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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_8/2023  
 
 
Arrêt du 7 juillet 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Stadelmann, Juge présidant, Moser-Szeless et Beusch. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par M e Daniel Meyer, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, rue des Gares 12, 1201 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (rente d'invalidité), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 29 novembre 2022 (A/1330/2021 - ATAS/1043/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, né en 1975, a travaillé en dernier lieu comme ferrailleur. Le 9 octobre 2013, il a reçu une poutre sur la mâchoire, avec fracture parasymphysaire droite et de l'angle de l'hémi-mandibule gauche (traitée par réduction et ostéosynthèse le 14 octobre 2013). En arrêt de travail depuis lors, il a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité le 21 juillet 2014. Le cas a été pris en charge par la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). 
Après avoir fait verser à son dossier celui de la CNA, l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'office AI) a recueilli l'avis des médecins traitants, dont ceux de la doctoresse B.________, spécialiste en médecine interne générale et médecin traitant. Il a ensuite mis en oeuvre une expertise pluridisciplinaire auprès de l'Unité d'expertises médicales du Centre universitaire de médecine générale et santé publique de Lausanne (Unisanté), avec une évaluation neurologique, neuropsychologique et maxillo-faciale. Rendant leur expertise le 15 septembre 2020, les docteurs C.________, spécialiste en médecine interne générale, D.________, spécialiste en médecine interne générale, et E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, ont diagnostiqué une majoration de symptômes physiques pour des raisons psychologiques, avec un syndrome algique facial persistant (sans substrat anatomique retrouvé) et des troubles cognitifs aux examens neuropsychologiques (avec des tests de validité des symptômes en faveur d'une collaboration insuffisante), et un épisode dépressif sans précision. Les médecins ont indiqué que l'assuré présentait une capacité de travail entière dans son activité habituelle ou toute autre activité adaptée depuis le 18 décembre 2017, soit un mois après l'ablation du matériel d'ostéosynthèse (du 17 novembre 2017). Par décision du 16 mars 2021, l'office AI a octroyé à l'assuré une rente entière d'invalidité du 1 er janvier 2015 au 31 mars 2018, soit trois mois après l'amélioration de son état de santé.  
 
B.  
L'assuré a déféré cette décision à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève. Il a produit notamment l'avis des docteurs B.________ (notamment des 8 mai 2021, 7 août 2021 et 21 janvier 2022), F.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (du 31 mai 2021), et G.________, spécialiste en neurologie (du 21 mai 2021), ainsi que les résultats d'un scanner du massif facial (du 10 janvier 2022) et d'une évaluation auprès de la consultation ambulatoire de la douleur de l'Hôpital H.________ (du 20 mars 2020). La Cour de justice a entendu les parties et les docteurs B.________, G.________ et F.________ en audience de comparution personnelle et d'enquêtes le 8 février 2022. L'assuré a encore produit l'avis du docteur I.________, spécialiste en chirurgie orale et maxillo-faciale (du 17 mars 2022). Statuant le 29 novembre 2022, la Cour de justice a rejeté le recours. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont il demande l'annulation. Il conclut à l'octroi d'une rente entière de l'assurance-invalidité à compter du 1 er janvier 2015. Subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. A l'appui de son recours, il dépose un nouvel avis médical (du 20 décembre 2022).  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que le Tribunal fédéral applique d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).  
 
1.2. En vertu de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Cette exception, dont il appartient à la partie recourante de démontrer que les conditions sont remplies (ATF 143 V 19 consid. 1.2 et la référence), vise les faits qui sont rendus pertinents pour la première fois par la décision attaquée. En dehors de ces cas, les nova ne sont pas admissibles, qu'il s'agisse de faits ou moyens de preuve survenus postérieurement à la décision attaquée (ATF 144 V 35 consid. 5.2.4; 143 V 19 consid. 1.2 et les références) ou d'éléments que les parties ont négligé de présenter devant l'autorité précédente (ATF 143 V 19 consid. 1.2).  
En l'espèce, le recourant produit un avis médical établi le 20 décembre 2022 "par souci de complétude". Dès lors qu'il n'explique pas en quoi ce document remplirait les conditions de l'art. 99 al. 1 LTF et que ce document est postérieur à l'arrêt attaqué du 29 novembre 2022, le moyen de preuve et les griefs qui s'y réfèrent ne peuvent pas être pris en considération. 
 
2.  
 
2.1. Compte tenu des conclusions et motifs du recours, le litige porte en instance fédérale sur le droit du recourant à une rente entière de l'assurance-invalidité au-delà du 31 mars 2018, étant rappelé que le recourant a été mis au bénéfice d'une rente entière pour la période courant du 1 er janvier 2015 au 31 mars 2018. A cet égard, l'arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels - dans leur version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021 (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1) - relatifs à la notion d'invalidité (art. 7 et 8 al. 1 LPGA en relation avec l'art. 4 al. 1 LAI), à son évaluation (art. 16 LPGA et art. 28a LAI) et à la révision du droit à la rente (art. 17 LPGA), ainsi qu'à la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 125 V 351 consid. 3). Il suffit d'y renvoyer.  
 
2.2. Les premiers juges ont par ailleurs rappelé qu'ils étaient tenus de se prononcer, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, d'après l'état de fait existant au moment où la décision de l'office AI a été rendue (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; 121 V 362 consid. 1b). Ils n'ont dès lors pas pris en considération à juste titre l'évolution alléguée de l'état de santé du recourant postérieure à la décision du 16 mars 2021. L'argumentation contraire du recourant fondée sur l'"économie de procédure" méconnaît les principes jurisprudentiels sur le cadre temporel du litige soumis à la juridiction de première instance.  
 
3.  
Le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques ou psychosomatiques (ATF 143 V 409 et 418; 145 V 215). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références). 
 
4.  
 
4.1. En se fondant sur les conclusions des médecins du centre d'expertises Unisanté (rapport du 15 septembre 2020), la juridiction cantonale a considéré que le recourant avait retrouvé une pleine capacité de travail dans son activité habituelle ou dans toute autre activité adaptée à compter du 18 décembre 2017. Sur le plan somatique, elle a retenu qu'aucun élément ne permettait de douter des conclusions des experts selon lesquelles aucun substrat organique, en particulier aux douleurs, aux céphalées et aux vertiges, n'était à l'origine d'une éventuelle incapacité de travail ou de limitations fonctionnelles à compter du 18 décembre 2017. De plus, rien ne permettait de s'écarter des conclusions des experts sur le plan psychique. La juridiction cantonale a encore ajouté que même si elle retenait au surplus le diagnostic de trouble somatoforme douloureux plutôt que celui de majoration de symptômes physiques pour des raisons psychologiques, elle n'arriverait pas à une solution plus favorable au recourant, puisque les effets sur la capacité de travail, évalués selon les indicateurs pertinents, seraient les mêmes.  
 
4.2. Invoquant une appréciation arbitraire des preuves, le recourant reproche à la juridiction cantonale de s'être fondée sur les conclusions de l'expertise du 15 septembre 2020 pour retenir une amélioration de son état de santé à compter du 18 décembre 2017. Il fait valoir que les premiers juges ont omis de manière arbitraire de tenir compte dans l'évaluation de sa capacité de travail de ses céphalées, de son syndrome vertigineux et de ses douleurs au niveau de la mâchoire. Sur le plan psychique, se référant à l'avis de la doctoresse F.________ (du 31 mai 2021), il conteste de plus le diagnostic de majoration de symptômes physiques pour des raisons psychologiques. Il affirme souffrir d'un trouble somatoforme douloureux persistant et d'une symptomatologie dépressive qui ne résulterait pas de facteurs psychosociaux ou socio-culturels. En se référant au catalogue d'indicateurs définis par la jurisprudence, il soutient enfin que la juridiction cantonale a retenu de manière arbitraire que sa personnalité et ses ressources sur les plans psychique, familial et social apparaissaient conservés et que le tableau clinique était propre à démontrer un déficit de cohérence.  
 
5.  
En l'espèce, mise à part la référence à la divergence d'opinions entre ses médecins traitants, d'une part, et les experts, d'autre part, le recourant ne fait état d'aucun élément concret et objectivement vérifiable susceptible de remettre en cause les conclusions de l'expertise du 15 septembre 2020. En particulier, lors de l'audience d'enquêtes du 8 février 2022, les docteurs G.________ et B.________ ont indiqué pour le premier qu'il ne pouvait pas exclure une majoration des symptômes et pour la deuxième que les vertiges étaient dus aux antalgiques et myorelaxants sans les mettre en lien avec une incapacité de travail. On ne saisit dès lors pas en quoi l'avis de ces médecins remettrait en cause les conclusions de l'expertise pluridisciplinaire concernant les céphalées et le syndrome vertigineux que les experts ont, quoi qu'en dise le recourant, dûment pris en considération. Par ailleurs, si la doctoresse B.________ a demandé un avis chirurgical concernant les douleurs faciales persistantes du recourant, le docteur I.________ lui a répondu qu'un lien entre ces douleurs chroniques et les fractures mandibulaires ostéosynthésées était "peu probable" (avis du 17 mars 2022). Dans ces circonstances, si le recourant a présenté initialement des symptômes physiques compatibles avec l'accident du 9 octobre 2013, il n'établit nullement que ses plaintes auraient une base organique depuis l'ablation du matériel d'ostéosynthèse en novembre 2017. 
Enfin, sur le plan psychique, le recourant omet le fait que la juridiction cantonale a constaté - de manière à lier le Tribunal fédéral (supra consid. 1.1) - que même si elle retenait le diagnostic de trouble somatoforme douloureux, conformément aux conclusions de la doctoresse F.________, elle n'arriverait pas à une solution plus favorable pour le recourant. Aussi, en critiquant le diagnostic de majoration de symptômes physiques pour des raisons psychologiques, le recourant n'établit nullement en quoi la divergence diagnostique entre les experts et la doctoresse F.________ aurait une répercussion concrète sur l'évaluation de sa capacité de travail et de ses limitations fonctionnelles. Il n'y a dès lors pas lieu d'approfondir cette question plus avant. Pour le surplus, procédant de manière appellatoire, le recourant se limite à substituer son appréciation du schéma d'évaluation des affections psychiques à celle des experts. Ce faisant, en présence d'un tableau clinique difficile à appréhender en raison de ses aspects subjectifs et d'une situation psychosociale difficile, il n'établit nullement en quoi les premiers juges se seraient fondés de manière arbitraire sur l'appréciation des experts pour évaluer sa capacité de travail sur le plan psychique. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de s'écarter de l'appréciation des premiers juges. 
 
6.  
Mal fondé, le recours doit être rejeté. 
 
7.  
Les frais judiciaires de la procédure fédérale sont mis à la charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 7 juillet 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Stadelmann 
 
Le Greffier : Bleicker