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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_563/2022  
 
 
Arrêt du 6 juin 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Maîtres Nicolas Candaux et Yannick Fernandez, avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
représentée par Me Cécile Berger Meyer, avocate, 
intimée, 
 
Département du territoire de la République et canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, 
case postale 22, 1211 Genève 8. 
 
Objet 
Autorisation de construire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 20 septembre 2022 (ATA/948/2022 - A/804/2021-LCI). 
 
 
Faits :  
 
A.  
B.________ SA, société anonyme dont le siège est à Genève, est titulaire d'un droit distinct et permanent sur la parcelle n° 6'936, feuille 51 de la commune Genève-Cité dont la Ville de Genève est propriétaire. Cette parcelle, d'une superficie de 5'784 m2 aux adresses 3, rue de la Cloche, 2, rue de Monthoux et 19, quai du Mont-Blanc, abrite l'hôtel à l'enseigne "C.________". 
Par requête du 30 juin 2020, B.________ SA a sollicité auprès du Département du territoire de la République et canton de Genève (ci-après: le Département) l'autorisation de transformer et rénover les façades de l'hôtel. Au cours de l'instruction de cette autorisation, le projet a été modifié et les préavis des services concernés ont été recueillis, tous favorables. Ainsi, par décision du 28 janvier 2021, le Département a délivré l'autorisation de construire DD 113'670 en lien avec la version du projet n° 3. 
 
B.  
Propriétaire de la parcelle n° 1'514, feuille 38 de la commune Genève-Cité aux adresses 1, rue de Monthoux et 17, quai du Mont-Blanc, A.________ SA a formé recours contre la décision du 28 janvier 2021. Exploitant sur cette parcelle A.________ SA, la recourante soutenait que le gabarit de la construction projetée était contraire aux dispositions cantonales en la matière. En outre, la nouvelle image de l'hôtel détonnait très fortement avec le style classique des bâtiments avoisinants. 
Par jugement du 27 janvier 2022, le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève a rejeté le recours. La Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) en a fait de même aux termes d'un arrêt rendu le 20 septembre 2022. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ SA demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal ainsi que l'autorisation de construire DD 113'670. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'intimée B.________ SA conclut principalement à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet avec suite de frais et dépens. Le Département cantonal conclut au rejet du recours avec suite de frais à la charge de la recourante. Un second échange d'écritures a eu lieu, au terme duquel les parties maintiennent leurs conclusions respectives. 
Par ordonnance du 10 novembre 2022, le Président de la I ère Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif formée par la recourante.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. La recourante, propriétaire d'une parcelle voisine du projet litigieux, est particulièrement touchée par l'arrêt attaqué qui confirme l'octroi de l'autorisation de construire litigieuse; elle a un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation; elle bénéficie partant de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF
Les autres conditions de recevabilité sont au surplus réunies. S'agissant de l'obligation de motiver, l'intimée soutient qu'elle n'est pas réalisée. Au vu du résultat auquel parvient le présent arrêt, point n'est besoin d'approfondir la question. Il convient donc, sous cette réserve, d'entrer en matière. 
 
2.  
Devant le Tribunal fédéral, l'objet du litige porte uniquement sur le gabarit de l'immeuble côté rue de Monthoux, à savoir en face du bâtiment de la recourante. Cette dernière se prévaut d'arbitraire dans l'application du droit cantonal relatif à cette question, en particulier s'agissant des art. 22 ss de la loi genevoise sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI/GE; RSG L 5 05). 
 
2.1. Le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal (art. 95 LTF). Il examine en revanche sous l'angle restreint de l'arbitraire l'interprétation et l'application des autres règles du droit cantonal ou communal (ATF 141 I 36 consid. 5.4; 138 V 67 consid. 2.2; 134 II 349 consid. 3).  
Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 144 IV 136 consid. 5.8; 144 I 170 consid. 7.3; arrêt 1C_359/2022 du 20 avril 2023 consid. 2.2). 
Si le Tribunal fédéral applique le droit fédéral d'office (art. 106 al. 1 LTF), il appartient au recourant de démontrer par une argumentation qui réponde aux exigences des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF en quoi une norme cantonale a été appliquée arbitrairement. Le recourant doit ainsi indiquer précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et démontrer par une argumentation précise en quoi consiste la violation. 
 
2.2. A teneur des considérants de l'arrêt cantonal, le gabarit côté quai du Mont-Blanc a été défini par la largeur de ce quai, soit 21 mètres et est aussi applicable côté rue de Monthoux; en outre, le gabarit du bâtiment restera quasiment inchangé après rénovation. Ces éléments ne sont pas contestés devant le Tribunal fédéral. En d'autres termes, n'est pas remise en cause l'application de l'art. 38 LCI/GE, aux termes duquel "lorsqu'une construction (...) a des façades sur des rues de largeurs différentes, la hauteur de la ligne verticale du gabarit est fixée par les dimensions de la rue la plus large". N'est pas non plus critiqué le mécanisme de l'art. 23 al. 1 LCI/GE selon lequel la hauteur ("H") du gabarit ne peut dépasser de plus de 3 m la distance ("D") fixée entre alignements (H < D + 3).  
Les juges cantonaux ont poursuivi leur raisonnement en appliquant l'art. 37 LCI/GE qui prescrit que "les constructions d'angle ne peuvent avoir un gabarit différent du gabarit applicable au bloc auxquelles elles appartiennent, et cela sur une profondeur égale à celle de ce bloc" (al. 1), l'al. 3 précisant que "en aucun cas cette profondeur ne peut dépasser 20 m". Ils ont ajouté que le "bloc" visé par la loi constitue nécessairement l'ensemble d'un bâtiment avec ses caractéristiques en hauteur et en largeur; dans ces conditions, l'art. 37 LCI/GE ne limite pas le report de gabarit uniquement à la hauteur de la façade. En outre, l'idée de "profondeur" ne peut que se rapporter à la largeur du bâtiment par opposition à sa hauteur. 
En conclusion, la cour cantonale a constaté que le gabarit retenu sur la rue de Monthoux (24 m) ne serait pas conforme à la loi s'il était calculé en se fondant uniquement sur l'art. 23 LCI/GE: en fonction de la largeur de cette rue entre le bâtiment de la recourante et celui de l'intimée (14.99 m seulement), le gabarit serait limité à 17.99 m (14.99 m + 3 = 17.99 m). Cela découlait cependant précisément de l'application de l'art. 37 LCI qui constitue une " lex specialis " par rapport aux normes générales sur les gabarits.  
 
2.3. Après avoir exposé de manière générale les principes du droit genevois en matière de gabarit ainsi que la jurisprudence cantonale y afférente et évoqué les normes d'autres cantons sur le sujet, la recourante se réfère à un plan de coupe du projet de rénovation contenu dans le dossier cantonal (coupe C-C'), qu'elle reproduit et agrémente d'adjonctions de couleur. Elle affirme sur la base de ces documents que la rénovation prévue se trouverait "manifestement hors gabarit": l'empiètement qu'elle a figuré en couleur sur la coupe précitée serait le résultat d'une "équation faussée"; se référant implicitement à l'art. 23 al. 1 LCI/GE, elle prétend que la valeur "D" applicable sur la rue de Monthoux devrait être de 14.99 m au lieu des 21 m retenus par la cour cantonale. Elle en conclut que l'approche des juges cantonaux permettrait de valider l'équation "14.99 m + 3 m = 24 m". L'arrêt attaqué serait ainsi "inexplicable, soit arbitraire". La recourante ajoute, sans autre développement, que l'application de l'art. 37 LCI/GE à titre de lex specialis aboutirait à un résultat arbitraire. En effet, à la suivre, son propre bâtiment se retrouverait "quasi greffé d'une façade de plus de 24 m face aux fenêtres de ses chambres".  
Sous couvert d'arbitraire, la recourante limite en réalité son propos à une simple critique de l'application du droit cantonal. Elle n'explique en particulier pas pourquoi l'art. 37 LCI/GE devrait être privé du statut de lex specialis, alors que cette norme vise précisément une situation particulière (les "constructions d'angle" selon le titre marginal de l'art. 37 LCI/GE) par rapport aux règles générales de gabarit de la deuxième zone (art. 22-25 LCI/GE). Or le raisonnement des juges cantonaux repose sur cette prémisse, d'ailleurs seule à même de garantir un gabarit uniforme pour un bâtiment du type de celui de l'intimé.  
Dans la mesure où le caractère insoutenable de la règle de l'art. 37 LCI/GE n'est pas démontré, le résultat auquel est parvenue la cour cantonale ne l'est pas non plus. La recourante n'a en outre pas contesté que le gabarit du futur bâtiment resterait quasiment inchangé après rénovation. Son argumentation reviendrait dès lors à dire que l'actuel bâtiment dépasserait déjà aujourd'hui le gabarit légal de plusieurs mètres, ce qu'elle se garde d'affirmer. 
 
2.4. Le recours apparaît dès lors infondé, dans la mesure de sa recevabilité.  
 
3.  
La recourante, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée, qui obtient gain de cause avec l'aide d'un avocat, a droit à des dépens, à la charge de la recourante (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 francs, sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Une indemnité de dépens de 5'000 francs est allouée à l'intimée, à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante et de l'intimée, au Département du territoire et à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 6 juin 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller