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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_82/2023  
 
 
Arrêt du 8 août 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jametti, présidente, Kiss et Rüedi. 
Greffier: M. O. Carruzzo. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Philippe Eigenheer, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Pierre Seidler, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
responsabilité civile du détenteur de véhicule; causalité naturelle; preuve du dommage, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 3 janvier 2023 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (PT18.004353-211980, 625). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.________ a commencé une formation d'infirmière auprès de la Haute Ecole de Santé Vaud (HESAV) au mois d'octobre 2002. Ayant échoué au premier cycle, elle a été promue au deuxième cycle au mois d'octobre 2005.  
 
A.b. Le 16 janvier 2006, sur une route verglacée, un automobiliste au volant de son véhicule, assuré en responsabilité civile auprès de A.________ SA, a heurté par l'arrière la voiture de B.________ (ci-après: la lésée), laquelle était en train de freiner et tentait de s'immobiliser. L'automobile conduite par la lésée a alors fait un quart de tour sur sa droite et a heurté un véhicule à l'arrêt.  
La lésée s'est immédiatement plainte de douleurs cervicales et a consulté le même jour le Dr C.________, lequel lui a diagnostiqué une entorse cervicale. Il a attesté une incapacité de travail totale d'une durée de trois à cinq jours. 
Dans un rapport du 7 juillet 2006, la Dre D.________, médecin généraliste, a attesté une incapacité de travail de 100 % du 19 au 29 janvier 2006 et de 50 % du 30 janvier au 7 mai 2006. Elle a jugé l'évolution de l'état de la lésée favorable et a estimé qu'il ne fallait pas s'attendre à des séquelles. 
 
A.c. La lésée a été exmatriculée de la HESAV le 16 novembre 2006. Entendue en cours de procédure, elle a expliqué avoir repris les cours au mois d'avril 2006, mais qu'elle n'avait pas pu terminer son stage de formation pratique en raison de douleurs ressenties à la nuque. Faute d'arrangement avec l'école, elle avait alors renoncé à sa formation au mois de novembre 2006. La lésée a ensuite entrepris une formation auprès de l'Ecole d'études sociales et pédagogiques, à Lausanne, du 18 septembre 2007 au 19 août 2011, date à laquelle elle a obtenu un diplôme en travail social avec orientation en éducation sociale. Depuis le 14 février 2011, la lésée travaille dans une prison vaudoise en tant qu'intervenante socio-éducative en milieu de détention à un taux de 70 %.  
 
A.d. La lésée se plaignant de cervicalgies persistantes à la suite de son accident, une IRM cervicale a été réalisée. Dans un rapport du 31 mai 2007, le radiologue E.________ a relevé des "altérations dégénératives débutantes des disques C3-C4, C4-05 et C5-C6" et a conclu à un enfoncement vraisemblablement traumatique du plateau supérieur de C6 dans sa partie antérieure, encore entouré d'une réaction inflammatoire de la vertèbre.  
 
A.e. Entre les mois d'avril et octobre 2007, la lésée a consulté à plusieurs reprises la Dre F.________, spécialiste en médecine interne et en maladies rhumatismales, pour des cervico-dorsalgies chroniques. La praticienne a rédigé un rapport le 18 décembre 2007, dans lequel elle relevait notamment que l'IRM réalisée montrait vraisemblablement l'existence d'une petite lésion, non diagnostiquée au départ, du bord supérieur du plateau C6 dans les suites de l'accident survenu le 16 janvier 2006. Elle a également fait état d'un deuxième accident de la circulation dont avait été victime la lésée en juillet 2007 et a indiqué qu'une appréciation neutre pluridisciplinaire lui paraissait souhaitable.  
 
A.f. Dans un rapport du 1er février 2008, le Dr G.________, spécialiste en orthopédie chirurgicale, a confirmé le diagnostic d'une fracture C6 type 1.1.  
 
A.g. H.________ SA, assureur-accidents obligatoire de la lésée, a confié aux Drs I.________, psychiatre, et J.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, au sein de la Clinique K.________, le soin de réaliser une expertise pluridisciplinaire. L'expertise psychiatrique s'est déroulée en présence de la lésée et de son père, lequel s'est montré "parfois un tout petit peu trop participatif à l'examen", répondant à la place de sa fille ou lui posant des questions. Au niveau de l'anamnèse professionnelle, les experts ont notamment relevé, dans leur rapport du 24 avril 2008, que la lésée, qui se destinait à la profession de sage-femme avant d'entamer sa formation en soins infirmiers avait ensuite changé d'avis quant au métier qu'elle souhaitait exercer, l'intéressée désirant désormais travailler dans le secteur psychiatrique. Dans leur rapport, les spécialistes ont relevé que la lésée avait souffert, dès l'âge de 13 ans, de diverses affections allant de la dépression au trouble obsessionnel compulsif, en passant par l'anorexie, et avait une tendance naturelle à vouloir minimiser les troubles psychiques éventuellement présents. lls ont également estimé que la relation de causalité entre l'accident du 16 janvier 2006 et les douleurs cervicales persistantes était vraisemblable, voire certaine. Le cas ne pouvait pas être tenu pour stabilisé et un avis neurochirurgical pour la fracture de C6 était souhaitable. Ledit rapport ne faisait pas état d'une éventuelle incapacité de travail.  
A la requête de H.________ SA, le Dr L.________, neurologue, a ausculté la lésée le 4 septembre 2008. Après avoir indiqué que l'intéressée avait été percutée par un bus en deux temps, il a relevé une fracture-tassement du bord antérieur du plateau supérieur de C6, ce qui constituait une distorsion cervicale de stade IV selon la Quebec Task Force. A son avis, les cervicalgies déclarées étaient la conséquence probable, voire certaine, de l'accident du 16 janvier 2006. Le rapport dudit spécialiste ne mentionnait aucune incapacité de travail de la lésée. 
 
A.h. Dans un rapport établi le 13 novembre 2008, les Drs M.________ et N.________, respectivement chef de clinique et médecin-assistant auprès du service d'angiologie du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), ont indiqué que la symptomatologie présentée par la lésée pouvait " possiblement " être mis en lien avec un problème au niveau du tunnel carpien.  
 
A.i. Par courrier du 1er juillet 2009, le Dr O.________, médecin-conseil de A.________ SA, a interpellé le Dr P.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et médecin-conseil de H.________ SA. Selon le Dr O.________, les expertises des spécialistes de la Clinique K.________ et du Dr L.________ présentaient de nombreux éléments incohérents ou incomplets.  
Par courrier du 14 septembre 2009, le Dr P.________ a répondu au Dr O.________ qu'il s'en tenait aux conclusions des expertises médicales réalisées, en expliquant pourquoi. 
 
A.j. Dans un rapport du 28 juillet 2009, la Dre F.________ a fait état de plaintes formulées par sa patiente, laquelle lui avait indiqué qu'elle n'arrivait jamais à participer à une journée complète de cours dans le cadre de sa formation d'éducatrice spécialisée et était empêchée de vivre comme les autres personnes de son âge.  
 
A.k. A la demande du conseil de la lésée, le Dr Q.________, spécialiste en neurochirurgie, a examiné l'intéressée. Dans son rapport du 18 février 2010, il a indiqué qu'il y avait, s'agissant de la supposée fracture de C6, "au moins autant d'arguments parlant contre que pour une fracture", qu'une telle fracture était tout sauf acquise et qu'elle devait dans tous les cas être qualifiée de bénigne. Il a constaté que le statu quo sine était intervenu deux ans après le traumatisme, lequel devait être qualifié de traumatisme cervical qui entrait dans la catégorie II à III de la Quebec Task Force. Il considérait qu'à ce stade, il n'y avait plus aucune atteinte en rapport causal avec l'événement du 16 janvier 2006.  
 
A.l. Le 5 août 2010, H.________ SA a indiqué au conseil de la lésée qu'elle pouvait procéder au règlement de son dommage permanent sur la base d'un taux d'atteinte à l'intégrité arrêté à 15 %, ce qui représentait 16'020 fr. de prestations à titre LAA et 5'154 fr. 30 à titre de prestations complémentaires LAA.  
 
A.m. Insatisfaite des conclusions du Dr Q.________, la lésée a sollicité une nouvelle expertise auprès du service de neurologie du CHUV. Dans leur rapport du 29 août 2011, le Prof. R.________ et la Dre S.________, respectivement médecin-chef et médecin-assistante dudit service, ont estimé que l'intéressée souffrait d'un syndrome cervical très probablement en lien avec l'accident dont elle avait été victime le 16 janvier 2006. Ils ont estimé le taux de capacité de travail de l'intéressée à 70 %, tout en précisant que celui-ci n'était pas définitif et devrait être réévalué une fois que le traitement de neuroréhabilitation propposé serait terminé. Ils ont par ailleurs noté que l'intéressée arrivait à exécuter toutes les tâches ménagères de façon indépendante, à l'exception du lavage des vitres.  
 
A.n. Dans son rapport établi le 23 octobre 2012, le Dr T.________, chef de clinique auprès du service de neuropsychologie et de neuroréhabilitation du CHUV, a retenu que la lésée souffrait de cervico-scapulalgies chroniques après traumatisme cervical de type " coup du lapin " survenu le 16 janvier 2006, compliquées d'une fracture du plateau supérieur de C6, de lombalgies chroniques, de sciatalgies droites sur syndrome du muscle pyramidal et d'un déconditionnement physique global. S'agissant de la capacité résiduelle de travail de la lésée, il a préconisé l'exercice d'une activité qui évitait si possible le port de charges. Il a précisé que l'intéressée semblait en mesure de poursuivre sa formation d'éducatrice spécialisée vu l'absence d'atteinte physique ou rachidienne qui contre-indiquerait le port de charges.  
 
A.o. Après avoir réglé une première fois son recours contre A.________ SA, H.________ SA a poursuivi son versement des prestations à la suite de la reprise du traitement médical. Le 22 juillet 2013, H.________ SA a adressé à A.________ SA une nouvelle demande de liquidation du recours pour un montant total de 34'489 fr. 45 (pour la part LAA), dont 16'020 fr. pour l'atteinte à l'intégrité déterminée transactionnellement et 7'379 fr. 65 pour des frais d'expertises.  
 
A.p. Dans un document intitulé " rapport d'évaluation de l'incapacité dans le travail ménager " et daté du 29 août 2013, U.________, ergothérapeute d'entreprise, a estimé à 14,83 % le taux d'incapacité ménagère de la lésée.  
 
A.q. Dans un rapport établi le 19 novembre 2015, le Dr V.________, spécialiste en neurochirurgie, a estimé que le diagnostic de fracture de la sixième vertèbre cervicale était certain et qu'il s'agissait indiscutablement de la conséquence directe de l'accident qui constituait une lésion traumatique sévère. Il a également retenu une incapacité de travail de 30 % de la lésée dans son activité d'éducatrice, directement imputable à l'accident survenu en janvier 2006. Il a en outre retenu des limitations de l'intéressée, estimées à 20 %, dans l'accomplissement de ses activités ménagères.  
 
B.  
 
B.a. Après une tentative infructueuse de conciliation, la lésée a saisi, en date du 26 janvier 2018, la Chambre patrimoniale cantonale vaudoise d'une demande tendant au paiement de la somme de " 1'372'802 fr. ou de toute autre somme à dire de justice, plus intérêts à 5 % à dire de justice ".  
En cours de procédure, la demanderesse a renoncé à la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire. 
Statuant le 17 janvier 2020, la Chambre patrimoniale a admis partiellement la demande et a condamné A.________ SA à verser à la lésée la somme de 2'819 fr. 80 avec intérêts, à titre de frais de l'ergothérapeute consultée afin de déterminer le dommage ménager. Elle a retenu un lien de causalité entre l'accident et les cervico-scapulalgies chroniques de la lésée. Elle a toutefois considéré que la demanderesse avait échoué à rapporter la preuve du montant de son dommage, à l'exception de la somme précitée. 
 
B.b. Le 17 avril 2020, la lésée a fait appel de ce jugement, concluant à ce que la défenderesse soit condamnée à lui payer la somme de " 1'474'626 fr. ou telle autre somme à dire de justice ".  
A.________ SA a conclu, principalement, à l'irrecevabilité de l'appel et, subsidiairement, à son rejet. Elle a formé simultanément un appel joint. 
Par arrêt du 10 juin 2021, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté l'appel formé par la lésée et a admis l'appel joint formé par A.________ SA. Elle a réformé le jugement attaqué dans le sens que la demande de la lésée est rejetée. En bref, elle a considéré que la circonstance selon laquelle les rapports médicaux concluaient " en grande majorité " à l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et l'état de santé de la lésée ne permettait pas de retenir ce fait comme prouvé, dès lors que lesdits rapports avaient été dûment contestés par la défenderesse et qu'il ne s'agissait pas d'expertises judiciaires. La lésée n'ayant pas apporté la preuve du lien de causalité entre l'accident de janvier 2006 et les cervico-scapulalgies chroniques dont elle souffrait, ni du lien causal entre l'accident et la fin de sa formation en soins infirmiers, elle ne pouvait pas prétendre à la réparation d'un quelconque dommage. 
 
B.c. Statuant par arrêt du 13 décembre 2021 (cause 4A_410/2021), le Tribunal fédéral a admis le recours formé par la lésée à l'encontre de cet arrêt. Partant, il a annulé celui-ci et renvoyé la cause à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants. En bref, il a considéré que les rapports d'expertise mis en oeuvre par l'assureur-accidents de la lésée, à savoir le rapport pluridisciplinaire du 24 avril 2008 de la Clinique K.________ et celui établi par le Dr L.________, ne devaient pas être considérés comme des expertises privées et, partant, comme de simples allégations d'une partie. La cour cantonale aurait dû au contraire en apprécier librement la valeur probante, après avoir respecté le droit d'être entendu des parties, raison pour laquelle il convenait de lui renvoyer la cause afin qu'elle procède de la sorte et statue à nouveau sur le lien de causalité litigieux.  
 
B.d. Le 3 janvier 2022, la cour cantonale a invité les parties à se déterminer sur la suite à donner à la procédure eu égard à l'arrêt prononcé le 13 décembre 2021 par le Tribunal fédéral.  
Le 2 mars 2022, les parties se sont déterminées. La lésée a sollicité la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise médicale pluridisciplinaire dans l'hypothèse où celle de la Clinique K.________ n'aurait pas de valeur probante. 
Le 8 mars 2022, la défenderesse a déposé des déterminations spontanées et s'est opposée à la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise. 
Par arrêt du 3 janvier 2023, la cour cantonale, admettant partiellement l'appel principal et très partiellement l'appel joint, a réformé le jugement querellé en ce sens qu'elle a condamné la défenderesse à verser à la lésée la somme de 1'291'256 fr. (472'729 fr. 65 [perte de gain actuelle] + 495'401 fr. 40 [perte de gain future] + 57'133 fr. 50 [atteinte à l'avenir économique] + 99'219 fr. 70 [dommage ménager actuel] + 159'971 fr. 95 [dommage ménager futur] + 3'980 fr. [indemnité pour tort moral] + 2'819 fr. 80 [frais d'expertise de U.________]). Elle a jugé irrecevable la conclusion de la demande portant sur le paiement d'un "intérêt à 5 % à dire de justice", faute pour l'intéressée d'avoir précisé la date du point de départ de l'intérêt réclamé. La cour cantonale a en outre procédé à une nouvelle répartition des frais et dépens de la procédure de première instance. Les motifs qui étayent cette décision seront examinés plus loin dans la mesure utile à la compréhension des critiques dont elle est la cible. 
 
C.  
Le 3 février 2023, A.________ SA (ci-après: la recourante) a formé un recours en matière civile à l'encontre de cet arrêt. Elle conclut principalement à la réforme de la décision entreprise en ce sens que la lésée (ci-après: l'intimée) est déboutée entièrement de toutes ses conclusions. Subsidiairement, elle requiert l'annulation de l'arrêt déféré et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
En tête de sa réponse, l'intimée a conclu à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, à son rejet. 
La cour cantonale s'est référée à son arrêt. 
La recourante a déposé des observations spontanées sur la réponse. 
L'intimée a déclaré contester le bien-fondé des déterminations de son adversaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont satisfaites, en particulier l'exigence d'une valeur litigieuse égale ou supérieure à 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2). Il n'est en revanche pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4).  
 
3.  
Il s'impose d'examiner la question de l'autorité de l'arrêt de renvoi, dont la recourante dénonce la violation à plusieurs titres. 
 
3.1. En vertu du principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi, la cour cantonale à laquelle une affaire est renvoyée est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants en droit de l'arrêt du Tribunal fédéral. Sa cognition est ainsi limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi (ATF 131 III 91 consid. 5.2; arrêt 4A_606/2020 du 1er septembre 2021 consid. 3.1 non publié aux ATF 147 III 463 et les références citées). L'arrêt de renvoi fait aussi autorité pour les parties et le Tribunal fédéral lui-même. La nouvelle décision cantonale ne se prête pas à des griefs que le Tribunal fédéral avait expressément rejetés dans l'arrêt de renvoi ou qu'il n'avait pas eu à traiter, faute pour les parties de les avoir invoqués dans la première procédure de recours alors qu'elles auraient pu et dû le faire (ATF 135 III 334 consid. 2 et 2.1; 131 III 91 consid. 5.2; arrêt 4A_121/2022 du 8 novembre 2022 consid. 4.1).  
 
3.2.  
 
3.2.1. Premièrement, la recourante fait valoir que son adversaire était tenue d'établir un double rapport de causalité entre l'événement dommageable du 16 janvier 2006 et les cervicalgies chroniques dont elle souffre, d'une part, ainsi que l'arrêt de ses études d'infirmière, d'autre part. Or, à son avis, le Tribunal fédéral aurait uniquement renvoyé l'affaire à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau sur le premier lien de causalité. Par conséquent, l'autorité précédente, qui avait déjà conclu à l'inexistence du second lien de causalité, ne pouvait pas réexaminer cette question dans la décision qu'elle a rendu à la suite de l'arrêt fédéral de renvoi.  
Semblable argumentation n'emporte nullement la conviction de la Cour de céans. Dans son arrêt de renvoi du 13 décembre 2021, le Tribunal fédéral a certes examiné exclusivement le moyen pris de l'établissement manifestement inexact des faits et de la violation de l'art. 8 CC, en tant qu'il se rapportait à la question relative à la preuve du lien de causalité naturelle entre l'accident du 16 janvier 2006 et les troubles sur lesquels la lésée fondait sa prétention en dommages et intérêts. Dans son mémoire de recours, la lésée avait toutefois soulevé divers griefs en lien avec la perte de gain qu'elle prétendait avoir subi du fait de l'arrêt de ses études d'infirmière en raison de l'accident survenu en janvier 2006. Or, le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur les critiques formulées par l'intéressée. Dans son arrêt de renvoi, il a en effet indiqué que la cour cantonale devrait examiner les différents moyens invoqués par la lésée en lien avec la démonstration de son préjudice, notamment s'agissant de la perte de gain qu'elle prétendait avoir subie du fait de l'accident survenu en janvier 2006, dans l'hypothèse où elle conclurait à l'existence d'un lien de causalité entre cet événement dommageable et les troubles sur lesquels la lésée fondait ses diverses prétentions. Aussi la cour cantonale n'a-t-elle pas méconnu l'autorité de l'arrêt de renvoi en examinant si l'accident du 16 janvier 2006 avait provoqué l'arrêt des études d'infirmière de la lésée. 
 
3.2.2. Deuxièmement, la recourante fait grief aux juges cantonaux d'avoir enfreint le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi en réexaminant la valeur probante des différents éléments ressortant des expertises privées alors que le Tribunal fédéral avait uniquement donné pour instruction à la cour cantonale d'apprécier librement la valeur probante de deux expertises, à savoir celles réalisées par le Dr L.________ et par les spécialistes de la Clinique K.________.  
Semblable reproche tombe à faux. Le Tribunal fédéral a en effet renvoyé l'affaire à la cour cantonale afin qu'elle statue à nouveau sur le lien de causalité litigieux. Ce faisant, il n'a jamais laissé entendre que l'autorité précédente ne pourrait pas procéder à une nouvelle appréciation de l'ensemble des éléments à sa disposition pour trancher cette question. 
 
3.2.3. Troisièmement et dernièrement, la recourante fait valoir que la cour cantonale ne pouvait pas statuer à nouveau sur la question de l'indemnité pour tort moral réclamée par l'intimée. A cet égard, elle relève que l'autorité précédente, dans son arrêt du 10 juin 2021, avait indiqué que l'atteinte subie par l'intimée avait déjà été compensée par l'indemnité de 16'020 fr. pour atteinte à l'intégrité que lui avait versée l'assureur-accidents.  
Quoi que soutienne l'intéressée, la cour cantonale n'a pas enfreint le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi. Il appert en effet que le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur la question de l'indemnité pour tort moral réclamée par la lésée, laquelle avait du reste formulé diverses critiques sur ce point, dans le recours qu'elle avait interjeté à l'encontre de l'arrêt cantonal du 10 juin 2021. La cour cantonale, qui n'avait pas examiné cette question dans son premier arrêt, comme en attestent les termes utilisés par elle ("i l n'y a pas lieu d'y revenir non plus "), mais s'était contentée de relever, en passant, que l'atteinte avait déjà été compensée par l'octroi d'une indemnité versée par l'assureur-accidents de la lésée, était dès lors en droit de procéder à un véritable examen de ce préjudice. 
 
4.  
La recourante se plaint, à de multiples égards, d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et d'établissement manifestement inexact des faits. 
 
4.1. En matière d'appréciation des preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 136 III 552 consid. 4.2).  
 
4.2. Le juge civil peut utiliser, à titre de preuve, une expertise mise en oeuvre par une autre autorité dans une autre procédure (par exemple, une expertise médicale ordonnée par un assureur social). Une telle expertise " extérieure " a valeur probante dans la mesure où le juge civil respecte le droit d'être entendu des parties. Celles-ci doivent pouvoir prendre position sur le contenu de l'expertise, s'exprimer sur la personne de l'expert et poser des questions complémentaires. L'expertise extérieure est alors dotée de la même valeur probatoire qu'une expertise ordonnée par le juge civil lui-même, étant entendu qu'il en apprécie librement la force probante et reste libre d'ordonner une nouvelle expertise sur les mêmes questions si l'expertise extérieure prête le flanc à la critique (ATF 140 III 24 consid. 3.3.1.3; arrêt 4A_410/2021, précité, consid. 3.2 et les références citées).  
Si l'expertise n'a pas été requise par une autre autorité dans une autre procédure, il s'agit d'une expertise privée. Celle-ci n'est pas un moyen de preuve au sens de l'art. 168 al. 1 CPC, mais doit être assimilée aux allégués de la partie qui la produit. Elle doit être prouvée si elle est contestée de manière motivée par la partie adverse. Dans la mesure où elle est corroborée par des indices qui, eux, sont établis par des preuves, elle peut constituer un moyen de preuve (ATF 141 III 433 consid. 2.6 et les références citées; arrêt 4A_410/2021, précité, consid. 3.2 et les références citées). 
Lorsque la juridiction cantonale se rallie au résultat d'une expertise, le Tribunal fédéral n'admet le grief d'appréciation arbitraire des preuves que si l'expert n'a pas répondu aux questions, si ses conclusions sont contradictoires ou si, de quelque autre manière, l'expertise est entachée de défauts à ce point évidents et reconnaissables, même en l'absence de connaissances ad hoc, qu'il n'était tout simplement pas possible de les ignorer. L'autorité cantonale n'est pas tenue de contrôler à l'aide d'ouvrages spécialisés l'exactitude scientifique des avis de l'expert. Il n'appartient pas non plus au Tribunal fédéral de vérifier que toutes les affirmations de l'expert sont exemptes d'arbitraire; sa tâche se limite à examiner si l'autorité cantonale pouvait, sans arbitraire, faire siennes les conclusions de l'expertise (ATF 133 II 384 consid. 4.2.3; 132 II 257 consid. 4.4.1; arrêt 4A_558/2020 du 18 mai 2021 consid. 4.1 et les références citées).  
 
4.3.  
 
4.3.1. La recourante reproche tout d'abord à la cour cantonale d'avoir apprécié de façon arbitraire la valeur probante de l'expertise réalisée par le Dr L.________ et d'avoir retenu, manifestement à tort, l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et les cervico-scapulalgies dont souffre l'intimée.  
 
4.3.2. L'existence d'un lien de causalité naturelle entre le fait générateur de responsabilité et le dommage est une question de fait que le juge doit trancher selon la règle du degré de la vraisemblance prépondérante. Dans ce cas, l'allègement de la preuve se justifie par le fait que, en raison de la nature même de l'affaire, une preuve stricte n'est pas possible ou ne peut être raisonnablement exigée de celui qui en supporte le fardeau (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2, 462 consid. 4.4.2). La vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2).  
 
4.3.3. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale, détaillant le contenu du rapport établi par le Dr L.________, relève que celui-ci est arrivé à la conclusion que la patiente présentait une fracture-tassement du bord antérieur du plateau de C6, ce qui constituait une distorsion cervicale de stade IV selon la Quebec Task Force. Selon cet expert, les cervicalgies étaient la conséquence probable, voire certaine, de l'accident survenu le 16 janvier 2006. L'autorité précédente observe aussi que ce praticien a noté que l'intéressée présentait d'autres affections sans lien avec cet événement dommageable. Elle constate aussi que ce spécialiste n'a mentionné aucune incapacité de travail dans son rapport. La cour cantonale rappelle ensuite que le Dr O.________, médecin-conseil de la recourante, a remis en cause les expertises réalisées par les praticiens de la Clinique K.________ ainsi que par le Dr L.________, les rapports en question présentant à son avis des lacunes, insuffisances et des interprétations probablement erronées. La cour cantonale souligne en outre que la recourante a pointé du doigt le fait que le Dr L.________ n'avait pas détaillé les pièces mis à sa disposition pour réaliser son examen et que sa description de l'accident survenu en janvier 2006 ne correspondait pas à la réalité puisque le rapport d'expertise indiquait, à tort, que le véhicule conduit par l'intimée avait été percuté par un bus, en deux temps.  
Procédant ensuite à l'examen du rapport établi par le Dr L.________, la cour cantonale considère que ledit rapport jouit d'une pleine valeur probante, nonobstant les critiques formulées par la recourante à son encontre. A cet égard, elle juge infondé le reproche fait au spécialiste de n'avoir pas détaillé les pièces qui avaient été mises à sa disposition, étant donné qu'il ressort dudit rapport que l'expert s'est fondé sur le dossier de H.________ SA, les documents complémentaires faxés par la Dre F.________, en particulier un rapport de consultation du Dr G.________ du 11 août 2008, un rapport d'IRM fonctionnelle effectuée le 8 août 2008, les documents radiologiques amenés par l'intimée, un entretien avec cette dernière suivi d'un examen neurologique et d'un électroneuromyographique du membre supérieur droit effectué le 4 septembre 2008. L'autorité précédente estime aussi que l'allégation de la recourante selon laquelle des cervicalgies constantes depuis l'accident survenu en janvier 2006 seraient nécessaires au diagnostic de distorsion cervicale de stade IV selon la classification de la Quebec Task Force n'est nullement étayée, étant précisé que la recourante n'a pas requis la mise en oeuvre d'une contre-expertise ni fourni la moindre preuve pour étayer semblable allégation. Elle souligne, par ailleurs, que les avis divergents exprimés par les Dr O.________ et Q.________ ne constituent que des allégations de parties qui ne sont corroborées par aucun autre moyen de preuve. Elle aboutit ainsi à la conclusion que l'accident survenu en janvier 2006 a provoqué chez l'intimée des cervico-scapulalgies chroniques après le traumatisme cervical du type " coup du lapin " ajouté à une fracture du plateau supérieur de C6, ce qui est du reste confirmé par d'autres expertises privées. 
 
4.3.4. Par son argumentation revêtant un caractère appellatoire marqué, la recourante se borne, dans une très large mesure, à soutenir que la cour cantonale n'aurait pas dû retenir que le rapport d'expertise du Dr L.________ jouissait d'une pleine force probante, dès lors que ledit rapport se heurtait à l'avis contraire d'autres professionnels de la santé (en particulier ceux du Dr O.________ et du Dr Q.________). Les critiques émises par l'intéressée ne permettent toutefois pas de démontrer en quoi les conclusions du rapport du Dr L.________, qui rejoignaient du reste celles d'autres praticiens, seraient manifestement fausses, ni en quoi il était arbitraire pour l'autorité précédente de s'y référer. En présence d'avis contradictoires sur des questions dont la résolution exigeait des connaissances spéciales, la juridiction cantonale devait nécessairement opérer un choix entre les opinions exprimées par les divers praticiens ayant examiné l'intimée. Or, la cour cantonale a donné la préférence à l'avis du Dr L.________, sans négliger aucune circonstance pertinente, tout en soulignant que les reproches formulés à l'encontre du rapport établi par ledit médecin ne suffisaient pas à remettre en cause sa pleine force probante. La recourante souligne certes que le spécialiste précité a décrit de manière inexacte l'accident survenu en janvier 2006 et n'a pas discuté les conséquences du second accident dont avait été victime l'intimée. Cela ne signifie toutefois pas que l'autorité cantonale a sombré dans l'arbitraire en faisant siennes les conclusions de l'expertise litigieuse.  
 
4.4.  
 
4.4.1. La recourante reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir procédé à une constatation factuelle manifestement inexacte, en retenant l'existence d'un lien de causalité entre l'accident du 16 janvier 2006 et l'arrêt de la formation en soin infirmiers de l'intimée.  
 
4.4.2. Dans la décision querellée, la cour cantonale constate que l'intimée a arrêté sa formation d'infirmière en novembre 2006, soit quelques mois après l'accident, l'intéressée justifiant l'interruption de sa formation par des douleurs dans la nuque. Si elle observe certes que l'intimée a pu mener sa nouvelle formation d'éducatrice jusqu'à son terme, elle note que celle-ci a été effectuée durant une phase où l'évolution de la santé de l'intéressée s'améliorait, et non peu après l'accident où les douleurs et les plaintes devaient être maximales, étant précisé que la fracture de la vertèbre C6 n'avait pas encore été détectée. Dans la mesure où il convient de se placer au moment de l'abandon de la formation, la juridiction cantonale estime que l'intéressée ne peut se voir reprocher d'avoir mis un terme à sa formation à bout touchant, alors qu'elle souffrait et que ses douleurs, établies, sont admises, par divers praticiens, comme étant en lien de causalité avec la réduction de sa capacité de gain et ménagère. Le fait pour l'intéressée d'avoir déclaré aux experts de la Clinique K.________ souhaiter désormais exercer dans le milieu psychiatrique ne permet pas forcément d'inférer un choix délibéré d'abandonner sa formation en soins infirmiers. D'une part, le choix d'opter pour un domaine plus accessible physiquement est compréhensible eu égard notamment aux douleurs rencontrées par l'intéressée. D'autre part, la déclaration faite par l'intimée peut être interprétée de diverses manières, étant donné que la formation en soins infirmiers peut aussi déboucher sur un poste dans le secteur de la psychiatrie. La cour cantonale observe également que même si les médecins de l'intimée lui ont déconseillé de suivre une formation en éducation spécialisée nécessitant le port de charges, il est notoire que les soins infirmiers en impliquent davantage. Dans ces conditions, l'autorité précédente, se référant à l'expérience générale de la vie et au cours ordinaire des choses, estime que le lien de causalité entre l'accident survenu en janvier 2006 et l'interruption de la formation en soins infirmiers de l'intimée est tenu pour établi.  
 
4.4.3. Dans son mémoire de recours, l'intéressée s'en prend, de manière précise et circonstanciée, à chaque détail du raisonnement tenu par les juges précédents aux fins de démontrer qu'un lien de causalité a été arbitrairement retenu entre l'accident survenu en janvier 2006 et l'arrêt de la formation en soin infirmiers de l'intimée.  
En l'occurrence, la cour cantonale a relevé expressément qu'aucun rapport médical produit dans le cadre de la procédure n'a traité clairement la question de savoir s'il existe un tel lien de causalité. Il sied dès lors d'examiner si, nonobstant cela, l'autorité précédente pouvait considérer ce fait comme établi sans sombrer dans l'arbitraire. Comme le relève la recourante, sans être du reste contredite par l'intimée, cette dernière a présenté deux allégations de fait en lien avec l'arrêt de sa formation en soin infirmiers dans sa demande en justice. Pour étayer ses allégations, l'intimée a offert à titre de moyens de preuve des pièces attestant les dates d'immatriculation et d'exmatriculation de la HESAV ainsi que sa propre audition. Or, lesdits moyens de preuve ne permettaient nullement de prouver, au degré de preuve requis, le moindre lien de causalité entre l'accident du 16 janvier 2006 et l'interruption de ladite formation, et singulièrement d'établir les motifs ayant conduit l'intéressée à changer de formation professionnelle. 
Mais il y a plus. Comme le souligne à bon droit la recourante, l'autorité précédente a reformulé de manière manifestement inexacte les propos tenus par l'intimée lors de son entretien avec la Clinique K.________ au sujet de l'arrêt de sa formation d'infirmière. Comme l'avait allégué la recourante dans sa réponse à la demande, l'intimée avait en effet déclaré ce qui suit lors dudit entretien : 
 
"par la suite, se destinant à la profession de sage-femme, elle a choisi d'entamer le cursus de formation en soins infirmiers. Cependant, les divers stages qu'elle a effectués (l'un en EMS, l'autre en psychiatrie) l'ont fait changer d'avis quant à la profession qu'elle voulait exercer. Elle souhaiterait maintenant travailler dans le domaine psychiatrique." (termis mis en gras par le Tribunal fédéral). 
Il appert ainsi que l'intéressée souhaitait changer de profession. Aussi en omettant de tenir compte des déclarations limpides de cette dernière, la cour cantonale a-t-elle procédé à une interprétation insoutenable en retenant que cette dernière aurait pu, en substance, vouloir dire qu'elle souhaitait poursuivre sa profession mais dans le domaine de la psychiatrie. 
Au demeurant, même s'il était établi que l'intimée avait effectivement pris la décision de mettre fin à sa formation initiale en raison de l'accident survenu en janvier 2006, cela ne signifie pas encore que l'intéressée aurait réellement été empêchée de poursuivre sa formation jusqu'à son terme, seul un expert médical ayant été à même de le déterminer. Or, l'intéressée a renoncé à la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire, raison pour laquelle elle doit supporter l'échec de la preuve du lien causal entre l'accident et l'impossibilité d'achever sa formation d'infirmière. 
En définitive, le raisonnement tenu par les juges précédents, reposant sur une série de constatations non étayées par des moyens de preuve et des appréciations manifestement inexactes a abouti à la conclusion arbitraire selon laquelle il existait un lien de causalité entre l'accident du 16 janvier 2006 et l'interruption des études d'infirmière par l'intimée. Compte tenu de ce qui précède, le degré de preuve requis pour retenir l'existence d'un tel lien de causalité - dont l'autorité avait pourtant une juste conception - n'était manifestement pas atteint en l'espèce. 
 
4.5.  
 
4.5.1. La recourante fait encore grief à la cour cantonale d'avoir sombré dans l'arbitraire en constatant que l'intimée présentait, à la suite de l'accident, un taux d'incapacité de 30 % ainsi qu'une incapacité ménagère de 30 %. A son avis, aucun élément probant ne permet d'établir une éventuelle incapacité de travail ou incapacité ménagère de l'intéressée, raison pour laquelle celle-ci ne saurait obtenir la moindre indemnisation au titre de la perte de gain et du préjudice ménager. La recourante estime aussi que la juridiction cantonale a arbitrairement retenu l'existence d'une atteinte à l'avenir économique de l'intimée. En allouant divers montants à l'intimée pour lesdits postes du dommage, la cour cantonale, se fondant sur ces constatations de fait arbitraires, aurait dès lors aussi enfreint l'art. 58 al. 1 LCR ainsi que les art. 42 et 46 al. 1 CO.  
 
4.5.2. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale, se référant aux rapports d'expertise du Prof. R.________ et de la Dre S.________ du 29 août 2011, à celui du Dr V.________ du 2 décembre 2015 ainsi qu'à l'appréciation de l'ergothérapeute d'entreprise U.________, retient que l'état de santé dégradé de l'intimée après l'accident survenu en janvier 2006 a provoqué une perte de gain de 30 % ainsi qu'une incapacité ménagère de 20 %. Ce faisant, elle s'est exclusivement basée sur des expertises privées, sans que de telles constatations ne soient pourtant étayées par des moyens de preuve jouissant d'une pleine force probante, étant précisé que ni le rapport du Dr L.________ ni celui établi par les praticiens de la Clinique K.________ n'ont fait état de telles incapacités. Or, comme le relève à juste titre la recourante, la cour cantonale avait souligné, dans son arrêt du 10 juin 2021, que cette dernière avait contesté de manière détaillée lesdites expertises privées, lesquelles devaient dès lors être considérées comme de simples allégations de parties devant être prouvées par d'autres moyens de preuve. Curieusement, l'arrêt présentement attaqué est pourtant muet s'agissant des contestations détaillées de la recourante à l'égard des expertises privées en question. Partant, la cour cantonale a sombré dans l'arbitraire en retenant comme "établies" une prétendue incapacité de travail de 30 % et une incapacité ménagère de 20 %, dès lors que ces éléments, ressortant exclusivement d'expertises privées, avaient été soigneusement contestés par la recourante et n'étaient étayés par aucune preuve. A cet égard, il sied de rappeler que le rapport établi par le Dr L.________, lequel jouit d'une pleine force probante, ne faisait pas état de la moindre incapacité de travail ou ménagère de l'intimée. Partant, en tenant pour établies de telles incapacités, l'autorité précédente a manifestement versé dans l'arbitraire.  
Au regard de ce qui précède, l'intimée n'a ainsi, contrairement à ce qu'a retenu arbitrairement la cour cantonale, pas établi à satisfaction de droit que l'accident survenu en janvier 2006 l'aurait empêchée d'achever sa formation en soins infirmiers, ni apporté la preuve d'une éventuelle incapacité partielle de gain ou ménagère. Dans ces conditions, elle ne saurait obtenir la moindre indemnisation au titre d'une prétendue perte de gain ou d'indemnité pour son préjudice ménager allégué. 
 
4.5.3. Il ne saurait en aller différemment s'agissant de l'indemnité allouée à l'intimée pour une prétendue atteinte à son avenir économique. La cour cantonale a en effet fondé arbitrairement son raisonnement sur des faits non établis, en retenant notamment que l'intéressée présentait une incapacité de gain partielle. Comme l'expose du reste de façon convaincante la recourante, sans être contredite par son adversaire, l'intimée n'a pas offert le moindre moyen de preuve visant à établir une prétendue atteinte à son avenir économique. Elle n'a en particulier jamais allégué ni a fortiori démontré qu'elle serait désavantagée sur la marché du travail car il lui serait plus difficile de trouver et de conserver un emploi avec une rémunération identique, ou que ses douleurs pourraient entraver un changement de profession ou réduire ses chances de promotion. Elle n'a surtout jamais prouvé que son taux d'invalidité médico-théorique était encore supérieur à 10 %, ce qui, selon la jurisprudence, exclut toute atteinte à l'avenir économique (arrêt 4A_699/2012 du 27 mai 2013 consid. 5.2 et les références citées). Dans ces conditions, c'est manifestement à tort que l'autorité précédente lui a alloué une indemnité pour atteinte à son avenir économique.  
 
5.  
La recourante reproche encore à la cour cantonale d'avoir enfreint le droit fédéral en allouant une indemnité pour tort moral à l'intimée. 
 
5.1. En vertu de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale.  
Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO (ATF 141 III 97 consid. 11.2). 
Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent avant tout le genre et la gravité de la lésion, l'intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la personne concernée, le degré de la faute de l'auteur ainsi que l'éventuelle faute concomitante de la victime (ATF 141 III 97 consid. 11.2 et les références citées). 
L'indemnité allouée doit être équitable (ATF 130 III 699 consid. 5.1 et les références citées). Le juge applique les règles du droit et de l'équité lorsque la loi le charge, comme l'art. 47 CO, de prononcer en tenant compte des circonstances (cf. art. 4 CC). Le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec réserve la décision d'équité prise en dernière instance cantonale. Il intervient lorsque celle-ci s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, lorsqu'elle repose sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle ou, au contraire, lorsqu'elle ignore des éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; en outre, le Tribunal fédéral redresse les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 141 III 97 consid. 11.2; 135 III 121 consid. 2). 
 
5.2. En l'occurrence, la cour cantonale a alloué une indemnité pour tort moral de 3'980 fr. (20'000 fr. - 16'020 fr. [montant versé par l'assureur-accidents au titre de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité]), car elle a estimé que l'accident survenu en janvier 2006 avait entraîné des "lésions de moyenne gravité" entraînant une incapacité partielle de l'intimée, laquelle n'était âgée que de 24 ans au moment de l'accident.  
 
5.3. Dans son mémoire de recours, l'intéressée conteste, sur un mode appellatoire, la qualification de la gravité des douleurs de l'intimée retenue par la cour cantonale. Elle tente également de manière guère convaincante de soutenir que la cour cantonale ne pouvait pas tenir compte de l'âge de l'intimée au moment de la survenance de l'accident, dès lors que cet élément n'aurait pas été valablement allégué. Si la recourante soutient certes à juste titre que la cour cantonale n'aurait pas dû tenir compte d'une prétendue incapacité partielle de travail, elle échoue en revanche à démontrer que l'autorité précédente aurait abusé de son (large) pouvoir d'appréciation en allouant le montant qu'elle a finalement arrêté, même si une telle indemnité se situe dans le haut de la fourchette de ce qui est admissible. C'est le lieu du reste de souligner qu'il est établi, notamment par le rapport d'expertise du Dr L.________, que l'accident survenu en janvier 2006 a provoqué des douleurs chroniques chez l'intimée (cervico-scapulalgies après le traumatisme cervical du type " coup du lapin " ajouté à une fracture du plateau supérieur de C6), laquelle s'est du reste vu octroyer une indemnité substantielle pour atteinte à l'intégrité de la part de son assureur-accidents. Il s'ensuit le rejet du moyen considéré.  
 
6.  
La recourante reproche enfin à la juridiction cantonale d'avoir retenu que l'intimée avait droit au paiement de la somme de 2'819 fr. 80, montant correspondant à la note d'honoraires de l'ergothérapeute U.________ (expertise W.________), que l'intéressée avait consultée aux fins de calculer son préjudice ménager. 
Tel qu'il est présenté, le grief ne saurait prospérer. Il appert, en effet, que de tels frais ont bel et bien été provoqués par l'accident, puisque le rapport établi par le Dr L.________ confirme l'existence d'un lien de causalité entre l'événement dommageable survenu en janvier 2006 et les douleurs de l'intimée. Sous l'angle procédural, la recourante reproche à la juridiction cantonale d'avoir enfreint les art. 55 et 221 al. 1 let. d CPC, en tenant compte du montant de ladite facture, alors que l'intimée n'avait formulé aucune allégation dans la partie " Faits et moyens de la procédure " de sa demande concernant ladite facture. Il ressort toutefois de l'arrêt attaqué que la partie demanderesse a allégué une série d'éléments dans la partie intitulée " En Droit " de son mémoire de demande, en accompagnant certaines allégations d'offres de preuve. Sous la rubrique intitulée " Les frais " de la partie " En Droit ", la partie demanderesse a notamment allégué ce qui suit: 
 
" 40. La demanderesse a supporté des frais importants non couvert (sic) par son assureur-accidents. 
41. L'espèce (sic), l'enquête W.________ permettant de déterminer le dommage ménager s'est élevée à CHF 2'820 fr.-. 
42...." (complètement d'office selon l'art. 105 al. 2 LTF). 
La demanderesse a offert plusieurs moyens de preuve pour étayer ces allégations, dont la note d'honoraires de U.________. Les frais en question, et notamment ceux relatifs à l'expertise réalisée par la prénommée, n'ont visiblement pas échappé à la recourante, puisque celle-ci a rétorqué, dans sa réponse, que "les frais de l'avocat et d'expertises médicales ont été pris en charge, ou pourraient l'être, par l'assurance de protection juridique..., si bien que ces postes du dommage ne sauraient être pris en compte" (complètement d'office selon l'art. 105 al. 2 LTF). Dans ces conditions, force est d'admettre que la recourante a bel et bien compris qu'il s'agissait de faits allégués sur lesquels il y avait lieu de se déterminer. En tout état de cause, les instances cantonales auraient fait preuve de formalisme excessif, si elles avaient rejeté la demande sur ce point pour défaut de motivation, sans avoir au préalable invité la partie demanderesse à préciser ses allégués (cf. dans le même sens: arrêt 4A_437/2017 du 14 juin 2018 consid. 5.1). Pour le reste, la recourante ne démontre pas que ce poste du dommage aurait été retenu de manière arbitraire. Le moyen s'avère ainsi infondé. 
 
7.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être partiellement admis. L'arrêt attaqué doit dès lors être annulé et réformé en ce sens que la recourante est condamnée à payer à l'intimée la somme de 6'799 fr. 80 (3'980 fr. [indemnité pour tort moral] + 2'819 fr. 80 [frais d'expertise W.________]). La cause sera renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais judiciaires et les dépens des instances cantonales. 
En l'occurrence, les montants alloués à l'intimée dans l'arrêt entrepris sont réduits d'environ 1'284'450 fr. Dans la mesure où la recourante triomphe dans une très large mesure et voit sa conclusion tendant au déboutement intégral de l'intimée rejetée dans une infime mesure, il convient de mettre les frais de la procédure fédérale à la charge de l'intimée. Celle-ci versera en outre à la recourante une indemnité à titre de dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. L'arrêt attaqué est annulé et réformé en ce sens que la recourante est condamnée à payer à l'intimée la somme de 6'799 fr. 80. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 16'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
L'intimée versera à la recourante une indemnité de 18'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais judiciaires et les dépens des instances cantonales. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 8 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : O. Carruzzo