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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1450/2021  
 
 
Arrêt du 28 avril 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Juge présidant, Muschietti et van de Graaf. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
2. B.________, 
représentée par Me Louis Gaillard, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Ordonnance de classement (faux dans les titres), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice 
de la République et canton de Genève, 
Chambre pénale de recours, du 9 novembre 2021 (P/731/2020 ACPR/766/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par ordonnance du 25 juin 2021, le Ministère public du canton de Genève a classé la procédure s'agissant de l'infraction de faux dans les titres à l'égard de B.________, refusé d'ordonner les actes d'instruction sollicités par A.________, laissé les frais de procédure à la charge de l'Etat et refusé d'allouer une indemnité à A.________. 
 
B.  
Par arrêt du 9 novembre 2021, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a rejeté le recours formé par A.________ à l'encontre de l'ordonnance de classement du ministère public. 
En bref, il ressort les éléments suivants de l'arrêt précité. 
 
B.a. A.________ et B.________ se sont mariés en 2009. De leur union est né C.________, en 2009. Le couple s'est séparé en 2010. Leur séparation a donné lieu à de nombreuses procédures civiles et pénales.  
 
B.b. Par courrier du 19 mai 2020, complété par plis des 10 novembre 2020, 23 janvier 2021, 2 février 2021 et 17 février 2021, A.________ a déposé plainte pénale contre son ex-épouse, B.________, et d'éventuel (s) complice (s) pour faux dans les titres (art. 251 CP).  
 
C. En substance, B.________ était débitrice d'une contribution d'entretien mensuelle de 1'330 fr., allocations familiales non comprises, en faveur de C.________, et ne s'était acquittée d'aucun montant à ce titre entre les mois de juin et de décembre 2017, l'arriéré litigieux s'élevant à 9'310 fr. pour cette période. Les 2 octobre et 19 décembre 2017, A.________ avait déposé plainte pénale contre la susnommée pour violation d'une obligation d'entretien relativement à la période précitée (art. 217 CP). Dans le cadre de cette procédure (P/20165/2017), B.________ avait produit, le 5 décembre 2017, une attestation établie le 13 novembre 2017 par D.________, lequel lui sous-louait un appartement, indiquant qu'elle lui devait encore les loyers des mois de mai à novembre 2017, à l'exception du mois de septembre 2017. Devant la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice (ci-après: CPAR), B.________ avait produit une attestation établie le 1er mars 2019 par E.________, assistante sociale auprès de F.________, libellée comme suit: "Par cette attestation nous confirmons que Madame B.________ nous a bien apporté les preuves de paiement de loyer mensuel dès le début de l'aide financière à savoir du 1er août 2017 à ce jour". Ces deux documents étaient contradictoires et il convenait de déterminer lequel était véridique, ceux-ci ayant eu une influence directe et déterminante sur le sort de la procédure pénale P/20165/2017. En effet, par jugement du 17 janvier 2019, le tribunal de police, qui s'était fondé notamment sur l'attestation de D.________, avait acquitté B.________ du chef d'infraction à l'art. 217 CP pour les mois de juin et juillet 2017, mais l'avait reconnue coupable de celle-ci pour les mois d'août à décembre 2017. La CPAR avait, quant à elle, par arrêt du 23 mars 2020 (AARP/127/2020), acquitté l'intéressée pour la période du 1er juin au 31 décembre 2017 en se basant notamment sur l'attestation de E.________. Par arrêt du 22 octobre 2020 (6B_540/2020), le Tribunal fédéral avait annulé cet arrêt et renvoyé la cause à l'autorité cantonale afin notamment qu'elle examine et indique sur quelle pièce ou autre preuve elle se fondait pour considérer que B.________ s'était acquittée de son loyer. La production du faux avait en effet sciemment pour but de procurer à B.________ un avantage indu en procédure (levée d'un séquestre) mais aussi de la soustraire à une condamnation pénale pour violation de l'art. 217 CP.  
 
C.a. Dans son ordonnance de non-entrée en matière, le ministère public a notamment considéré que rien ne venait étayer les allégations du plaignant quant au caractère mensonger de l'attestation de F.________ du 1er mars 2019, E.________ ayant en particulier confirmé à la police que les affirmations qui y figuraient étaient attestées par des preuves de versement.  
 
D.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 9 novembre 2021. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement, au renvoi de la cause au ministère public afin qu'il procède à la mise en accusation de E.________ et de B.________ pour faux dans les titres et procède aux actes d'instruction que le Tribunal fédéral estimera nécessaire. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO (ATF 146 IV 76 consid. 3.1 p. 82; 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4). La notion d'influence du jugement pénal sur les prétentions civiles est conçue strictement. La partie plaignante ne peut pas s'opposer à une décision parce que celle-ci ne facilite pas son action sur le plan civil. Il faut que la décision attaquée ait pour conséquence qu'elle rencontrera plus de difficultés à faire valoir ses prétentions civiles (ATF 127 IV 185 consid. 1a p. 188; arrêts 6B_711/2022 du 8 février 2023 consid.1; 6B_831/2021 du 26 janvier 2023 consid. 1). 
En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe à la partie recourante d'alléguer les faits qu'elle considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir. Lorsque le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement déjà pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait déjà déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste pas moins que le procureur qui refuse d'entrer en matière ou prononce un classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans tous les cas, il incombe par conséquent à la partie plaignante d'expliquer dans son mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se substituer au ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4). 
 
1.1. Le recourant expose tout d'abord que l'arrêt entrepris a entraîné le rejet des prétentions civiles qu'il avait fait valoir devant la cour cantonale. Il avait requis à ce titre une indemnité d'un montant de 638 fr. en réparation du dommage matériel résultant des frais de photocopies (190 fr.) et de l'achat du Commentaire Romand du Code pénal II (448 fr.), et d'un montant de 15'000 fr. en réparation du tort moral pour le temps consacré à cette procédure, ainsi qu'à la procédure P/20165/2017, impactée par la production du faux document.  
En outre, le recourant soutient que l'issue de la présente procédure aura un impact direct et déterminant sur la procédure pénale P/20165/2017, dans le cadre de laquelle le document litigieux rédigé par E.________ a été déposé par l'intimée 2. Du reste, la cour cantonale avait admis sa qualité pour recourir pour ce motif, ainsi que dans une procédure parallèle concernant un autre faux dans les titres. 
 
1.2. A teneur de l'arrêt entrepris, E.________ a établi l'attestation litigieuse en sa qualité d'assistante sociale auprès de F.________, soit dans le cadre de ses fonctions. Or, à teneur de l'art. 23 de la loi du canton de Genève sur F.________ (LHG; RS/GE J 4 07), les relations entre F.________ et son personnel sont régies par la législation cantonale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux. La loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du canton de Genève (LPAC; RS/GE B 5 05) prévoit ainsi qu'elle s'applique au personnel de l'office cantonal des assurances sociales et des établissements qu'il regroupe, ainsi que de F.________ (art. 1 al. 1 let. f LPAC). Partant, en ce qui concerne E.________, il suffit de relever que, conformément à l'art. 2 de la loi genevoise sur la responsabilité de l'État et des communes du 24 février 1989 (LREC; RS/GE A 2 409), l'État de Genève et les communes du canton sont tenus de réparer le dommage résultant pour des tiers d'actes illicites commis soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence par leurs fonctionnaires ou agents dans l'accomplissement de leur travail (al. 1); les lésés n'ont aucune action directe envers les fonctionnaires ou agents (al. 2). Le canton de Genève ayant fait usage de la faculté réservée à l'art. 61 al. 1 CO, le recourant ne disposerait, le cas échéant, que d'une prétention de droit public à faire valoir non pas contre l'auteur présumé contre lequel il a dirigé sa plainte, mais contre l'État. Or, des prétentions fondées sur le droit public en raison de la responsabilité d'agents de l'État ne constituent pas des prétentions civiles au sens de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF (cf. consid. 1.1 supra). Cela exclut que le recourant puisse déduire sa qualité pour recourir de cette disposition en ce qui concerne l'infraction qu'il impute à E.________.  
 
1.3. Pour autant que l'infraction dénoncée vise l'intimée 2, il y a lieu de considérer ce qui suit.  
 
1.3.1. En ce qui concerne le dommage résultant, selon le recourant, des frais engendrés par la nécessité de défendre ses intérêts dans la procédure (photocopies et achat d'un ouvrage de doctrine), ainsi qu'en réparation du tort moral résultant du temps consacré à la procédure, il est constant que le droit au remboursement des frais de dépôt de plainte et de démarches destinées à ménager une preuve liés à une infraction pénale relève de l'art. 433 CPP (arrêt 6B_1036/2020 du 30 septembre 2020 consid. 4 et la référence citée), ce qui exclut d'en faire l'objet de conclusions civiles. Les explications du recourant ne permettent pas de comprendre pourquoi il n'en irait pas ainsi des frais qu'il allègue avoir engagés et du temps qu'il aurait consacré à cette affaire. Dans cette mesure, il ne fait pas valoir de prétentions civiles à l'encontre de l'intimée au sens de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF.  
 
1.3.2. Dans la mesure où le recourant se prévaut d'un préjudice résultant de l'influence du document argué de faux dans la procédure pénale visant l'intimée 2 pour violation d'une obligation d'entretien, il y a lieu de considérer ce qui suit.  
L'art. 251 CP protège, en tant que bien juridique, d'une part la confiance particulière placée dans un titre ayant valeur probante dans les rapports juridiques et, d'autre part, la loyauté dans les relations commerciales (ATF 142 IV 119 consid. 2.2 p. 121 s. et les références citées). Le faux dans les titres peut également porter atteinte à des intérêts individuels, en particulier lorsqu'il vise précisément à nuire à un particulier (ATF 140 IV 155 consid. 3.3.3 p. 159; 119 Ia 342 consid. 2b p. 346 s. et les références citées). Tel est le cas lorsque le faux est l'un des éléments d'une infraction contre le patrimoine, la personne dont le patrimoine est menacé ou atteint ayant alors la qualité de lésé (ATF 119 Ia 342 consid. 2b p. 346 s.; arrêts 6B_666/2021 du 13 janvier 2023 consid. 3.1.2; 6B_1185/2019 du 13 janvier 2020 consid. 2.2). 
En l'espèce, le recourant soutient qu'un verdict de culpabilité prononcé à l'encontre de l'intimée 2 pour l'infraction de violation d'une obligation d'entretien lui permettra d'obtenir réparation d'une partie du préjudice découlant de ladite infraction, en se voyant verser la contribution d'entretien due à son fils grâce à l'allocation d'une créance compensatrice correspondant aux avoirs actuellement séquestrés. Le recourant se prévaut ainsi de prétentions civiles déduites de l'infraction réprimée à l'art. 217 CP, qui fait l'objet d'une procédure distincte. En ce sens, il n'invoque pas de prétentions déduites directement de l'infraction de faux dans les titres. Or, il sied de rappeler que les prétentions civiles visées par l'art. 81 LTF sont celles qui peuvent être prises directement dans la procédure pénale elle-même (cf. arrêt 6B_633/2018 du 23 août 2018 consid. 1.4). Tel n'est pas le cas de celles invoquées par le recourant. 
Pour le reste, l'existence d'un dommage qui résulterait directement de l'infraction de faux dans les titres alléguée n'a rien d'évident. En effet, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que le document dénoncé comme faux par le recourant aurait été conçu ou utilisé par l'intimée 2 dans le but de nuire aux intérêts de l'intéressé, mais plutôt de se défendre dans le cadre de la procédure pénale qui la vise du chef d'infraction de violation d'une obligation d'entretien. Dans cette mesure, le document argué de faux n'est pas l'un des éléments d'une infraction portant atteinte au patrimoine du recourant et pour laquelle il pourrait demander réparation dans la présente procédure. Par ailleurs, pour autant que le recourant envisage un préjudice résidant dans l'influence du document litigieux sur la question de l'allocation de la créance compensatrice par l'autorité pénale devant laquelle celui-ci a été produit, le Tribunal fédéral a rappelé à plusieurs occasions que, lorsque le litige à l'origine de la dénonciation pénale n'est pas encore terminé, on ignore si la prétendue infraction pourrait avoir eu une quelconque influence sur le jugement à rendre. A ce stade, il s'agit de pures conjectures (ATF 123 IV 184 consid. 1c p. 189; arrêts 6B_987/2020 du 4 mars 2021 consid. 1.2 et l'arrêt cité). 
En conséquence, à défaut de se prévaloir de prétentions civiles déduites directement de l'infraction dénoncée, le recourant est dépourvu de la qualité pour recourir sur le fond de la cause. 
 
1.4. L'hypothèse visée à l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF n'entre pas en considération, la contestation ne portant pas sur le droit de porter plainte.  
Indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie recourante est aussi habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 5 et les références citées). En l'espèce, le recourant ne présente pas de grief qui puisse être séparé du fond, de sorte qu'il ne dispose pas non plus de la qualité pour recourir sous cet angle. 
 
2.  
Au vu de ce qui précède, le recours est irrecevable, faute de qualité pour recourir. Le recourant supporte les frais (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée 2, qui n'a pas été invitée à se déterminer, ne saurait prétendre à des dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 28 avril 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Denys 
 
La Greffière : Musy