Avviso importante:
Le versioni vecchie di Netscape non sono in grado di mostrare i grafici. La funzionalità della pagina web è comunque garantita. Se volesse utilizzare frequentemente questa pagina, le raccomandiamo di installare un browser aggiornato.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_425/2023  
 
 
Arrêt du 23 octobre 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Schöbi et Bovey. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Ltd, 
représenté par Me Alexandre de Senarclens, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. B.________ AG, 
représentée par Me Patrick Eberhardt et Me Michael Lepper, avocats, 
 
2. C.________, 
représenté par Me Pierre Kobel, avocat, 
intimées. 
 
Objet 
opposition au séquestre, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile, du 25 avril 2023 (C/11969/2022, ACJC/563/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ Ltd, sise à la Barbade, est, par le biais de sa succursale de [capitale de W.________, Etat africain], active dans l'extraction de pétrole et de gaz naturel en W.________.  
C.________ est un établissement public intégralement détenu par l'Etat [W.________]. 
A.________ Ltd et C.________ sont conjointement titulaires d'une concession pétrolière nommée xxx, qu'elles exploitent par le biais de la société [de l'Etat W.________] D.________ SA. 
Par accord du 6 octobre 2003, A.________ Ltd et C.________ ont notamment convenu des modalités de l'affectation et de l'enlèvement du pétrole brut produit par ladite concession. 
Le processus de vente de pétrole brut se résume comme suit: D.________ SA informe C.________ de la disponibilité d'une cargaison de pétrole "xxx mélange". A.________ Ltd propose à C.________ de vendre à celle-ci sa part nette de pétrole brut. C.________ lance un appel d'offres et conclut un contrat de vente portant sur la totalité du pétrole brut. Ensuite, C.________ achète à A.________ Ltd sa part nette selon un prix calculé sur la base de la vente de la totalité du pétrole. 
 
A.b.  
 
A.b.a. Le 8 février 2022, D.________ SA a informé C.________ de la vente d'une cargaison de pétrole brut "xxx mélange" d'environ 170'000 barils (+/- 5%). Cette quantité comprenait tant la part de A.________ Ltd que celle de C.________.  
Par fax du 28 février 2022, A.________ Ltd a proposé à C.________ la vente de sa part nette de pétrole brut de 63'000 barils/8'159 TM (+/- 5%). La fourchette de la période d'enlèvement était prévue entre le 18 et le 22 avril 2022. A.________ Ltd demandait à C.________ de lui faire parvenir la meilleure offre pour l'achat de la quantité précitée. 
 
A.b.b. A une date indéterminée, C.________ a conclu un contrat de vente avec une entité du groupe E.________ Ltd, qui possède une filiale en Suisse, portant sur 171'834 barils, dont approximativement 63'000 barils appartenant à A.________ Ltd, pour un montant d'environ 18'000'000 USD.  
Le 18 mars 2022, C.________ a accepté d'acheter la part de pétrole brut de A.________ Ltd. Le paiement du prix devait intervenir par virement bancaire 45 jours après la date du connaissement, établi au moment de l'enlèvement (chargement) du pétrole. Tout litige entre les parties en lien avec cette transaction devait être réglé selon le règlement d'arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale à Paris et soumis au droit [de l'Etat W.________]. 
Le 24 mars 2022, A.________ Ltd a confirmé son accord avec ce qui précède. 
 
A.c. Le 7 avril 2022, la banque B.________ AG, par sa succursale de Genève, a émis, sur ordre de E.________ Ltd à Guernesey, une lettre de crédit irrévocable référence yyy, dont le bénéficiaire était C.________, pour un montant de 18'000'000 USD.  
Cette lettre était valable jusqu'au 31 mai 2022 et était payable au 30 ème jour dès la date du connaissement. Elle devait être confirmée par F.________, que B.________ AG s'engageait à rembourser à réception de son message confirmant que les documents présentés étaient conformes et après l'envoi des documents à son attention.  
 
A.d. Le 21 avril 2022, D.________ SA a établi un connaissement (" bill of lading ") contenant la mention " for the order of B.________ AG " et indiquant que la cargaison de pétrole avait été chargée sur un navire au terminal de Y.________ (W.________), à destination de Z.________ (Italie).  
Le même jour, A.________ Ltd a fait parvenir à C.________ sa facture, pour un montant de 6'472'620 USD. 
 
A.e. Par courriel du 27 avril 2022, C.________ a indiqué à A.________ Ltd que la répartition de l'enlèvement du 21 avril 2022 concernait "C.________/ETAT & H.________".  
 
A.f. Le 5 mai 2022, F.________, banque confirmatrice, a demandé à B.________ AG de lui verser, le 20 mai 2022 au plus tard, un montant de 17'114'321,86 USD, les documents reçus par elle étant conformes à ce qui était prévu dans la lettre de crédit.  
Le lendemain, B.________ AG a confirmé qu'elle procéderait au paiement de la somme requise. 
 
A.g. Le 6 mai 2022, A.________ Ltd a mis C.________ en demeure de payer sa facture du 21 avril 2022, ainsi que les intérêts de retard y relatifs.  
 
B.  
 
B.a.  
 
B.a.a. Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance de Genève (ci-après: tribunal) le 23 juin 2022, A.________ Ltd a requis le séquestre, à concurrence de 6'240'635 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 6 juin 2022, de tous avoirs, espèces, liquidités, valeurs, titres et créances appartenant à C.________ en mains de B.________ AG et, en particulier, de la créance en faveur de C.________ incorporée dans la lettre de crédit, référence yyy émise le 7 avril 2022 par B.________ AG.  
A.________ Ltd a invoqué le cas de séquestre prévu à l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP
 
B.a.b. Par ordonnance du 23 juin 2022, le tribunal a ordonné le séquestre requis.  
 
B.b.  
 
B.b.a. Par acte reçu le 4 juillet 2022 au greffe du tribunal, B.________ AG a formé opposition à l'ordonnance de séquestre, sollicitant son annulation avec suite de frais.  
Par acte déposé au greffe du tribunal le 24 août 2022, C.________ s'est également opposée au séquestre. 
A.________ Ltd a conclu principalement à l'irrecevabilité de l'opposition formée par B.________ AG et au rejet de l'opposition déposée par C.________, avec suite de frais. Subsidiairement, elle a conclu à ce que les deux oppositions soient rejetées. 
 
B.b.b. Par jugement du 23 décembre 2022, la vice-présidente du tribunal a admis l'opposition de C.________ contre l'ordonnance de séquestre rendue le 23 juin 2022 et l'a en conséquence révoquée.  
 
B.c. Par arrêt du 25 avril 2023, la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours interjeté par A.________ Ltd contre cette décision et débouté les parties de toutes autres conclusions.  
 
C.  
Par acte posté le 1 er juin 2023, A.________ Ltd interjette un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre cet arrêt. Elle conclut principalement à sa réforme, en ce sens que les oppositions de B.________ AG et de C.________ contre le séquestre n° zzz soient rejetées et l'ordonnance de séquestre du 23 juin 2022 confirmée. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt du 25 avril 2023 et au renvoi de la cause à l'instance cantonale pour qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants. En substance, elle se plaint d'arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'application de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP.  
Par acte posté le 12 juillet 2023, B.________ AG a spontanément répondu. Par acte posté le 28 juillet 2023, C.________ en a fait de même. 
 
D.  
Par ordonnance présidentielle du 23 juin 2023, l'effet suspensif a été attribué au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité cantonale supérieure statuant sur recours (art. 75 LTF). La valeur litigieuse atteint au moins 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). La recourante, qui a été déboutée de ses conclusions par l'autorité précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).  
 
1.2. Il ressort de l'art. 102 LTF qu'une réponse ne doit être sollicitée que si elle apparaît nécessaire pour statuer. Cette restriction procède, d'une part, de la volonté d'assurer la célérité de la procédure et, d'autre part, de limiter les coûts (frais d'avocat) pour les justiciables. Il appartient donc au Tribunal fédéral d'apprécier, de cas en cas, si une réponse lui paraît nécessaire pour statuer. En conséquence, la loi n'oblige pas le Tribunal fédéral à recueillir des observations et ne confère à personne le droit d'en présenter (BOVEY, in Commentaire de la LTF, 3 ème éd., 2022, n° 14 s. ad art. 102 LTF).  
En l'occurrence, les intimées ont répondu, sans y être invitées, au recours, si bien que ces deux actes seront purement et simplement écartés de la procédure et aucuns dépens ne seront alloués à ce titre, quel que soit le sort du présent recours. 
 
2.  
 
2.1. La décision sur opposition au séquestre rendue par l'autorité judiciaire supérieure (art. 278 al. 3 LP) porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 135 III 232 consid. 1.2; arrêt 5A_480/2021 du 28 octobre 2021 consid. 2.1 et les références); la partie recourante ne peut donc se plaindre que d'une violation de ses droits constitutionnels (ATF 144 III 145 consid. 2). Le Tribunal fédéral n'examine un tel grief que si, conformément au principe d'allégation, il a été invoqué et motivé (art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF).  
Lorsque, comme en l'espèce, l'autorité précédente était saisie d'un recours stricto sensu, de sorte que son pouvoir d'examen était limité à l'arbitraire s'agissant des faits retenus par le premier juge (art. 320 let. b CPC), le Tribunal fédéral contrôle librement la manière dont elle a fait usage de sa cognition limitée, en recherchant, dans le cadre des griefs qui lui sont présentés, si elle a nié - ou admis - à tort l'arbitraire de l'appréciation en fait opérée par le premier juge (interdiction de l'"arbitraire au carré"; ATF 116 III 70 consid. 2b; 112 I 350 consid. 1; arrêt 5A_972/2021 du 2 février 2023 consid. 1.3 et les autres références).  
 
3.  
L'autorité cantonale a retenu que la créance invoquée à l'appui du séquestre concernait la vente d'une quantité de pétrole par une société sise à la Barbade, soit la recourante, à une société [de l'Etat W.________], soit l'intimée n° 2, en vertu d'un contrat soumis au droit [de l'Etat W.________] et prévoyant en cas de litige un arbitrage à Paris. Il n'était pas allégué, ni rendu vraisemblable, que le paiement du prix revenant à la recourante devait être payé par l'intimée n° 2 sur un compte bancaire en Suisse, ni à partir d'un tel compte. Contrairement à celui de la créance séquestrée, le paiement de la créance à la base du séquestre ne supposait pas l'intervention d'une banque suisse, dans le cadre d'une opération documentaire ou à un quelconque autre titre. Aucun lien entre la créance concernée et la Suisse ne résultait donc des éléments précités. Par ailleurs, le fait que l'intimée n° 2 ait eu pour but de revendre la quantité de pétrole acquise de la recourante, additionnée d'autres quantités propres, à une entité du groupe E.________, ne permettait pas de retenir que ladite intimée aurait déployé une activité commerciale en Suisse. Outre que la vente régulière par l'intimée n° 2 à cet acheteur n'était pas alléguée, il n'était pas établi que l'acquéreur final du pétrole aurait été la filiale suisse du groupe, le donneur d'ordre de la lettre de crédit étant une entité sise à Guernesey. 
L'autorité cantonale a ajouté que la recourante feignait de confondre la créance séquestrée avec la créance invoquée à la base du séquestre pour le paiement de laquelle le recours à aucun instrument particulier n'était apparemment prévu, et qui ne présentait aucun autre point de rattachement avec la Suisse. La seule connexité pouvant être aperçue entre les deux créances, puisque la recourante était informée du prix auquel sa marchandise serait revendue à l'acquéreur final, ne suffisait pas à conférer à la créance de celle-ci un lien qualifié avec la Suisse. Elle a relevé qu'il n'était notamment pas allégué, ni rendu vraisemblable, que la recourante fût alors informée du fait que l'acquéreur final s'acquitterait de son obligation par le biais d'une lettre de crédit émise par une banque suisse, ni que le recours à cet instrument aurait revêtu une importance quelconque dans sa décision de vendre sa part du pétrole à l'intimée pour le prix qui lui était indiqué. 
L'autorité cantonale a encore examiné l'intérêt respectif des parties au maintien du séquestre litigieux. Elle a relevé que la solution choisie par les parties, dans laquelle la recourante se contentait de vendre "préalablement" une quantité de pétrole à l'intimée n° 2, plutôt que d'apparaître aux côtés de celle-ci dans la vente à l'acquéreur final - et d'être également désignée bénéficiaire de l'instrument de paiement choisi - revient à faire théoriquement supporter à l'intimée n° 2 la totalité du risque de défaut ou de fraude dudit acquéreur, la recourante demeurant fondée à obtenir le paiement de sa part de marchandise auprès de l'intimée n° 2 en pareil cas. La recourante ne pouvait, selon la cour cantonale, simultanément vouloir tirer profit du mode de paiement convenu par l'intimée n° 2 avec l'acquéreur final et des liens que ce mode présentait in casu avec la Suisse pour obtenir des garanties que ses accords avec l'intimée ne prévoyaient pas, dans l'éventualité où comme en l'espèce, un litige naîtrait non pas avec l'acquéreur susvisé, mais avec l'intimée n° 2 elle-même. Elle a encore observé que la recourante avait librement consenti au mode de règlement alternatif des litiges convenu avec l'intimée n° 2 et qu'elle avait pleinement accepté les éventuelles difficultés de recouvrement auxquelles elle prétendait être exposée en cas d'issue favorable de la procédure en cause, sans d'ailleurs rendre ces difficultés autrement vraisemblables. Pour sa part, l'intimée n° 2, qui assumait seule les risques de la transaction finale, devait pouvoir compter sur le paiement effectif de son cocontractant à cette transaction, même si le principe ou la quotité d'une part de pétrole provenant de la recourante étaient contestés par celle-ci, y compris lorsque que le paiement de l'acquéreur final offrait par hypothèse un point de rattachement avec la Suisse.  
Au vu de ces motifs, l'autorité cantonale a nié l'existence d'un cas de séquestre, les intérêts respectifs des parties et le rapport très indirect que la créance invoquée à l'appui du séquestre possédait avec la Suisse ne permettant pas de retenir l'existence d'un lien suffisant entre cette créance et la Suisse. 
 
4.  
 
4.1. La recourante se plaint d'une application arbitraire de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP. Elle reproche en substance à l'autorité cantonale d'avoir nié, sans examen juridique exhaustif d'une question pourtant controversée, la vraisemblance de l'existence d'un lien suffisant avec la Suisse de la créance invoquée à l'appui du séquestre litigieux. Elle lui reproche également de n'avoir pas tenu compte de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce lors de l'examen de l'intérêt du créancier à maintenir le séquestre.  
La recourante soutient que l'utilisation de la lettre de crédit et l'intervention de B.________ AG, en Suisse, constituent le centre de gravité de la transaction, sans lesquels l'opération ne se serait pas faite. Selon elle, E.________ n'aurait pas pu acheter le pétrole à l'intimée sans des instruments documentaires solides et sans les garanties offertes tant par B.________ AG que par la Suisse, comme centre de réputation mondial dans le domaine du commerce international. Pour sa part, elle n'aurait évidemment pas vendu sa part de pétrole d'une valeur de plus de 6 millions USD si elle ne s'était pas préalablement assurée que, à l'instar de ce qui se faisait dans les transactions précédentes, le contrat de vente de brut entre l'intimée et E.________ ne respectait pas scrupuleusement les pratiques commerciales en vigueur dans le domaine, à savoir un prix de vente final garanti par une lettre de crédit irrévocable émis par un établissement bancaire international de premier ordre et ceci dans une juridiction sûre. Selon elle, toute l'opération sous-jacente au litige entre les parties a été conduite depuis et en Suisse, ce qui constitue de manière évidente un point connexe de rattachement qui devrait être tenu pour vraisemblable. La recourante affirme que l'examen aurait dû porter sur le fait que E.________ est sise en Suisse et qu'elle a demandé à B.________ AG d'émettre une lettre de crédit car elle avait besoin d'un établissement de premier ordre en Suisse pour rassurer l'intimée et que B.________ AG, propriétaire du pétrole durant le transport, a financé et coordonné toute l'opération de vente. En conséquence, sans la banque suisse, la transaction litigieuse n'aurait pas pu avoir lieu, les deux créances (E.________-C.________ et C.________-A.________ Ltd) constituent une unité économique et la créance de la recourante découlant d'une activité commerciale déployée en Suisse présente un lien manifeste avec ce pays. 
Par ailleurs, la recourante considère que l'autorité cantonale n'a pas examiné les intérêts respectifs des parties, ce qui conduit aussi à un résultat arbitraire. Elle souligne qu'elle n'a pas pris en considération qu'il lui serait impossible de faire valoir ses droits contre C.________ et de recouvrer sa créance en W.________ au vu de la crise frappant ce pays. 
 
4.2.  
 
4.2.1. Une décision est arbitraire, donc contraire à l'art. 9 Cst., lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si sa décision apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision soient insoutenables; il faut encore que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Il ne suffit d'ailleurs pas non plus qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale puisse être tenue pour également concevable ou apparaisse même préférable (ATF 144 I 170 consid. 7.3; 142 II 369 consid. 4.3; 140 III 157 consid. 2.1). Une décision cantonale est en outre arbitraire lorsqu'elle s'écarte de la jurisprudence du Tribunal fédéral sans motif pertinent (ATF 148 III 95 consid. 4.1). En revanche, le choix d'une solution opéré par l'autorité cantonale sur une question qui est controversée en doctrine et qui n'a pas été tranchée par le Tribunal fédéral ne peut pas être qualifié d'arbitraire (parmi plusieurs, cf. arrêt 5A_519/2018 du 1er mai 2019 consid. 2 et les références).  
 
4.2.2.  
 
4.2.2.1. Selon l'art. 272 al. 1 LP, le séquestre est autorisé, entre autres exigences, si l'on est en présence d'un cas de séquestre (ch. 2) et qu'il existe des biens appartenant au débiteur (ch. 3).  
 
4.2.2.2. Aux termes de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP, le créancier d'une dette échue et non garantie par gage peut requérir le séquestre des biens du débiteur qui se trouvent en Suisse lorsque le débiteur n'habite pas en Suisse et qu'il n'y a pas d'autre cas de séquestre, pour autant que la créance ait un lien suffisant avec la Suisse ou qu'elle se fonde sur une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP.  
 
4.2.2.3. La notion de "lien suffisant avec la Suisse", dont l'examen est limité à la seule vraisemblance (cf. art. 272 al. 1 ch. 2 LP; ATF 138 III 636 consid. 4.3.2; 138 III 232 consid. 4.1.1), ne doit pas être interprétée restrictivement (ATF 135 III 608 consid. 4.5; 124 III 219 consid. 3; 123 III 494 consid. 3a et les références).  
Ce lien doit être déterminé selon les règles du droit des poursuites, lesquelles prévoient que le cas de séquestre doit être rendu vraisemblable par le créancier. Ce dernier doit alléguer les faits constitutifs du cas de séquestre et produire les moyens de preuve qui permettent de le rendre vraisemblable (ATF 148 III 377 consid. 2.3.5). 
Le lien suffisant de la créance avec la Suisse peut être établi par différents points de rattachement (cf. entre autres: KREN KOSTKIEWICZ, OFK SchKG Kommentar, 20 ème éd., 2020, n° 44 ad art. 271 LP; STOFFEL, in Basler Kommentar, SchKG II, 3 ème éd., 2021, n° 90 ss ad art. 271 LP). Outre les cas dans lesquels le droit suisse est applicable au litige (ATF 123 III 494 consid. 3a) ou pour lesquels les juridictions suisses sont compétentes ratione loci (ATF 124 III 219 consid. 3b/bb), la jurisprudence retient notamment le lieu d'exécution en Suisse de la prestation du créancier séquestrant ou de celle du débiteur séquestré (ATF 123 précité loc. cit.). Ainsi, le paiement sur un compte en Suisse en relation avec le contrat litigieux peut constituer un lien suffisant avec la Suisse (arrêt 5A_222/2012 du 2 novembre 2012 consid. 4.1.2 et les références, publié in SJ 2013 I p. 361). Il n'est pas nécessaire que le lien avec la Suisse soit prépondérant par rapport à celui avec d'autres États (ATF 148 III 377 consid. 2.3.1).  
En règle générale, le seul fait que les biens dont le séquestre est requis se trouvent en Suisse ne constitue pas, en revanche, un lien suffisant avec la Suisse au sens de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP. La doctrine considère qu'un tel lien pourrait cependant être suffisant dans le cas où le débiteur aurait placé ses biens en Suisse aux seules fins d'aggraver la situation du créancier en lui rendant plus difficile, voire impossible, le recouvrement de sa créance (ATF 148 précité loc. cit.; arrêt 5A_60/2013 du 27 mai 2013 consid. 4.2.2.2 et les références).  
Une partie de la doctrine soutient aussi que, lorsque la créance invoquée pour obtenir le séquestre est en lien avec l'activité commerciale exercée par le débiteur en Suisse, la condition du lien suffisant serait réalisée, quand bien même la créance n'est pas soumise au droit suisse. A cet égard, certains auteurs affirment que l'intervention d'une banque sise en Suisse dans une opération de crédit documentaire pourrait conduire à admettre que le débiteur développe une activité commerciale en Suisse. La majorité d'entre eux précise toutefois qu'il faut que la banque suisse ait assumé un engagement de paiement ou ait joué au moins un rôle actif. Selon une minorité d'auteurs, le lien suffisant devrait même être déjà retenu lorsque la banque assume un rôle même marginal dans la relation contractuelle en cause (arrêt 5A_222/2012 précité consid. 4.1.2 et les références doctrinales). 
 
4.2.2.4. L'autorité de séquestre doit apprécier l'existence d'un lien suffisant à la lumière de l'ensemble des circonstances, en mettant en balance les intérêts du créancier et ceux du débiteur. Ainsi, le lien de la créance avec la Suisse est suffisant lorsque l'intérêt du créancier à poursuivre le débiteur au lieu du séquestre se base sur un point de rattachement avec la Suisse qui l'emporte, au regard de l'ensemble des circonstances, sur l'intérêt du débiteur à conserver intacte sa possession (arrêts 5A_519/2018 du 1 er mai 2019 consid. 3.3; 5A_222/2012 précité consid. 4.2). L'autorité de séquestre doit, en fin de compte, empêcher l'ouverture de procédures dont l'objet n'a aucun rapport avec la Suisse, tout en évitant néanmoins que la Suisse ne constitue un refuge aux débiteurs tentant d'échapper à l'exécution forcée (Message du Conseil fédéral du 8 mai 1991 concernant la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, in FF 1991 III p. 1 ss [188]; cf. aussi, PAHUD, Le séquestre et la protection provisoire des créances pécuniaires, thèse Fribourg, 2018, n° 206).  
 
4.2.3. En l'espèce, par son argumentation, la recourante ne démontre pas que l'autorité cantonale aurait rendu une décision arbitraire.  
En premier lieu, elle méconnaît la notion d'arbitraire (art. 9 Cst.) quand elle soutient que le point de savoir si le lien suffisant avec la Suisse est réalisé lorsqu'une banque intervient de manière marginale dans l'exécution d'un contrat pourrait être tranchée de manière généralisable. Elle omet que le lien suffisant avec la Suisse nécessite d'être concrétisé à la lumière des circonstances du cas d'espèce pertinentes pour pondérer les intérêts en présence et, en fin de compte, examiner si, dans son résultat, la décision conduit à la violation de l'art. 9 Cst. 
Ensuite, une décision n'est pas arbitraire lorsqu'elle se fonde sur l'avis d'une partie de la doctrine sur une question controversée, qui n'a pas été tranchée par le Tribunal fédéral. Or, en l'occurrence, même les auteurs cités dans l'arrêt 5A_222/2012, arrêt auquel la recourante se réfère, qui se montrent les plus larges dans l'admission du lien suffisant avec la Suisse lorsqu'une banque suisse intervient de manière marginale, ne visent que les cas où cette intervention concerne le contrat dont découle la créance litigieuse, et non un autre contrat (cf. not. GANI, Le "lien suffisant avec la Suisse" et autres conditions du séquestre lorsque le domicile du débiteur est à l'étranger, in RSJ 1996 (97) p. 227 ss [231] et GILLIÉRON, Commentaire de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite, art. 271-352, 2003, n° 74 ad art. 271 LP). La recourante ne cite aucun auteur qui soutiendrait sa position. C'est dès lors à tort qu'elle reproche à l'autorité cantonale de n'avoir pas tranché, et de plus arbitrairement, la question de la portée du rôle marginal d'une banque suisse sur le lien suffisant avec la Suisse au sens de l'art. 271 al. 1 ch. 4 LP. Cette autorité s'est employée à faire une telle analyse pour exclure un tel lien lorsque ce rôle est non seulement marginal, mais concerne en plus une autre relation contractuelle que celle dont est issue la créance litigieuse. Sous couvert d'opposer à l'autorité cantonale de n'avoir pas "cré[é] une jurisprudence", la recourante ne lui reproche rien d'autre que de n'avoir pas statué dans le sens qu'elle aurait souhaité.  
En dernier lieu, les développements de la recourante concernant " la réalité comm erciale de la transaction entre A.________ Ltd et C.________" et la "réelle balance des intérêts" qu'il aurait fallu faire ne sont nullement documentés. Il en va ainsi en particulier de l'élément décisif dont l'absence suffit à elle seule à nier l'arbitraire de la décision, soit que l'intervention de B.________ AG dans le contrat de vente entre C.________ et E.________ aurait été une condition de la conclusion de son propre contrat avec C.________. L'autorité cantonale a établi exactement le contraire en retenant qu'il n'était pas allégué que la recourante avait été informée du fait que l'acquéreur final s'acquitterait de son obligation par le biais d'une lettre de crédit émise par une banque suisse. Au demeurant, il ressort des faits constatés dans la décision attaquée que B.________ AG a émis la lettre de crédit après que la recourante avait confirmé son accord sur la vente la concernant. A cela s'ajoute que, se bornant à soutenir le contraire, la recourante ne démontre pas non plus l'arbitraire de la constatation selon laquelle la régularité de la vente de pétrole à E.________ et la qualité d'acquéreur final de la filiale suisse de ce groupe n'étaient pas établis. Les éléments dont l'autorité cantonale a tenu compte pour pondérer les intérêts en présence sont en outre pertinents et parfaitement motivés. 
Il suit de là que le grief de violation de l'art. 9 Cst. doit être rejeté. 
 
5.  
En définitive, le recours est rejeté, aux frais de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens, les intimées n'ayant pas été suivies sur la question de l'effet suspensif et leurs réponses spontanées étant irrecevables (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 20'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 23 octobre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari