plus toutes partialité et manipulation doivent être strictement exclues (ATF 134 I 2 consid. 3.3.2).  
 
5.6. Il résulte de ce qui précède trois critères juridiques déterminants pour examiner le respect du principe de pluralité. D'abord, lorsque l'émission précède une votation qu'elle concerne, les obligations de diligence journalistiques s'appliquent de manière accrue, notamment au regard du principe de pluralité (cf. infra consid. 5.6.1). Ensuite, le principe de pluralité impose d'exprimer de manière appropriée la diversité des opinions; les différents points de vue doivent être présentés de manière équilibrée et les opinions minoritaires doivent être exposées dans une mesure appropriée (cf. également PETER NOBEL/ ROLF H. WEBER, Medienrecht, 4e éd., Berne 2021, p. 229; cf. infra consid. 5.6.2). Enfin, pour déterminer s'il y a eu violation du principe de pluralité et de l'obligation de diligence journalistique en découlant, il ne faut tenir compte ni de la forme de l'émission ni de l'appréciation (personnelle) du diffuseur quant à l'objectif de sa publication, mais plutôt de l'impact de l'émission sur le public évalué objectivement (" dessen objektiv abzuschätzende Wirkung auf das Publikum "; ATF 134 I 2 consid. 3.3.2) (cf. infra consid. 5.6.3).  
 
5.6.1. S'agissant du premier critère, d'un point de vue factuel, la proximité de l'émission avec la votation résulte non seulement de sa proximité temporelle: le reportage a été diffusé 14 jours avant le vote sur la loi Covid. Elle découle également du fait que l'émission se réfère explicitement à la votation sur la loi Covid, non seulement dans son titre, mais aussi durant le reportage et à la fin de celui-ci (cf. supra consid. 3 et 4.3).  
Par ailleurs, l'examen plus détaillé du contenu de l'émission - tenant compte du fait que l'émission a pour objet principal de thématiser l'augmentation des violences auxquelles sont exposés les politiciens - conduit à retenir que le lien constaté avec la votation sur la loi Covid par l'instance précédente n'apparaît en aucun cas arbitraire sur le plan de l'établissement des faits (cf. supra consid. 4.3), ni contraire au droit fédéral. En effet, dans son appréciation du contenu de l'émission, l'Autorité de plainte a relevé que le reportage n'était pas une émission type portant sur une votation. Elle a examiné le thème du reportage, à savoir l'augmentation des insultes et des menaces subies par les différents politiciens dans la campagne de votation, et a retenu que celui-ci était directement ancré dans le débat sur la prochaine votation sur la loi Covid, et qu'il existait ainsi un lien clair et direct (un lien immédiat) avec la votation (cf. arrêt attaqué consid. 8.1 et supra consid. 3).  
Une telle appréciation n'est en aucun cas contraire au droit. Au contraire, elle est conforme à la jurisprudence fédérale. En effet, dans une précédente affaire concernant une émission Schweiz-Aktuell (" Freiburger Original "), qui dressait le portrait d'un politicien local d'un point de vue personnel, sans aucune référence à sa (ré) élection imminente, le Tribunal fédéral a retenu une violation du devoir de diligence journalistique, compte tenu de la proximité temporelle de la diffusion de l'émission avec l'élection et du fait que les autres candidats n'avaient pas eu droit à la parole (ATF 134 I 2 consid. 4.2.2 s.). Il existait donc un lien direct entre le reportage et la future élection pourtant non thématisée dans l'émission.  
 
En l'espèce, il convient ainsi de reconnaître l'existence d'un devoir de diligence accru en lien avec le principe de pluralité, compte tenu du lien temporel et thématique entre le reportage et la votation, tant sous l'angle de l'art. 10 CEDH (cf. supra consid. 5.1.1) que du droit fédéral (cf. supra consid. 5.5.2).  
 
5.6.2. Concernant le deuxième critère, le principe de pluralité oblige le diffuseur à tenir compte de la diversité réelle des opinions au sein de la société et à exprimer la diversité politique et idéologique; les sujets doivent ainsi être abordés sous différents angles (voir la synthèse de NOBEL/WEBER, op. cit., p. 553). L'expression équilibrée des différents points de vue dans le cadre d'une votation fait partie des devoirs fondamentaux de diligence journalistique. Cela signifie notamment que les différentes opinions politiques doivent être exprimées de manière appropriée. Il est contraire à ce principe de ne pas donner la parole à quelqu'un ou à un groupe, ou de ne le faire que de manière très défavorable. Cela est d'autant plus vrai à la veille d'élections ou de votations (cf. supra consid. 5.1.3 et 5.5.2).  
Dans le cas d'espèce, l'émission litigieuse thématise presque exclusivement, par des recherches et des interviews détaillées, les attaques subies par les politiciens partisans de la loi Covid. Les opposants à la loi Covid prennent en revanche peu la parole: une première fois, au tout début du reportage, lorsque Mme C.________ du "Réseau choix vaccinal" relève que le climat politique s'est durci avec l'adoption des mesures (temps de parole d'environ 23 secondes) et ensuite lorsque Mme D.________, présentée en tant que fervente opposante au pass sanitaire, dit que les citoyens se sentent opprimés et qu'ils vont peut-être insulter un citoyen ou un politicien (temps de parole d'environ 15 secondes). Près de 9 minutes plus tard, I.________ prend la parole et s'exprime, à la demande du journaliste, sur ce qui est fait pour lutter contre la haine et la violence dans le camp des opposants à la loi Covid. Il fait référence à une charte qui est appliquée, mais ajoute que comme le Conseil fédéral a outrepassé ses compétences, la virulence augmente (temps de parole d'environ 34 secondes au total). Les trois personnes présentées comme des opposants à la loi Covid s'expriment donc au total pendant environ 1 minute et 12 secondes et leurs interviews sont coupées afin de confirmer la thèse défendue par le reportage qui tend à démontrer que les opposants à la loi Covid sont violents. 
Tout le reste de l'émission se concentre sur la haine des opposants à la loi Covid, avec de nombreux exemples des agressions commises, allant d'insultes, de messages de haine et d'attaques sexistes à des menaces de mort. Il est notamment diffusé de longues interviews d'hommes politiques qui militent pour l'adoption de la loi Covid et qui font état des agressions dont ils ont fait l'objet dans ce cadre. Les politiciens opposés à la loi Covid ne sont pas interviewés et il n'y a aucune indication que des demandes dans ce sens aient été refusées (cf. décision attaquée consid. 8.4.1). L'émission ne traite pas non plus le point de savoir si les partisans de la loi Covid ont également exprimé de la haine sur le net. 
Par ailleurs, il ne ressort pas de la décision attaquée que d'autres reportages auraient porté sur les violences subies par les opposants à la loi Covid. La recourante ne le prétend pas. Dans ces circonstances, le respect du principe de pluralité peut donc porter sur une émission en elle-même (cf. supra consid. 5.5.1 s.).  
Ainsi, on ne saurait retenir que, dans le reportage litigieux ou de façon plus large par le biais d'autres émissions, la recourante a tenu compte de la diversité réelle des opinions au sein de la société, concernant les éventuelles pressions subies par les différents protagonistes, comme le requiert le principe de pluralité. 
 
5.6.3. Dans ce contexte, il convient d'examiner le troisième critère et d'évaluer l'impact objectif de l'émission sur le public. L'émission a pour but déclaré de présenter un fait d'actualité et de thématiser l'augmentation des insultes et des menaces auxquelles sont exposés les politiciens. Son visionnage pourrait toutefois laisser entendre que les débordements seraient essentiellement le fait des opposants à la loi Covid. Elle thématise ce climat polarisé sans donner la parole aux opposants de manière adéquate pour qu'ils se prononcent sur les éventuelles insultes et menaces qu'ils auraient eux-même eu à subir. Les opposants sont longuement présentés comme des personnes haineuses enclines à la violence, qui seraient responsables de l'augmentation de la virulence dans le débat démocratique. Ils ne s'expriment eux-mêmes que de manière marginale sur l'ensemble du reportage, créant ainsi un déséquilibre. Le reportage peut ainsi donner l'impression que les opposants ne comportent pas de personnes raisonnables dans leur rang et ne relève pas suffisamment le fait que les opposants à la loi Covid ne se réduisent pas à des théoriciens du complot et à des personnes violentes. L'émission donne ainsi une image des deux camps en présence susceptible d'influencer le comportement de vote. Or, comme avant toute votation, mais en particulier dans un contexte de polarisation notoirement croissante de la société en rapport avec les votations sur les mesures liées au Covid, le devoir de diligence en matière de pluralité s'applique de manière accrue. Le fait que les opposants aient pu s'exprimer en quelques secondes et exposer en quelques phrases que l'autre partie contribuait également à la dégradation du débat démocratique de plus en plus polarisé ne permet pas d'atténuer suffisamment cette impression.  
 
5.6.4. Le reportage a ainsi véhiculé auprès des téléspectateurs une impression unilatérale. Or, diffusé deux semaines avant la votation sur la loi Covid, il était nécessaire que ce reportage donne la parole de manière équitable à l'ensemble des protagonistes de la votation sur le thème traité. Cette émission, qui présente les opposants comme étant principalement enclins à la violence, aurait pu influencer la votation - même si cela n'était pas voulu par la recourante. C'est précisément ce qu'interdit le principe de pluralité.  
 
5.7. Il découle de ce qui précède que l'arrêt attaqué ne viole ni le droit fédéral ni le droit conventionnel en retenant que le reportage litigieux n'est pas conforme aux exigences légales découlant du principe de pluralité, principe qui s'applique de manière accrue en l'espèce.  
 
6.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, doit être rejeté. 
Selon l'art. 66 al. 4 LTF, les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent en règle générale se voir imposer des frais judiciaires, lorsqu'elles s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause. La recourante remplit, dans le cadre de ses activités d'information, une tâche prévue par la loi, de sorte qu'il sera statué sans frais (cf. arrêt 2C_335/2007 du 25 octobre 2007 consid. 5 non publié aux ATF 134 I 2). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux intimés, qui ne sont pas représentés par un avocat (cf. art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires ni alloué de dépens. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante, aux intimés, ainsi qu'à l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision. 
 
 
Lausanne, le 20 septembre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. Wiedler