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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_655/2023  
 
 
Arrêt du 24 novembre 2023  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Hurni et Hofmann, 
Greffier: M. Magnin. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________, agissant par Me Robert Assaël, 
2. B.A.________, agissant par Me Marc Oederlin, 
3. C.A.________, agissant par Me Yaël Hayat, 
4. D.A.________, agissant par Me Romain Jordan, 
tous les quatre représentés par Me Romain Jordan, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Mandat de comparution, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ACPR/700/2023 - P/21865/2017). 
 
 
Faits:  
 
A.  
 
A.a. Des membres de la famille A.________, composée de B.A.________ (père), A.A.________ (mère), C.A.________ (fils) et D.A.________ (épouse de ce dernier) (ci-après: les prévenus), sont prévenus dans une procédure pénale ouverte par le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après: le Ministère public) pour, notamment, traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 2 CP) et usure par métier (art. 157 ch. 1 et 2 CP). Il leur est en substance reproché d'avoir exploité leur personnel de maison.  
 
A.b. Par acte d'accusation du 14 février 2023, complété et corrigé le 15 août 2023, le Ministère public a renvoyé les prévenus devant le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal correctionnel).  
 
A.c. Selon les mandats de comparution des 5, 6 et 24 avril 2023, les prévenus ont été convoqués aux débats fixés du 2 au 6 octobre 2023.  
 
B.  
 
B.a. Le 15 août 2023, la Présidente du Tribunal correctionnel a émis des mandats de comparution à l'endroit des prévenus pour des nouveaux débats fixés au 3 octobre 2023. Ces mandats comportent chacun la précision suivante: "si vous ne donnez pas suite au mandat de comparution [précédent] et ne comparaissez pas [...] le lundi 2 octobre 2023 [...], vous êtes cité à comparaître [...] lors de nouveaux débats le mardi 3 octobre 2023".  
 
B.b. Par arrêt du 11 septembre 2023, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre pénale de recours) a déclaré irrecevable le recours interjeté par les prévenus contre les mandats de comparution du 15 août 2023, les frais de la procédure de recours, arrêtés à 2'000 fr., étant mis solidairement à leur charge.  
 
C.  
 
C.a. Par acte du 20 septembre 2023, A.A.________, B.A.________, C.A.________ et D.A.________ (ci-après: les recourants) forment un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant, avec suite de dépens sur les plans cantonal et fédéral, à son annulation et au renvoi de la cause à la Chambre pénale de recours afin qu'elle entre en matière sur le recours cantonal puis rende une nouvelle décision. Ils ont en outre requis l'effet suspensif en ce sens que les mandats de comparution émis le 15 août 2023 soient suspendus.  
 
C.b. Par ordonnance du 25 septembre 2023, le Président de la cour de céans a rejeté la requête d'effet suspensif, respectivement de mesures provisionnelles.  
 
C.c. Par courrier du 29 septembre 2023, les recourants ont informé la cour de céans que le Tribunal correctionnel avait reporté les débats prévus dès le 2 octobre 2023. Ils ont persisté dans leurs conclusions du 20 septembre 2023 et "ont explicitement invité" le Tribunal fédéral à entrer en matière sur le recours nonobstant le report des débats.  
Le 2 octobre 2023, la Présidente du Tribunal correctionnel a informé l'autorité de céans que les mandats de comparution pour les débats des 2 et 3 octobre 2023 avaient dû être révoqués et que les recourants avaient été convoqués à de nouveaux premiers débats le 20 novembre 2023. 
 
C.d. Par lettre du 6 octobre 2023, la Chambre pénale de recours a indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à formuler. Le 23 octobre 2023, le Ministère public a conclu au rejet du recours. L'autorité cantonale a produit le dossier de la cause.  
 
 
Considérant en droit:  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2). 
 
 
1.1. Le recours - formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) - est dirigé contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF) dans le cadre d'une procédure pénale, qui est donc susceptible d'être attaquée par la voie du recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1 LTF.  
De nature incidente, l'arrêt querellé ne met pas un terme à la procédure pénale. Le recours au Tribunal fédéral n'est dès lors en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Cela étant, lorsque le recours est formé, comme dans le cas présent, contre une décision d'irrecevabilité, cette situation équivaut, sous l'angle de la recevabilité, à un déni de justice formel. Sur ces points particuliers, le recours est ouvert indépendamment d'un préjudice irréparable (ATF 143 I 344 consid. 1.2; arrêts 7B_166/2023 du 29 septembre 2023 consid. 1.1; 7B_253/2023 du 31 août 2023 consid. 3.1). Dans ce cas, seule la question de la recevabilité peut toutefois être portée devant le Tribunal fédéral (arrêts 7B_166/2023 du 29 septembre 2023 consid. 1.1; 7B_253/2023 du 31 août 2023 consid. 3.1). 
 
1.2.  
 
1.2.1. Selon l'art. 81 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b).  
Cet intérêt doit être actuel et pratique (ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1; 140 IV 74 consid. 1.3.1), soit exister tant au moment du dépôt du recours qu'à celui où l'arrêt est rendu (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1; 139 I 206 consid. 1.1). Un intérêt général ou de fait est insuffisant (ATF 147 IV 2 consid. 1.3; 133 IV 228 consid. 2.3). La simple perspective d'un intérêt juridique futur ne suffit pas (cf. ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1). 
Par souci d'économie de procédure, cette exigence vise à garantir que le Tribunal fédéral se prononce sur des questions concrètes et non pas théoriques (ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1; 140 IV 74 consid. 1.3.1). Il n'est renoncé à l'exigence d'un intérêt juridique actuel et pratique que si la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, si sa nature ne permet pas de la soumettre à une autorité judiciaire avant qu'elle perde son actualité et s'il existe un intérêt public suffisamment important à la solution des questions litigieuses en raison de leur portée de principe (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1; 140 IV 74 consid. 1.3.3). Il s'agit de conditions cumulatives (arrêt 6B_342/2022 du 30 mai 2023 consid. 4.1 et les arrêts cités). 
 
1.2.2. En l'espèce, les mandats de comparution, par lesquels la Présidente du Tribunal correctionnel avait convoqué les recourants aux débats des 2 et 3 octobre 2023, ont été révoqués et de nouveaux débats ont été appointés au 20 novembre 2023. La date des débats litigieux est en outre passée. Ainsi, il n'existe plus d'intérêt actuel à l'annulation ou à la modification de l'arrêt querellé. Il y a dès lors lieu d'examiner si les conditions permettant exceptionnellement de traiter un recours en cas d'absence d'un tel intérêt pourraient être réalisées.  
Dans leur écriture du 29 septembre 2023, les recourants font valoir qu'il existerait un intérêt public à trancher la question litigieuse, à savoir en substance la validité de l'envoi d'une "double convocation" dans un laps de temps de 24 heures, importante en pratique, dès lors qu'en l'espèce l'autorité de jugement allait "renvoyer possiblement à nouveau" de telles convocations et que la "contestation" pourrait se reproduire en tout temps dans des circonstances analogues. Ils ajoutent qu'au regard des "probables courts délais de convocation", le Tribunal fédéral serait toujours face à des débats soit annulés, soit qui auraient déjà eu lieu, et qu'il ne pourrait dès lors jamais examiner cette question avant la mise en oeuvre des mandats de comparution contestés. En l'occurrence, il ne ressort pas des écritures des parties faisant suite à l'annulation des débats des 2 et 3 octobre 2023 que le Tribunal correctionnel aurait, lors de la fixation des nouveaux premiers débats du 20 novembre 2023, également adressé un double envoi à des seconds débats le jour suivant pour le cas d'un éventuel défaut. Il s'ensuit, comme le relève le Ministère public dans ses observations du 23 octobre 2023, que la "double convocation" redoutée par les recourants ne s'est pas reproduite. Pour le reste, on ne voit pas - et les recourants ne l'expliquent au demeurant pas - pourquoi des circonstances analogues pourraient se reproduire en tout temps. Par ailleurs, il est erroné d'affirmer que les délais de convocation sont généralement courts et que le Tribunal fédéral n'aurait pas le temps d'examiner la question litigieuse, dès lors qu'il est fréquent que des audiences de jugement devant le tribunal de première instance, voire l'autorité d'appel, soient fixées plusieurs mois après la convocation. Enfin, dans le cadre de leurs écritures, les recourants ne démontrent pas que l'envoi d'une "double convocation" constituerait une pratique fréquente ou généralisée des autorités, en particulier cantonales, de sorte qu'on ne saurait admettre, sur cette seule base, l'existence d'un intérêt public suffisamment important à la résolution de la question litigieuse. Cette question ne revêt par conséquent pas un caractère de principe permettant de s'écarter exceptionnellement de l'exigence d'un intérêt actuel pour entrer en matière sur le recours. 
 
1.2.3. Les recourants ne disposent donc pas d'un intérêt juridique actuel à l'annulation ou à la modification de l'arrêt querellé et l'exception à cette condition n'est pas non plus établie.  
 
2.  
En définitive, le recours doit être déclaré irrecevable. 
Les recourants, qui succombent, supporteront solidairement les frais judiciaires. Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux recourants, au Ministère public de la République et canton de Genève, à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève et au Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 24 novembre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Abrecht 
 
Le Greffier : Magnin