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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_49/2020  
 
 
Arrêt du 8 décembre 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Beusch, Hartmann et Ryter. 
Greffier : M. Jeannerat. 
 
Participants à la procédure 
Diffusion Transat SA, 
représentée par Me Pierre Kobel, avocat, 
recourante, 
 
contre 
 
Commission de la concurrence COMCO, Hallwylstrasse 4, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Cartels - sanction; marché du livre en français, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour II, du 30 octobre 2019 (B-4019/2013). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Diffusion Transat SA (ci-après: Diffusion Transat) est une société anonyme de droit suisse. Elle est détenue par A.________ et B.________. Elle propose des services de diffusion et de distribution aux éditeurs de livres en français, étant précisé qu'elle sous-traite l'intégralité de la seconde tâche à la société suisse C.________, qui assure dans ce cadre aussi la gestion des ouvrages retournés. Elle conclut à cette fin des contrats qui, pour la plupart, contiennent une clause d'exclusivité, dont le contenu et la formulation peuvent néanmoins différer d'une convention à l'autre. 
 
B.  
 
B.a. Du 12 juillet 2007 au 13 mars 2008, le secrétariat de la Commission de la concurrence (ci-après: la COMCO) a mené une enquête préalable sur le marché du livre écrit en français. Les informations obtenues auprès des diffuseurs-distributeurs et des revendeurs de livres actifs en Suisse ont fait apparaître que les premiers occupaient une position forte sur le marché en cause et que le niveau des prix y était élevé.  
 
B.b. Le 13 mars 2008, d'entente avec le Président de la COMCO, le secrétariat a ouvert une enquête visant à examiner l'existence d'un éventuel abus de position dominante au sens de la loi sur les cartels (LCart). Le 2 mars 2011, de concert avec son Président, le secrétariat de la COMCO a élargi son enquête à l'examen d'un potentiel accord illicite affectant la concurrence au sens de la loi précitée.  
 
B.c. Le 18 mars 2011, le Parlement a adopté la loi fédérale sur la réglementation du prix du livre, contre laquelle un référendum a été lancé. L'adoption de cette loi et la perspective d'une votation populaire ont amené le secrétariat de la COMCO à suspendre l'enquête par décision incidente du 6 juin 2011, en application du principe de l'économie de la procédure. Le référendum ayant abouti, le peuple suisse s'est prononcé en votation le 11 mars 2012 et a rejeté la loi sur le prix du livre.  
La COMCO a repris son enquête le 22 mars 2012. 
 
B.d. Le 14 août 2012, le secrétariat de la COMCO a communiqué aux parties sa proposition de décision et la liste des pièces versées au dossier. Il retenait notamment que Diffusion Transat avait participé, durant la période visée par l'enquête, à savoir de 2005 à 2011, à un accord horizontal de répartition géographique conclu au sein de l'Association Suisse des Diffuseurs, Editeurs et Libraires (ASDEL), ainsi qu'à un accord vertical de fixation des prix de revente sur la base de ses tabelles. Selon le secrétariat, la société avait aussi participé à un accord vertical attribuant des territoires dans la distribution. Il considérait que l'ensemble de ces relations était illicite au sens de l'art. 5 LCart et proposait d'interdire aux diffuseurs-distributeurs de fixer les prix de revente, notamment au moyen de tabelles, et de s'entendre avec les libraires sur un taux de remise fondé sur un prix public final pour la Suisse. De même, il envisageait de défendre aux diffuseurs-distributeurs d'opérer une répartition géographique du marché de la diffusion et distribution du livre en français en Suisse, de s'entendre sur une entrave aux importations parallèles ou d'empêcher celles-ci par des contrats de distribution exclusive. Finalement, il a proposé de sanctionner Diffusion Transat et de mettre à sa charge une part des frais de procédure. Il n'a, pour le reste, pas retenu l'existence d'un abus de position dominante.  
 
B.e. En date du 27 mai 2013, après déterminations des parties sur la proposition de décision et divers actes d'instruction et auditions, la COMCO a rendu une décision à l'encontre de la société Diffusion Transat et de neuf autres diffuseurs-distributeurs. Elle a notamment condamné la société précitée au paiement d'une sanction de 447'000 fr. en application de l'art. 49a al. 1 LCart en raison de sa participation à des accords illicites au sens de l'art. 5 al. 1 et 4 LCart (ch. 1.4 du dispositif). Elle lui a par ailleurs interdit - comme aux neuf autres diffuseurs-distributeurs concernés par sa décision - d'entraver par des contrats de distribution et/ou de diffusion les importations parallèles de livres écrits en français par tout détaillant actif en Suisse (ch. 2 du dispositif). Enfin, elle l'a condamnée au paiement, à titre solidaire, des frais de procédure, lesquels se montaient à 760'150 fr. (ch. 4 du dispositif).  
 
B.f. Le 12 juillet 2013, Diffusion Transat a interjeté recours auprès du Tribunal administratif fédéral contre la décision précitée. La société concluait principalement à son annulation pure et simple, subsidiairement à celle de ses chiffres 1.4 et 2, ainsi qu'à ce qu'il soit constaté qu'elle n'entravait pas les importations parallèles de livres en français par tout détaillant actif en Suisse par des contrats de distribution et/ou de diffusion.  
Par arrêt du 30 octobre 2019, le Tribunal administratif fédéral a entièrement rejeté le recours de Diffusion Transat. 
 
C.  
Le 14 janvier 2020, Diffusion Transat (ci-après: la recourante) dépose un recours en matière de droit public contre l'arrêt précité auprès du Tribunal fédéral. La société, qui sollicite, à titre préalable, l'octroi de l'effet suspensif à son recours, demande l'annulation de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 30 octobre 2019, ainsi que celle des chiffres 1.4, 2 et 4 de la décision de la COMCO du 27 mai 2013. Elle conclut en outre à ce qu'il soit constaté qu'elle n'a pris part à aucun accord illicite au sens de l'art. 5 al. 4 LCart. Subsidiairement, elle demande que la sanction faisant l'objet du chiffre 1.4 de la décision de la COMCO soit réduite, de même que les dépens la concernant fixés au chiffre 4 de la même décision, afin que, séparément ou cumulés l'un à l'autre, le montant auquel elle est condamnée reste à un niveau inférieur ou égal à ses fonds propres à la fin de l'année 2012. Plus subsidiairement encore, elle conclut au renvoi de la cause à l'instance inférieure pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Par ordonnance du 31 janvier 2020, le Président de la Cour de céans a octroyé l'effet suspensif au recours. 
Le Tribunal administratif fédéral a renoncé à prendre position sur le recours, renvoyant aux considérants de l'arrêt attaqué. La COMCO a répondu au recours, concluant à son rejet. 
La recourante et la COMCO ont répliqué, respectivement dupliqué. La première a renoncé à déposer d'ultimes observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
I. Recevabilité et pouvoir d'examen  
 
 
1.  
 
1.1. Le litige porte sur le bien-fondé d'un arrêt du Tribunal administratif fédéral confirmant une décision prononcée par la COMCO ayant notamment pour effet de condamner la recourante au paiement d'une sanction financière en application de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les cartels et autres restrictions à la concurrence (loi sur les cartels, LCart; RS 251). Il s'agit d'une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant sous le coup d'aucune des exceptions figurant à l'art. 83 LTF, de sorte que la voie du recours en matière de droit public au Tribunal fédéral est en principe ouverte.  
 
1.2. Le recours a par ailleurs été interjeté dans les formes requises (art. 42 LTF) et en temps utile compte tenu des féries hivernales (art. 100 al. 1 en lien avec l'art. 46 al. 1 let. c LTF) par la société destinataire de l'arrêt attaqué qui a, sous cet angle, manifestement qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF). Il est partant recevable, sous réserve de la conclusion constatatoire accessoire qui y est prise, laquelle n'a aucune portée propre par rapport à celle en annulation de l'arrêt attaqué (cf. ATF 137 II 199 consid. 6; 135 II 60 consid. 3.3; aussi 141 II 113 consid. 1.7; arrêt 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 1.2, non publié in ATF 148 II 25), et des conclusions demandant l'annulation, respectivement la réforme de la décision de première instance de la COMCO du 27 mai 2013. Ces dernières conclusions sont en effet irrecevables en raison de l'effet dévolutif complet du recours déposé auprès du Tribunal administratif fédéral (cf. ATF 136 II 101 consid. 1.2), dont la décision peut seule être attaquée devant le Tribunal fédéral (cf. art. 86 al. 1 let. a LTF).  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, sous réserve d'une violation du droit manifeste (cf. ATF 140 III 115 consid. 2; 140 III 86 consid. 2; 133 III 545 consid. 2.2; arrêt 4A_399/2008 du 12 novembre 2008 consid. 2.1, non publié in ATF 135 III 112). A cela s'ajoute que, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine le respect des droits fondamentaux que si un grief en ce sens a été non seulement invoqué, mais également motivé par la partie recourante (ATF 141 I 36 consid. 1.3; 136 II 304 consid. 2.5).  
En l'occurrence, dans son mémoire de recours, la recourante invoque parfois de manière lapidaire, au milieu d'autres griefs, la violation d'un droit fondamental déterminé, sans véritablement expliquer en quoi consiste exactement la violation alléguée et en quoi le droit fondamental invoqué n'aurait pas été respecté. La Cour de céans n'entrera pas en matière sur ce genre de critiques qui ne sont pas motivées à suffisance de droit à l'aune de l'art. 106 al. 2 LTF
 
2.2. L'examen du Tribunal fédéral se fonde sur les faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF; ATF 142 I 155 consid. 4.4.3), sous réserve des cas prévus par l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours peut critiquer les constatations de fait de l'arrêt attaqué à la double condition qu'elles aient été établies de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (cf. ATF 142 I 135 consid. 1.6), ce que la partie recourante doit rendre vraisemblable par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF. La notion de "manifestement inexacte" figurant à l'art. 97 al. 1 LTF correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (cf. ATF 140 III 264 consid. 2.3).  
 
II. Dispositions légales topiques et positions des autorités précédentes  
 
3.  
Le litige porte principalement sur le point de savoir si le Tribunal administratif fédéral a violé le droit en considérant que la recourante avait participé à des accords illicites en matière de concurrence - et présumés supprimer toute concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 1 et 4 LCart - et en la condamnant pour cette raison au paiement d'une sanction financière de 447'000 fr. 
Avant de présenter le raisonnement suivi par les différentes autorités précédentes sur ces points, un bref survol des dispositions topiques s'impose. 
 
4.  
 
4.1. La LCart a pour but d'empêcher les conséquences nuisibles d'ordre économique ou social imputables aux cartels et aux autres restrictions à la concurrence et de promouvoir ainsi la concurrence dans l'intérêt d'une économie de marché fondée sur un régime libéral (art. 1 LCart). Elle s'applique aux entreprises qui, entre autres situations, sont parties à des cartels ou à d'autres accords en matière de concurrence visant ou entraînant une restriction de celle-ci (cf. art. 2 al. 1 et 4 al. 1 LCart), à moins que la concurrence sur le marché des biens ou services concernés ne soit de toute manière exclue par d'autres prescriptions étatiques (cf. art. 3 al. 1 LCart). La loi est applicable aux états de fait qui déploient leurs effets en Suisse, même s'ils se sont produits à l'étranger (art. 2 al. 2 LCart).  
 
4.2. L'art. 5 LCart dispose, à son al. 1, que les accords qui affectent de manière notable la concurrence sur le marché de certains biens ou services et qui ne sont pas justifiés par des motifs d'efficacité économique, ainsi que tous ceux qui conduisent à la suppression d'une concurrence efficace, sont illicites. Après avoir précisé à son al. 2 la notion de "motifs d'efficacité économique", l'art. 5 LCart énumère ensuite, à ses al. 3 et 4, plusieurs types d'accords qui sont présumés entraîner la suppression d'une concurrence efficace et qui réunissent tantôt des entreprises effectivement ou potentiellement concurrentes (accords horizontaux), tantôt des entreprises occupant différents échelons sur un marché (accords verticaux). L'art. 5 al. 4 LCart, qui porte sur les accords verticaux et qui se trouve au centre du présent litige, prévoit en particulier ce qui suit:  
 
3 Sont [...] présumés entraîner la suppression d'une concurrence efficace les accords passés entre des entreprises occupant différents échelons du marché, qui imposent un prix de vente minimum ou un prix de vente fixe, ainsi que les contrats de distribution attribuant des territoires, lorsque les ventes par d'autres fournisseurs agréés sont exclues. 
 
4.3. Les sanctions administratives encourues en cas d'accords illicites sont réglées aux art. 49a ss LCart. L'art. 49a al. 1 LCart prévoit ainsi que l'entreprise qui participe à un accord illicite aux termes de l'art. 5 al. 3 et 4 LCart, ou qui se livre à des pratiques illicites aux termes de l'art. 7 LCart, est tenue au paiement d'un montant pouvant aller jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires réalisé en Suisse au cours des trois derniers exercices. L'art. 50 LCart dispose pour sa part qu'une sanction identique peut être infligée à une entreprise qui contrevient à son profit à un accord amiable, à une décision exécutoire prononcée par les autorités en matière de concurrence ou à une décision rendue par une instance de recours. Il découle de ces dispositions qu'une entreprise ne peut être sanctionnée de manière immédiate en raison d'un accord illicite en matière de concurrence que si elle participe à ce que l'on appelle communément un "cartel dur" ou un "accord rigide" (" hartes Kartell " ou " harte Abrede "), c'est-à-dire à l'un des accords, exhaustivement énumérés à l'art. 5 al. 3 et 4 LCart, dont il convient en principe de présumer, de manière réfragable, qu'ils suppriment toute concurrence (cf. ATF 147 II 72 consid. 6.2; arrêt 2C_113/2017 du 12 février 2020 consid. 10.2; aussi Message du Conseil fédéral du 7 novembre 2001 relatif à la révision de la loi sur les cartels, FF 2002 1920; ZIRLICK/BANGERTER, in KG - Kommentar zum Bundesgesetz über Kartelle und andere Wettbewerbsbeschränkungen, 2018, no 544 ad art. 5 LCart). Dans les autres cas, soit lorsqu'une entreprise prend part à un accord qui, sans être visé par l'art. 5 al. 3 et 4 LCart, restreint néanmoins notablement la concurrence sans motif d'efficacité économique (p. ex. un accord fixant un prix maximal), seul le prononcé d'une mesure administrative entre en ligne de compte (p. ex. une interdiction d'entrave à la concurrence; cf. art. 30 LCart; ATF 143 II 297 consid. 9.4.6; aussi arrêt 2C_44/2020 du 3 mars 2022 consid. 12.4, non publié in ATF 148 II 321) : ce n'est qu'en cas de récidive - à savoir en cas de non-respect de la mesure prononcée - que l'entreprise peut éventuellement se voir infliger une sanction, en application de l'art. 50 LCart (cf. arrêts 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 4.3, non publié in ATF 148 II 25; 2C_113/2017 du 12 février 2020 consid. 10.2; aussi JÜRG BORER, Wettbewerbsrecht I Kommentar, 3e éd. 2011, no 7 ad art. 49a LCart; KRAUSKOPF/SCHALLER, in Basler Kommentar, Kartellgesetz, 2e éd. 2021, no 651 ad art. 5 LCart).  
 
4.4. La problématique des accords verticaux en matière de concurrence est appréhendée de manière pratiquement identique, quoique dans des systèmes différents, par le droit suisse et le droit européen, qui se sont rapprochés au fil du temps (ATF 143 II 297 consid. 5.3.4). Les débats parlementaires laissent d'ailleurs transparaître sans équivoque que le législateur a souhaité que la réglementation des accords verticaux soit similaire à celle de l'Union européenne et s'avère aussi stricte qu'elle, sans l'être davantage (cf. BO 2003 CE 329 ss; voir BO 2002 CN 1435 ss), afin de ne pas conduire à une insécurité juridique (cf. BO 2003 CE 330). Le parallélisme des deux réglementations fait qu'il est possible de se référer à ce que l'Union européenne a exclu ou permis dans sa directive sur les accords verticaux (BO 2003 CE 330), sous réserve d'éventuels changements fondamentaux en droit européen de la concurrence et des différences pouvant exister entre les marchés suisse et européen, qui ne sont pas économiquement comparables (cf. ATF 143 II 297 consid. 6.2.3 et les références citées). Les règles de l'Union européenne ne doivent le cas échéant pas être considérées comme de simples éléments de comparaison et d'interprétation parmi d'autres. Sur le fond, le législateur fédéral désirait une véritable identité de régimes entre le droit suisse et les règles européennes sur les accords verticaux, même s'il n'a pas inséré de renvoi dynamique à ces règles dans la loi ni légiféré de manière techniquement identique (ATF 143 II 297 consid. 6.2.3; arrêt 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 4.4, non publié in ATF 148 II 25; cf. aussi BO 2003 CE 331).  
 
5.  
 
5.1. En l'occurrence, dans sa décision de première instance du 27 mai 2013, la COMCO a tout d'abord retenu que la LCart s'appliquait pleinement aux relations commerciales que la recourante avait pu entretenir entre 2005 et 2011 avec différents éditeurs et diffuseurs de livres étrangers ou suisses, dès lors que ces relations avaient été régies par des accords restreignant la concurrence au sens de l'art. 4 al. 1 LCart. Elle a ensuite considéré que, durant cette période, la recourante avait plus précisément pris part, dans le cadre de son activité de distribution de livres "en gros", à des accords verticaux instituant des systèmes de diffusion-distribution ayant pour objectif et effet de supprimer toute concurrence efficace sur le marché de la distribution "wholesale" du livre en français. D'après la COMCO, le système mis en place par la recourante avait en effet cloisonné la distribution des livres produits ou simplement diffusés par ses différents partenaires, en empêchant toute importation parallèle desdits produits par les revendeurs helvétiques. La COMCO a dès lors estimé que les relations commerciales entretenues par la recourante et ses partenaires tombaient sous le coup de la présomption de suppression de la concurrence efficace posée à l'art. 5 al. 4 LCart. Il n'existait par ailleurs aucune concurrence restante sur les plans "intermarques" et "intramarque" susceptible de renverser cette présomption de suppression de la concurrence efficace. Quand bien même l'on admettrait le contraire, il faudrait de toute manière considérer que les systèmes de distribution mis en place par la recourante ont eu pour effet de restreindre notablement la concurrence en Suisse, sans qu'aucun motif d'efficacité économique ne le justifie au sens de l'art. 5 al. 1 et 2 LCart.  
La COMCO a dès lors infligé à la recourante une sanction de 447'000 fr. pour participation à des accords illicites, en application combinée des art. 5, al. 1 et 4, et 49a al. 1 LCart. Elle lui a en outre interdit de continuer à empêcher toute importation parallèle de livres en français par des détaillants actifs en Suisse par l'entremise de contrats de distribution et/ou de diffusion exclusives. 
 
5.2. Par arrêt du 30 octobre 2019, le Tribunal administratif fédéral s'est très largement rallié à la décision de la COMCO. Il a en l'occurrence retenu qu'entre 2005 et 2011, la recourante avait conclu des contrats écrits de diffusion et/ou de distribution de livres avec 93 éditeurs et diffuseurs. Ces contrats, par lesquels les éditeurs et diffuseurs en question chargeaient la recourante de la diffusion et/ou de la distribution de leurs ouvrages en Suisse, constituaient tous des accords en matière de concurrence, indépendamment du fait qu'ils aient contenu ou non une clause d'exclusivité expresse en faveur de la recourante. Le fait était qu'ils affectaient les canaux d'approvisionnement des produits concernés dans le pays et qu'ils ne pouvaient pas être qualifiés de simples contrats d'agence sous l'angle du droit de la concurrence. Le Tribunal administratif fédéral a par ailleurs estimé que le système de diffusion-distribution mis en place par ces 93 contrats avait eu pour but et effet particuliers d'empêcher d'éventuels autres fournisseurs agréés à l'étranger de distribuer les mêmes ouvrages que ceux que la recourante diffusait et distribuait - avec l'aide de C.________ - en Suisse. Il fallait donc présumer, selon lui, conformément à l'art. 5 al. 4 LCart, que la concurrence efficace avait été supprimée dans le pays s'agissant de la distribution wholesale des ouvrages vendus par la recourante. Subsidiairement, le Tribunal administratif fédéral a estimé, à l'instar de la COMCO, que, même si l'on considérait que le système mis en place par l'intéressée ne supprimait pas toute concurrence efficace, il constituait à tout le moins une atteinte notable à celle-ci, non justifiée par un motif d'efficacité économique, de sorte qu'il s'avérait en tous les cas illicite au sens de l'art. 5 al. 1 LCart.  
Sur cette base, le Tribunal administratif fédéral a confirmé qu'il y avait lieu de condamner la recourante à payer une sanction de 447'000 fr. en application de l'art. 49a LCart et de lui interdire d'entraver à l'avenir les importations parallèles que voudraient opérer les revendeurs de livres suisses, ce exactement comme l'avait fait la COMCO. 
 
5.3. Dans ses écritures, la recourante conteste le raisonnement qui précède et affirme, en particulier, n'avoir jamais été partie à un quelconque accord en matière de concurrence au sens des art. 2 al. 1 et 4 al. 1 LCart et, a fortiori, à un éventuel accord s'avérant être illicite à l'aune de l'art. 5 al. 1 et 4 LCart. Elle remet ce faisant en cause plusieurs étapes du raisonnement tenu par le Tribunal administratif fédéral dans l'arrêt attaqué, dont il convient de vérifier la conformité au droit fédéral.  
III. Existence d'accords en matière de concurrence au sens des art. 2 al. 1 et 4 al. 1 LCart 
 
6.  
La première question à examiner sur le fond est celle de savoir si, en obtenant - par contrats écrits - le droit de diffuser et de distribuer 93 éditeurs et diffuseurs de livres en français sur le territoire suisse entre 2005 et 2011, la recourante a participé à des "accords en matière de concurrence" ayant déployé des effets en Suisse. Il s'agit en effet d'une condition de base indispensable à l'application de la LCart, ainsi que, partant, à la reconnaissance d'un accord illicite justifiant le prononcé d'une sanction financière en combinaison des art. 5, al. 1 et 4, et 49a al. 1 LCart (cf. art. 2 LCart et supra consid. 4). La recourante conteste en l'occurrence qu'une telle condition soit remplie. 
 
6.1. Comme on l'a dit, la LCart s'applique, entre autres situations, aux entreprises qui sont parties à des cartels ou, de manière générale, à d'autres types d'"accords en matière de concurrence" (art. 2 al. 1 LCart; cf. supra consid. 4.1). Or, aux termes de l'art. 4 al. 1 LCart, par accords en matière de concurrence, on entend "les conventions avec ou sans force obligatoire ainsi que les pratiques concertées d'entreprises occupant des échelons du marché identiques ou différents, dans la mesure où elles visent ou entraînent une restriction à la concurrence". Cela signifie que, pour être en présence d'un accord en matière de concurrence relevant de la LCart, deux conditions doivent être réunies: il faut (1) se trouver face à une convention ou une pratique concertée entre (au moins) deux entreprises et (2) que cette convention ou cette pratique vise ou entraîne une restriction à la concurrence (ATF 144 II 246 consid. 6.4), laquelle consiste en une limitation de la liberté dans le jeu de l'offre et de la demande en lien avec des paramètres déterminants du point de vue de la concurrence efficace (arrêts 2C_39/2020 du 3 août 2022 consid. 6.2, destiné à la publication; 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 7.2, non publié in ATF 148 II 25).  
 
6.2. Plusieurs formes d'accords sont mentionnées à l'art. 4 al. 1 LCart, à savoir les conventions, avec ou sans force obligatoire, et les pratiques concertées. Ces deux formes différentes d'accords en matière de concurrence supposent cependant toutes deux une action collective, consciente et voulue des entreprises participantes (Message du Conseil fédéral du 23 novembre 1994 concernant la loi fédérale sur les cartels et autres restrictions de la concurrence [Loi sur les cartels, LCart], FF 1995 I 472 ss, spéc. p. 544; cf. ATF 147 II 72 consid. 3.2; 129 II 18 consid. 6.3; ATF 124 III 495 consid. 2a). Elles sont alternatives du point de vue de l'art. 4 al. 1 LCart. L'existence d'une convention obligatoire restreignant un seul paramètre de la concurrence suffit ainsi pour conclure à l'existence d'un accord en matière de concurrence. Il n'est alors pas nécessaire de se demander si cet accord remplit les conditions d'une pratique concertée (ATF 144 II 246 consid. 6.4.1).  
 
6.3. Des accords en matière de concurrence au sens de l'art. 4 al. 1 LCart peuvent exister non seulement entre entreprises de même rang (accords horizontaux), mais aussi entre entreprises de différents échelons du marché (accords verticaux; ATF 144 II 246 consid. 6.4.1; 129 II 18 consid. 4), dans la mesure où ils concernent les conditions auxquelles les entreprises parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services (cf. arrêts 2C_33/2020 rendu ce jour consid. 7.2 et 2C_39/2020 du 3 août 2022 consid. 6.2.6, destiné à la publication; Communication de la Commission de la concurrence du 28 juin 2010 concernant l'appréciation des accords verticaux [ci-après: CommVert], FF 2010 4625, ch. 1). Pour tomber dans le champ d'application du droit suisse, de tels accords verticaux ou horizontaux doivent évidemment déployer des effets en Suisse (cf. art. 2 al. 2 LCart). Cela étant, le Tribunal fédéral a précisé qu'il suffisait qu'un accord ait le potentiel de déployer des effets anticoncurrentiels sur le marché suisse pour que la LCart s'applique et pour justifier, le cas échéant, une enquête des autorités helvétiques. Cette interprétation large du champ d'application de la LCart ne préjuge néanmoins pas le point de savoir si l'accord concerné est illicite au sens du droit suisse et, plus particulièrement, de l'art. 5 LCart. Cette question relève de l'examen matériel de conformité au droit de l'accord tombant sous le coup de l'art. 4 al. 1 LCart, examen auquel il convient de procéder dans un second temps (ATF 144 II 194 consid. 3; 143 II 297 consid. 3.2.3 et 3.4).  
 
6.4. En l'occurrence, comme on le verra plus en détail (cf. infra consid. 8.1), le Tribunal administratif fédéral a constaté dans l'arrêt attaqué que, durant la période sous enquête de la COMCO, soit entre 2005 et 2011, la recourante avait entretenu des relations commerciales avec au moins 93 éditeurs et diffuseurs de livres qui l'avaient chargée, par le biais d'autant de contrats écrits, de diffuser et distribuer leurs ouvrages en Suisse. Or, d'après l'arrêt attaqué, dont les faits lient la Cour de céans (cf. art. 105 al. 1 LTF), la majorité de ces contrats contenaient non seulement une clause d'exclusivité expresse en faveur de l'intéressée, mais une grande partie d'entre eux prévoyaient également explicitement que les éditeurs et les diffuseurs partenaires devaient " ne pas vendre ou laisser vendre [leurs] ouvrages sur ce territoire " et/ou " transmettre à [la recourante] toute commande de Suisse qui l[eur] serait directement adressée ". On peut assurément déduire de telles conventions que les cocontractants de la recourante ont à tout le moins renoncé à opérer eux-mêmes des ventes sur le territoire suisse. Il est par ailleurs vraisemblable, de prime abord, qu'ils se soient également engagés à veiller à ce que les autres entreprises à qui ils livreraient leurs ouvrages ne les revendent pas à la clientèle réservée à la recourante. Ce constat suffit pour admettre que les conventions en question ont affecté - ou simplement visé à affecter - les conditions auxquelles les entreprises parties ont pu acheter, vendre ou revendre certains biens ou services.  
 
6.5. Il découle de ce qui précède que l'on ne peut pas reprocher aux autorités précédentes d'avoir considéré que la recourante avait bel et bien participé à des accords en matière de concurrence au sens des art. 2 al. 1 et 4 al. 1 LCart durant la période sous enquête. La recourante se méprend sur la portée des dispositions précitées lorsqu'elle affirme n'avoir jamais participé à aucun accord en matière de concurrence dans le cadre de son activité, en prétendant que seuls ses partenaires commerciaux auraient été à même de convenir et de mettre en oeuvre d'éventuelles interdictions d'exportation vers la Suisse avec leurs entreprises de distribution à l'étranger. Il est parfaitement possible de considérer que la recourante a participé à des accords en matière de concurrence au sens de l'art. 4 al. 1 LCart, sans même qu'il soit nécessaire de savoir - à ce stade - si elle est responsable d'un cloisonnement absolu du marché suisse. Cette dernière question n'a d'importance qu'au moment d'examiner l'illicéité et la punissabilité des accords en matière de concurrence concernés, examen auquel il sera procédé ci-après. A ce stade, on peut tout au plus se demander si certains accords particuliers passés par la recourante qui ne contiennent aucune clause d'exclusivité - voire qui indiquent explicitement que l'intéressée ne jouit d'aucune exclusivité - tombent véritablement dans le champ d'application de la LCart, étant précisé que le Tribunal administratif fédéral est parti de la prémisse que de tels accords étaient en réalité appliqués de la même manière que ceux contenant l'une ou l'autre des clauses d'exclusivité exposées ci-devant. La question peut néanmoins rester ouverte dans la mesure où elle ne revêt aucune pertinence pour l'issue du litige, ainsi qu'on le verra (cf. infra consid. 8.7 et 9.4).  
 
6.6. Il convient donc de retenir que la recourante a bel et bien été partie à des accords en matière de concurrence tombant dans le champ d'application de la LCart durant la période sous enquête de la COMCO. Reste à savoir si les accords en question - ou du moins une partie d'entre eux - sont visés par l'art. 5 al. 4 LCart et s'ils s'avèrent à ce titre illicites et sanctionnables en application des art. 5 al. 1 et 49a al. 1 LCart, ce que soutiennent les autorités précédentes, mais que conteste la recourante.  
 
IV. Portée de l'art. 5 al. 4 LCart  
 
7.  
La recourante réfute en l'occurrence avoir participé à des accords verticaux illicites remplissant les conditions de l'art. 5 al. 4 LCart dans le cadre de son activité de diffusion et de distribution de livres en Suisse et, partant, avoir institué un système présumé supprimer toute concurrence efficace sur ce marché et justifiant le prononcé d'une sanction financière au sens de l'art. 49a al. 1 LCart. Elle soulève à cet égard plusieurs griefs qui ne peuvent être traités qu'après un bref rappel de la portée de l'art. 5 al. 4 LCart
 
7.1. L'art. 5 al. 4 LCart prévoit, notamment, que les "contrats de distribution attribuant des territoires" sont présumés entraîner la suppression de la concurrence efficace sur le marché qu'ils concernent "lorsque les ventes par d'autres fournisseurs agréés sont exclues". Cette présomption implique la réalisation de trois conditions: (1) l'existence d'un accord vertical de distribution, (2) l'attribution d'un territoire et (3) la mise en place d'une protection territoriale absolue (cf. ATF 148 II 25 consid. 8; 143 II 297 consid. 6.2).  
 
7.2. Il n'y a d'accord vertical de distribution au sens de l'art. 5 al. 4 LCart que lorsque des entreprises occupant des échelons du marché différents s'entendent sur des modalités de distribution de biens, services ou produits dans le cadre d'un contrat de distribution. Selon la jurisprudence, la notion de "contrats de distribution" doit être comprise largement. Elle englobe évidemment les contrats de distribution proprement dits, par lesquels un producteur ou un prestataire de services organise son réseau de distribution et convient avec son distributeur que ses produits seront écoulés selon des modalités qu'ils spécifient (contrat de distribution exclusive, système de distribution sélective, contrat d'achat exclusif, contrat de fourniture exclusive, etc.). Elle couvre cependant aussi les clauses de distribution spécifiques insérées dans d'autres contrats, comme des contrats de franchise ou de licence (ATF 148 II 25 consid. 8.1; 143 II 297 consid. 6.3.1).  
 
7.3. Un accord vertical de distribution procède à une attribution de territoire lorsqu'il contient une clause d'attribution de marché se référant à une surface délimitée ou délimitable (p. ex. la Suisse qui constitue un marché potentiellement clos, ce qui a justifié l'introduction de l'art. 5 al. 4 LCart; ATF 143 II 297 consid. 6.3.2). Il convient de souligner à cet égard que le texte clair de l'art. 5 al. 4 LCart ne se réfère qu'aux répartitions de marchés sur la base de "territoires". La présomption de suppression de la concurrence efficace prévue par cette disposition ne vaut dès lors pas pour les accords de distribution qui segmenteraient le marché en fonction d'une "clientèle" (cf. aussi BO 2003 CE 330). Un accord d'exclusivité de clientèle par lequel un fournisseur s'engagerait à ne vendre ses produits qu'à un seul distributeur aux fins de leur revente à une clientèle déterminée (p. ex. à des clients exerçant une profession déterminée ou figurant sur une liste préétablie sur la base d'un critère donné; cf. Communication de la Commission européenne du 10 mai 2010, Lignes directrices sur les restrictions verticales, JOUE C 130/1 du 19 mai 2010, no 168) ne relève en principe pas de l'art. 5 al. 4 LCart, à moins bien sûr que la clientèle en question soit définie sur la base d'un critère géographique uniquement (ATF 148 II 25 consid. 8.2; AMSTUTZ/CARRON/REINERT, in Commentaire romand - Droit de la concurrence, 2e éd. 2013, no 594 ad art. 5 LCart).  
 
7.4. D'après l'art. 5 al. 4 LCart, un accord vertical de distribution attribuant un territoire n'est enfin présumé supprimer la concurrence efficace que s'il est exclu que d'autres fournisseurs agréés procèdent à des ventes sur ce territoire. Se fondant sur une interprétation historique et téléologique de la loi, le Tribunal fédéral considère que seuls les cas de protection territoriale "absolue" sont en réalité visés par l'art. 5 al. 4 LCart et concernés par la présomption de suppression de la concurrence instituée par cette norme. Il existe une telle protection lorsque les partenaires de distribution externes au territoire attribué se voient empêchés de procéder à des ventes non seulement "actives", mais également "passives" vers le territoire attribué (ATF 148 II 25 consid. 8.3; 143 II 297 consid. 6.3.4). Par "vente active", il faut comprendre le fait pour un distributeur de chercher à obtenir des clients ou une clientèle installés sur le territoire d'un autre distributeur par le biais de moyens ciblés. Quant à la "vente passive", elle consiste uniquement à répondre à des commandes spontanées effectuées par des clients provenant de ce territoire. La distinction entre ces deux types de vente est essentielle, car tant et aussi longtemps qu'il reste permis d'opérer des ventes passives à destination d'un territoire attribué à titre exclusif à un distributeur, il faut considérer que celui-ci ne bénéficie d'aucune protection territoriale absolue au sens de l'art. 5 al. 4 LCart, quand bien même aucun autre distributeur ne peut procéder à des ventes actives sur ce même territoire; on se trouve dans un tel cas face à une protection territoriale uniquement "relative", laquelle n'est pas visée par la disposition précitée et n'est, partant, pas présumée supprimer toute concurrence efficace (cf. ATF 148 II 25 consid. 8.3; 143 II 297 consid. 6.3.5).  
 
7.5. L'art. 5 al. 4 LCart précise que l'exclusion des ventes actives et passives justifiant la présomption de suppression de la concurrence doit concerner " d'autres fournisseurs agréés ". La version française de la disposition diverge sur ce point quelque peu de celles allemande et italienne qui évoquent, pour leur part, une interdiction de vente par des " gebietsfremde Vertriebspartner " ou des " distributori esterni". Il en ressort que la présomption de suppression de la concurrence de l'art. 5 al. 4 LCart implique que des entreprises actives dans la distribution d'un produit donné - et non dans sa seule production - se voient interdire de procéder à tout type de vente de ce produit à destination d'un territoire de distribution attribué à une autre entreprise (cf. ATF 143 II 297 consid. 6.3.3). Ainsi, l'accord par lequel une entreprise uniquement productrice se contenterait de renoncer à la vente directe de ses produits en Suisse, après en avoir externalisé la distribution à une autre entreprise, ne tombe pas en tant que tel sous le coup de l'art. 5 al. 4 LCart. Il en va de même de l'accord par lequel un producteur étranger s'obligerait à transmettre à son importateur suisse toutes les demandes d'achat qui lui parviendraient dans la mesure où elles émaneraient de Suisse. En effet, de telles restrictions de vente ne concernent en règle générale que le producteur du bien concerné, sans forcément s'étendre à d'éventuels distributeurs de celui-ci (cf. BO 2003 CE 329 ss; Note explicative de la Commission de la concurrence du 12 juin 2017 relative à la CommVert [état le 9 avril 2018; ci-après: Note explicative CommVert], ch. 9, 1er point; AMSTUTZ/ CARRON/REINERT, op. cit., nos 557 ss ad art. 5 LCart). Il est possible que ces accords soient malgré tout illicites à l'aune de l'art. 5 al. 1 LCart, dans la mesure où ils sont susceptibles de restreindre d'une manière notable la concurrence sur le marché considéré, ou qu'ils résultent d'un abus de position dominante au sens de l'art. 7 LCart de la part du distributeur protégé. Ne limitant pas en tant que tels la liberté d'action d'une entreprise "distributrice", ils ne constitueront en revanche pas des contrats présumés conduire à la suppression de toute concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 4 LCart (ATF 148 II 25 consid. 9.3.1).  
 
7.6. Ce n'est que si un accord vertical remplit chacune des conditions précitées qu'il faut présumer qu'il supprime la concurrence efficace sur le marché qu'il concerne. Cette présomption ne s'applique donc pas à tous les contrats de distribution exclusive, lesquels doivent pouvoir continuer de prévoir une certaine protection territoriale. Celle-ci reste en principe licite tant qu'elle n'a pas de caractère absolu, c'est-à-dire aussi longtemps que des ventes passives provenant d'un autre territoire restent autorisées (BO 2003 CE 329 et 331; aussi AMSTUTZ/ REINERT, Vertikale Preis- und Gebietsabreden - eine Kritische Analyse von Art. 5 Abs. 4 KG, in: Stoffel/Zäch [édit.], Kartellgesetzrevision 2003 - Neuerungen und Folgen, 2004, p. 102). La question de savoir si des ventes passives s'avèrent autorisées et, partant, possibles sur le marché concerné ne s'examine cependant pas de manière totalement abstraite et théorique; la faculté d'opérer des importations parallèles doit représenter une alternative crédible d'approvisionnement à des conditions acceptables pour les acheteurs suisses, au risque sinon de permettre un contournement facile de l'art. 5 al. 4 LCart et, partant, de vider la présomption de suppression de la concurrence posée par cette disposition d'une grande partie de sa portée (cf. ATF 148 II 25 consid. 9.3.3).  
V. Existence d'accords verticaux de distribution attribuant un territoire au sens de l'art. 5 al. 4 LCart 
 
8.  
La recourante soutient n'avoir conclu aucun accord vertical remplissant les conditions de l'art. 5 al. 4 LCart avec les 93 éditeurs et diffuseurs de livres s'étant adressés à elle en vue de la diffusion-distribution de leurs ouvrages en français sur le territoire suisse. Les contrats passés à cette fin n'auraient jamais visé à lui assurer une protection territoriale absolue. Ils n'auraient jamais tendu à empêcher non plus les autres diffuseurs-distributeurs de ces produits à l'étranger d'opérer des livraisons en Suisse. Retenir le contraire, comme l'ont fait le Tribunal administratif fédéral et, précédemment, la COMCO, violerait non seulement les règles d'interprétation des contrats fixées à l'art. 18 CO (RS 220), mais également la maxime inquisitoire prévue à l'art. 12 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA; RS 172.021) et l'interdiction de l'arbitraire consacrée à l'art. 9 Cst. 
 
8.1. En l'occurrence, il ressort de l'arrêt attaqué que, durant la période sous enquête, soit entre 2005 et 2011, la recourante a entretenu des relations commerciales avec 93 éditeurs et diffuseurs lui ayant confié la charge de diffuser et/ou distribuer leurs ouvrages sur le territoire suisse sur la base de contrats écrits à la formulation diverse. Cela étant, la majorité des contrats, soit 47 d'entre eux, contenaient une disposition caractéristique - dite de type A - par laquelle l'éditeur ou le diffuseur concerné confiait simplement à la recourante " la diffusion [et la distribution] exclusive[s] de l'ensemble de son fonds, y compris les réimpressions et les nouveautés à paraître pour tout le territoire suisse ".  
Selon l'arrêt attaqué, 40 autres contrats comportaient pour leur part une clause de type D présentant la teneur suivante: 
Art. 1 
[L'éditeur] déclare être titulaire des droits de diffusion et de distribution sur le territoire décrit à l'article 2, des ouvrages publiés pour le label ou marque [...]. [L'éditeur] confiera [à la recourante] la réalisation de ces mêmes opérations pour tout nouveau label dont il aurait acquis le droit de diffusion et de distribution pour le territoire suisse. En conséquence de quoi, [l'éditeur] confie [à la recourante] la diffusion et la distribution exclusives des fonds ci-dessus désignés [...]. 
Art. 2 
Cette exclusivité s'étend à tous nos clients [...] situ[és] sur le territoire suisse. [L'éditeur], par conséquent, s'engage à ne pas vendre ou laisser vendre ses ouvrages sur ce territoire pendant la durée de la présente convention et adressera [à la recourante] tous les ordres qui pourraient lui parvenir, provenant de clients revendeurs résidant en Suisse. Toutefois, les opérations de vente par correspondance et le courtage pourront donner lieu à un approvisionnement direct par [l'éditeur]. [Les parties] conviennent de s'informer mutuellement sur ces marchés, préalablement à leur réalisation." 
Quant aux six derniers contrats écrits passés par la recourante, ils présentaient, d'après l'arrêt attaqué, un contenu divers. Trois d'entre eux recelaient une clause d'exclusivité en faveur de l'intéressée, tout en précisant que l'éditeur ou le diffuseur partenaire s'engageait soit " à ne pas vendre ses ouvrages sur [le] territoire [suisse] pendant la durée de la présente convention et [à] adress[er] [à la recourante] tous les ordres qui pourraient lui parvenir, provenant de clients revendeurs résidant en Suisse " (clause de type E), soit " à transmettre à [la recourante] toute commande de Suisse qui lui serait directement adressée " (clause de type C). Un autre contrat se référait pour sa part à un précédent entretien téléphonique et évoquait simplement des " conditions de diffusion en exclusivité pour la Suisse " (clause de type G). Deux autres contrats ne recelaient enfin aucune clause d'exclusivité du tout en faveur de la recourante, l'un d'entre eux, apparemment conclu avec un diffuseur, confiant même expressément à la recourante " la commercialisation non exclusive des ouvrages en langue française des éditeurs précisés en annexe 1 sur le marché suisse " (clause de type F, respectivement B).  
 
8.2. Sur le vu de ce qui précède, force est d'admettre que les 93 contrats liant la recourante à différents éditeurs ou diffuseurs entre 2005 et 2011 constituaient tous des accords verticaux de distribution attribuant un marché, lequel consistait en l'occurrence dans la distribution wholesale de livres aux revendeurs helvétiques. Dans cette mesure, ils remplissaient assurément les deux premières conditions d'un accord vertical présumé supprimer la concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 4 LCart (à savoir l'existence d'un accord vertical de distribution et d'une attribution de territoire). La recourante ne le conteste d'ailleurs pas dans son mémoire. Reste à examiner si le Tribunal administratif fédéral a considéré à juste titre que les accords en question remplissaient également la troisième condition nécessaire à l'application de cette présomption, c'est-à-dire qu'ils conféraient aussi une protection territoriale absolue à la recourante (cf. supra consid. 7.4), en empêchant que d'autres distributeurs de livres actifs à l'étranger n'effectuent des ventes wholesale à destination du territoire suisse.  
 
8.3. Déterminer si des entreprises sont parties à un accord remplissant les conditions de l'art. 5 al. 4 LCart peut s'opérer de différentes manières. Un tel examen, qui peut se fonder sur un faisceau d'indices, implique cependant en tous les cas d'interpréter le contrat qui lie en principe les parties. A cet égard, il convient d'appliquer les règles générales figurant aux art. 1 ss CO et d'établir quelle était la volonté réciproque et concordante des parties, étant précisé que celle-ci peut être expresse ou tacite (cf. ATF 147 II 72 consid. 3.3). Les manifestations de volonté tacites comprennent notamment les actes concluants, c'est-à-dire ceux dont l'accomplissement laisse transparaître une certaine volonté des parties (ATF 147 II 72 consid. 3.3; 144 II 246 consid. 6.4.1). Ces déclarations et manifestations de volonté entre cocontractants doivent être interprétées conformément aux règles de l'art. 18 CO, qui implique de déterminer en priorité la volonté commune réelle des parties et, si cela n'est pas possible, d'interpréter leurs manifestations de volonté conformément au principe de la confiance, sans s'arrêter aux termes retenus dans la convention. Il faut en tous les cas que l'on puisse discerner une collaboration voulue et consciente de deux ou plusieurs entreprises, ce qui fait défaut en cas de restrictions à la concurrence purement unilatérales (cf. ATF 144 II 246 consid. 6.4.1; 124 III 495 consid. 2a). Cela étant, il est également important de garder à l'esprit que la notion de "convention" au sens de la LCart va au-delà de celle de "contrat" au sens du droit des obligations; elle couvre également les accords non contraignants sur le plan juridique, mais dont il ressort malgré tout une volonté de s'engager des parties, comme les gentlemen's agreements ou les Frühstückskartelle, ainsi que cela ressort clairement de l'art. 4 al. 1 LCart (ATF 147 II 72 consid. 3.3).  
 
8.4. Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties à un contrat, ce qui constitue une question de fait que le Tribunal fédéral ne revoit que sous l'angle de l'arbitraire, il doit rechercher leur volonté objective. Il lui appartient alors de déterminer le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3 et les références citées). Cette détermination de la volonté objective des parties selon le principe de la confiance est une question de droit, que le Tribunal fédéral examine librement; pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu des manifestations de volonté et sur les circonstances qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, à l'exclusion des événements postérieurs. Or, l'établissement de ces circonstances relève de la constatation des faits, ce que le Tribunal fédéral ne contrôle que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 133 III 61 consid. 2.2.1 et les arrêts cités).  
 
8.5. En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). Cela étant, les exigences liées à la preuve ne doivent pas être exagérées en droit de la concurrence, du moins lorsque les faits, par leur nature, sont difficilement démontrables (cf. ATF 139 I 72 consid. 8.3.2). Les preuves directes de l'existence d'un accord en matière de concurrence sont notamment très rares en pratique de sorte que l'appréciation des faits doit régulièrement se faire sur la base d'indices (ATF 144 II 246 consid. 6.4.4).  
 
8.6. En l'occurrence, dans son arrêt, le Tribunal administratif fédéral a opéré deux raisonnements différents pour arriver à la conclusion que chacun des contrats de diffusion-distribution que la recourante avait conclu constituait un accord lui octroyant une protection territoriale absolue. Il a opéré une distinction entre les contrats qui contenaient une clause de type D et ceux qui recelaient une clause d'un autre type (cf. supra consid. 8.1). Il convient dès lors d'examiner l'arrêt attaqué en opérant la même distinction (cf. infra consid. 8.6.1-8.6.3 pour les contrats avec clause de type D, respectivement consid. 8.6.4-8.6.6 pour les autres contrats).  
 
8.6.1. En ce qui concerne les 40 éditeurs ou diffuseurs ayant souscrit dans leur contrat une clause de type D les engageant à " ne pas vendre ou laisser vendre " leurs ouvrages sur le territoire suisse, le Tribunal administratif fédéral a estimé qu'ils avaient clairement manifesté leur volonté d'assurer à la recourante l'exclusivité de la diffusion-distribution de leurs produits dans le pays. Il a considéré que, par le biais d'une telle clause, les partenaires de la recourante ne s'étaient pas contentés de "confier, céder ou concéder" une exclusivité à cette dernière, mais s'étaient également engagés à prendre les mesures nécessaires pour faire respecter pleinement cette exclusivité, notamment en ne laissant aucun autre diffuseur et/ou distributeur de livres vendre leurs ouvrages sur le territoire suisse, pas même depuis l'étranger. L'autorité judiciaire précédente a concédé qu'un tel engagement reposait certes sur un simple rapport bilatéral entre les éditeurs ou diffuseurs concernés et la recourante, de sorte qu'il n'imposait en lui-même aucune obligation à d'éventuelles sociétés tierces, que ce soit des sociétés de diffusion-distribution de livres ou des grossistes. Il a toutefois estimé qu'il existait une présomption de fait que les partenaires de distribution de la recourante avaient effectivement pris des mesures destinées à assurer le respect de l'exclusivité accordée à cette dernière.  
 
8.6.2. La Cour de céans constate que le Tribunal administratif fédéral s'est efforcé d'établir la volonté réelle et commune de la recourante et de ses partenaires lorsque ceux-ci ont conclu les divers accords de diffusion-distribution contenant une clause de type D qui les ont liés entre 2005 et 2011. En tenant compte du texte de ces accords, lequel constitue la base de toute interprétation contractuelle, y compris en droit des cartels (cf. notamment ATF 143 II 297 consid. 6.4.3), l'autorité précédente a retenu que les parties avaient bel et bien voulu conclure des accords visant à cloisonner le marché suisse du livre en français. Or, on ne voit pas en quoi l'autorité précédente aurait violé l'art. 18 CO en procédant de la sorte, quoi qu'en dise la recourante. En cherchant à établir et en constatant la volonté subjective réelle et concordante des parties au moment de souscrire une clause de type D, le Tribunal administratif fédéral s'est pleinement conformé aux règles d'interprétation des contrats fixées par le droit fédéral. Il n'a ensuite fait preuve d'aucun arbitraire dans l'établissement des faits en retenant que les éditeurs et diffuseurs s'étaient en l'occurrence sciemment et volontairement engagés envers la recourante à faire en sorte qu'aucun distributeur étranger ne procède à des ventes passives de leurs ouvrages à destination du marché suisse. Il semble en tout cas très peu vraisemblable que l'engagement particulier de ne pas " laisser vendre " ait eu pour unique fonction d'interdire aux éditeurs et diffuseurs contractants de livrer eux-mêmes d'éventuels acheteurs suisses, comme le prétend la recourante, une telle interdiction étant déjà visée par l'obligation de " ne pas vendre " également contenue dans le contrat. Le fait, pour un éditeur ou un diffuseur de livres, de s'obliger contractuellement envers son diffuseur-distributeur helvétique non seulement à " ne pas vendre " ses ouvrages en Suisse, mais également à ne pas les y " laisser vendre" dénote bien davantage une volonté claire d'assurer une protection territoriale absolue à ce diffuseur-distributeur, comme l'a déjà relevé le Tribunal fédéral dans un arrêt précédent concernant un autre diffuseur-distributeur visé par l'enquête de la COMCO (cf. arrêt 2C_39/2020 du 3 août 2022 consid. 7.6.4). Le Tribunal administratif fédéral était donc parfaitement en droit de soutenir que les éditeurs et diffuseurs ayant souscrit une clause de type D avec la recourante s'étaient sciemment et volontairement obligés à veiller à ce qu'aucun distributeur actif à l'étranger ne vende leurs ouvrages en Suisse, quand bien même il se serait uniquement agi de répondre à des commandes non sollicitées provenant du territoire suisse (ventes passives).  
 
8.6.3. Sur la base de ce constat, le Tribunal administratif fédéral a considéré à juste titre que la recourante avait participé à au moins 40 accords de distribution lui octroyant une protection territoriale absolue et s'avérant, de ce fait, visés par l'art. 5 al. 4 LCart. Contrairement à ce que prétend la recourante, il importe peu que l'arrêt attaqué ne fasse état d'aucune société de distribution étrangère - notamment française - s'étant vu imposer une interdiction de vente passive vers la Suisse en relation avec les ouvrages distribués par la recourante, ni d'aucun revendeur de livres suisse s'étant vu refuser une importation parallèle de ces produits. L'absence de toute preuve sur ces points n'empêche pas d'admettre l'octroi d'une protection territoriale absolue en faveur de la recourante, laquelle peut être admise sur la seule base des 40 conventions signées par l'intéressée contenant une clause de type D (cf. arrêt 2C_44/2020 du 3 mars 2022 consid. 10.6.4, non publié in ATF 148 II 321). L'existence d'une protection territoriale absolue n'est pas non plus remise en question par le fait que les revendeurs de livres suisses n'ont peut-être jamais éprouvé d'intérêt à importer de manière parallèle les ouvrages distribués par la recourante durant la période sous enquête, ni par le fait qu'ils ont joui durant cette même période de la faculté d'acheter des livres à l'étranger par le biais de sites internet de commerce de détail, tels que celui d' amazon.fr. Une éventuelle absence d'intérêt des détaillants helvétiques à effectuer des importations parallèles ne s'oppose pas à la reconnaissance d'une entente entre la recourante et ses partenaires éditeurs visant un cloisonnement absolu du marché suisse (cf. ATF 144 II 194 consid. 4.4.2; 143 II 297 consid. 5.4.2). Quant aux achats que certains revendeurs de livres suisses auraient effectués auprès de la société Amazon, en quantité négligeable et uniquement de manière ponctuelle selon l'arrêt attaqué, ils ne permettent pas d'admettre que d'autres distributeurs externes ou d'autres "fournisseurs agréés" étaient autorisés à vendre des livres diffusés par la recourante sur le territoire suisse. En effet, la société de vente en ligne précitée, qui s'assimilait plutôt à une librairie étrangère durant la période sous enquête, n'endossait pas un rôle de "distributeur" ou de "fournisseur" sur le marché de la distribution du livre de niveau wholesale, comme le Tribunal fédéral l'a déjà précisé dans un arrêt récent (cf. ATF 148 II 25 consid. 9.3).  
 
8.6.4. Quant aux 53 autres contrats de diffusion et/ou de distribution ne contenant pas de clause de type D, mais une clause de type A, B, C, E, F ou G, le Tribunal administratif fédéral a concédé qu'il n'était pas possible d'en déduire un engagement des éditeurs et diffuseurs concernés de faire en sorte qu'aucun de leurs distributeurs actifs à l'étranger ne concurrence la recourante en opérant des ventes passives vers la Suisse. D'après les juges précédents, il existerait toutefois d'autres éléments et indices démontrant que ces éditeurs et diffuseurs se seraient obligés à tout mettre en oeuvre afin d'assurer une protection territoriale absolue à la recourante. Le Tribunal administratif fédéral a d'abord indiqué qu'un système de distribution excluant toute importation parallèle depuis la France était propre à faciliter la mise en place du droit de retour des ouvrages distribués par la recourante. Il a également relevé que la question d'une éventuelle "autorisation" des importations parallèles avait été abordée en 2005 et 2007 lors de différentes séances de l'Association Suisse des Diffuseurs, Editeurs et Libraires (ASDEL) auxquelles un représentant de la recourante était présent. Cela laisserait entendre qu'il aurait existé une pratique de cloisonnement du marché suisse de la part des diffuseurs-distributeurs suisses à cette époque. Estimant que ces deux éléments ne suffisaient pas encore à démontrer l'existence d'une protection territoriale absolue en faveur de la recourante, le Tribunal administratif fédéral s'est enfin - et surtout - fondé sur le fait qu'aucune importation parallèle n'aurait eu lieu, ni n'aurait été possible en lien avec les ouvrages diffusés et distribués par la recourante durant la période visée par l'enquête de la COMCO, alors même qu'il aurait existé un intérêt économique pour les librairies helvétiques à se procurer les ouvrages en question à l'étranger. Cette absence d'importation parallèle démontrerait, selon lui, que tous les éditeurs et diffuseurs partenaires de la recourante - même ceux qui n'étaient pas liés par une clause de type D - avaient accepté d'octroyer une protection territoriale absolue à cette dernière.  
 
8.6.5. La Cour de céans relève que les considérations développées plus haut en relation avec les contrats contenant une clause de type D ne peuvent pas être transposées aux 53 contrats de diffusion-distribution conclus par la recourante contenant une clause d'un autre type. En effet, à suivre leur texte, ces contrats, qui contiennent une clause de type A, B, C, E, F ou G, se limitent la plupart du temps à confier la diffusion et la distribution exclusives de livres en Suisse à la recourante. On précisera que quelques-uns de ces contrats ne contiennent même pas de clause d'exclusivité du tout, voire dénient expressément toute exclusivité à la recourante (cf. supra consid. 8.1). Il est donc absolument impossible d'en tirer un devoir contractuel des éditeurs et diffuseurs concernés de faire en sorte qu'aucun distributeur étranger ne vende leurs ouvrages à des revendeurs de livres suisses, même sur demande spontanée de ces derniers. Le Tribunal administratif fédéral l'a du reste lui-même reconnu dans son arrêt (cf. arrêt attaqué, consid. 11.3.4). Il n'a finalement été convaincu de l'existence d'une protection territoriale absolue que parce qu'il s'agissait, selon lui, de la seule explication au fait que les librairies suisses n'auraient - d'après son constat - jamais pu procéder à aucune importation parallèle d'ouvrages diffusés et distribués par la recourante (avec l'aide de C.________), alors même que de tels achats transfrontaliers auraient été intéressants pour elles d'un point de vue commercial et économique.  
 
8.6.6. En ce qui concerne cette dernière justification toutefois, l'arrêt attaqué ne fait état d'aucune librairie ou autre détaillant helvétique qui se serait concrètement adressé à des distributeurs ou grossistes étrangers, afin de se procurer auprès d'eux des ouvrages distribués en Suisse par la recourante, et, a fortiori, qui se serait vu refuser une telle livraison durant la période sous enquête. Le constat du Tribunal administratif fédéral selon lequel aucune importation parallèle de ces ouvrages n'aurait été possible ne se fonde finalement que sur des déclarations de libraires suisses ayant affirmé de manière générale et indéterminée en cours de procédure que les diffuseurs-distributeurs, éditeurs ou détaillants français n'auraient en principe jamais accepté d'ouvrir un compte d'achat aux détaillants helvétiques et que la pratique aurait généralement consisté à les renvoyer vers les diffuseurs-distributeurs officiels pour la Suisse. Il repose enfin également sur les déclarations d'un représentant d'une autre société suisse de distribution de livres - en l'occurrence D.________ - qui a admis qu'il n'était " pas possible de s'approvisionner auprès des éditeurs français qui ont une antenne commerciale en Suisse, sauf par le marché gris ".  
La Cour de céans peine cependant à comprendre en quoi ces différentes allégations seraient propres à démontrer d'une quelconque manière que les éditeurs ayant souscrit un contrat de diffusion-distribution contenant une clause de type A, B, C, E, F ou G avec la recourante se seraient engagés à faire en sorte que les détaillants suisses ne puissent pas se procurer leurs ouvrages à l'étranger. Il ressort tout d'abord de l'arrêt attaqué que les libraires interrogés évoquent avant tout une impossibilité de s'approvisionner non pas auprès des entreprises de distribution françaises, mais auprès des éditeurs français, soit auprès des "producteurs" de livres, étant rappelé qu'un tel refus ne constitue pas une exclusion de vente par des "distributeurs agréés" au sens de l'art. 5 al. 4 LCart (cf. supra consid. 7.5). Force est ensuite de constater que les déclarations mises en avant dans l'arrêt attaqué consistent en des considérations générales sur le marché du livre sans rapport précis avec la recourante. En l'état de l'arrêt attaqué, il est impossible de déterminer, par exemple, les ouvrages auxquels se réfèrent les détaillants interrogés, c'est-à-dire les titres ou le catalogue exact de produits que ces derniers auraient voulu ou tenté d'importer de manière parallèle en Suisse. En l'absence de toute précision, il faut reconnaître qu'il existe une très forte probabilité que les libraires interrogés se soient plaints de l'impossibilité d'obtenir à l'étranger des ouvrages qui n'étaient en réalité pas diffusés et distribués en Suisse par la recourante, dont la part de marché en Suisse est faible par rapport à celle des principaux diffuseurs-distributeurs actifs en Suisse, tels que D.________. On peut également imaginer que ces mêmes libraires se soient plaints d'une impossibilité d'importer des livres certes diffusés par l'intéressée, mais édités par des sociétés ayant souscrit une autre clause que celles de type A, B, C, E, F ou G dont il est ici question (p. ex. une clause de type D; cf. supra consid. 8.6.1-8.6.3). Il s'avère ainsi manifestement insoutenable et, partant, arbitraire, de retenir, sur la seule base de témoignages aussi vagues et peu probants, qu'il était exclu pour les revendeurs helvétiques de se procurer à l'étranger les ouvrages diffusés en Suisse par la recourante en vertu de contrats contenant l'une des clauses précitées. 
 
8.7. Il s'ensuit que rien dans l'arrêt attaqué ne permet de soutenir que les 53 éditeurs ou diffuseurs ayant souscrit une clause de type A, B, C, E, F ou G se seraient engagés envers la recourante à tout mettre en oeuvre afin qu'aucun de leurs diffuseurs-distributeurs à l'étranger ne vende leurs ouvrages à destination du marché suisse. En l'absence de toute disposition contractuelle claire en ce sens, un tel engagement ne peut en aucun cas être établi sur la base de considérations générales sur le fonctionnement du marché du livre en français, sans autres investigations et indices spécifiques en relation avec la situation de la recourante. Le Tribunal administratif fédéral a violé non seulement l'art. 5 al. 4 LCart, mais également l'interdiction de l'arbitraire en retenant le contraire.  
 
8.8. En revanche, comme on l'a vu, le Tribunal administratif fédéral n'a pas versé dans l'arbitraire ni violé le droit fédéral en retenant que la recourante était partie à des contrats de distribution accordant une protection territoriale absolue au sens de l'art. 5 al. 4 LCart avec 40 éditeurs ayant souscrit une clause d'exclusivité de type D. Il n'a sur ce point précis pas violé non plus le droit d'être entendue de la recourante, ni la maxime inquisitoire ancrée à l'art. 12 PA (cf. en lien avec l'art. 37 LTAF), puisqu'il lui était loisible de ne pas tenir compte des allégations et réquisitions de preuves de la recourante sur la base d'une appréciation anticipée de celles-ci, dans la mesure où les preuves administrées lui avaient permis de forger sa conviction et d'établir l'ensemble des faits pertinents pour la cause sans arbitraire (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).  
 
VI. Existence d'accords illicites au sens de l'art. 5 al. 1 LCart  
 
9.  
Il s'agit encore de déterminer si les différents accords de diffusion-distribution passés par la recourante - et en particulier ceux contenant une clause de type D - doivent être qualifiés d'illicites au sens de l'art. 5 al. 1 LCart, ce que la recourante conteste. 
 
9.1. En vertu de l'art. 5 al. 1 LCart, sont illicites, d'une part, les accords qui affectent de manière notable la concurrence sur le marché de certains biens ou services et qui ne sont pas justifiés par des motifs d'efficacité économique au sens de l'art. 5 al. 2 LCart et, d'autre part, les accords qui conduisent à la suppression d'une concurrence efficace. Dans ce second cas, la justification des accords par des motifs d'efficacité économique est exclue (cf. ATF 143 II 297 consid. 4.1; 129 II 18 consid. 3). La suppression de la concurrence efficace peut être prouvée directement; elle peut également résulter des différents cas de figures énumérés par le législateur à l'art. 5 al. 3 et 4 LCart, où il est présumé que la concurrence effective est supprimée. Une telle présomption n'est toutefois pas irréfragable, en ce sens qu'elle peut être levée lorsqu'il est établi qu'une concurrence subsiste malgré tout sur le marché considéré (cf. notamment ATF 147 II 72 consid. 6.1 et 6.5; 144 II 246 consid. 7.2 et les références citées). Si cette présomption est levée, il convient de se demander pour les accords visés à l'art. 5 al. 3 et 4 LCart, comme face à tout accord en matière de concurrence, si la concurrence n'est malgré tout pas affectée de manière notable, sans motifs d'efficacité économique (art. 5 al. 1 et 2 LCart), auquel cas l'accord est illicite.  
 
9.2. La jurisprudence a précisé la portée à donner à la notion d'"accords qui affectent de manière notable la concurrence" figurant à l'art. 5 al. 1 LCart. De manière générale, le caractère notable d'une atteinte à la concurrence peut être établi à l'aide de critères tant quantitatifs que qualitatifs, étant précisé que le seuil de gravité justifiant un constat d'illicéité doit rester globalement le même, quelle que soit l'approche adoptée (ATF 143 II 297 consid. 5.2.2; arrêt 2C_113/2017 du 12 février 2020 consid. 7.3.1). Cela étant, les accords visés par l'art. 5 al. 3 ou 4 LCart, auxquels le législateur a décidé d'appliquer une présomption de suppression de la concurrence efficace en raison de leurs effets potentiellement graves, ne constituent en principe pas des cas bagatelles, de sorte qu'ils sont par nature réputés affecter de manière notable la concurrence au sens de l'art. 5 al. 1 LCart. Autrement dit, une appréciation qualitative de ces accords sous le prisme de l'art. 5 al. 3 et 4 LCart suffit en règle générale à remplir la condition de l'atteinte notable à la concurrence au sens de l'art. 5 al. 1 LCart, sans qu'il faille au surplus en examiner les effets réels sur un plan quantitatif, ce qui n'est pas le cas des autres accords visés par cette disposition (cf. ATF 144 II 194 consid. 4.3.1-4.3.2; 143 II 297 consid. 5.2.5 et 5.4). Il est de ce fait possible de les qualifier d'illicites, pour autant qu'ils ne se justifient par des motifs d'efficacité économique (cf. art. 5 al. 1 et 2 LCart). Dans ce cas, il n'est pas nécessaire de se demander si ces accords, qui touchent le noyau dur de la concurrence (cf. supra consid. 4.3), remplissent le second cas de figure visé par cette disposition (cf. supra consid. 11.1), à savoir s'ils conduisent à une suppression de la concurrence efficace. Rappelons qu'admettre une suppression de la concurrence supposerait notamment d'examiner si la présomption posée à l'art. 5 al. 3 et 4 LCart peut ou non être considérée comme levée (cf. ATF 143 II 297 consid. 5.2.1-5.2.5, 5.3.2, 5.6).  
 
9.3. Sur le vu de ce qui précède, il faut retenir que les 40 contrats de diffusion-distribution qui ont lié la recourante à certains éditeurs et diffuseurs durant la période sous enquête et qui contenaient une clause d'exclusivité territoriale de type D s'avèrent forcément illicites à l'aune de l'art. 5 al. 1 LCart. Ils constituent en effet tous des accords verticaux visés par l'art. 5 al. 4 LCart. De tels accords, qui sont présumés avoir supprimé toute concurrence efficace en Suisse sur le marché de la distribution wholesale du livre en français, ont en tous les cas affecté celle-ci de manière notable, ce conformément à la jurisprudence exposée ci-avant. Rien n'indique pour le reste que les restrictions à la concurrence prévues par ces accords aient été justifiées par des motifs d'efficacité économique. Le Tribunal administratif fédéral l'a au contraire expressément nié dans son arrêt et ce point n'est pas contesté par la recourante, de sorte qu'il n'y a pas lieu de le remettre en question. Les 40 accords précités étant de toute manière illicites sous cet angle de vue, il n'est pas nécessaire d'examiner si la présomption de suppression de la concurrence efficace entrant en ligne de compte en l'espèce pourrait être levée, ce à quoi le Tribunal administratif fédéral a du reste répondu par la négative dans son arrêt.  
 
9.4. On pourrait se demander si la recourante a également participé à des accords illicites au sens de l'art. 5 al. 1 LCart avec les 53 autres éditeurs avec lesquels elle a entretenu des liens commerciaux entre 2005 et 2011, sans que les faits constatés dans l'arrêt attaqué ne permettent de retenir qu'elle a conclu avec eux des accords de distribution présumés supprimer toute concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 4 LCart (cf. supra consid. 8.7). En cohérence avec la motivation de son arrêt, le Tribunal administratif fédéral n'a pas traité cette question. Y répondre aurait en l'occurrence impliqué d'opérer une analyse globale de l'impact des accords passés par la recourante sur le marché suisse du livre (cf. supra consid. 9.2). Il n'appartient pas à la Cour de céans de procéder en première instance à un tel examen, qui dépend non seulement de l'établissement de faits ne ressortant pas de l'arrêt attaqué, mais qui relève également du pouvoir d'appréciation des autorités compétentes en matière de droit des cartels (cf. ATF 135 II 60 consid. 3.1.2). Compte tenu de l'écoulement du temps depuis la fin de l'enquête de la COMCO, le Tribunal fédéral renonce du reste à renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral pour qu'il se prononce sur ce point. Soulignons que le constat selon lequel la recourante aurait participé à des accords en matière de concurrence non visés par l'art. 5 al. 4 LCart, mais néanmoins illicites au sens de l'art. 5 al. 1 LCart avec 53 autres éditeurs n'aurait de toute manière aucune incidence déterminante sur l'issue du litige. Ce constat pourrait tout au plus donner lieu au prononcé d'une mesure d'interdiction d'entrave à la concurrence selon l'art. 30 al. 1 LCart (ch. 2 du dispositif de la décision de la COMCO du 27 mai 2013), étant précisé qu'une telle mesure se justifie de toute manière déjà en raison des nombreux accords contenant une clause de type D auxquels l'intéressée a participé entre 2005 et 2011 (cf. supra consid. 4.3 et infra consid. 10). En revanche, il n'aurait aucune influence sur les différentes questions de légalité et de quotité de la sanction litigieuse prononcée à l'encontre de l'intéressée en application de l'art. 49a al. 1 LCart, puisque la participation à des accords non visés par l'art. 5 al. 3 ou 4 LCart ne permet pas d'infliger une telle sanction et qu'elle n'a en principe aucun effet aggravant sur le prononcé de la peine à infliger.  
 
VII. Sanction et mesure prononcées au sens des art. 30 et 49a LCart  
 
10.  
Il s'agit à présent d'examiner si le Tribunal administratif fédéral était en droit de condamner la recourante au paiement d'une sanction financière de 447'000 fr. et de lui interdire d'entraver par des contrats de diffusion-distribution les importations parallèles de livres rédigés en français par tout détaillant actif en Suisse. 
 
10.1. Dans son recours, la recourante affirme à titre principal qu'il n'y avait pas lieu de la condamner au paiement d'une quelconque sanction financière, tout en remettant en cause à titre subsidiaire le montant de celle qui lui a été infligée.  
 
10.1.1. Selon l'art. 49a al. 1 LCart, l'entreprise qui participe à un accord illicite aux termes de l'art. 5 al. 3 et 4 LCart est tenue au paiement d'un montant pouvant aller jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires réalisé en Suisse au cours des trois derniers exercices (1 re phrase). La jurisprudence a précisé que, par "accord illicite au sens de l'art. 5 al. 3 et 4", il fallait entendre les différents types d'accords mentionnés aux alinéas précités. Ces accords présentent en effet un caractère particulièrement dommageable, qu'ils conservent même en cas de renversement de la présomption de suppression de la concurrence efficace qui leur est associée (ATF 147 II 72 consid. 8.3.1 et les références citées). Ces accords, qui doivent donc être sanctionnés parce qu'ils sont considérés comme des restrictions particulièrement problématiques de la liberté d'action, ne peuvent toutefois être sanctionnés que s'ils sont illicites au sens de l'art. 5 al. 1 LCart, soit s'ils suppriment la concurrence ou l'entravent de manière notable sans justification d'efficacité économique (ATF 144 II 194 consid. 5.3; 143 II 297 consid. 9.4.6). A cela s'ajoute qu'une entreprise n'est passible de sanction que si l'on peut lui reprocher une faute, quand bien même le texte de l'art. 49a al. 1 LCart ne le précise pas expressément. A cet égard, il n'est pas indispensable de pouvoir attribuer la responsabilité de la violation à la LCart à une personne physique déterminée (cf. ATF 147 II 72 consid. 8.4.2; 146 II 217 consid. 8.5.2). Un manque de diligence objectif prenant la forme d'un défaut d'organisation au sein de l'entreprise suffit, étant précisé qu'un devoir de diligence découle en premier lieu de la loi, à laquelle les entreprises doivent se conformer et en application de laquelle elles doivent en principe s'abstenir de conclure des accords en matière de concurrence rigides visés par l'art. 5 al. 3 et 4 LCart (ATF 147 II 72 consid. 8.4.2; 143 II 297 consid. 9.6.2). Ainsi, lorsqu'une entreprise adopte un comportement anticoncurrentiel avéré, elle viole en règle générale simultanément son devoir de diligence objectif, car les entreprises doivent connaître et rester informées des règles de la LCart, de la pratique qui s'y rapporte et des publications pertinentes. Il leur est au demeurant loisible de se renseigner sur la situation juridique actuelle auprès de la COMCO (cf. ATF 147 II 72 consid. 8.4.2; 143 II 297 consid. 9.6.2).  
 
10.1.2. D'après l'art. 49a LCart, le montant de la sanction est calculé en fonction de la durée et de la gravité des pratiques illicites (3 e phrase). Le profit présumé résultant des pratiques illicites de l'entreprise est dûment pris en compte pour le calcul de ce montant (4 e phrase). Les différents critères de calcul sont pour le reste précisés plus avant par l'Ordonnance du 12 mars 2004 sur les sanctions en cas de restrictions illicites (Ordonnance sur les sanctions LCart, OS LCart; RS 251.5), qui rappelle notamment qu'il doit être tenu compte du principe de la proportionnalité (art. 3 al. 2 OS LCart). Le calcul de la sanction relève en fin de compte d'un acte d'appréciation que le Tribunal administratif fédéral peut contrôler librement (art. 37 LTAF en lien avec l'art. 49 let. c PA), mais que le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec une certaine retenue, n'intervenant qu'en cas d'abus du pouvoir d'appréciation de la part des autorités inférieures (cf. art. 189 Cst. et art. 95 et 97 al. 1 LTF a contrario; ATF 147 II 72 consid. 8.5.2).  
 
10.2. En l'occurrence, quoi qu'en dise la recourante, celle-ci a bel et bien participé à 40 accords de distribution illicites remplissant les conditions de l'art. 5 al. 4 LCart avec différents éditeurs ou diffuseurs durant la période sous enquête (cf. supra consid. 9.3). Le fait que les clauses d'exclusivité de type D contenues dans ces contrats auraient pu perdre tout effet et utilité dans l'hypothèse où la loi fédérale sur le prix du livre aurait été acceptée en référendum en 2012 n'y change rien. Il s'ensuit que l'on peut reprocher à la recourante d'avoir adopté un comportement remplissant les conditions objectives au prononcé d'une sanction financière au sens de l'art. 49a al. 1 LCart. Pour le reste, force est de constater qu'on peut également lui opposer la commission d'une faute dès lors qu'elle a conclu des accords qui ont cloisonné le marché suisse et qui constituent à ce titre des "accords rigides" ou des "cartels durs", dont elle devait savoir qu'ils étaient contraires à la législation fédérale.  
 
10.3. La recourante tente en vain de se dégager de toute faute et responsabilité en affirmant qu'elle pouvait légitimement penser que les contrats qu'elle avait conclus ne posaient aucun problème du point de vue du droit des cartels. Le fait est qu'en concluant avec ses partenaires éditeurs des contrats de diffusion-distribution les obligeant à ne pas vendre ni laisser vendre leurs ouvrages par d'autres diffuseurs-distributeurs qu'elle en Suisse, la recourante devait effectivement savoir qu'elle était liée à des accords de distribution aptes à cloisonner le marché suisse et susceptibles d'être visés par l'art. 5 al. 4 LCart. Il importe peu à cet égard que la COMCO n'ait jamais ouvert d'enquête en relation avec le marché du livre en français avant 2007, que cette autorité ait tout d'abord entamé une procédure pour abus de position dominante - et non pour participation à des accords illicites au sens de la LCart - et qu'il lui ait fallu plus de cinq années pour rendre sa décision finale constatant que l'intéressée avait violé le droit fédéral. De même est-il sans pertinence que le Tribunal administratif fédéral ait eu besoin de six ans pour rendre l'arrêt attaqué sur recours et arriver à la même conclusion que la COMCO. Ces faits mettent tout au plus en lumière la complexité qu'il peut y avoir d'appréhender le fonctionnement du marché suisse du livre pour des acteurs qui y sont extérieurs, étant précisé qu'une telle complexité ne libère pas la recourante de son devoir de diligence en matière de droit de la concurrence. Enfin, cette dernière se prévaut en vain de diverses jurisprudences - en l'occurrence des ATF 135 II 86 et 142 IV 333 (consid. 4.2, respectivement 4.1) - qui indiqueraient, selon elle, que, pour pouvoir lui imputer une quelconque faute et lui infliger une sanction financière directe, il aurait été nécessaire non seulement d'identifier la personne qui, au sein de son entreprise, aurait été individuellement responsable de la conclusion des accords illicites visés par l'art. 49a LCart, mais aussi de vérifier que cette personne remplissait les conditions objectives et subjectives de punissabilité posées par cette disposition. La recourante perd en effet de vue que les jurisprudences qu'elle cite n'ont aucune sorte de pertinence en l'espèce, dans la mesure où elles se réfèrent à des comportements illégaux sans rapport avec le droit de la concurrence et à propos desquels la loi ne définit pas la faute - par hypothèse commise par une personne morale - comme une carence d'organisation, contrairement à ce que fait la LCart, comme on l'a vu (cf. supra consid. 10.1.1).  
 
10.4. S'agissant enfin du montant de la sanction, il convient de relever que les autorités précédentes l'ont fixé à 447'000 fr. en tenant compte de la gravité du comportement anticoncurrentiel imputable à la recourante. Ce faisant, elles sont parties de la prémisse selon laquelle celle-ci aurait participé, entre 2005 et 2011, à des accords illicites au sens des art. 4 al. 1 et 5 al. 4 LCart non seulement en lien avec la diffusion-distribution en Suisse de 40 éditeurs ou diffuseurs liés par une clause de type D, mais également en lien avec la diffusion-distribution dans le pays de 53 éditeurs ou diffuseurs liés par un autre type de clause (cf. arrêt attaqué, consid. 20.3.4.3). Toutefois, comme on l'a vu, il ne peut pas être reproché à la recourante d'avoir participé à des accords en matière de concurrence illicites visés par l'art. 5 al. 4 LCart en tant qu'elle s'est vue chargée de diffuser et de distribuer ce second type d'éditeurs et diffuseurs (cf. supra consid. 8.7). Il s'ensuit que la violation de la LCart imputable à la recourante n'est pas aussi grave que ce que retient l'arrêt attaqué, puisqu'elle ne concerne finalement qu'une portion moindre de ses activités de diffusion-distribution de livres. Il se justifie donc d'adapter à la baisse la sanction prononcée à l'encontre de la recourante, laquelle doit, comme on l'a vu, tenir compte de la gravité des pratiques illicites. Il n'appartient toutefois pas au Tribunal fédéral de prononcer lui-même une nouvelle sanction, dont le calcul relève d'un acte d'appréciation (cf. supra consid. 10.1.2). L'affaire doit donc être renvoyée à la juridiction inférieure pour qu'elle se prononce à nouveau sur le montant de la sanction à infliger en application de l'art. 49a LCart, ainsi que l'a déjà décidé la Cour de céans dans une affaire similaire relative au marché du livre en français (cf. arrêt 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 12, non publié in ATF 148 II 25).  
 
10.4.1. Le renvoi du dossier à l'autorité inférieure pour nouveau calcul de la sanction fait qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur les autres griefs soulevés par la recourante à l'encontre du montant de la sanction.  
 
10.5. Il convient pour le reste de confirmer l'interdiction faite à la recourante "d'entraver par des contrats de distribution et/ou de diffusion concernant les livres écrits en français les importations parallèles par tout détaillant actif en Suisse". En effet, lorsque l'autorité parvient à la conclusion qu'une restriction illicite à la concurrence existe dans le cas d'espèce, elle peut ordonner des mesures destinées à supprimer ladite restriction (art. 30 al. 1 LCart; sur la nature de cette disposition, cf. arrêt 2C_782/2021 du 14 septembre 2022 consid. 4 et 5, destiné à la publication). En l'occurrence, il n'apparaît pas à la lecture de l'arrêt attaqué que les contrats de distribution conclus par la recourante - et contenant une clause par laquelle les éditeurs et diffuseurs de livres s'engagent envers l'intéressée à ne pas laisser vendre leurs ouvrages sur le territoire suisse par d'autres entreprises - aient été modifiés ou amendés après l'ouverture de la procédure de la COMCO. L'interdiction faite à la recourante de continuer d'entraver les importations parallèles au moyen de telles clauses contractuelles apparaît ainsi nécessaire, tout en constituant la mesure la moins incisive afin de supprimer la restriction illicite constatée. La Cour de céans peine à suivre la recourante en tant qu'elle affirme que cette injonction manquerait de clarté ou serait impossible, étant précisé qu'elle ne s'applique évidemment qu'aux seuls accords considérés comme illicites au sens de l'art. 5 al. 1 LCart à l'aune des considérants qui précèdent (cf. aussi 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 12.2, non publié in ATF 148 II 25). Contrairement à ce qu'elle prétend, dite injonction ne l'oblige nullement à s'immiscer directement dans les relations contractuelles de ses partenaires éditeurs afin que ceux-ci autorisent expressément leurs distributeurs à l'étranger à répondre aux sollicitations des libraires suisses. Il lui suffit de modifier les accords qui visent à empêcher les importations parallèles auxquels elle est partie et de renoncer à en conclure de nouveaux du même genre.  
 
VIII. Frais et dépens des procédures antérieures  
 
11.  
Dans son mémoire, la recourante demande que les frais de procédure relatifs aux procédures menées successivement devant la COMCO et devant le Tribunal administratif fédéral soient mis à la charge de la Confédération, respectivement qu'ils soient au moins réduits en tant qu'ils ont été mis à sa charge. 
 
11.1. Cette conclusion, qui ne fait l'objet d'aucune motivation spécifique dans le mémoire de recours, serait évidemment bien fondée si le recours l'avait été dans son ensemble. Tel n'est toutefois pas le cas, car il convient de confirmer le constat des autorités précédentes selon lequel la recourante a participé à des accords illicites au sens de l'art. 5 al. 1 et 4 LCart durant la période sous enquête, ce qui a pour conséquence principale de justifier le prononcé d'une sanction financière à l'encontre de l'intéressée en application de l'art. 49a LCart. Notons que le Tribunal administratif fédéral a considéré que ce seul constat justifiait de condamner la recourante au paiement d'un montant de 760'150 fr. pour les frais de procédure devant la COMCO, solidairement avec neuf autres diffuseurs-distributeurs de livres. D'après lui, un tel montant, équivalant à 76'015 fr. par diffuseur-distributeur, ne serait pas exagéré, ni contraire à l'ordonnance du 25 février 1998 relative aux émoluments prévus par la loi sur les cartels (OEmol-LCart; RS 251.2), dès lors qu'il correspondrait à 380 heures de travail par partie et que cette durée ne dépendrait pas de la fixation de la sanction, mais avant tout de la détermination de l'existence d'un comportement contraire à la LCart.  
 
11.2. Il n'y a pas lieu de remettre en cause le raisonnement du Tribunal administratif fédéral en tant qu'il confirme que la recourante doit payer un dixième des frais occasionnés par la procédure de la COMCO, étant ici précisé que les frais de l'enquête initiale portant sur un éventuel abus de position dominante sur le marché du livre ont été laissés à la charge de la Confédération (cf. décision de la COMCO du 27 mai 2013, no 774; art. 105 al. 2 LTF). Cette décision, contre laquelle la recourante ne soulève aucun grief, ne viole pas le droit fédéral à première vue, même s'il appert que le nombre d'accords fondant le prononcé d'une sanction au titre de l'art. 49a al. 1 LCart est finalement moindre, dès lors que l'intéressée a malgré tout été sanctionnée et qu'il s'agit là d'un critère justifiant la mise à sa charge des frais de procédure de première instance. La Cour de céans ne voit en revanche pas pourquoi la recourante devrait répondre solidairement des frais de procédure provoqués par les autres diffuseurs-distributeurs. Un tel régime de solidarité ne s'imposerait que si l'intéressée et ces autres sociétés avaient provoqué ensemble ( gemeinsam) la décision de première instance de la COMCO, ce qui n'est pas le cas en l'espèce s'agissant de condamnations pour accords verticaux illicites n'entretenant aucun lien direct et nécessaire entre eux (cf. art. 2 al. 2 de l'ordonnance générale du 8 septembre 2004 sur les émoluments [OGEmol; RS 172.041.1] en lien avec l'art. 1a OEmol-LCart), comme la Cour de céans l'a d'ailleurs déjà relevé dans plusieurs arrêts récents (cf. notamment arrêts 2C_43/2020 du 21 décembre 2021 consid. 13.2, non publié in ATF 148 II 25; 2C_44/2020 du 3 mars 2022 consid. 13.2, non publié in ATF 148 II 321). Il appartiendra au Tribunal administratif fédéral, à qui la cause doit de toute manière être renvoyée pour nouvelle décision, de corriger ce point.  
 
11.3. Il se justifiera enfin de procéder à une nouvelle répartition des frais et dépens de la procédure menée devant le Tribunal administratif fédéral, lequel devra réduire la sanction à infliger à la recourante et, partant, admettre partiellement son recours. La cause sera donc également renvoyée à cette instance précédente pour qu'elle se prononce sur ce point (art. 67 et 68 al. 5 LTF).  
IX. Conséquences 
 
12.  
Le recours doit ainsi être admis partiellement, dans la mesure de sa recevabilité. L'arrêt attaqué doit être partiellement annulé et la cause renvoyée au Tribunal administratif fédéral pour nouvelle décision s'agissant de la sanction à infliger à la recourante et des frais et dépens des procédures précédentes. 
 
13.  
Compte tenu de l'issue du litige, des frais réduits seront mis à la charge de la recourante, qui succombe partiellement. Aucun frais ne sera mis à la charge de la COMCO, celle-ci ayant agi dans l'exercice de ses attributions officielles, sans que son intérêt patrimonial n'ait été en cause (art. 66 al. 4 LTF; cf. arrêt 2C_343/2010 du 11 avril 2011 consid. 9.3, non publié aux ATF 137 II 199). La COMCO sera en revanche condamnée à verser des dépens à la recourante, qui obtient partiellement gain de cause (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
L'arrêt du Tribunal administratif fédéral B-4019/2013 du 30 octobre 2019 est partiellement annulé et la cause est renvoyée à cette autorité pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
3.  
Des frais judiciaires réduits, arrêtés à hauteur de 6'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
La COMCO est condamnée à verser à la recourante une indemnité de 4'500 fr. à titre de dépens réduits. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à la COMCO, au Tribunal administratif fédéral, Cour II, et au Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche DEFR. 
 
 
Lausanne, le 8 décembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : E. Jeannerat