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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_549/2022  
 
 
Arrêt du 24 novembre 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Hohl et Kiss. 
Greffier : M. Botteron. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Guerric Canonica, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. B.________ SA, 
représentée par Me Guillaume Ruff, avocat, 
2. C.________, 
intimés. 
 
Objet 
contrat de vente; erreur essentielle, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2022 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/1536/2018, ACJC/1424/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Au cours de l'année 2016, B.________ SA (ci-après : la venderesse, la défenderesse ou l'intimée) et D.________ SA, tombée ultérieurement en faillite et dont la raison sociale a été radiée (ensemble : les venderesses), sont entrées en pourparlers concernant la vente d'un fonds de commerce, en l'espèce un restaurant sis... à Genève, avec la société A.________ SA (ci-après : l'acquéresse, la demanderesse ou la recourante).  
 
A.b. En avril 2016, le Service du commerce de l'État de Genève a écrit à E.________, employée de D.________ SA et titulaire de la patente de cafetier restaurateur au sein de l'établissement, pour l'informer de l'obligation, pour les établissements publics, de se mettre en conformité avec la nouvelle loi genevoise du 19 mars 2015 sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement (LRDBHD; RSGE I 2 22), entrée en vigueur le 1er janvier 2016. Cette nouvelle loi ainsi que son règlement d'application (RRDBHD; RSGE I 2 22.01) prévoyaient que les personnes titulaires d'une autorisation délivrée en vertu de l'ancienne loi devaient requérir du service une autorisation de remplacement, nécessaire pour poursuivre l'exploitation, au plus tard dans les six mois suivant l'entrée en vigueur de la loi (soit jusqu'à fin juin 2016), et que leur ancienne autorisation serait révoquée en cas d'omission d'en requérir le renouvellement, au terme des 12 mois suivants l'entrée en vigueur de la loi, soit à fin 2016.  
 
A.c. Le 20 juin 2016, les venderesses ont conclu avec l'acquéresse une convention de cession du fonds de commerce du restaurant "D.________" (ci-après : la convention). Cette convention a été rédigée par le conseil de l'acquéresse. Le prix de vente était de 1'950'000 fr. Le paiement se faisait par un premier acompte de 195'000 fr. versé sur un compte de consignation auprès d'un tiers-séquestre, en l'occurrence de C.________, avocat et administrateur unique de l'acquéresse jusqu'en juillet 2018. Le solde devait être versé sur le compte de consignation avant la signature du bail du local commercial par l'acquéresse. La prise de possession de l'établissement était convenue au 1er novembre 2016. L'acquéresse souhaitait transformer les locaux pour exploiter le restaurant sous une autre enseigne de restauration rapide en franchise et devait, pour ce faire, requérir une autorisation de construire.  
L'art. IV ch. 5 de la convention prévoyait que dans le cas d'un ajournement pour l'obtention d'une autorisation de construire, les venderesses autorisaient l'acquéresse à exploiter le restaurant "D.________" tel qu'il était aujourd'hui [à la date de la convention], pendant cette période d'attente. 
Il était également convenu que si les venderesses ou l'acquéresse venaient à "rompre la convention", les parties étaient dans l'obligation de payer une dédite de 195'000 fr. 
L'article VII ch. 1 de la convention prévoyait que l'acquéresse s'engageait au jour de la vente définitive du fonds de commerce, à respecter la législation suisse relative notamment à l'autorisation d'exploiter s'appliquant à une société commerciale. 
Enfin, l'acquéresse déclarait avoir pris connaissance de tous les éléments permettant l'appréciation de la valeur du fonds de commerce et libérait les venderesses de leur obligation de garantie. 
 
A.d. Par e-mail du 26 octobre 2016 de C.________, l'acquéresse a affirmé constater, à la lecture de l'autorisation d'exploitation reçue cinq jours plus tôt de la part des venderesses, que celles-ci ne disposaient pas d'une autorisation mise à jour en vertu de la nouvelle loi. L'acquéresse a déclaré que ce manquement constituait une violation des obligations contractuelles des venderesses, rendant impossible l'exécution de la convention. L'acquéresse a proposé à cette occasion d'amender la convention par un avenant reportant les effets de celle-ci au jour de l'obtention de l'autorisation d'exploitation conforme au nouveau droit.  
Le lendemain, les venderesses ont répondu que la charge de demander une nouvelle autorisation incombait à l'acquéresse, d'après la convention, et que le droit conféré par la convention à l'acquéresse d'exploiter l'enseigne "D.________", dans l'attente de l'autorisation de transformer les locaux, ne les obligeait pas à effectuer les démarches de renouvellement de leur patente. En outre, les venderesses avaient rendu l'acquéresse attentive à la problématique de l'autorisation d'exploitation plusieurs fois depuis le 22 juillet 2016. 
 
A.e. Une demande complète de mise en conformité de la patente a été requise le 28 novembre 2016, mais le Service du commerce a déclaré ne pas pouvoir la traiter avant janvier 2017.  
Les parties ont négocié les termes d'un report des effets du transfert, sous condition que l'acquéresse prépare un avenant formalisant celui-ci. Malgré plusieurs rappels, l'acquéresse n'a jamais préparé cet avenant. 
La venderesse a continué d'exploiter le restaurant jusqu'à sa vente à un tiers le 1er septembre 2017 (art. 105 al. 2 LTF). 
 
A.f. Les parties se sont mutuellement accusées d'inexécution du contrat et ont exigé l'une de l'autre le paiement d'une dédite de 195'000 fr. L'acquéresse a en outre exigé la libération de son acompte de 195'000 fr.  
 
B.  
Par requête de conciliation du 18 janvier 2018, puis, suite à l'échec de celle-ci, par demande du 23 novembre 2018, l'acquéresse a conclu à la restitution de l'acompte de 195'000 fr. déposé auprès de Me C.________, ainsi qu'à la condamnation de la venderesse B.________ SA à lui payer la somme de 195'000 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 20 avril 2017 au titre de dédite. Elle a soutenu avoir été victime d'une erreur essentielle au moment de la signature de la convention. 
La défenderesse a conclu au déboutement de la demanderesse de toutes ses conclusions. Elle considérait que l'acquéresse avait violé ses obligations découlant de la convention et que, par conséquent, l'acompte de 195'000 fr. lui était acquis à titre de dédite. 
Par jugement du 22 juin 2021, le Tribunal de première instance a débouté la demanderesse de toutes ses conclusions. 
Par arrêt du 21 octobre 2022, statuant sur appel de la demanderesse, la Chambre civile du Tribunal cantonal du canton de Genève a confirmé le jugement attaqué. En substance, la cour cantonale a considéré que l'erreur de l'acquéresse n'était pas essentielle. La question de l'interprétation du contrat a été laissée ouverte. 
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui a été notifié le 2 novembre 2022, la demanderesse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 2 décembre 2022. Elle conclut principalement à sa réforme en ce sens que l'acompte de 195'000 fr. lui soit restitué et que la venderesse soit condamnée à lui payer un montant de 195'000 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 20 avril 2017 "à titre de "dédit" (peine conventionnelle) ". Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants de l'arrêt à intervenir. 
L'intimée conclut au rejet du recours. 
La recourante a répliqué et l'intimée a dupliqué. 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
La requête d'effet suspensif a été acceptée par ordonnance du 20 janvier 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) par la partie demanderesse qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), contre un arrêt final (art. 90 LTF), rendu sur appel par le Tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF), dans une affaire civile (art. 72 al. 1 LTF) dont la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1; 136 II 304 consid. 2.4). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2, 115 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al.2 LTF; ATF 139 I 22 consid. 2.3; 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4 in fine).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Relèvent de ces faits tant les constatations relatives aux circonstances touchant l'objet du litige que celles concernant le déroulement de la procédure conduite devant l'instance précédente et en première instance, c'est-à-dire les constatations ayant trait aux faits procéduraux (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Le Tribunal fédéral ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes, c'est-à-dire arbitraires (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5) ou ont été établies en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
 
3.  
Les parties sont liées par un contrat de vente d'un fonds de commerce, soit en l'occurrence d'un restaurant. La question litigieuse porte en premier lieu sur le contenu du contrat, en particulier sur l'existence d'une obligation de la partie venderesse de solliciter le renouvellement de son autorisation d'exploitation du restaurant. Subsidiairement, à défaut d'une telle obligation, le litige se porte sur l'existence d'une erreur essentielle de la partie acquéresse, qui pensait que la venderesse se chargerait de ce renouvellement d'autorisation avant le transfert de sa propriété. Dans l'affirmative, la recourante prétend alors à la restitution de son acompte de 195'000 fr. versé sur un compte de consignation, ainsi qu'au paiement par la venderesse d'une dédite de 195'000 fr. pour inexécution du contrat. 
La cour cantonale a procédé à l'interprétation du contrat. Elle a appliqué la théorie de la confiance, faute d'avoir pu établir une réelle et commune intention des parties sur le point de l'obligation de renouveler la patente. La cour cantonale a interprété l'art. IV ch. 5 de la convention en tant que manifestation de volonté de l'acquéresse - puisque c'est cette dernière qui a rédigé le contrat. Cette clause a la teneur suivante : "dans le cas d'un ajournement pour l'obtention d'une autorisation de construire, les venderesses autorisaient l'acquéresse à exploiter le restaurant "D.________" tel qu'il était à la date de la convention pendant cette période d'attente". La cour cantonale a considéré que l'interprétation de cette clause ne permettait pas d'en déduire une obligation à charge de la venderesse, de s'assurer de la mise à jour de l'autorisation d'exploitation du restaurant avant fin juin. La cour cantonale a également interprété la clause du point de vue de l'acquéresse, mais a laissé ouverte la question de savoir si celle-ci pouvait ou non croire que les venderesses avaient une obligation de faire la demande. 
Examinant ensuite les conditions de l'erreur essentielle dans laquelle l'acquéresse prétendait se trouver au moment de la signature de la convention, plus spécifiquement l'erreur de base (art. 24 al. 1 ch. 4 CO), elle a conclu que l'erreur n'était pas si importante subjectivement pour l'acquéresse, au point que, si elle avait connu la réalité, elle n'aurait pas conclu le contrat. La cour cantonale fonde cette conclusion sur le fait que l'acquéresse, dont les conseils qui ont rédigé la convention devaient connaître la problématique de l'autorisation d'exploitation, aurait prévu expressément cette obligation dans le contrat si cela lui avait été si important. A l'inverse, l'acquéresse a prévu dans le contrat une clause selon laquelle elle connaissait tous les éléments permettant l'appréciation de la valeur du fonds de commerce et qu'elle renonçait à toute garantie de la part des venderesses. 
Partant, la cour cantonale a considéré que la venderesse n'avait pas failli à l'exécution du contrat, et que l'acquéresse n'était pas dans une erreur essentielle sur les obligations de la venderesse au moment de la signature. 
 
4.  
Invoquant la violation de l'art. 18 CO, la recourante soutient que l'interprétation objective du contenu du contrat de vente du fonds de commerce aurait dû conduire la cour cantonale à retenir une obligation de la venderesse de renouveler son autorisation d'exploitation. Pour la recourante, l'article IV ch. 5 de la convention du 20 juin 2016 impliquait que la venderesse se chargerait de renouveler son autorisation d'exploitation afin de permettre à l'acquéresse d'exploiter le restaurant sous l'enseigne "D.________". 
 
4.1. En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 144 III 93 consid. 5.2.1; 123 III 35 consid. 2b).  
Lorsque le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves, il doit rechercher leur volonté objective, selon le principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; arrêt 4A_508/2022 du 3 octobre 2023, consid. 3.1). 
Il doit déterminer le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune des parties pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre, et ce en fonction de l'ensemble des circonstances, c'est-à-dire du contexte dans lequel elles ont traité (art. 1 al. 1 CO en relation avec l'art. 2 al. 1 CC). Les circonstances déterminantes à cet égard sont celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, mais non pas les événements postérieurs (arrêt 4A_643/2020 du 22 octobre 2021 consid. 4.2.2 et 4.2.5 et les références à la doctrine; ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les arrêts cités). Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît claire à première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que son texte ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu; il n'y a toutefois pas lieu de s'écarter du sens littéral du texte adopté par les intéressés lorsqu'il n'existe aucune raison sérieuse de penser qu'il ne correspond pas à leur volonté (arrêt 4A_643/2020 précité consid. 4.2.2; ATF 136 III 186 consid. 3.2.1; 135 III 295 consid. 5.2; 129 III 118 consid. 2.5; 127 III 444 consid. 1b). Il sied encore d'ajouter que, d'après le principe de la confiance, la volonté interne de s'engager du déclarant n'est pas seule déterminante; une obligation à sa charge peut découler de son comportement, dont l'autre partie pouvait, de bonne foi, déduire une volonté de s'engager. Ce principe permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 130 III 417 consid. 3.2 et les arrêts cités). 
La détermination de la volonté objective des parties, selon le principe de la confiance, est une question de droit, que le Tribunal fédéral examine librement; pour la trancher, il doit cependant se fonder sur le contenu des manifestations de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 i.f.). 
 
4.2. En l'espèce, la cour cantonale a respecté le principe de la priorité de la volonté subjective puisqu'elle n'a cherché la volonté objective qu'après avoir constaté que les parties n'étaient pas parvenues à un accord de fait.  
Bien que la recourante soutienne que sa volonté de continuer l'exploitation du restaurant après le 31 décembre 2016 devait faire penser à la venderesse qu'il lui incombait de demander le renouvellement de son autorisation, il n'en demeure pas moins que l'acquéresse disposait également du temps nécessaire après la conclusion du contrat pour la demander elle-même, et qu'elle pouvait également s'enquérir de la question du maintien de la patente avant même la signature du contrat, puisque la nouvelle loi cantonale était déjà en vigueur depuis le 1er janvier 2016. Enfin le texte même du contrat ne laisse aucunement transparaître que le droit d'exploiter l'enseigne "D.________" impliquerait une obligation à la charge des venderesses, de demander le renouvellement de l'autorisation d'exploitation du restaurant. 
La cour cantonale n'a pas violé le droit en tirant une telle conclusion de son interprétation objective de la clause. 
 
5.  
À supposer que la convention de vente ne prévoie pas de clause mettant le renouvellement de l'autorisation d'exploitation à la charge de la venderesse, la recourante soutient qu'elle était alors dans l'erreur au moment de la signature de celle-ci. Elle invoque une violation des art. 23 et 24 CO par la cour cantonale, qui aurait écarté à tort l'existence d'une erreur essentielle. 
Selon la recourante, son erreur consistait à croire qu'il revenait à la venderesse de renouveler son autorisation d'exploitation du restaurant pour qu'elle-même puisse l'exploiter jusqu'à la délivrance du permis de construire l'autorisant à transformer les locaux et à aménager un nouveau restaurant. 
 
5.1. À teneur de l'art. 23 CO, le contrat n'oblige pas celle des parties qui, au moment de conclure, se trouvait dans une erreur essentielle.  
Il y a erreur lorsqu'une personne, en se faisant une fausse représentation de la situation, manifeste une volonté qui ne correspond pas à celle qu'elle aurait exprimée si elle ne s'était pas trompée (arrêt 4A_217/2009 du 3 novembre 2009 consid. 2.4). 
 
5.1.1. L'erreur est essentielle notamment lorsqu'elle porte sur des faits que la loyauté commerciale permettait à celui qui s'en prévaut de considérer comme des éléments nécessaires du contrat (art. 24 al. 1 ch. 4 CO).  
 
5.1.2. Selon l'art. 31 al. 1 et 2 CO, la partie qui invoque son erreur doit le faire dans un délai d'une année dès la découverte du vice, à défaut de quoi le contrat est tenu pour ratifié.  
En outre, lorsque la partie qui invoque son erreur opte pour l'action en garantie des défauts, elle ratifie implicitement le contrat; en effet, l'action en garantie implique un contrat existant (ATF 127 III 83 consid. 1b; arrêt 4A_535/2021 du 6 mai 2022 consid. 7.1). 
 
5.2. La cour cantonale a considéré que les avocats de l'acquéresse, ayant rédigé le contrat après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi cantonale genevoise sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement (LRDBH), ne pouvaient pas ignorer la nécessité de requérir une nouvelle autorisation d'exploitation et qu'il incombait alors à l'acquéresse de prévoir dans la convention une réglementation sur la question du renouvellement de l'autorisation - laquelle était encore possible au moment de la signature. Au lieu de cela, l'acquéresse a prévu une clause selon laquelle elle connaissait tous les éléments permettant l'appréciation de la valeur du fonds de commerce et qu'elle renonçait à toute garantie de la part de la venderesse. La cour cantonale a considéré que les avocats de l'acquéresse auraient réglé le sort de cette question dans le contrat si cette condition avait été déterminante pour la conclusion du contrat.  
Par ces motifs, la cour cantonale a considéré que l'éventuelle obligation de la venderesse d'effectuer les démarches en vue de la mise en conformité de l'ancienne autorisation n'était pas un fait essentiel au sens de l'art. 24 al. 1 ch. 4 CO pour l'acquéresse, au point que celle-ci n'aurait pas signé la convention si elle avait su qu'elle n'existait pas. 
 
5.3. La Cour de céans peut se dispenser d'examiner les griefs à l'encontre de la motivation de la cour cantonale sur la question du caractère essentiel de l'erreur de la recourante. En effet, quoi qu'il en soit, la recourante ne s'est pas prévalue de son erreur dans le délai d'un an dès la découverte de celle-ci prescrit par l'art. 31 al. 1 CO. Ce délai, péremptoire, se relève d'office. Lorsqu'elle prétend avoir réalisé que la venderesse ne disposait plus d'autorisation d'exploitation au-delà de la fin de l'année 2016, la recourante a écrit à la venderesse par la plume de son administrateur C.________, avocat, un e-mail du 26 octobre 2016 indiquant qu'elle était disposée à signer un avenant reportant les effets du transfert. Le 20 décembre 2016, elle a déclaré se départir de la convention et réclamer, en vertu de l'art. IV de cette même convention, 195'000 fr. à titre de dédite, en plus de la restitution de son acompte de 195'000 fr. Elle ne s'est pas prévalue d'une erreur, mais d'une violation contractuelle. Ce n'est qu'à dater de l'introduction de l'instance, par requête du 17 janvier 2018, soit plus d'un an après avoir découvert que les venderesses ne disposeraient plus d'autorisation d'exploitation après la fin 2016, que la recourante a mentionné s'être trouvée dans l'erreur au moment de la signature. Partant, le délai péremptoire d'un an dès la découverte de l'erreur était écoulé.  
De plus, la recourante a effectivement ratifié la convention. En effet, au lieu de se prévaloir de son erreur et de la nullité du contrat qui en serait la conséquence, elle a, au contraire, reproché à sa cocontractante une inexécution de la convention et s'est prévalue d'une indemnité en vertu de celle-ci, de 195'000 fr. en sa faveur. Ce faisant, elle a ratifié le contrat puisqu'elle a choisi la voie de l'inexécution prévue par le contrat lui-même. 
En définitive, que son erreur soit essentielle au sens de l'art. 24 al. 1 ch. 4 CO ou non ne change rien, puisque la recourante n'a pas déclaré à temps invalider le contrat pour cause d'erreur et l'a ratifié. 
Par conséquent, son grief fondé sur la violation de l'art. 24 CO est rejeté. 
 
6.  
Il suit de là que la venderesse n'a pas violé le contrat dès lors que celui-ci ne l'obligeait pas à se charger de renouveler la patente du restaurant dans le cadre de la vente de celui-ci, et que l'acquéresse ne s'est pas départie du contrat, faute d'avoir invoqué une éventuelle erreur essentielle à temps. Cette dernière n'a par conséquent pas droit au remboursement de son acompte de 195'000 fr. puisqu'elle n'a pas invalidé le contrat, ni au paiement par la venderesse d'une peine conventionnelle de 195'000 fr. puisque celle-ci n'a pas violé ses obligations contractuelles. 
 
7.  
Dès lors qu'ils n'ont aucune conséquence sur l'issue du litige, les griefs en contestation de l'état de fait de la recourante n'ont pas à être examinés (art. 97 al. 1 LTF). 
 
8.  
Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté aux frais de la recourante. Celle-ci versera une indemnité de dépens à l'intimée (art. 66 al. 1 et 68 al. 1-2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr. sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera une indemnité de 7'000 fr. à l'intimée à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 24 novembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Botteron