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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal  
 
 
 
 
2C_795/2022  
 
 
Arrêt du 15 mars 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, Ryter et Kradolfer. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Maîtres Pierre-Marie Glauser et Lysandre Papadopoulos, Avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Assistance administrative (CDI CH-FR), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 6 septembre 2022 (A-1577/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 11 mai 2016, la Direction générale des finances publiques française (DGFP; ci-après: l'autorité requérante ou l'autorité française) a déposé une demande d'assistance administrative en matière fiscale auprès de l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale ou l'AFC) fondée sur l'art. 28 de la Convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (ci-après: CDI CH-FR, RS 0.672.934.91). L'autorité requérante indiquait qu'une enquête diligentée en Allemagne par le parquet de Bochum et des visites domiciliaires effectuées dans les succursales allemandes de la banque B.________ AG (ci-après: la Banque) avaient abouti à la saisie de données concernant des contribuables français en lien avec des comptes ouverts auprès de ladite banque. La demande d'assistance administrative concernait les années 2010 à 2014 pour l'impôt sur le revenu et les années 2010 à 2015 pour l'impôt de solidarité sur la fortune et se fondait sur des listes contenant des numéros de comptes bancaires liés à des personnes inscrites sous un code "domizil" français. Elle visait l'obtention des nom, prénom, date de naissance et l'adresse la plus actuelle disponible des titulaires, ayants droit économiques selon le formulaire A, et de toute autre personne venant aux droits et obligations de ces derniers auprès de la Banque.  
Déférant à une demande de production du 10 juin 2016, la Banque a transmis à l'Administration fédérale les informations demandées entre juin 2016 et juillet 2017. Informée par la Banque du risque que ces renseignements soient utilisés dans la procédure pénale ouverte contre elle en France, l'Administration fédérale a obtenu des autorités compétentes françaises, dans le cadre d'un échange de lettres du 11 juillet 2017 et par un courrier de l'autorité requérante du même 
jour, l'assurance que les informations transmises ne seraient communiquées qu'aux personnes et autorités mentionnées à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR et qu'elles ne seraient utilisées qu'aux fins qui y sont énumérées. 
Le 9 février 2018, l'Administration fédérale a, dans huit décisions finales rendues à l'encontre de certaines personnes concernées, ainsi qu'à la Banque (dont le Tribunal administratif fédéral avait reconnu la qualité pour recourir dans l'arrêt A-4974/2016 du 25 octobre 2016), accordé l'assistance administrative à l'autorité française. Par arrêt du 30 juillet 2018, le Tribunal administratif fédéral a admis le recours formé par la Banque et annulé les décisions finales du 9 février 2018. Cette décision a été annulée, sur recours de l'Administration fédérale, par le Tribunal fédéral qui, par arrêt du 26 juillet 2019 (cause 2C_653/2018 partiellement publiée in ATF 146 II 150), a confirmé la validité des décisions finales du 9 février 2018. A la suite de cet arrêt, l'Administration fédérale a repris le traitement des procédures qui avaient été suspendues jusqu'à droit connu sur la position du Tribunal fédéral. 
 
A.b. Par courrier du 2 janvier 2020, l'autorité requérante a adressé une lettre à l'Administration fédérale, au terme de laquelle elle indique qu"aucune transmission des renseignements reçus de vos services n'aura lieu en faveur des autorités en charge de la procédure pénale pendante en France contre la banque B.________ AG, et [...] ces renseignements seront exclusivement utilisés contre les personnes visées par notre demande (y inclus les personnes tierces dans un contexte fiscal) ".  
 
A.c. Le 16 janvier 2020, les avocats de C.________ ont informé l'Administration fédérale du décès, en octobre 2018, de leur mandant, qui était lié à un compte bancaire concerné par la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016. Ils précisaient que son épouse, A.________, était la seule héritière du compte bancaire précité et qu'ils la représentaient désormais dans la procédure.  
 
B.  
Par décision finale du 3 mars 2021 notifiée à A.________, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative à l'autorité requérante et décidé de lui transmettre les renseignements concernant le compte bancaire lié à feu C.________. Sous le titre "Restrictions à l'utilisation des informations", la décision précise que: "Lors de la transmission, l'AFC rappellera à la DGFP les restrictions à l'utilisation des renseignements et les obligations de confidentialité [...]. En particulier, l'AFC, conformément à la réserve de spécialité [...], rappellera que les informations transmises ne peuvent être utilisées qu'en relation avec la/les personne/s concernée/s et pour les faits décrits dans la demande (arrêt du Tribunal fédéral 2C_537/2019 du 13 juillet 2020 consid. 3.7) ". 
Par arrêt du 6 septembre 2022, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours interjeté par A.________ contre la décision finale du 3 mars 2021. Il a jugé que les conditions de l'octroi de l'assistance administrative étaient remplies et que l'assistance administrative pouvait être exécutée concernant C.________, quand bien même cette personne était décédée au cours de la procédure. 
 
C.  
A l'encontre de cet arrêt, A.________ forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Sous suite de frais et dépens, elle lui demande, principalement, de l'annuler, de déclarer irrecevable la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 la concernant, de refuser toute forme d'assistance administrative à l'autorité requérante et de ne communiquer aucune information la concernant; subsidiairement, de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral pour qu'il rende une nouvelle décision, en lui ordonnant préalablement d'obtenir une garantie que les renseignements seraient utilisés conformément au droit applicable, de révoquer le courrier du 2 janvier 2020 adressé par l'autorité requérante à l'Administration fédérale ainsi que tout accord qui en découlerait, d'interpeller l'autorité requérante sur la prescription et d'ordonner que tout envoi de renseignements indique les éventuels montants qui ont été soumis à l'art. 3 de l'Accord du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil en matière de fiscalité des revenus de l'épargne sous forme de paiements d'intérêts, dans sa version antérieure au 1er janvier 2017; plus subsidiairement, de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral ou à l'Administration fédérale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Le Tribunal administratif fédéral s'en tient à son arrêt. L'Administration fédérale conclut au rejet du recours. La recourante s'est déterminée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Selon l'art. 83 let. h LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière d'entraide administrative internationale, à l'exception de l'assistance administrative en matière fiscale. Il découle de l'art. 84a LTF que, dans ce dernier domaine, le recours n'est recevable que lorsqu'une question juridique de principe se pose ou lorsqu'il s'agit, pour d'autres motifs, d'un cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF
 
1.1. D'après la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid. 1.3; arrêt 2C_289/2015 du 5 avril 2016 consid. 1.2.1 non publié in ATF 142 II 218; arrêt 2C_54/2014 du 2 juin 2014 consid. 1.1, in StE 2014 A 31.4. Nr. 20).  
 
1.2. La recourante soutient que la présente cause soulève une question juridique liée à l'application dans le temps de l'art. 18a de la loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative internationale en matière fiscale (LAAF; RS 651.1; ci-après aussi: loi fédérale sur l'assistance administrative fiscale), qui prévoit que l'assistance administrative peut être exécutée concernant des personnes décédées. Il s'agit de savoir si l'assistance administrative peut être accordée lorsque la demande d'assistance vise une personne décédée avant l'entrée en vigueur de cette disposition le 1er novembre 2019 et si celle-ci s'applique à des demandes d'assistance administrative ou à des périodes fiscales antérieures au 1er novembre 2019.  
Déterminer dans quelle mesure l'Administration fédérale doit transmettre des renseignements à l'autorité requérante en exécution d'une demande d'assistance administrative lorsque la personne visée par la demande décède en cours de procédure suppose de s'interroger sur la nature de l'art. 18a LAAF et sur son application dans le temps. Ces questions sont d'une importance certaine en pratique et nécessitent une clarification du Tribunal fédéral. La condition de recevabilité de l'art. 84a LTF est donc remplie. 
 
1.3. Au surplus, la recourante, qui a qualité pour agir (cf. art. 89 al. 1 LTF), a recouru en temps utile (art. 100 al. 2 let. b LTF) et dans les formes prévues (art. 42 LTF).  
 
1.4. Il convient donc d'entrer en matière.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, en vertu de l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la violation de droits fondamentaux, que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (ATF 149 III 81 consid. 1.3; 148 I 127 consid. 4.3; 145 V 304 consid. 1.2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des situations visées à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire (art. 9 Cst.) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 145 V 188 consid. 2). Conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF qui viennent d'être rappelées, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions sont réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergeant de celui qui est contenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques appellatoires portant sur l'état de fait ou l'appréciation des preuves (cf. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 140 III 264 consid. 2.3; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
3.  
La demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 qui est à l'origine de la présente procédure est régie par l'art. 28 CDI CH-FR et sur le chiffre XI du Protocole additionnel à la CH-FR. Sur le plan interne, c'est la LAAF, applicable en l'espèce (cf. art. 24 LAAF), qui concrétise l'exécution en Suisse de l'assistance administrative en matière d'échange de renseignements sur demande (cf. art. 1 LAAF; ATF 146 II 150 consid. 5.4; 143 II 224 consid. 6.1; 628 consid. 4.3). 
 
4.  
Le litige porte sur le point de savoir si c'est à bon droit que le Tribunal administratif fédéral a confirmé que l'assistance administrative requise par l'autorité requérante le 11 mai 2016 devait être exécutée s'agissant du compte bancaire lié à feu C.________, décédé en octobre 2018. 
 
4.1. La demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 a fait l'objet d'un arrêt de principe du 26 juillet 2019, qui a été partiellement publié (ATF 146 II 150; supra let. A.a). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a d'abord constaté que cette demande, qui concernait plusieurs dizaines de milliers de personnes, revêtait les caractéristiques d'une demande dite "collective" (ATF 146 II 150 consid. 4). Il a ensuite retenu que l'autorité requérante était fondée à demander l'assistance administrative de la Suisse pour les périodes fiscales 2010 à 2015 en identifiant ces personnes par d'autres moyens que par leur nom et leur adresse (ATF 146 II 150 consid. 5) et que, sur le fond, les conditions de l'assistance administrative à la France étaient remplies; en effet, les renseignements demandés remplissaient la condition de la pertinence vraisemblable au sens de l'art. 28 par. 1 CDI CH-FR et la demande ne constituait pas une pêche aux renseignements inadmissible (ATF 146 II 150 consid. 6). Enfin, le Tribunal fédéral a jugé que l'autorité requérante avait fourni des assurances suffisantes que les informations qu'elle recevrait ne seraient pas transmises aux autorités pénales françaises pour être utilisées dans la procédure pénale qui était alors ouverte en France contre la Banque, en violation du principe de spécialité et de l'obligation de garder le secret prévue à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR (ATF 146 II 150 consid. 7).  
 
4.2. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif fédéral s'est largement référé à cet arrêt pour rejeter le recours formé par la recourante contre la décision finale du 3 mars 2021, par laquelle l'Administration fédéral a accordé l'assistance administrative à la France concernant le compte lié à feu C.________. Il a par ailleurs retenu que, contrairement à ce que la recourante alléguait, les renseignements que l'Administration fédérale entendait livrer à l'autorité requérante remplissaient la condition de la pertinence vraisemblable (consid. 6.1 et 6.2) et que c'était en vain que la recourante se plaignait d'une violation des principes de spécialité et de confidentialité garantis à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR du fait que l'autorité requérante avait indiqué, le 2 janvier 2020, qu'elle pourrait utiliser les renseignements transmis dans une procédure fiscale dirigée contre des personnes tierces (consid. 6.3). Enfin, le Tribunal administratif fédéral a jugé que l'assistance administrative pouvait être exécutée, quand bien même C.________ était décédé au cours de la procédure (consid. 6.5).  
 
5.  
A l'encontre de l'arrêt attaqué, la recourante reproche au Tribunal administratif fédéral d'avoir violé l'art. 28 par. 1 CDI CH-FR en confirmant la transmission des renseignements concernant le compte bancaire lié à feu C.________, alors que ces renseignements ne remplissaient pas, à tout le moins s'agissant des années 2010 et 2011, la condition de la pertinence vraisemblable. A l'appui de son grief, elle relève que l'autorité requérante avait indiqué elle-même dans sa demande que la prescription était de dix ans en droit français, de sorte que les juges précédents n'auraient pas dû confirmer, en 2022, la transmission de renseignements concernant les années 2010 et 2011, en raison de la prescription. En outre, feu C.________ avait quitté la France en septembre 2011 pour s'établir en Suisse. Les renseignements requis ne remplissaient pas non plus la condition de la pertinence vraisemblable pour ce motif. 
 
5.1. En vertu de l'art. 28 par. 1 CDI CH-FR, les autorités compétentes des États contractants échangent les renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la présente Convention ou pour l'administration ou l'application de la législation interne relative aux impôts de toute nature ou dénomination perçus pour le compte des États contractants.  
La condition de la pertinence vraisemblable a pour but d'assurer un échange de renseignements en matière fiscale qui soit le plus large possible, sans qu'il soit pour autant loisible aux États contractants de demander des renseignements au hasard ou qui ne sont pas susceptibles d'apporter un éclairage sur les affaires fiscales d'un contribuable particulier (ch. XI par. 2 du Protocole additionnel à la CDI CH-FR). 
Selon la jurisprudence, la condition de la pertinence vraisemblable est réputée réalisée si, au moment où la demande d'assistance administrative est formulée, il existe une possibilité raisonnable que les renseignements demandés se révéleront pertinents. En revanche, peu importe qu'une fois fournie, il s'avère que l'information demandée soit finalement non pertinente (cf. notamment ATF 145 II 112 consid. 2.1.1; 144 II 29 consid. 4.2.2; 144 II 206 consid. 4.3; 142 II 161 consid. 2.1.1). L'appréciation de la pertinence vraisemblable des informations demandées est en premier lieu du ressort de l'État requérant. L'État requis se limite à examiner si les documents demandés ont un rapport avec l'état de fait présenté dans la demande et s'ils sont potentiellement propres à être utilisés dans la procédure étrangère (cf. ATF 148 II 336 consid. 7.2; 142 II 161 consid. 2.1.1). Il ne peut donc pas examiner les objections liées au bien-fondé de la procédure fiscale menée à l'étranger, ni déterminer lui-même si d'éventuels obstacles procéduraux du droit interne de l'État requérant empêcheraient l'utilisation des renseignements obtenus (cf. ATF 144 II 206 consid. 4.3; arrêts 2C_1162/2016 du 4 octobre 2017 consid. 6.3; 2C_241/2016 du 7 avril 2017 consid. 5.4). Il n'incombe donc pas à l'État requis d'examiner si certaines périodes fiscales concernées par une demande d'assistance administrative pourraient être atteintes par le délai de prescription dans l'État requérant, quand bien même l'existence d'un tel délai serait mentionnée dans la demande d'assistance administrative elle-même (arrêt 2C_662/2021 du 18 mars 2022 consid. 5.4.1 et 5.4.2). L'État requis ne peut pas non plus déterminer lui-même si la personne visée par la demande avait sa résidence fiscale dans l'État requérant au plan international. Il s'agit en effet là d'une question de fond qui n'a pas, et qui ne peut pas, être tranchée dans le contexte d'une procédure d'assistance administrative, fondée sur la condition de la pertinence vraisemblable (cf. ATF 142 II 161 consid. 3.6; cf. aussi ATF 145 II 112 consid. 2.2.2; 142 II 218 consid. 3.6). 
 
5.2. Au vu de ce qui précède, c'est en vain que la recourante reproche au Tribunal administratif fédéral d'avoir confirmé la transmission de renseignements alors que certaines périodes fiscales concernées par la demande d'assistance administrative seraient prescrites selon le droit français, ou que feu C.________ aurait quitté la France en 2011. Ces objections doivent être soulevées devant l'État requérant.  
 
5.3. Au surplus, la recourante ne soutient, à juste titre, pas que les renseignements ne rempliraient plus la condition de la pertinence vraisemblable en raison du décès de C.________ au cours de la procédure. En effet, il n'incombe pas à l'État requis de refuser de transmettre des renseignements parce que la personne visée par la demande d'assistance administrative décède au cours de la procédure, au motif que ces renseignements ne seraient de ce fait plus vraisemblablement pertinents. Le point de savoir si les renseignements conservent leur utilité pour l'État requérant dans une telle situation relève aussi du droit interne de l'Etat requérant, dont la cognition échappe à l'État requis. En d'autres termes, le fait que la personne visée par une demande d'assistance administrative décède en cours de procédure n'affecte pas la réalisation de la condition de la pertinence vraisemblable des renseignements qui sont requis à son sujet.  
 
5.4. On ne discerne donc aucune violation de l'art. 28 par. 1 CDI CH-FR dans le cas d'espèce.  
 
6.  
La recourante reproche également aux juges précédents d'avoir violé le principe d'interdiction de la rétroactivité des lois en confirmant la transmission de renseignements concernant C.________ en vertu de l'art. 18a LAAF, entré en vigueur le 1er novembre 2019, alors que cette personne était décédée en octobre 2018. Elle fait valoir que, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal administratif fédéral, l'art. 18a LAAF n'est pas une disposition de procédure applicable immédiatement, mais une disposition qui a une portée matérielle en ce sens qu'elle étend l'échange aux renseignements concernant des personnes décédées. Or, en tant que disposition matérielle, l'art. 18a LAAF ne pourrait s'appliquer que si la personne visée par une demande est décédée après son entrée en vigueur le 1er novembre 2019 et ne pourrait concerner que les périodes fiscales postérieures à cette date. 
 
6.1. Il faut d'abord rappeler que l'échange de renseignements fiscaux sur demande instaure une collaboration entre États, laquelle ne prévoit pas la participation des personnes qui en font l'objet (cf. ATF 146 I 172 consid. 6.1). Il est certes admis que les États parties à une convention qui instaure un échange de renseignements sur demande peuvent prévoir, dans leur droit interne, des droits procéduraux pour les personnes visées. Ces droits ne peuvent toutefois pas entraver ou retarder la correcte exécution de l'échange de renseignements (cf. OCDE, Modèle de Convention fiscale concernant le revenu et la fortune, 2019, Commentaire, n° 14.1 ad art. 26; ATF 146 I 172 consid. 6.2; dans le contexte de la CDI-FR, cf. aussi le ch. XI par. 5 du Protocole additionnel à la CDI CH-FR, qui concrétise ce principe dans le contexte de l'échange de renseignements fiscaux franco-suisse en prévoyant que les règles de procédure administrative relatives aux droits du contribuable s'appliquent dans l'État requis, sans pour autant que leur application puisse entraver ou retarder indûment les échanges effectifs de renseignements).  
 
6.2. En Suisse, la loi fédérale sur l'assistance administrative fiscale accorde des droits procéduraux à une personne visée par une demande d'assistance administrative. Cela se concrétise notamment par le fait que cette personne doit être informée de l'existence de la procédure (cf. art. 14 et 14a LAAF), qu'elle peut y prendre part (art. 15 LAAF) et que, si elle s'oppose à la transmission de renseignements, l'Administration fédérale doit lui notifier une décision finale, dans laquelle elle justifie l'octroi de l'assistance administrative et précise l'étendue des renseignements à transmettre (art. 17 al. 1 LAAF).  
 
6.3. Si la personne visée décède au cours de la procédure devant l'Administration fédérale, aucune décision finale ne peut plus lui être notifiée. Cet obstacle lié au décès découle du choix de la Suisse de conférer des droits procéduraux aux personnes intéressées. Or, comme le droit de procédure qui s'applique en droit interne ne peut pas entraver la bonne exécution de l'assistance administrative (supra consid. consid. 6.1), cela ne peut pas conduire la Suisse à s'abstenir d'exécuter l'assistance administrative en cas de décès, puisque les renseignements requis conservent leur pertinence vraisemblable (supra consid. 5.3). C'est pourquoi l'art. 18a LAAF prévoit que l'assistance administrative peut être exécutée concernant des personnes décédées et que leurs successeurs en droit se voient conférer le statut de partie.  
 
6.4. L'historique de cette disposition montre que l'art. 18a LAAF a été introduit dans la LAAF, lors de la révision partielle de la loi entrée en vigueur le 1er novembre 2019 (RO 2019 3161), pour donner suite à une recommandation du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales (ci-après: Forum mondial) d'assurer l'exécution de l'échange de renseignements en cas de décès de la personne visée. Cette exécution n'était alors pas garantie, en raison d'une jurisprudence initiée en 2010 par le Tribunal administratif fédéral, qui statuait comme unique instance de recours dans le domaine de l'assistance administrative internationale fiscale (la possibilité de recourir au Tribunal fédéral n'est ouverte que depuis le 1er février 2013, avec l'entrée en vigueur de l'art. 84a LTF [RO 2013 231]). Dans l'arrêt A-6711/2010 du 1er décembre 2010, le Tribunal administratif fédéral avait en effet constaté la nullité d'une décision finale que l'Administration fédérale avait notifiée à une personne visée par une demande d'assistance administrative, mais qui était décédée, ce qui avait pour conséquence selon cet arrêt que l'assistance administrative ne pouvait pas être exécutée (cf. consid. 3.4 de l'arrêt; CÉLINE MARTIN/MICHAEL URWYLER, in Kommentar zum Schweizerischen Steuerrecht, Amtshilfe, 2020, § 8 Verfahren vor ESTV, n° 31). Afin qu'il soit tout de même possible d'exécuter l'assistance administrative en cas de décès de la personne visée par une demande, l'Administration fédérale avait alors développé une pratique consistant à déterminer les éventuels successeurs légaux pouvant servir de destinataires de la décision finale, mais cette pratique supposait que les successeurs légaux disposent de la capacité d'être partie et de la capacité d'ester en justice selon le droit suisse et qu'ils puissent être identifiés, ce qui n'était pas toujours possible (cf. Message du 21 novembre 2018 sur la mise en oeuvre des recommandations du Forum mondial émises dans le rapport de phase 2 de la Suisse, FF 2019 300 ch. 2.3.1.1). C'est la raison pour laquelle, dans son rapport d'examen de la Suisse du 16 juillet 2016 (phase 2), le Forum mondial a recommandé à la Suisse de faire en sorte que "les renseignements sur les personnes décédées puissent être échangés en toutes circonstances" (Message précité, FF 2019 277 ch. 2.3.1).  
 
6.5. L'art. 18a LAAF permet ainsi à la Suisse d'assurer l'exécution d'une demande d'assistance administrative lorsqu'il apparaît que la personne visée par la demande est décédée. Il ne s'agit donc pas d'une disposition matérielle, mais procédurale, contrairement à ce que soutient la recourante. Cette portée correspond du reste à la vocation de la LAAF, qui consiste à régler l'exécution en Suisse des demandes d'assistance administrative (supra consid 3). En outre, l'art. 18a LAAF permet de mettre en oeuvre les obligations internationales de la Suisse (supra consid. 5.3). Il s'ensuit que l'art. 18a LAAF ne déroge pas à la nature procédurale de cette loi fédérale. Partant, comme toutes les règles procédurales, elle s'applique immédiatement dès son entrée en vigueur et donc aux demandes d'assistance administrative en matière fiscale en cours, indépendamment de la date à laquelle elles ont été formulées, de la date du décès de la personne visée ou des périodes visées par la demande d'assistance administrative.  
 
6.6. Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le Tribunal administratif fédéral a jugé que la demande devait être exécutée nonobstant le décès de feu C.________. Le grief de violation de l'art. 18a LAAF en lien avec l'interdiction de la rétroactivité des lois, infondé, est rejeté.  
 
7.  
La recourante fait encore valoir que le Tribunal administratif fédéral aurait dû refuser la transmission des renseignements dans le cas d'espèce, en raison d'un risque de violation des principes de spécialité et de confidentialité garantis à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR. Elle relève que, dans un courrier du 2 janvier 2020 (supra let. A.b), l'autorité requérante avait informé l'Administration fédérale qu'elle serait susceptible d'utiliser les renseignements obtenus dans une procédure fiscale dirigée contre des personnes tierces. Selon la recourante, cela attestait que l'autorité requérante pourrait utiliser les renseignements transmis de manière contraire au principe de spécialité tel qu'il avait été circonscrit par le Tribunal fédéral. 
 
7.1. Selon l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR, les renseignements reçus en vertu du par. 1 par un État contractant sont tenus secrets de la même manière que les renseignements obtenus en application de la législation interne de cet État et ne sont communiqués qu'aux personnes ou autorités (y compris les tribunaux et organes administratifs) concernées par l'établissement ou le recouvrement des impôts mentionnés au par. 1, par les procédures ou poursuites concernant ces impôts, par les décisions sur les recours relatifs à ces impôts, ou par le contrôle de ce qui précède. Ces personnes ou autorités n'utilisent ces renseignements qu'à ces fins. Elles peuvent révéler ces renseignements au cours d'audiences publiques de tribunaux ou dans des jugements. Nonobstant ce qui précède, les renseignements reçus par un État contractant peuvent être utilisés à d'autres fins lorsque cette possibilité résulte des lois des deux États et lorsque l'autorité compétente de l'État qui fournit les renseignements autorise cette utilisation.  
 
7.2. Dans le contexte de la procédure d'assistance administrative initiée par la demande collective française du 11 mai 2016, le Tribunal fédéral a jugé que l'utilisation des renseignements obtenus par la voie de l'assistance administrative dans la procédure pénale alors ouverte en France contre la banque B.________ AG serait contraire au principe de la spécialité réservé à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR (consid. 7.5), mais que la France avait fourni des assurances suffisantes qu'elle ne les utiliserait pas dans le cadre de cette procédure pénale (ATF 146 II 150 consid. 7.6 à 7.9). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé plus avant sur le point de savoir si le principe de la spécialité s'opposait à ce que l'autorité requérante utilise des renseignements obtenus par la voie de l'assistance administrative dans une procédure fiscale dirigée contre une personne tierce. C'est dans un arrêt du 13 juillet 2020, publié dans ATF 147 II 13, que le Tribunal fédéral a précisé que la réserve du principe de spécialité revêtait aussi une dimension personnelle, en ce sens qu'il excluait également que l'autorité requérante puisse utiliser des renseignements reçus par la voie de l'assistance administrative dans une procédure fiscale dirigée contre des personnes tierces (ATF 147 II 13 consid. 3.4; cf. toutefois aussi déjà ATF 144 II 29 consid. 4.4; 142 II 161 consid. 4.6.1). Constatant que la portée personnelle du principe de la spécialité n'était pas admise de manière générale, notamment au plan international, et qu'il subsistait de ce fait une ambiguïté sur la portée de ce principe (cf. à ce sujet A NDREA OPEL, Schutz von Bankmitarbeiterdaten in Amtshilfeverfahren, in RSDA 2020/6, p. 600, RENÉ MATTEOTTI/BÜSRA BECEREN/ALEX USCHATZ, Analyse der bundesgerichtlichen Rechtsprechung zur internationalen Amtshilfe in Steuerangelegenheiten aus dem zweiten Halbjahr 2020, in Archives 89, p. 802), le Tribunal fédéral en a conclu que, dans ces circonstances, il incombait à l'Administration fédérale d'indiquer aux États requérants, dans les décisions finales qu'elle rendrait, de cette restriction d'utilisation des renseignements fournis selon la conception suisse du principe de spécialité (cf. ATF 147 II 13 consid. 3.7).  
S'il existe des indices concrets d'une violation de l'obligation de garder le secret ou du principe de spécialité par l'État requérant, l'État requis peut refuser l'assistance administrative (ATF 146 II 150 consid. 7.3). 
 
7.3. En l'espèce, le Tribunal administratif fédéral a jugé qu'en invoquant une violation du principe de la spécialité en lien avec le risque que l'autorité requérante utilise les renseignements dans des procédures contre des tiers, la recourante ne faisait pas valoir ses propres intérêts, mais l'intérêt de tiers, de sorte que son grief était irrecevable et que, même s'il entrait en matière sur le grief, celui-ci devrait être rejeté (arrêt attaqué consid. 6.3.2).  
 
7.4. Le point de savoir si, contrairement à ce que retient l'instance précédente, la recourante - qui, en tant qu'héritière de la personne visée par la demande, n'est pas une personne tierce dans la procédure - peut, comme elle le soutient, se prévaloir d'une violation du principe de la spécialité peut rester indécis, puisque le grief doit de toute manière être rejeté sur le fond. En effet, il ressort des constatations de fait des juges précédents, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF, supra consid. 2.2) que le courrier du 2 janvier 2020, par lequel l'autorité requérante évoque la possibilité d'utiliser les renseignements qu'elle recevrait dans des procédures fiscales dirigées contre des tiers, est antérieur à la précision apportée le 13 juillet 2020 par le Tribunal fédéral (arrêt 2C_537/2019) quant à la portée personnelle du principe de la spécialité. En outre, dans sa décision finale du 3 mars 2021, l'Administration fédérale a, conformément à l'arrêt précité 2C_537/2019 du 13 juillet 2020, dûment rappelé à l'autorité requérante qu'elle ne pourrait les utiliser qu'en relation avec la personne concernée par la demande et pour les faits décrits dans celle-ci (supra let. B). Le courrier du 2 janvier 2020 ne saurait ainsi constituer un indice concret de violation du principe de la spécialité propre à entraîner un refus de l'assistance administrative.  
 
7.5. Dans ces circonstances, on ne peut pas reprocher aux juges précédents d'avoir violé l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR en confirmant la transmission des renseignements à l'autorité requérante.  
 
8.  
La recourante fait également valoir son droit à l'autodétermination informationnelle tel que garanti par l'art. 8 CEDH pour s'opposer à ce que "ses propres informations bancaires" soient remises à l'autorité requérante. 
Ce grief repose sur la prémisse que des renseignements concernant la recourante elle-même seront transmis à l'autorité requérante. Or, le Tribunal administratif fédéral a précisément constaté que, dans sa réponse au recours, l'Administration fédérale avait indiqué que seules les informations concernant feu C.________, qui faisait l'objet de la demande, seraient transmises aux autorités françaises et que les noms de ses héritiers ne figureraient pas dans la documentation transmise (arrêt attaqué consid 6.3.5). La recourante ne se plaint nullement d'une constatation arbitraire des faits sur ce point (supra consid. 2.2). Le grief de violation de l'art. 8 CEDH est donc sans objet (sur le droit à l'autodétermination informationnelle dans la procédure d'assistance administrative internationale en matière fiscale, cf. ATF 146 I 172 consid. 7). 
 
9.  
La recourante fait finalement valoir que le Tribunal administratif fédéral aurait dû ordonner à l'Administration fédérale d'indiquer à l'autorité requérante le montant des intérêts qui ont été versés au bénéficiaire effectif du compte bancaire concerné par la demande, en application "par analogie" de l'art. 2 par. 2 let. d de l'Accord du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne prévoyant des mesures équivalentes à celles prévues dans la directive 2003/48/CE du Conseil en matière de fiscalité des revenus de l'épargne sous forme de paiements d'intérêts, dans sa teneur applicable jusqu'au 31 décembre 2016 (RO 2005 2571), afin de permettre l'application du mécanisme d'élimination de la double imposition prévu par cet accord. Selon elle, cela reviendrait à "appliquer le droit alors en vigueur, qui prévoyait alors la communication du montant des intérêts payés". 
La question de l'élimination de la double imposition internationale d'un revenu est étrangère à la procédure d'assistance administrative, qui vise uniquement la transmission de renseignements vraisemblablement pertinents. Les griefs de la recourante en lien avec la double imposition internationale des intérêts qui auraient été versés sur le compte bancaire lié à feu C.________ n'ont donc pas de lien avec l'objet du litige. En outre, la recourante n'invoque aucune violation du droit fédéral, se bornant à demander l'application au cas d'espèce d'un accord qui n'est plus en vigueur et sans fournir d'argument qui justifierait d'appliquer "par analogie" l'une de ses dispositions, sans expliquer en quoi ses conditions seraient remplies. 
Pour autant qu'il soit recevable, le grief est ainsi manifestement infondé et doit donc être rejeté. 
 
10.  
Ce qui précède conduit au rejet du recours. Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, à l'Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI,et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 15 mars 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : S. Vuadens