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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_171/2023  
 
 
Arrêt du 19 janvier 2024  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jametti, présidente, Hohl, Kiss, Rüedi et May Canellas. 
Greffier: M. O. Carruzzo. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Guillaume Fournier, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
ROLEX SA, 
représentée par Mes Theda König Horowicz et Pascal Fehlbaum, avocats, 
intimée. 
 
Objet 
droit des marques; concurrence déloyale, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 9 février 2023 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/26421/2020 ACJC/188/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. ROLEX SA (ci-après: ROLEX), société genevoise ayant notamment pour but la fabrication et la commercialisation de montres, détient la marque ROLEX pour divers produits horlogers dans le monde entier, y compris en Suisse, ainsi que la couronne distinctive qui l'accompagne. Elle est notamment titulaire de plusieurs marques suisses dans le domaine horloger et/ou de la joaillerie ainsi que de la bijouterie. Elle jouit d'une grande notoriété tant en Suisse qu'au niveau mondial.  
 
A.b. D.________ est le co-fondateur de la société de droit français E.________, créée en 2005 à Paris, exploitée sous le nom commercial " (...) ", qui avait pour but, en France et à l'étranger, la conception, la personnalisation et la commercialisation de tous produits vintage spécifiques à l'horlogerie et à la joaillerie et toute activité connexe et complémentaire s'y rattachant.  
En 2009, D.________ a fondé la société genevoise F.________ SA, radiée en 2017, dont le but social était la création, la fabrication, l'exploitation d'une fabrique de production et la commercialisation de montres de prestige et de grande complication, de tous instruments, articles et objets d'horlogerie, de bijouterie, de joaillerie, d'orfèvrerie et de pierres précieuses ainsi que de tous accessoires de luxe. 
 
A.c. En 2013, D.________ a créé A.________ SA, société inscrite au registre du commerce genevois ayant pour but la " transformation de montres et toutes activités, services et conseils dans ces domaines ". Ladite société est détenue majoritairement par son fondateur, lequel en est également le directeur avec signature individuelle depuis 2015.  
A.________ SA personnalise des montres de luxe produites en série, essentiellement par ROLEX, en changeant certaines pièces, en leur donnant une nouvelle apparence et/ou en modifiant diverses caractéristiques techniques afin de les rendre plus exclusives conformément aux souhaits exprimés par ses clients. Certaines opérations consistent à transformer une montre en modèle-squelette et à rendre le mouvement visible par transparence, ce que n'a jamais fait ROLEX. L'activité de personnalisation, aussi connue sous le nom de customisation, nécessite parfois, mais pas systématiquement, de déposer et réapposer les marques de la montre d'origine sur le cadran, après le remplacement ou la modification de celui-ci, voire d'apposer des marques sous forme de décalques sous la glace dans le cas des modèles-squelettes. A.________ SA recrée notamment, en modifiant certaines montres récentes, certains traits de l'apparence de modèles vintage de ROLEX, qui ne sont plus commercialisés par celle-ci mais qui ont une valeur marchande importante parmi les collectionneurs. Sur les modèles modifiés, elle appose ses propres signes (...) et/ou (...) à côté de ceux de la marque ROLEX. Plusieurs modèles personnalisés de montres de la marque ROLEX comportent le nom de célébrités n'ayant jamais été ambassadrices officielles de la marque précitée, avec lesquelles A._______ SA peut être amenée à conclure des contrats de collaboration.  
A.________ SA procède à la personnalisation de montres apportées par le client. Elle ne possède pas de boutique mais dispose uniquement d'un atelier. Son activité s'exerce en ligne via son site internet "www.A.________.com", enregistré le 2 octobre 2017. Elle présente également sur son site internet un catalogue d'exemples de montres modifiées, dont certains font partie de séries limitées. 
En cours de procédure, A.________ SA a produit une capture d'écran de son site internet à la date du 21 mars 2021 indiquant que l'accès à celui-ci n'est possible qu'après avoir accepté un avertissement mentionnant que la société concernée est un atelier indépendant offrant des services de personnalisation de montres à la demande de clients pour un usage privé, qu'elle ne fabrique pas ni ne vend des montres et qu'elle n'est ni affiliée aux fabricants de montres sur lesquelles elle intervient ni autorisée par ceux-ci à déployer son activité de personnalisation. Elle a allégué que tel était déjà le cas avant l'introduction de la présente procédure. 
Une fois la montre personnalisée par ses soins, A.________ SA offre une nouvelle garantie propre à ses clients, ses conditions générales (dans leur état au 21 mars 2021) précisant que la garantie originale est automatiquement annulée à la suite de son intervention. 
 
A.d. ROLEX, qui refuse d'une manière générale le co-marquage, n'a jamais octroyé d'autorisation à A.________ SA concernant l'utilisation de ses marques. Cette dernière ne le conteste pas. Elle soutient toutefois que ROLEX a toléré son activité de longue date.  
 
A.e. Les premiers contacts entre D.________ et ROLEX remontent à 2005. A cette époque, le prénommé, agissant au nom de E.________, a notamment indiqué spontanément à ROLEX faire de la restauration et de la personnalisation de montres anciennes. L'intéressé s'est alors engagé à indiquer, dans les conditions de vente, que les montres personnalisées ne faisaient pas partie des créations de ROLEX et a pris note qu'aucun nom, logo ou marque ne devait être supprimé, changé ou ajouté. Le 12 juin 2006, ROLEX a fait savoir qu'elle s'opposait à la commercialisation de ses produits modifiés. Dans un courrier adressé le 3 octobre 2006 à E.________, les conseils de ROLEX ont souligné que leur mandante n'approuvait en aucun cas l'activité de personnalisation de montres de sa marque et qu'elle ne consentait pas à la poursuite de cette pratique.  
A.________ SA allègue que D.________ aurait poursuivi l'activité de personnalisation de montres jusqu'à la création de la société précitée en 2013, ce que conteste ROLEX, laquelle soutient n'avoir plus constaté d'activité de la part du prénommé à la suite de cette dernière correspondance. A.________ SA soutient que ROLEX ne pouvait ignorer son activité depuis sa constitution, car celle-ci avait été évoquée dans plusieurs articles de presse et sur divers sites internet entre 2013 et 2018. 
 
A.f. Sous un prête-nom, ROLEX a pris contact, en octobre 2019, avec A.________ SA en vue d'un achat test effectué en février 2020. Elle a acquis un modèle modifié d'une montre ROLEX Daytona pour un montant de 32'580 fr., ce prix comprenant la fourniture de la montre d'origine ainsi que la réalisation de la personnalisation. Celle-ci a notamment nécessité une réapposition des marques ROLEX, OYSTER et COSMOGRAPH, à côté du logo (...). Le signe (...) apparaissait sur la masse oscillante et le fond de la montre modifiée remise à Rolex en septembre 2020. Entendu en cours de procédure, I.________, employé chez ROLEX depuis 18 ans et responsable du support technique et atelier, a constaté qu'il s'agissait d'une imitation vintage, que le cadran avait été changé avec l'apposition de décalques de marques appartenant à ROLEX non réalisées par cette dernière, que la boîte avait été modifiée (remplacement des protections de la couronne, des poussoirs, de la lunette, du fond et de la glace), que le mouvement avait subi des modifications structurelles et que le bracelet montrait des modifications de finitions.  
 
A.g. Par courrier du 10 juin 2020, ROLEX a mis en demeure A.________ SA de cesser toutes ses activités en lien avec des montres de sa marque.  
Sous la plume de D.________, A.________ SA a répondu le 29 juin 2020 qu'elle était abasourdie par le contenu dudit courrier lequel marquait, à son avis, une rupture totale avec les rapports entretenus avec le prénommé depuis 2005. Elle a rejeté les reproches formulés à son endroit et a sollicité une rencontre. 
Le 10 août 2020, ROLEX a relevé que les activités déployées autrefois en France par E.________ n'avaient aucun lien avec la présente affaire. Elle a souligné qu'elle s'y était du reste toujours catégoriquement opposée et que celles-ci ne s'étaient, à sa connaissance, pas poursuivies. 
Le 1er octobre 2020, A.________ SA a spontanément présenté à ROLEX un document dans lequel elle prenait un certain nombre d'engagements visant, pour l'essentiel, à garantir une clientèle privée devant s'engager à ne pas revendre la montre customisée et à ne pas disposer de stock de montres personnalisées ou à personnaliser. 
 
 
B.  
Le 22 décembre 2020, ROLEX a assigné A.________ SA devant la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. Elle a conclu à ce qu'il soit ordonné à la défenderesse: 
 
- de cesser immédiatement de fabriquer, de faire fabriquer, d'importer, d'exporter, de commercialiser, d'offrir et/ou de promouvoir, de quelque manière que ce soit, y compris sur internet, des montres, parties de montres ou accessoires qui ne sont pas d'origine et/ou comportent des modifications au niveau du design et/ou au niveau technique, mais arborent néanmoins une ou plusieurs marques appartenant à ROLEX; 
- de cesser immédiatement tout usage dans le commerce de marques appartenant à ROLEX en vue d'offrir et/ou de promouvoir, de quelque manière que ce soit, y compris sur internet, des services de modification aboutissant à des montres, parties de montres ou accessoires; 
- de cesser immédiatement tout usage dans le commerce de marques appartenant à ROLEX en combinaison ou en association avec d'autres signes et/ou noms tels que (...), (...), (...) et/ou d'autres célébrités nommément désignées; 
- de cesser immédiatement de reprendre ou de faire référence à d'anciens designs ou modèles de montres ROLEX seuls ou en combinaison avec une ou plusieurs des marques pour ou en relation avec tout produit ou service horloger; 
- d'indiquer le nom et l'adresse de ses sous-traitants et/ou fournisseurs et/ou distributeurs et/ou acheteurs commerciaux pour tous les produits ou services décrits précédemment. 
La demanderesse a également requis que les produits comportant les caractéristiques susdécrites soient confisqués et détruits. Elle a conclu à ce que les condamnations et les interdictions requises soient assorties de la peine d'amende prévue par l'art. 292 du Code pénal suisse (CP; RS 311.0) ainsi que d'une amende d'ordre de 1'000 fr. pour chaque jour d'inexécution. A titre préalable, elle a sollicité la production par la défenderesse de toutes les pièces permettant de déterminer le gain obtenu par celle-ci, se réservant le droit de chiffrer ultérieurement ses conclusions. 
La défenderesse a conclu au rejet de la demande. 
Par ordonnance du 8 avril 2022, la cour cantonale a décidé, avec l'accord des parties, de limiter la procédure à la question de l'existence d'une éventuelle atteinte aux droits de propriété intellectuelle de la demanderesse découlant du comportement adopté par la défenderesse. 
Lors de l'audience de plaidoiries finales tenue le 29 septembre 2022, les parties ont persisté dans leurs conclusions et explications respectives. 
Statuant par arrêt du 9 février 2023 en qualité d'instance cantonale unique, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a interdit à la défenderesse: 
 
- tout usage, dans le commerce, de marques appartenant à ROLEX, par apposition ou réapposition; 
- tout usage, dans le commerce, de marques appartenant à ROLEX en combinaison ou en association avec d'autres signes et/ou noms tels que (...), (...), (...) et/ou d'autres célébrités nommément désignées. 
- tout usage, dans le commerce, de marques appartenant à ROLEX en vue d'offrir et/ou de promouvoir, de quelque manière que ce soit, y compris sur internet, des services de modification de montres, parties de montres ou accessoires. 
Ces injonctions ont été prononcées sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP. La cour cantonale a aussi réservé la suite de la procédure, en indiquant que les conclusions des parties demeurées litigieuses seraient réglées ultérieurement. Les motifs qui étayent cette décision seront indiqués plus loin dans la mesure utile à la compréhension des griefs dont celle-ci est la cible. 
 
C.  
Le 21 mars 2023, A.________ SA (ci-après: la recourante) a formé un recours en matière civile, assorti d'une requête d'effet suspensif, contre cet arrêt. Elle conclut, principalement, à la réforme de la décision querellée en ce sens que la demande introduite à son encontre le 22 décembre 2020 est rejetée intégralement. Subsidiairement, elle requiert l'annulation de l'arrêt déféré et le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
ROLEX (ci-après: l'intimée) a conclu au rejet du recours. 
La cour cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt. 
L'effet suspensif a été octroyé au recours par ordonnance du 3 avril 2023, après avoir été dans un premier temps accordé à titre superprovisionnel le 23 mars 2023. 
La recourante a répliqué suscitant le dépôt d'une duplique de la part de l'intimée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 145 I 239 consid. 2; 138 III 46 consid. 1). 
 
1.1. Lorsque le droit fédéral prévoit une instance cantonale unique, le recours en matière civile est recevable indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 [LTF; RS 173.110]) et, contrairement à la règle générale (cf. art. 75 al. 2 LTF), le tribunal supérieur n'a pas à statuer sur recours (art. 75 al. 2 let. a LTF). En l'occurrence, la cour cantonale, qui a statué en instance cantonale unique, a fondé sa compétence ratione materiae sur l'art. 5 al. 1 let. a et d du Code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC; RS 272), de sorte que la décision attaquée est sujette au recours en matière civile indépendamment de la valeur litigieuse.  
 
1.2. Le recours en matière civile n'est recevable que contre les décisions finales (art. 90 LTF), les décisions partielles (art. 91 LTF) et, sous réserve des cas visés à l'art. 92 LTF, les décisions incidentes notifiées séparément (art. 93 al. 1 LTF) si celles-ci peuvent causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale permettant d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b).  
 
1.2.1. La décision finale est celle qui met un terme à l'instance. La décision partielle est celle qui statue sur un objet dont le sort est indépendant de celui qui reste en cause (art. 91 let. a LTF) ou met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts (art. 91 let. b LTF). L'indépendance au sens de l'art. 91 let. a LTF signifie, d'une part, que la partie des conclusions faisant l'objet de la décision en cause aurait pu, théoriquement, donner lieu à un procès séparé et, d'autre part, que la décision attaquée tranche définitivement une partie du litige, sans qu'il n'existe de risque de contradiction entre la décision à rendre sur les conclusions restant à juger et la décision partielle déjà entrée en force (ATF 146 III 254 consid. 2.1.1; 141 III 395 consid. 2.4; 135 III 212 consid. 1.2.2 et 1.2.3). Pour que le sort de deux actions puisse être qualifié d'indépendant, on doit pouvoir juger séparément leurs conclusions en ce sens que la décision sur l'une n'est pas le préalable nécessaire de la décision sur l'autre; il faut donc non seulement qu'il soit possible de statuer sur les prétentions déjà tranchées indépendamment de celles qui ne le sont pas encore, mais également que le sort de l'objet encore en cause puisse être réglé indépendamment des conclusions déjà tranchées (ATF 146 III 254 consid. 2.1.4 et les références citées; arrêts 4A_122/2023 du 22 mars 2023 consid. 3.1; 4A_47/2021 du 24 octobre 2022 consid. 1.2.1; 4A_279/2021 du 1er juin 2021 consid. 7.1). De manière générale, il n'y a pas de décision partielle au sens de l'art. 91 let. a LTF s'il ne peut être statué sur certaines prétentions avant qu'une décision sur d'autres n'ait été rendue (ATF 146 III 254 consid. 2.1.4; arrêt 4A_47/2021, précité, consid. 1.2.1).  
Les décisions qui ne sont ni finales ni partielles d'après ces critères sont des décisions incidentes. 
 
1.2.2. En l'espèce, il ressort de l'arrêt attaqué que la procédure a été limitée, dans un premier temps, au point de savoir si le comportement adopté par la recourante était illicite ou non, la question d'un éventuel dommage subi par l'intimée devant le cas échéant être examinée ultérieurement. La décision querellée ne met ainsi pas un terme à la procédure. Il appert toutefois que, dans le dispositif de la décision querellée, la cour cantonale ne s'est pas contentée de constater l'existence d'une atteinte aux droits de propriété intellectuelle de l'intimée, puisqu'elle a interdit à la recourante d'adopter toute une série de comportements, lesdites injonctions étant prononcées sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP. Dans ces conditions, on peut légitimement s'interroger sur le point de savoir si l'arrêt attaqué constitue une décision partielle au sens de l'art. 91 LTF ou s'il doit être assimilé à une décision incidente tombant sous le coup de l'art. 93 LTF. Il faut en effet bien voir que les prétentions encore en cause tendant à la réparation d'un éventuel dommage subi par l'intimée supposent notamment que la recourante ait adopté un comportement illicite. Or, l'arrêt attaqué a reconnu l'existence d'un tel acte illicite et, partant, a reconnu que l'une des conditions permettant de fonder une éventuelle responsabilité civile de la recourante était remplie. Autrement dit, la cour cantonale, au moment de se prononcer sur les prétentions pécuniaires de l'intimée, ne pourra pas faire abstraction des conclusions déjà tranchées par elle dans l'arrêt attaqué. Il existe dès lors manifestement un lien entre les conclusions déjà traitées et le sort de l'objet encore en cause. Point n'est toutefois besoin de pousser plus avant l'examen du critère de l'indépendance visé par l'art. 91 let. a LTF. A supposer même que l'arrêt querellé doive être qualifié de décision incidente, il y a en effet lieu d'admettre, sur le vu des explications avancées par l'intéressée dans son mémoire de recours, que la décision attaquée est de nature à lui causer un préjudice irréparable, raison pour laquelle le recours serait de toute manière recevable au regard de l'art. 93 al. 1 let. a LTF.  
 
1.3. Pour le reste, qu'il s'agisse de la qualité pour recourir de l'intéressée, du délai de recours ou des conclusions prises par la recourante, aucune de ces conditions de recevabilité ne fait problème en l'espèce.  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 139 I 22 consid. 2.3; 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.; RS 101), que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1). Il ne suffit pas qu'une appréciation différente puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable (ATF 144 I 170 consid. 7.3; 142 II 369 consid. 4.3; 140 III 167 consid. 2.1). 
 
3.  
Dans un premier groupe de moyens, la recourante, dénonçant un établissement manifestement inexact, respectivement incomplet des faits, une atteinte à son droit d'être entendue et une violation du droit fédéral, soutient, en substance, que l'intimée aurait toléré de longue date ses activités, raison pour laquelle l'action aurait été introduite tardivement par l'intéressée et, partant, serait périmée. Avant d'examiner la recevabilité et, le cas échéant, les mérites des critiques formulées par la recourante, il convient de rappeler certains principes et d'exposer le raisonnement tenu par les juges précédents sur le problème considéré. 
 
3.1. Conformément à la jurisprudence constante, les actions défensives en matière de droits de propriété intellectuelle et de concurrence déloyale peuvent s'éteindre lorsqu'elles sont mises en oeuvre trop tard (arrêts 4A_267/2020 du 28 décembre 2020 consid. 11.1; 4A_91/2020 du 17 juillet 2020 consid. 4.1; 4A_630/2018 du 17 juin 2019 consid. 3.1 et les références citées).  
La péremption pour avoir tardé à agir doit toutefois être admise avec retenue car, selon l'art. 2 al. 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC; RS 210), la protection d'un droit sera exclue seulement si son exercice est manifestement abusif (arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.1; 4A_630/2018, précité, consid. 3.1 et les références citées). Plus exactement, l'abus de droit réside dans le fait que l'ayant droit adopte un comportement contradictoire ( venire contra factum proprium) : l'inaction prolongée suscite l'apparence d'une tolérance, que contredit l'action en justice intentée des années plus tard (arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.1; 4A_257/2014 du 29 septembre 2014 consid. 6.1). Le simple fait de tarder avant de faire valoir son droit ne constitue en revanche pas à lui seul un abus de droit (ATF 131 III 439 consid. 5.1; arrêt 4A_161/2022 du 5 juin 2023 consid. 4.4).  
 
3.2. La péremption suppose que l'ayant droit ait eu connaissance (ou aurait dû avoir connaissance) de la violation de ses droits, qu'il ait toléré celle-ci pendant une longue période sans s'y opposer et que l'auteur de la violation, de bonne foi, ait entre-temps acquis lui-même une position digne de protection ( eigener wertvoller Besitzstand; arrêt 4A_91/2020, précité, consid. 4.1).  
 
3.2.1. Le moment à partir duquel la passivité du titulaire est à prendre en considération est celui où il a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance de l'utilisation du signe litigieux (première condition; arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.2; 4A_630/2018, précité, consid. 3.2; 4A_257/2014, précité, consid. 6.2).  
 
3.2.2. L'ayant droit doit avoir toléré la violation pendant une longue période (deuxième condition). Savoir après combien de temps d'inactivité du lésé la péremption doit être admise dépend des circonstances de l'espèce. Le législateur a renoncé à fixer un délai déterminé. Ce choix correspond au mécanisme de l'art. 2 al. 2 CC, qui suppose une certaine élasticité (arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.3; 4A_257/2014, précité, consid. 6.3 et les références citées). La jurisprudence récente en matière de signes distinctifs fait état d'une période oscillant en règle générale entre quatre et huit ans (arrêts 4A_267/2020, précité, consid. 11.5.2; 4A_91/2020, précité, consid. 4.3; sur l'ensemble de la question, cf. arrêt 4A_257/2014, précité, consid. 6.3). Le facteur temps revêt une grande importance, mais il n'est pas le seul à entrer en ligne de compte pour déterminer si le fait d'invoquer tardivement le droit en question peut constituer un abus de droit (arrêt 4A_257/2014, précité, consid. 6.3 et la référence citée). Il s'agit, de manière plus générale, de se mettre à la place de l'usurpateur et de voir s'il pouvait raisonnablement et objectivement admettre, au vu du comportement de l'ayant droit, que celui-ci avait renoncé à agir (arrêts 4A_267/2020, précité, consid. 11.5.2; 4A_257/2014, précité, consid. 6.3). Plus la période pendant laquelle l'ayant droit tolère l'usage concurrent est longue, plus l'auteur de la violation sera fondé à admettre, selon les règles de la bonne foi, que l'ayant droit continuera à tolérer la violation et qu'on ne pourra exiger de lui qu'il doive abandonner la situation acquise (ATF 117 II 575 consid. 4a; arrêt 4A_257/2014, précité, consid. 6.3).  
 
3.2.3. L'auteur de l'atteinte doit utiliser de bonne foi le signe distinctif contesté (troisième condition). La bonne foi ne doit toutefois pas nécessairement exister à l'origine (bonne foi initiale) : lorsque l'auteur de l'atteinte est mis en demeure de cesser l'utilisation du signe litigieux, un nouveau "délai de péremption" commence à courir (arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.4; 4A_257/2014, précité, consid. 6.4 et les références citées); la bonne foi de l'auteur peut alors refaire surface, sous forme de bona fides superveniens. En d'autres termes, l'ayant droit peut exceptionnellement se voir opposer la péremption même vis-à-vis de celui qui s'est consciemment approprié un signe distinctif prêtant à confusion, en particulier lorsque, par sa passivité, il amène le concurrent (originairement de mauvaise foi) à la conviction légitime que la violation est tolérée (cf. ATF 117 II 575 consid. 4a et la référence citée; arrêt 4A_91/2020, précité, consid. 4.4).  
La mise en demeure peut être répétée, mais pas indéfiniment (ATF 100 II 395 consid. 3b). En effet, la répétition d'interpellations non suivies d'effet peut conforter l'auteur de l'atteinte dans la conviction que l'ayant droit ne songe pas sérieusement à faire valoir ses droits en justice (arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.4; 4A_257/2014, précité, consid. 6.4). 
 
3.2.4. S'agissant de la position digne de protection (quatrième condition), il est décisif que le signe distinctif de l'auteur de la violation se soit imposé dans le public (sur le marché) comme étant le signe distinctif de l'entreprise ensuite d'un long et paisible usage, et que le défendeur se soit ainsi créé une position concurrentielle avantageuse (arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.5; 4A_257/2014, précité, consid. 6.5; sur l'ensemble de la question, cf. ATF 117 II 575 consid. 6a; 109 II 338 consid. 2a). Cette position concurrentielle doit être telle que les désavantages (sérieux) qui résulteraient pour l'auteur de la violation de l'abandon du signe litigieux justifient de faire supporter au lésé (ayant droit) l'inconvénient de ne plus pouvoir faire valoir ses droits exclusifs à son égard (sur cette pesée des intérêts, cf. ATF 117 II 575 consid. 6a et la référence citée).  
Le préjudice économique que subirait l'auteur de la violation s'il devait cesser l'utilisation du signe litigieux peut, selon les circonstances, entrer dans la notion de désavantage sérieux (aspect quantitatif; cf. arrêts 4A_91/2020, précité, consid. 4.5; 4C.76/2005 du 30 juin 2005 consid. 3.4 non publié in ATF 131 III 581). L'existence d'un chiffre d'affaires important n'est toutefois, en soi, pas suffisant, mais l'auteur de la violation doit nécessairement établir le lien entre ce chiffre d'affaires et l'utilisation du signe litigieux (arrêt 4A_630/2018, précité, consid. 3.3 et les références citées). 
Les désavantages sérieux peuvent également revêtir un aspect qualitatif: cela sera le cas lorsque l'utilisation du signe litigieux a, pour l'auteur de la violation, une importance stratégique vis-à-vis de certains clients (arrêts 4A_630/2018, précité, consid. 3.3; 4C.76/2005, précité, consid. 3.4 non publié in ATF 131 III 581). 
Il ne peut être renoncé à la condition de la position digne de protection, qui constitue le véritable fondement de l'objection de péremption en matière de signes distinctifs (arrêts 4A_630/2018, précité, consid. 3.3; 4C.76/2005, précité, consid. 3.4 et la référence citée). 
 
3.3. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale estime que les échanges sporadiques intervenus en 2005 entre l'intimée et D.________ concernant l'activité commerciale déployée par la société de droit français E.________ ne permettent pas de retenir que l'intimée aurait toléré l'activité de personnalisation de montres déployée par une entité tierce, à savoir la recourante. Elle relève par ailleurs qu'il n'existait aucun lien entre la recourante et la société F.________ SA, fondée en 2009 à Genève, puisque cette dernière fabriquait et commercialisait ses propres montres et n'était pas active dans le secteur de la personnalisation de montres.  
Poursuivant le fil de son raisonnement, l'autorité précédente constate que la recourante a été constituée en 2013 et que D.________ en est le directeur depuis 2015. Elle observe que son but social mentionne expressément la transformation de montres de luxe. La juridiction cantonale considère néanmoins que cela ne suffit pas à retenir que l'intimée en aurait eu connaissance à cette époque-là, étant donné qu'elle n'était pas tenue de procéder à une surveillance générale et continue des sociétés nouvellement créées opérant dans un secteur d'activités plus ou moins proche du sien. 
La cour cantonale indique, par ailleurs, que la recourante a produit sept pièces (articles de presse et extraits de sites internet) visant à démontrer que son activité de personnalisation de montres avait été relayée dans les médias en 2013 déjà. Elle estime toutefois que les premières publications dont se prévaut la recourante ne font au mieux état que de modifications esthétiques apportées par l'intéressée sur des garde-temps, sans mention de l'intimée ou de l'une de ses marques. La juridiction cantonale constate que ce n'est qu'en novembre 2016 qu'un article a fait état, dans un journal de mode américain, de la personnalisation substantielle d'une montre de l'intimée opérée par la recourante en collaboration avec une célébrité. Elle observe qu'un autre article, paru en novembre 2018 sur un site internet spécialisé, a relaté une personnalisation effectuée par la recourante en faveur d'une autre célébrité. Elle estime que les articles parus entre 2016 et 2018 - dont on ignore s'ils ont été portés à la connaissance de l'intimée - ne permettent pas de retenir que cette dernière aurait déjà eu connaissance à ce moment-là, respectivement aurait dû connaître l'activité commerciale de la recourante et l'aurait tolérée. La simple existence d'un site internet exploité par la recourante n'y change rien, tout comme le fait que l'intimée investisse des montants substantiels dans la recherche d'éventuels auteurs de contrefaçons de ses montres. La juridiction cantonale considère dès lors que les droits de l'intimée n'étaient pas périmés lorsqu'elle a ouvert action. A titre superfétatoire, elle relève que la solution retenue par elle demeurerait inchangée, dans l'hypothèse où l'intimée aurait déjà eu connaissance des activités de la recourante en 2016, dès lors que l'intimée a procédé à une mise en demeure en juin 2020 afin que la recourante cesse de porter atteinte à ses droits. 
 
3.4. Dans son mémoire de recours, l'intéressée s'emploie à démontrer que l'intimée connaissait ou aurait dû avoir connaissance de ses activités dès sa création en 2013. A cet égard, elle souligne en particulier que les articles parus en 2013, dans des revues que " toute personne qui s'intéresse de près ou de loin à l'horlogerie consulte régulièrement ", faisaient état de ses activités de personnalisation et contenaient des photographies illustrant des montres de la marque de l'intimée ayant été customisées. Elle reproche, par ailleurs, à l'autorité précédente d'avoir passé sous silence un passage essentiel du témoignage d'un employé de l'intimée (I.________), lequel avait admis, en substance, que les exemples de personnalisation de montres ressortant d'un article paru en 2013, qui lui avaient été soumis durant la présente procédure, étaient considérés comme des formes de contrefaçons par l'intimée. La recourante estime en outre que la juridiction cantonale a omis de tenir compte de ce que l'intimée avait reconnu disposer d'un service de surveillance des articles de presse. Elle insiste aussi sur le fait que l'intimée assumait une obligation de surveillance accrue, étant donné que les parties ont leur siège au même endroit et que le terme "..." figure dans sa raison sociale. Dans ces conditions, la recourante est d'avis que les juges précédents, s'ils avaient pris en considération l'ensemble de ces éléments, n'auraient manifestement pas pu retenir que l'intimée ignorait l'activité déployée par elle avant 2019. La cour cantonale aurait, au contraire, dû juger que l'intimée en avait parfaitement connaissance ou aurait dû la connaître depuis 2013 et qu'elle l'avait tolérée puisqu'elle ne l'avait jamais interdite.  
La recourante fait par ailleurs valoir que l'intimée connaissait son fondateur D.________ depuis 2005 et qu'elle avait toléré ses activités de personnalisation, respectivement celles effectuées par le truchement de sa société E.________. Elle critique en particulier l'affirmation selon laquelle les échanges entre le prénommé et elle-même auraient été " sporadiques et de très faible intensité ". A son avis, les correspondances échangées étaient en réalité nombreuses et impliquaient directement les sphères dirigeantes de l'intimée. La recourante fait en outre grief à l'autorité précédente d'avoir omis de prendre en considération divers éléments censés démontrer que l'intimée tolérait en réalité l'activité de personnalisation exercée par D.________. Elle estime que la cour cantonale, en omettant de tenir compte de plusieurs témoignages pourtant cruciaux pour déterminer si l'action introduite par l'intimée était périmée, aurait enfreint son droit d'être entendue, dès lors que la prise en considération de ces éléments l'aurait inévitablement conduite à un autre résultat que celui auquel elle a abouti. 
 
3.5. Dans une critique mélangeant de manière inextricable le fait et le droit et présentant de surcroît un ton appellatoire marqué, la recourante s'en prend essentiellement à la constatation de fait de la cour cantonale selon laquelle l'intimée n'avait pas connaissance ni n'aurait dû connaître l'activité déployée par son adversaire avant 2019. Ce faisant, elle critique l'appréciation des preuves disponibles ayant conduit l'autorité précédente à opérer pareille constatation. Or, le Tribunal fédéral ne revoit l'appréciation des preuves de la juridiction cantonale que sous l'angle restreint de l'arbitraire (art. 9 Cst.). On rappellera que, pour conclure à l'arbitraire, il ne suffit pas que l'appréciation effectuée par la cour cantonale soit discutable, ou même qu'une autre solution eût été préférable. La décision du tribunal doit être insoutenable. Or, on ne saurait qualifier d'insoutenable la constatation opérée par l'autorité précédente selon laquelle l'intimée ne connaissait pas, respectivement n'aurait pas dû avoir connaissance des activités de la recourante avant 2019. Les arguments avancés par la recourante sont impropres à démontrer le contraire.  
L'intéressée fait grand cas de ce que cinq articles, publiés en octobre et novembre 2013, ont décrit ses activités de personnalisation, reproduisant notamment des montres fabriquées par l'intimée et customisées par ses soins. En décrivant par le menu le contenu de ces divers articles, elle échoue toutefois à démontrer que la cour cantonale se serait rendue coupable d'une appréciation arbitraire des preuves disponibles en retenant qu'il n'était pas établi que l'intimée avait pris connaissance, respectivement qu'elle aurait dû découvrir les articles en question lors de leur diffusion. Son affirmation péremptoire selon laquelle "t oute personne qui s'intéresse de près ou de loin à l'horlogerie " consulterait les revues et sites internet concernés ne constitue pas une motivation digne de ce nom du caractère arbitraire de la constatation de fait incriminée opérée par les juges précédents. Par ailleurs, la circonstance invoquée par la recourante selon laquelle l'intimée disposait d'un service de surveillance des articles de presse ne suffit pas non plus à taxer la solution par les juges précédents d'arbitraire, puisqu'il est tout à fait concevable que ledit service n'ait pas eu connaissance des articles concernés au moment de leur publication. L'allégation de la recourante selon laquelle l'intimée assumait en l'occurrence une obligation de surveillance accrue ne permet pas davantage de retenir que la cour cantonale aurait versé dans l'arbitraire en retenant que l'intéressée ignorait et n'aurait pas dû connaître les activités de la recourante en 2013. L'intéressée déduit, en effet, semblable devoir du fait que les parties " partagent la même localisation géographique ". Cela étant, il ressort de l'état de fait de l'arrêt querellé que la recourante ne possède pas de boutique et qu'elle offre ses services sur son propre site internet, créé le 2 octobre 2017. Dans ces circonstances, on voit mal comment on pourrait imputer à l'intimée la connaissance d'activités déployées par la recourante sur le territoire suisse avant cette date-là, étant donné que cette dernière ne possède pas de véritable boutique et que, de son propre aveu, elle offre exclusivement ses services sur son site internet. Dans ces conditions, la recourante échoue manifestement à démontrer que l'intimée connaissait, respectivement aurait dû connaître ses activités en 2013 déjà. 
Au vu de ce qui précède, c'est en pure perte que la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir passé complètement sous silence une partie essentielle du témoignage de l'employé I.________, puisque le point de savoir si les modifications évoquées dans les articles publiés en 2013 étaient comparables à d'autres formes de personnalisation observées en 2020 par l'intimée est sans pertinence. 
La recourante fait également fausse route lorsqu'elle s'attelle à démontrer que l'intimée connaissait et tolérait, depuis 2005, les activités de personnalisation exercées par D.________ ou une autre société créée par lui. C'est également en vain qu'elle se plaint, dans ce cadre-là, d'une violation de son droit d'être entendue. A supposer même que la cour cantonale ait omis de tenir compte de certains témoignages censés démontrer que l'intimée avait effectivement toléré l'activité déployée par le prénommé avant 2013, ce qui est loin d'être établi, il faut bien voir que la tolérance prétendument affichée par l'intimée - vivement contredite par la principale intéressée dans sa réponse - se rapportait à une activité de nature différente déployée par une société distincte (E.________) dans un autre État. Ainsi, même dans l'hypothèse où l'intimée aurait effectivement toléré l'activité commerciale de E.________, cela ne permet pas encore de retenir que l'intimée aurait automatiquement eu connaissance de l'existence de la recourante en 2013 déjà et qu'elle aurait toléré ses activités. La recourante fait grand cas de ce que la responsable du département des marques de l'intimée avait indiqué qu'un dossier avait déjà été constitué au sujet de D.________ lorsque celui-ci dirigeait E.________ Cet élément n'est toutefois pas décisif. Il apparaît du reste que le prénommé n'a été inscrit au registre du commerce en tant que directeur de la recourante qu'en novembre 2015, et non pas lors de la constitution de celle-ci en 2013. 
Il résulte ainsi des constatations cantonales qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), dans la mesure où l'intéressée a échoué à en démontrer le caractère arbitraire, que l'intimée ne connaissait pas ni n'aurait dû connaître l'activité de la recourante avant 2019. Au regard des circonstances de la présente espèce, l'autorité précédente n'a dès lors pas enfreint le droit fédéral en considérant que la prétention de l'intimée n'était pas périmée lorsqu'elle a introduit son action le 22 décembre 2020. 
On relèvera encore que la juridiction cantonale a considéré, à titre superfétatoire, que l'intimée n'avait pas tardé à réagir, même dans l'hypothèse où l'intéressée aurait eu connaissance en 2016 déjà de l'activité déployée par la recourante. Or, la recourante ne s'en prend pas véritablement à ce pan du raisonnement des juges précédents. Quoi qu'il en soit, la solution retenue par la cour cantonale ne méconnaît pas le droit fédéral. En l'espèce, on ne voit pas que l'inaction de l'intimée durant un certain laps de temps ait pu créer une apparence d'autorisation. D.________, qui avait du reste déjà dû faire face à des réticences de l'intimée lorsque celle-ci avait eu connaissance des activités déployées par la société de droit français E.________ qu'il avait co-fondée, ne pouvait pas raisonnablement et objectivement admettre, au vu de l'attitude passive adoptée par l'intimée, que celle-ci tolérait l'activité de la recourante, étant précisé qu'il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que cette dernière aurait avisé l'intimée de la nature exacte de ses activités. Il appert ainsi que l'existence d'un abus de droit manifeste imputable à l'intimée est loin d'être établie. Il n'est en effet pas possible d'admettre que la "passivité" de cette dernière ait pu légitimement laisser croire à la recourante que son activité était tolérée et qu'elle le serait également à l'avenir. 
 
4.  
La recourante reproche ensuite à la juridiction cantonale d'avoir considéré qu'elle avait adopté un comportement incompatible avec le droit des marques et contraire aux règles visant à lutter contre la concurrence déloyale. 
Il convient d'opérer une distinction entre les deux questions juridiques principales que soulève la présente contestation. La première a trait à la licéité même des activités déployées par la recourante au regard des dispositions de la loi fédérale du 28 août 1992 sur la protection des marques et des indications de provenance (LPM; RS 232.11) et de la loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la concurrence déloyale (LCD; RS 241). La seconde concerne le point de savoir si la manière dont la recourante offre ses services et en fait la promotion contrevient aux normes de la LPM ou de la LCD. Ces deux problématiques seront examinées successivement. 
 
5.  
La recourante fait grief à l'autorité précédente d'avoir qualifié d'illicite l'activité de personnalisation de montres exercée par elle. A cet égard, elle lui reproche d'avoir établi les faits de manière manifestement inexacte, respectivement incomplète. Elle dénonce également la violation de l'art. 13 LPM et soutient que la juridiction cantonale aurait méconnu le principe de l'épuisement en droit des marques et fait fi de ce que l'usage de la marque d'autrui à des fins privées est licite. 
 
5.1. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale débute son analyse en énonçant certains principes gouvernant le droit des marques. Elle rappelle que la fonction d'une marque consiste à permettre aux consommateurs de reconnaître un produit parmi d'autres. Pour que le titulaire d'une marque puisse dénoncer une violation des droits que lui confère celle-ci et agir sur la base de l'art. 13 al. 2 LPM, elle souligne que l'usage incriminé de ladite marque doit avoir lieu "sur le marché". Ainsi, l'utilisation d'une marque dans le cadre privé ou au sein d'une entreprise ne pose pas de problème. La juridiction cantonale rappelle que le droit des marques obéit au principe de l'épuisement, quand bien même la LPM ne le consacre pas expressément. A teneur dudit principe, le droit exclusif de commercialisation d'un bien protégé par un droit de propriété intellectuelle s'épuise à la première mise en circulation du bien concerné effectuée licitement. La cour cantonale estime cependant que si des tiers veulent modifier la qualité d'un produit de marque d'une quelconque façon, ceux-ci doivent soit obtenir l'accord du titulaire de la marque soit ôter la marque de l'article modifié, le titulaire de la marque pouvant s'opposer à ce que ses marchandises soient remises sur le marché après avoir subi des modifications. Elle précise, par ailleurs, que l'art. 15 LPM accorde une protection renforcée au titulaire de marques de haute renommée puisque celui-ci peut en interdire l'usage à des tiers pour tous les produits ou les services lorsqu'un tel usage menace le caractère distinctif de la marque, exploite sa réputation ou lui porte atteinte (art. 15 al. 1 LPM). La cour cantonale détaille ensuite certains comportements contraires aux règles de la LCD.  
Procédant à l'examen des circonstances du cas d'espèce, la juridiction cantonale estime que seul le client peut se prévaloir du principe de l'épuisement de la marque, à l'exclusion de la société tierce qui fournit des services de nature commerciale sur le produit de marque concerné. Autrement dit, ledit principe n'autorise pas un tiers à offrir un service commercial en utilisant librement les marques d'autrui sur le marché pour son propre bénéfice. Si, en l'occurrence, les modifications sont certes effectuées à la demande d'un client, propriétaire d'une montre de luxe acquise licitement, l'autorité précédente est d'avis que l'activité exercée par la recourante n'intervient pas dans un cadre privé, dès lors que celle-ci fournit un service commercial et générateur de profits, pour lequel elle fait de la publicité. Pour les juges cantonaux, cette situation diffère manifestement de celle où un client modifie lui-même sa montre dans un cadre privé. L'offre commerciale consistant à inciter un particulier à faire modifier sa propre montre, notamment selon des modèles ou en série limitée, n'est pas couverte par l'usage privé. L'activité commerciale litigieuse implique dès lors une remise sur le marché de produits de marque modifiés, de manière substantielle, sans l'accord du titulaire de la marque concernée, raison pour laquelle ce dernier peut s'y opposer. La cour cantonale estime dès lors que la recourante ne saurait se prévaloir du principe de l'épuisement de la marque. Elle souligne du reste que toute modification touchant les caractéristiques spécifiques du produit de marque conduit à la création d'un article différent pour lequel l'utilisation de la marque originale n'est pas permise. 
L'autorité précédente considère également que l'apposition de la marque d'un tiers sur un nouveau produit constitue une contrefaçon et contrevient ainsi à l'art. 13 al. 2 let. a LPM. En procédant à la dépose et à la réapposition de marques dont l'intimée est titulaire sur des montres personnalisées qui ne sont plus d'origine, la recourante contrevient ainsi aux règles du droit des marques. Tel ne serait, en revanche, pas le cas si l'intéressée personnalisait des montres et retirait les marques appartenant à l'intimée. 
La cour cantonale aboutit ainsi à la conclusion que les comportements susdécrits sont incompatibles avec l'art. 13 LPM, de sorte qu'il n'est pas nécessaire d'examiner si ceux-ci sont aussi contraires aux règles de la LCD. 
 
5.2. A l'encontre de cette motivation, la recourante fait valoir que les montres qu'elle personnalise appartiennent à ses clients, lesquels ont acheté des biens authentiques avant de les lui remettre pour les faire personnaliser selon leurs désirs. Les modifications opérées par la recourante sont ainsi exécutées sur des montres originales, et non des contrefaçons, qui sont et demeurent propriété du client, lequel, en tant que propriétaire, peut les personnaliser à sa guise aussi longtemps que les objets en question sont destinés à un usage exclusivement privé. Si la recourante reconnaît certes que les services qu'elle propose relèvent d'une activité commerciale, elle souligne que son offre ne s'adresse qu'à des personnes privées en vue d'un usage strictement personnel. Selon la recourante, peu importe si elle fait figurer son propre signe à côté de la marque de l'intimée, si ladite marque reste inscrite sur la montre personnalisée ou si celle-ci est réapposée à un autre endroit une fois les modifications opérées, car l'objet customisé demeure un produit exclusivement destiné à l'usage personnel de son propriétaire légitime. De telles opérations de personnalisation interviennent au demeurant au sein de l'entreprise. La recourante soutient dès lors que la marque de l'intimée, laquelle apparaît certes sur les montres personnalisées, ne se retrouve pas sur le marché et n'est pas utilisée dans les affaires, dans la mesure où l'objet modifié est restitué à son propriétaire légitime pour son usage personnel. La recourante compare son intervention à celle d'un carrossier indépendant qui serait chargé de repeindre un véhicule automobile dans une autre couleur et qui, pour ce faire, n'aurait d'autre choix que d'ôter les pièces métalliques comportant la marque dudit véhicule, avant de procéder aux travaux de peinture, puis d'installer à nouveau lesdites pièces et de restituer la voiture à son propriétaire.  
La recourante insiste, par ailleurs, sur le fait qu'elle ne fabrique pas ni ne vend des montres customisées. Elle précise qu'elle ne modifie pas davantage des montres destinées à être revendues, ce qu'elle mentionne du reste sur son site internet et dans ses conditions contractuelles lorsqu'un client souhaite faire appel à ses services. 
L'intéressée indique agir uniquement à la demande de ses clients, en modifiant des montres qui leur appartiennent selon leurs instructions et en les leur rendant une fois son intervention terminée. Elle concède que si un client venait à faire appel à ses services pour faire personnaliser des montres dans le but de les revendre ultérieurement, dans le cadre d'une activité commerciale, l'intéressé contreviendrait aux règles de la LPM car il commercialiserait des produits modifiés comportant la marque de la montre d'origine sans l'accord de son titulaire. 
La recourante estime que l'affirmation de la cour cantonale selon laquelle son activité implique une "remise sur le marché de produits de marque modifiés" est fondamentalement erronée car la montre originale est la propriété du client et le demeure après l'opération de customisation. Elle considère que l'arrêt attaqué témoigne d'une profonde méconnaissance de la différence existant entre deux activités commerciales distinctes, à savoir celle liée aux services de personnalisation de montres et celle relative à la commercialisation de montres de marque modifiées. Si elle concède que l'offre consistant à proposer à un particulier de faire personnaliser sa montre revêt un caractère commercial, la recourante rappelle que le produit modifié est destiné au seul usage privé de son propriétaire, raison pour laquelle l'article personnalisé n'est pas (re) mis sur le marché. La recourante considère que la situation est comparable à celle de l'acheteur d'une robe de haute couture qui ferait appel aux services d'un couturier pour y ajouter une autre pièce d'étoffe ou la modifier d'une quelconque manière: même si cet artisan se fait rétribuer pour ses services, il se contente de transformer des articles authentiques sur requête de son client, sans que la robe retouchée, sur laquelle subsiste la marque d'origine, ne soit (re) mise sur le marché. 
Soulignant que la jurisprudence suisse ne s'est pas encore prononcée sur le point de savoir si la personnalisation de produits de marque effectuée sur requête et pour le compte de leur propriétaire est licite ou non, la recourante s'emploie à démontrer que son activité est conforme au droit. Pour étayer sa thèse, elle se réfère notamment à diverses décisions rendues par les autorités judiciaires allemandes. Elle estime que le résultat auquel ont abouti les juges cantonaux est contraire au principe de l'épuisement du droit des marques. Elle fait aussi valoir que le titulaire d'une marque peut uniquement interdire à des tiers d'utiliser celle-ci "dans les affaires", mais ne peut pas s'opposer à l'usage de ladite marque à des fins privées. Selon la recourante, si le droit suisse des marques n'empêche pas une personne de fabriquer elle-même un produit contrefait pour son propre usage, c'est-à-dire de créer un objet arborant la marque d'un tiers sans l'accord de son titulaire, ou de faire appel à des tiers à cette fin, il ne saurait en aller différemment lorsqu'un individu personnalise ou fait modifier par une société tierce une montre originale en vue de son usage personnel. La recourante relève enfin que la solution retenue par l'autorité précédente a pour effet de limiter les prérogatives du propriétaire ayant acquis licitement une montre de marque, dans la mesure où celui-ci ne pourrait plus confier l'objet à un prestataire de services en vue de le personnaliser. 
 
5.3. A l'encontre de l'argumentation développée par son adversaire, l'intimée fait valoir que l'offre commerciale consistant à inciter des particuliers à faire modifier leurs montres selon des modèles et des "séries limitées" ne saurait être tolérée sous le couvert de l'exception de l'usage privé du consommateur final. Admettre le contraire reviendrait à tolérer "un commerce de contrefaçons" et à vider la protection offerte par la LPM de toute substance. L'intimée souligne que la cour cantonale a retenu, à bon droit, que seul le client peut bénéficier du principe de l'épuisement de la marque, à l'exclusion du tiers exerçant une activité commerciale en lien avec le produit en question. Elle s'emploie ensuite à démontrer que la recourante utilise la marque d'autrui pour offrir ou fournir des services, ce qui n'est pas admissible au regard de l'art. 13 al. 2 let. c LPM. A cet égard, elle soutient, références doctrinales à l'appui, que la notion d'offre visée par cette disposition doit être interprétée largement, raison pour laquelle une invitation à soumettre une offre pour la conclusion d'un contrat est déjà suffisante, indépendamment du point de savoir si elle se concrétise par la suite. L'intimée soutient que la recourante a adopté un modèle d'affaires visant à contourner le droit des marques. Elle en veut pour preuve l'achat test effectué par ses soins démontrant que la recourante commercialise des montres modifiées. L'intimée estime ainsi que son adversaire se livre à une forme de "piratage" de ses propres marques. A son avis, le fait d'effectuer des modifications sur une montre, sans enlever définitivement la marque d'origine, relève de la contrefaçon. Que le propriétaire d'une montre de marque soit en principe libre de faire ce qu'il veut de celle-ci ne signifie pas qu'un prestataire de services puisse utiliser, sans restriction, la marque d'autrui. L'intimée prétend que la recourante usurpe ses marques en vue de conférer aux montres qu'elle a personnalisées "l'éclat de la légende ROLEX". Elle estime que son adversaire peut parfaitement personnaliser des montres arborant sa marque, à condition toutefois qu'elle ôte celle-ci de l'objet modifié. L'intimée s'évertue ensuite à démontrer que les jurisprudences étrangères citées par la recourante et les comparaisons effectuées par elle avec d'autres secteurs d'activités ne sont pas pertinentes car elles visent des cas de figure différents.  
 
5.4. Les arguments avancés par les parties ayant été résumés ci-dessus, il convient d'en examiner les mérites. Pour mieux saisir le sens des explications qui vont suivre, il sied toutefois de rappeler certains principes juridiques susceptibles de trouver application en l'espèce.  
 
5.5.  
 
5.5.1. Aux termes de l'art. 1 al. 1 LPM, la marque est un signe propre à distinguer les produits ou les services d'une entreprise de ceux proposés par d'autres entreprises. Selon la jurisprudence, le rôle de la marque est de distinguer les produits ou les services d'une entreprise de ceux d'autres entreprises; son but est d'individualiser les prestations ainsi désignées et de les différencier des autres, de telle sorte que le consommateur puisse retrouver, dans l'abondance de l'offre, un produit ou un service qu'il apprécie (ATF 148 III 257 consid. 6.2.1; 122 III 382 consid. 1, 469 consid. 5f; 119 II 473 consid. 2c; arrêt 4A_458/2022 du 3 avril 2023 consid. 4.1). La loi protège ainsi les fonctions de distinction et d'indication de provenance de la marque (ATF 122 III 469 consid. 5f). D'autres fonctions économiques éventuelles de la marque, notamment celles visant à garantir une qualité constante et à provoquer un impact publicitaire, ne jouissent en revanche pas d'une protection en soi (ATF 148 III 257 consid. 6.2.1; 128 III 146 2b/bb; 122 III 469 consid. 5f; Message du 21 novembre 1990 concernant une loi fédérale sur la protection des marques et des indications de provenance, FF 1991 I p. 18). La LPM n'apparaît ainsi pas comme un instrument qui permettrait au titulaire de la marque de contrôler toute la chaîne de distribution de ses produits (ATF 122 III 469 consid. 5f).  
 
5.5.2. La protection d'une marque vaut sur le territoire suisse dès l'enregistrement (art. 5 LPM). Son titulaire dispose du "droit exclusif" de faire usage de la marque pour distinguer les produits ou services enregistrés et d'en disposer (art. 13 al. 1 LPM). Il peut interdire à des tiers l'usage des signes dont la protection est exclue en vertu de l'art. 3 al. 1 LPM. Selon l'art. 13 al. 2 LPM, le titulaire d'une marque peut en particulier interdire à des tiers:  
 
- d'apposer le signe concerné sur des produits ou des emballages (let. a); 
- de l'utiliser pour offrir des produits, les mettre dans le commerce ou les détenir à cette fin (let. b); 
- de l'utiliser pour offrir ou fournir des services (let. c); 
- de l'utiliser pour importer, exporter ou faire transiter des produits (let. d); 
- de l'apposer sur des papiers d'affaires, de l'utiliser à des fins publicitaires ou d'en faire usage de quelqu'autre manière dans les affaires (let. e). 
Le droit à l'usage exclusif de la marque se limite à l'utilisation dans les affaires, raison pour laquelle l'usage d'une marque à des fins privées est en principe licite (ATF 146 III 89 consid. 4.1 "Dieser markenrechtliche Ausschliesslichkeitsanspruch ist grundsätzlich auf den gewerbsmässigen Bereich beschränkt und hindert den bloss privaten Gebrauch eines Kennzeichens nicht"; cf. aussi arrêt 4C.376/2004 du 21 janvier 2005 consid. 3.5). Ladite règle souffre toutefois d'une exception visée à l'art. 13 al. 2bis LPM (ATF 146 III 89 consid. 4.1). Afin de combattre l'importation à des fins non commerciales de marchandises fabriquées illégalement ("importations capillaires"), le législateur a en effet adopté, en 2007, ce nouvel alinéa. L'objectif était d'étendre le droit d'exclusivité aux marchandises fabriquées industriellement qui sont importées ou exportées ou qui transitent par la Suisse à des fins privées (Message du 23 novembre 2005 concernant la modification de la loi sur les brevets et l'arrêté fédéral portant approbation du Traité sur le droit des brevets et du Règlement d'exécution, FF 2006 I p. 124). Procédant à l'interprétation de l'art. 13 al. 2bis LPM, le Tribunal fédéral a jugé que le titulaire d'une marque peut recourir aux instruments de droit civil figurant dans la LPM lorsque l'importation, l'exportation ou le transit de produits de fabrication industrielle sont effectués à des fins privées (ATF 146 III 89 consid. 7-8.1.3). 
 
5.5.3. Pour les titulaires de marques de haute renommée, l'art. 15 LPM élargit le champ de protection des droits conférés par la marque; dans cette mesure, le principe de spécialité, qui régit le droit suisse des marques, ne s'applique plus (ATF 130 III 748 consid. 1.3; arrêt 4A_128/2012 du 7 août 2012 consid. 4.2.1). Le titulaire d'une marque de haute renommée peut ainsi interdire à des tiers l'usage de cette marque pour les produits et services de toute nature; il peut, en particulier, leur interdire de l'utiliser pour offrir des produits ou des services, de s'en servir à des fins publicitaires ou encore d'en faire usage de quelque autre manière dans les affaires (art. 13 al. 2 LPM). Il n'est donc pas nécessaire que les produits ou les services soient de même nature. Ainsi, il a été jugé qu'une entreprise ne pouvait pas utiliser pour des articles de parfumerie la marque des articles de sports "Nike" (ATF 124 III 277). De la même manière, il a été admis qu'une entreprise de literie ne pouvait pas utiliser la marque de boissons gazeuses "Coca Cola" (ATF 116 II 463). La marque de produits alimentaires "Nestlé" ne peut pas non plus être utilisée par un tiers pour désigner un établissement médico-social (ATF 130 III 748).  
La loi ne définit pas la haute renommée. Selon la jurisprudence, les critères déterminants pour décider si une telle qualification s'applique à une marque donnée peuvent être déduits du but de l'art. 15 LPM, lequel est de protéger les marques de haute renommée contre l'exploitation de leur réputation, l'atteinte portée à celle-ci ou la mise en danger du caractère distinctif de la marque (ATF 130 III 748 consid. 1.1 et les références citées). Semblable protection se justifie lorsque le titulaire de la marque a réussi à susciter une renommée telle que cette marque possède une force de pénétration publicitaire utilisable non seulement pour commercialiser les produits et fournir les services auxquels elle était destinée à l'origine, mais encore pour faciliter sensiblement la vente d'autres produits ou la fourniture d'autres services. Cela suppose que la marque jouisse d'une considération générale auprès d'un large public. Pour admettre l'existence d'une marque de haute renommée, il ne suffit pas que la marque soit connue par un pourcentage élevé de personnes, car cela ne permettrait plus de distinguer la haute renommée d'une marque de sa notoriété. L'image positive que représente la marque auprès du public est un critère qui ne doit pas être négligé. Il n'est cependant pas nécessaire que cette image positive fasse l'unanimité en ce sens que les produits ou les services désignés par la marque de haute renommée remporteraient tous les suffrages sans exception (ATF 130 III 748 consid. 1.1). 
 
5.5.4. Bien que la LPM ne le mentionne pas, le droit des marques obéit au principe de l'épuisement (arrêt 4C.357/2001 du 11 avril 2002 consid. 5). La règle de l'épuisement veut que le droit exclusif de commercialisation d'un bien protégé par un droit de propriété intellectuelle s'épuise à la première mise en circulation par laquelle le bien est aliéné de manière licite (ATF 122 III 469 consid. 5e et les références citées; arrêt 4C.357/2001, précité, consid. 5). Le Tribunal fédéral s'est prononcé en faveur de l'épuisement international en droit des marques (ATF 126 III 129 consid. 6a; 122 III 469 consid. 5f). Il en découle que la première mise en circulation du produit de marque dans n'importe quel État a pour conséquence de faire perdre au titulaire de la marque nationale les droits relatifs à ce produit (ATF 122 III 469 consid. 5e).  
 
5.6. La LCD ne revêt pas un caractère subsidiaire par rapport aux diverses lois qui protègent la propriété intellectuelle; son but est simplement différent (ATF 129 III 353 consid. 3.3; arrêt 4A_556/2016 du 19 septembre 2017 consid. 4.5 et la référence citée). Chaque disposition en matière de propriété intellectuelle ou de concurrence déloyale a son propre champ d'application. Il est parfaitement possible qu'un même comportement puisse tomber sous le coup de plusieurs dispositions différentes.  
A teneur de l'art. 2 LCD, est déloyal et illicite tout comportement ou pratique commerciale qui est trompeur ou qui contrevient de toute autre manière aux règles de la bonne foi et qui influe sur les rapports entre concurrents ou entre fournisseurs et clients. L'acte de concurrence déloyale doit être objectivement propre à influencer le marché (ATF 136 III 23 consid. 9.1). Il n'est toutefois pas nécessaire que l'auteur de l'acte soit lui-même dans un rapport de concurrence avec la ou les entreprises qui subissent les effets de la concurrence déloyale (ATF 126 III 198 consid. 2c/aa). La règle générale exprimée à l'art. 2 LCD est concrétisée par les cas particuliers énoncés aux art. 3 à 8 LCD, mais elle reste applicable pour les hypothèses que ces dispositions ne viseraient pas (ATF 132 III 414 consid. 3.1; 131 III 384 consid. 3). 
 
5.7.  
 
5.7.1. Il sied d'emblée de souligner que le Tribunal fédéral n'a encore jamais été amené à se prononcer sur le point de savoir si l'activité consistant à personnaliser, moyennant rémunération, un produit de marque à la demande de son propriétaire, sans l'accord du titulaire de la marque concernée, est licite ou non au regard des règles de la LPM et de la LCD. La question à résoudre est loin d'être anodine en pratique, dès lors que l'activité de customisation d'objets de marque est en plein essor et que celle-ci ne se limite pas au domaine horloger, mais concerne également bien d'autres secteurs, parmi lesquels figurent notamment ceux de la mode et de l'automobile. L'importance croissante des personnalisations d'articles de marque se traduit aussi par l'émergence de nouveaux conflits divisant les titulaires de marques d'avec des sociétés modifiant des biens revêtus de la marque originale de tiers. Ce n'est dès lors pas un hasard si les autorités judiciaires des pays qui nous entourent, et singulièrement les tribunaux allemands, ont dû résoudre divers problèmes en relation avec cette thématique et ont ainsi rendu plusieurs décisions susceptibles de présenter un certain intérêt. Il convient ainsi de garder à l'esprit cet état de choses au moment de trancher le présent litige.  
 
5.7.2. Il n'est pas contesté, ni contestable d'ailleurs, que la personne qui achète un produit de marque en devient la propriétaire et qu'elle peut ainsi en disposer librement dans les limites de la loi (art. 641 al. 1 CC). Ainsi, celui qui fait l'acquisition d'une montre, arborant la marque de l'intimée, peut choisir de la porter à son poignet. Il jouit aussi de la faculté de l'offrir à un tiers ou de la revendre. Selon ses préférences, il peut aussi décider d'y apporter des modifications d'ordre esthétique. A titre d'exemple, le Bundesgerichtshof allemand (BGH) a ainsi souligné, dans un arrêt rendu en 1998, que la personne qui avait acheté une montre revêtue de la marque de l'intimée et qui y avait ensuite fait ajouter un diamant n'avait pas porté atteinte aux droits de propriété intellectuelle de l'intimée (arrêt du 12 février 1998 in Gewerblicher Rechtsschutz und Urheberrecht [GRUR] 1998 p. 696 s.: "Das Verbietungsrecht findet seine Grenze, wenn die Verwendung der Marke nicht in Beziehung auf den geschäftlichen Verkehr stattfindet. Veränderungen einer Markenware, die der Abnehmer der Ware für den Eigenbedarf vornimmt oder vornehmen läßt, sind markenrechtlich irrelevant. Allein Veränderungen an einer zur Weiterveräußerung im geschäftlichen Verkehr bestimmten Ware können markenrechtliche Verbotsansprüche auslösen").  
Lorsqu'un exemplaire d'un produit de marque est aliéné par son titulaire, respectivement avec son accord, l'acquéreur peut ainsi en principe le modifier librement selon ses désirs. Il arrive toutefois fréquemment que la réalisation de certaines modifications sur le bien concerné nécessite certaines compétences techniques que ne possède pas forcément le nouveau propriétaire de l'objet en question. Ainsi, la personne qui fait l'acquisition d'une robe de haute couture devra bien souvent avoir recours aux services d'un couturier professionnel, si elle désire l'ajuster ou la modifier d'une quelconque façon. De même, l'acquéreur d'un véhicule de marque qui entend y apporter des modifications techniques ou esthétiques sera, dans les faits, fréquemment tenu de s'adjoindre les services d'artisans spécialisés dans le domaine automobile. Il n'en va pas différemment dans le monde horloger, lequel nécessite indéniablement des compétences et un savoir-faire tout particuliers. Or, la Cour de céans ne discerne a priori pas de raison légitime justifiant d'opérer une distinction, sur le plan juridique, entre le propriétaire d'un objet de marque procédant lui-même à la modification du bien qu'il a acquis et celui ayant recours aux services d'autrui pour aboutir au même résultat. Rien n'interdit ainsi, à première vue, à une entreprise d'offrir des services tendant à la réparation voire à la modification d'objets de marque en faveur de leurs propriétaires.  
 
5.7.3. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de préciser que l'usage d'une marque à des fins privées n'est pas prohibé, sous réserve de l'exception visée par l'art. 13 al. 2bis LPM (ATF 146 III 89 consid. 4.1). La doctrine reconnaît elle aussi que l'usage d'une marque à des fins privées de même que celui interne à une entreprise sont en principe licites (EUGEN MARBACH, Markenrecht, in SIWR III/1, 2e éd. 2009, n. 1528 ss; THOUVENIN/DORIGO, in Markenschutzgesetz [MSchG], Noth/Bühler/Thouvenin [édit.], 2e éd. 2017, no 11 ad art. 13 LPM; CHRISTOPH WILLI, Kommentar zum Markenschutzgesetz, 2002, nos 18 s. ad art. 13 LPM; PHILIPPE GILLIÉRON, in Commentaire romand, Propriété intellectuelle, 2013, nos 11 ss ad art. 13 LPM; ALAIN ALBERINI, L'exploitation de la renommée de la marque d'autrui, 2015, p. 181; BARBARA ABEGG, Der Gebrauch fremder Marken im Geschäftsverkehr, 2013, p. 40; MICHAEL ISLER, in Basler Kommentar, Markenschutzgesetz/Wappenschutzgesetz, 3e éd. 2017, no 25 ad art. 13 LPM; IVAN CHERPILLOD, Le droit suisse des marques, 2007, p. 169; LE MÊME, Propriété intellectuelle, 2021, n. 387; DAVID RÜETSCHI, Die Einfuhr markenverletzender Ware zum privaten Gebrauch [Art. 13 Abs. 2bis MSchG] - Rechtsfolgen einer atypischen Verletzungshandlung, in sic! 2010 p. 475; M ONJA SIEBER, Gewerbsmässige Markenverletzung bei Privatverkäufen über Auktionsplattformen, in sic! 2015 p. 674 s.). La fonction essentielle de la marque est en effet de distinguer les produits ou les services d'une entreprise de ceux d'autres entreprises, de manière à ce que le consommateur puisse retrouver un produit ou un service qu'il apprécie. Pour que le titulaire d'une marque puisse se prévaloir d'une violation de l'art. 13 LPM, il faut dès lors que l'usage de ladite marque intervienne "dans les affaires" (" gewerbmässig "), c'est-à-dire qu'il soit orienté vers le marché (arrêt 4A_335/2019 du 29 avril 2020 consid. 6.4 non publié in ATF 146 III 225). Aussi longtemps que l'usage d'une marque se limite à des fins privées, il n'y a pas de risque de confusion possible, faute d'offre sur le marché des prestations considérées (GILLIÉRON, op. cit., no 12 ad art. 13 LPM). L'usage d'une marque de haute renommée à des fins privées ne contrevient pas davantage à l'art. 15 LPM (DAVID/FRICK, in Basler Kommentar, Markenschutzgesetz/Wappenschutzgesetz, 3e éd. 2017, no 71 ad art. 15 LPM; MARBACH, op. cit., n. 1692).  
La personnalisation d'un objet de marque, effectuée à la demande et pour le compte de son propriétaire en vue de son usage personnel, ne porte en principe pas atteinte à la fonction distinctive de la marque, car l'objet modifié est destiné à un usage privé et n'est pas (re) mis sur le marché. Aussi la cour cantonale ne peut-elle pas être suivie lorsqu'elle considère que l'activité commerciale de la recourante implique une remise sur le marché de produits de marque modifiés sans l'accord de l'intimée. Lorsqu'elle personnalise un objet de marque sur requête de son propriétaire, l'entreprise concernée ne fait en réalité pas usage de la marque d'un tiers sur le marché pour offrir ses propres services, mais ne fait que modifier un bien à des fins privées. 
 
5.7.4. La situation est en revanche différente lorsqu'une entreprise ne se contente pas d'offrir des services de personnalisation d'articles de marque pour répondre aux souhaits de leur propriétaire, mais commercialise aussi des objets de marque customisés, sans l'accord du titulaire de la marque concernée. Une marque confère, en effet, à son titulaire le droit exclusif de déterminer lui-même la qualité des produits commercialisés sous sa marque ainsi que la manière dont il entend les mettre en vente (THOUVENIN/DORIGO, op. cit., no 117 ad art. 13 LPM). Le droit exclusif de commercialisation d'un bien protégé par un droit de propriété intellectuelle s'épuise certes lors de la première mise en circulation licite dudit bien (ATF 122 III 469 consid. 5e et les références citées; arrêt 4C.357/2001, précité, consid. 5). La règle de l'épuisement n'est toutefois pas absolue et connaît des exceptions, notamment lorsque l'article de marque concerné subit des modifications non autorisées par le titulaire de ladite marque (RALPH SCHLOSSER, L'épuisement international en droit des marques: étendue et limites, in sic! 1999 p. 401; MARBACH, op. cit., n. 1547 ss; ALBERINI, op. cit., p. 245). Ainsi, la commercialisation de produits modifiés après leur première mise en circulation qui continuent à revêtir la marque de l'article d'origine est en principe illicite (MARBACH, op. cit., n. 1550 s.; ISLER, op. cit., nos 57 ss ad art. 13 LPM; THOUVENIN/DORIGO, op. cit., no 117 ad art. 13 LPM; ABEGG, op. cit., p. 193 s.; MARBACH/DUCREY/WILD, Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht, 4e éd. 2017, n. 760). Dans un tel cas, la marque est en effet utilisée de telle manière que le marché puisse y voir un signe propre à identifier le produit commercialisé comme étant celui du titulaire de la marque d'origine, raison pour laquelle celui-ci peut s'opposer à ce que des produits, modifiés sans son autorisation et arborant sa marque, soient remis sur le marché (IVAN CHERPILLOD, Propriété intellectuelle, 2021, n. 399; GILLIÉRON, op. cit., no 6 ad art. 13 LPM; cf. aussi l'arrêt rendu le 8 février 1995 par l'Oberlandesgericht Karlsruhe, in GRUR 1995 p. 417 s.). Si des tiers souhaitent commercialiser un produit de marque ayant subi des modifications, ils doivent dès lors soit obtenir l'accord du titulaire de la marque concernée, soit ôter la marque de l'article personnalisé (THOUVENIN/DORIGO, op. cit., no 124 ad art. 13 LPM; ALBERINI, op. cit., p. 247).  
Dans une affaire jugée en 1992, le Tribunal des districts d'Hérens et Conthey a ainsi qualifié d'illicite la commercialisation, sous la marque d'origine Levi Strauss, de pantalons qui avaient été acquis légitimement avant d'être délavés puis revendus sans l'autorisation du titulaire de ladite marque (cf. Revue Suisse de la Propriété Intellectuelle 1992 p. 242). Plus récemment, le Landgericht de Hambourg a jugé qu'une entreprise allemande ayant vendu des modèles personnalisés de montres arborant la marque de l'intimée avait agi de manière illicite (arrêt rendu le 3 juin 2021 dans l'affaire ROLEX contre Blaken et consorts, n. 312 O 255/2). A cet égard, elle a considéré, en substance, que l'entreprise concernée faisait effectivement usage de la marque de l'intimée sur le marché, puisqu'elle ne se contentait pas de modifier une montre à la demande de son propriétaire mais permettait à ses clients d'acquérir des modèles précis de montres, en affichant sur son site internet un prix de vente, accompagné d'une illustration de l'objet concerné. Elle a en outre estimé que le principe de l'épuisement ne trouvait pas application compte tenu des modifications opérées sur lesdites montres. Elle a enfin jugé que l'apposition du signe de l'auteur de la personnalisation sur l'objet personnalisé à côté de la marque de l'intimée ne permettait pas au public d'identifier que la référence à cette dernière était censée faire uniquement référence à la montre dans son état d'origine, avant sa modification. 
 
5.7.5. Au regard des considérations juridiques qui viennent d'être émises, il convient dès lors d'opérer une distinction entre deux modèles d'activités en lien avec la personnalisation de montres de marque. Le premier, qui consiste pour une entreprise à fournir à ses clients des services de personnalisation de leurs montres de marque, est en principe licite, dans la mesure où le prestataire de services agit sur requête du propriétaire de l'objet concerné et où l'article customisé est restitué à son ayant droit, à l'issue de ce processus, sans que la montre n'ait été ainsi (re) mise sur le marché. Le second consiste à commercialiser des montres modifiées sur lesquelles apparaît toujours la marque figurant sur l'objet d'origine. A défaut d'autorisation consentie par le titulaire de ladite marque, une telle activité contrevient en principe à la LPM. Dans un tel cas, la marque est en effet utilisée sur le marché et elle ne remplit plus sa fonction d'identification car elle ne désigne plus l'article d'origine, lequel a subi des modifications sans l'assentiment du titulaire de la marque.  
 
5.8. En l'occurrence, il ressort des faits constatés dans l'arrêt attaqué que l'intimée a pu acheter auprès de la recourante, en février 2020, - c'est-à-dire avant le début de la présente procédure judiciaire (décembre 2020) -, un modèle personnalisé d'une montre revêtue de la marque Rolex Daytona pour un montant de 32'580 fr., ce prix comprenant la fourniture de la montre d'origine ainsi que la réalisation de la modification souhaitée. Un tel comportement était contraire au droit, puisqu'il correspondait au second modèle d'activités décrit ci-dessus (cf. consid. 5.7).  
A la suite de cet achat test et de la mise en demeure que lui a adressée l'intimée, la recourante a toutefois décidé de modifier son modèle d'affaires, raison pour laquelle elle a pris l'engagement, dans un document qu'elle a soumis à l'intimée le 1er octobre 2020, de ne pas disposer de stock de montres personnalisées ou à personnaliser. 
La recourante a en outre allégué, durant la procédure, que ses clients doivent impérativement être propriétaires d'une montre de marque authentique pour faire appel à ses services de personnalisation. Or, l'intimée n'a pas réussi à réfuter semblable allégation. Dans ces circonstances, il n'est dès lors pas possible de retenir que l'activité commerciale déployée par la recourante, après le 1er octobre 2020, inclurait toujours la revente de montres de marque personnalisées, ce fait n'étant établi par aucun moyen de preuve. 
Il convient ainsi de retenir que le modèle d'affaires actuel de la recourante consiste uniquement à offrir, contre rémunération, un service de personnalisation de montres de marque, sur requête de leur propriétaire et pour leur usage personnel. Lorsqu'elle réalise ses opérations de personnalisation, la recourante peut certes être amenée, suivant les cas, à ôter et à réapposer, à un autre endroit, la marque de l'intimée sur les montres qu'elle personnalise et à y faire figurer également ses propres signes à côté de ladite marque. De telles interventions interviennent cependant au sein de l'entreprise, sur requête du propriétaire du bien concerné et, une fois son travail effectué, la recourante restitue la montre personnalisée à son propriétaire en vue de son usage personnel, sans que la montre n'ait été (re) mise sur le marché, de sorte que cette activité ne porte pas atteinte au droit d'usage exclusif du titulaire de la marque concernée. Que la marque de l'intimée constitue, comme l'a souligné à juste titre la cour cantonale, notoirement une marque de haute renommée au sens de l'art. 15 LPM (cf. consid. 3.3.2.1 de l'arrêt attaqué) ne modifie pas cette appréciation, dès lors que les limites au droit à la marque liées à son utilisation à des fins privées valent également pour de telles marques. 
Pour le reste, l'activité déployée par la recourante ne contrevient, en elle-même, pas davantage aux règles de la LCD, dès lors que l'acte de concurrence déloyale doit être objectivement propre à influencer le marché (ATF 136 III 23 consid. 9.1). Or, comme on l'a vu, l'activité exercée par l'intéressée n'implique aucune remise sur le marché des montres personnalisées, dans la mesure où l'objet original acquis licitement par son propriétaire, modifié selon ses souhaits, lui est remis pour son usage personnel, une fois l'opération de personnalisation accomplie. 
En conclusion, le modèle d'affaires actuel de la recourante n'apparaît ni contraire au droit des marques ni incompatible avec les règles de la LCD. 
 
6.  
La seconde question à résoudre est celle de savoir si la manière dont la recourante offre ses services, respectivement fait la promotion de ses activités contrevient aux règles de la LPM ou aux dispositions de la LCD. 
 
6.1. Dans la décision entreprise (consid. 3.3.2.2-3.3.2.5, p. 24 ss), la juridiction cantonale indique que les montres fabriquées par l'intimée ainsi que ses marques figurent à de nombreuses reprises sur le site internet de la recourante. Elle relève aussi que cette dernière appose ses propres signes à côté des marques de l'intimée sur les montres qu'elle modifie. De l'avis des juges précédents, cet "ensemble de faits" est de nature à donner, pour les clients concernés - quel que soit leur niveau de connaissances du marché en question - l'impression que les deux parties collaborent dans la production, respectivement la modification de montres, alors que tel n'est pas le cas. Il n'est en effet ni établi ni notoire ni connu du grand public que l'intimée a pour politique de ne pas autoriser le co-marquage (ou co-branding), stratégie par laquelle deux entreprises réalisent un produit en partenariat et où chacune d'elles appose sa propre marque sur l'objet concerné. La cour cantonale estime ainsi que la recourante fait apparaître ses produits comme étant issus d'une synergie entre les deux parties, laquelle n'existe pas, créant ainsi une apparence de co-marquage constitutive d'une forme de parasitisme prohibé au sens de la LCD. Elle souligne que les avertissements donnés par la recourante aux utilisateurs de sa page internet ou encore le fait qu'elle offre sa propre garantie sont insuffisants, eu égard à l'impression générale qui émane du site internet et de l'apposition des marques des deux parties sur certaines montres. Les références aux marques de l'intimée sont en effet si nombreuses qu'il est implicitement suggéré que les parties ont tissé des liens (consid. 3.3.2.2).  
L'autorité précédente juge aussi que la recourante, lorsqu'elle fait référence à d'anciens designs ou à des modèles de montres de l'intimée, profite de la renommée de cette dernière et de la qualité de ses produits d'une manière parasitaire et contraire aux règles de la LCD (consid. 3.3.2.3). 
La cour cantonale considère enfin qu'il serait admissible que la recourante fasse figurer les marques et montres de l'intimée sur son site internet dans le but d'offrir des services de réparation ou d'entretien. Cependant, l'activité de la recourante est toute autre, puisque celle-ci est active dans le domaine de la customisation et de la modification de montres et que sa publicité est axée en ce sens. Or, de l'avis des juges cantonaux, pareille activité est illicite, raison pour laquelle la publicité opérée par la recourante ne saurait être tolérée (consid. 3.3.2.4). 
 
6.2. Dans son mémoire de recours, l'intéressée reproche à la cour cantonale d'avoir établi les faits relatifs au contenu de son site internet de façon manifestement inexacte, respectivement incomplète. Elle fait en outre grief à l'autorité précédente d'avoir enfreint son droit d'être entendue, en retenant qu'elle avait créé une apparence illicite de co-branding sur son site internet, en faisant totalement abstraction d'une série d'éléments (allégués et moyens de preuve) visant à démontrer qu'un internaute ne peut absolument pas penser que les parties auraient tissé un quelconque lien commercial. Se référant à des passages précis de son mémoire de réponse (allégués 441 à 487) ainsi qu'à diverses pièces produites par elle durant la procédure (n. 38 à 41, 43 à 45, 49 à 50, 52 à 56 et 58), l'intéressée souligne que le client potentiel est rendu attentif, dès qu'il accède à son site internet ainsi que tout au long de sa navigation, au fait qu'elle n'est pas associée de près ou de loin à l'intimée. Elle s'emploie ensuite à démontrer que la cour cantonale a totalement passé sous silence ses conditions contractuelles ainsi que le processus de commande du service de personnalisation, au cours duquel le client potentiel est informé de ce qu'elle n'est ni affiliée aux fabricants de montres ni autorisée par ceux-ci. L'intéressée estime dès lors que si la cour cantonale avait pris en considération l'ensemble de ces éléments, celle-ci n'aurait pas pu aboutir à la conclusion que les "nombreuses références" aux marques de l'intimée figurant sur son site internet étaient de nature à donner l'impression que les parties collaboraient dans la production ou la modification des montres produites par l'intimée.  
La recourante fait ensuite valoir que l'usage de la marque d'un tiers à des fins informatives ne contrevient ni à la LPM ni à la LCD. A cet égard, elle rappelle qu'elle ne fait que présenter certaines de ses réalisations sur son site internet, en affichant des photographies de montres personnalisées. Les marques de l'intimée ne sont pas reproduites sur les pages web du site internet, mais seulement visibles sur certaines montres photographiées et sont uniquement mentionnées, de manière purement factuelle, pour indiquer sur quelle montre la personnalisation a été effectuée. En d'autres termes, les marques de l'intimée apparaissent uniquement pour illustrer la façon dont la recourante personnalise certains modèles arborant ladite marque. La recourante considère dès lors que l'appréciation de la cour cantonale selon laquelle la référence aux marques de l'intimée donnerait à croire, de manière erronée, à l'existence de liens économiques entre les parties ne repose sur aucune constatation de fait qui autoriserait pareille conclusion. La recourante soutient aussi que le fait de présenter certaines de ses réalisations ne revient pas à opérer une comparaison parasitaire au sens de l'art. 3 let. e LCD, puisqu'il ne s'agit pas de comparer une montre personnalisée avec un produit traditionnel de l'intimée, en suggérant que la première aurait les mêmes vertus que la seconde. Elle estime aussi que ses activités n'entraînent aucune diminution des ventes de montres produites par l'intimée, puisque les transformations qu'elle opère sont effectuées sur des montres originales acquises licitement. 
 
6.3. De son côté, l'intimée rétorque que la juridiction cantonale n'a pas établi les faits de façon manifestement inexacte. Elle soutient que son adversaire utilise ses propres marques pour attirer le consommateur et l'inciter à personnaliser sa montre. Elle estime dès lors qu'il y a bel et bien usage de sa marque à titre de signe distinctif sur le marché. L'intimée concède que l'usage de la marque d'autrui à des fins informatives est certes licite dans certaines situations, mais que tel n'est pas le cas lorsque l'information excède ce qui est nécessaire et laisse croire à des liens - en réalité inexistants - entre l'entreprise concernée et le titulaire de la marque en cause. Elle considère que la recourante, en associant ses propres signes aux siens, agit de manière à laisser penser que les montres personnalisées seraient tout aussi bonnes que les objets originaux.  
 
6.4. Les arguments principaux avancés par les parties ayant été exposés ci-dessus, il convient de rappeler certaines règles et d'exposer quelques principes, avant d'examiner les mérites des critiques formulées par la recourante.  
 
6.4.1. En vertu de l'art. 13 al. 2 LPM, le titulaire d'une marque peut notamment interdire aux tiers de l'utiliser pour offrir ou fournir des services (let. c) ou de l'utiliser à des fins publicitaires ou d'en faire usage de quelqu'autre manière dans les affaires (let. e). L'utilisation à des fins informatives de la marque d'un tiers, notamment dans le cadre publicitaire, ne viole toutefois pas l'art. 13 LPM, à condition qu'elle reste clairement en rapport avec les propres offres ou prestations de celui qui fait la publicité (ATF 128 III 146 consid. 2; arrêt 4A_95/2019 du 15 juillet 2019 consid. 2.2.1; THOMAS WIDMER, Utilisation licite de la marque d'autrui: un point de situation, in sic! 2015 p. 617; en droit allemand, cf. l'arrêt rendu le 12 mars 2015 par le BGH dans l'affaire Porsche c. Techart concernant la publicité en matière de tuning automobile, in GRUR 2015 p. 1121 ss.). Celui qui utilise la marque d'autrui pour commercialiser des produits originaux ou pour offrir des services d'entretien ou de réparation visant des articles authentiques de ladite marque ne contrevient pas au droit des marques si sa publicité se réfère clairement à ses propres offres (arrêt 4A_95/2019, précité, consid. 2.2.1). En effet, chacun peut utiliser des indications pour décrire ses propres offres de produits ou de services, même si elles affectent les marques de tiers ( informativer Markengebrauch; ATF 128 III 146 consid. 2b/aa; 126 III 322 consid. 3b; arrêt 4A_95/2019, précité, consid. 2.2.1). Le titulaire d'une marque ne peut en principe pas prescrire aux revendeurs de ses produits ou à ceux qui offrent des services en rapport avec ceux-ci les mesures publicitaires qu'ils peuvent prendre (ATF 128 III 146 consid. 2b/bb). Il conserve néanmoins le droit exclusif d'effectuer une publicité générale de la marque, sans se référer à un assortiment particulier de marchandises ou à des services concrets, afin de promouvoir la réputation et la renommée de la marque auprès du public en général (ATF 128 III 146 consid. 2b/bb; 126 III 322 consid. 3a). L'utilisation de la marque d'un tiers est inadmissible dans la mesure où il se crée, dans le public, une fausse impression (d'ensemble) d'un lien spécifique entre le titulaire de la marque et la personne qui fait de la publicité ou d'un droit de cette dernière sur la marque en tant que telle (ATF 128 III 146 consid. 2; 126 III 322 consid. 3b; arrêt 4A_95/2019, précité, consid. 2.2.1).  
 
6.4.2. La manière dont une entreprise offre ses services et fait la promotion de ses activités peut également contrevenir aux règles de la LCD, étant rappelé ici que celle-ci ne revêt pas un caractère subsidiaire par rapport aux diverses lois qui protègent la propriété intellectuelle.  
L'art. 3 let. b LCD considère ainsi comme déloyal le fait de fausser le jeu de la concurrence en donnant des indications inexactes ou fallacieuses (arrêt 4A_689/2012 du 24 avril 2013 consid. 2.4; sur la notion d'indication inexacte ou fallacieuse: cf. ATF 132 III 414 consid. 4.1.2). 
L'art. 3 let. d LCD qualifie de déloyal le comportement de celui qui prend des mesures de nature à faire naître une confusion entre ses propres biens ou services et ceux d'autrui (sur la notion de risque de confusion: cf. ATF 135 III 446 consid. 6.1). Est visé tout comportement au terme duquel le public est induit en erreur par la création d'un danger de confusion, en particulier lorsque celui-ci est mis en place pour exploiter la réputation d'un concurrent (ATF 128 III 353 consid. 4; 126 III 239 consid. 3a et les références citées). Le risque de confusion peut d'ailleurs n'être qu'indirect, en ce sens qu'il suffit que l'auteur fasse naître l'idée que deux produits, en soi distincts, proviennent de la même entreprise (arrêts 4A_689/2012, précité, consid. 2.4; 4A_467/2007 du 8 février 2008 consid. 4.2). 
L'art. 3 let. e LCD traite de déloyal le comportement, propre à influencer le marché, qui consiste à comparer deux concurrents de façon inexacte, fallacieuse, inutilement blessante ou parasitaire. Tombe notamment sous le coup de cette disposition le fait de s'approprier la réputation d'autrui (ATF 135 III 446 consid. 7.1; arrêt 4A_689/2012, précité, consid. 2.4). L'exploitation de la réputation peut notamment consister à utiliser la marchandise ou la prestation d'autrui dans sa publicité de telle sorte que son image soit transférée sur ses propres offres. Agit de manière déloyale celui qui, par sa présentation publicitaire, transfère en fin de compte la bonne réputation de produits connus sous un autre signe sur ses propres produits, en suscitant des associations d'idées avec ceux-ci, sans qu'il y ait besoin d'un risque de confusion au sens décrit plus haut. Dans cette mesure, il n'est notamment pas nécessaire d'utiliser un signe si similaire à celui du concurrent qu'il puisse être confondu avec lui en position exclusive (ATF 135 III 446 consid. 7.1). 
Il a en outre été jugé que faire croire faussement à un lien entre deux entreprises tombe sous le coup de la clause générale de l'art. 2 LCD (arrêts 4A_689/2012, précité, consid. 2.4; 4A_128/2012, précité, consid. 4.2.2). 
 
6.5. En l'occurrence, la cour cantonale a fondé une grande partie de son raisonnement sur la prémisse erronée selon laquelle l'activité commerciale de la recourante était illicite, raison pour laquelle celle-ci ne pouvait pas se référer aux marques de l'intimée pour offrir ses services. Sous l'angle du droit des marques, elle n'a dès lors nullement examiné si les références aux marques de l'intimée sur le site internet de la recourante restaient clairement en rapport avec les propres offres de services proposés par cette dernière. Alors même qu'elle a souligné que l'usage des marques d'autrui pouvait s'avérer nécessaire pour un prestataire de services en vue de renseigner ses clients potentiels sur ses propres activités, elle s'est toutefois abstenue d'effectuer pareil examen, sous prétexte que l'activité de personnalisation de montres de marque devait être traitée différemment de services tendant uniquement à la réparation de celles-ci. La juridiction cantonale n'a pas davantage examiné si le fait que l'intimée soit titulaire d'une marque de haute renommée était susceptible de modifier son appréciation juridique s'agissant de la manière dont la recourante promeut ses activités. Il appert ainsi que l'autorité précédente a procédé à une analyse incomplète de la situation tant sur le plan factuel qu'au niveau juridique sous l'angle du droit des marques.  
Mais il y a plus. Sur la base d'une motivation très succincte, la cour cantonale a abouti à la conclusion que la recourante avait adopté un comportement contraire aux règles de la LCD, puisqu'elle avait créé, sur son site internet, l'apparence d'un co-branding entre les parties, et avait profité de la renommée de l'intimée et de la qualité de ses produits de manière parasitaire en se référant à d'anciens designs ou modèles de montres de cette dernière. Or, la solution retenue par les juges précédents se fonde sur plusieurs affirmations péremptoires ne reposant sur aucune constatation de fait. Il n'est ainsi pas possible de discerner les éléments de fait sur lesquels s'est appuyée la cour cantonale pour conclure à l'existence de nombreuses références aux marques de l'intimée sur le site internet de la recourante. Rien dans l'état de fait établi par la cour cantonale ne se rapporte véritablement au contenu ou à l'apparence du site internet exploité par la recourante, hormis quelques rares et timides allusions telle la circonstance selon laquelle cette dernière propose un catalogue d'exemples de modèles de montres modifiés, dont certains font partie de séries limitées. La cour cantonale s'est en outre contentée de relever que la recourante avait allégué certains éléments, respectivement produit des pièces, au sujet de l'accès à son site internet sans toutefois opérer la moindre constatation de fait à cet égard. Le Tribunal fédéral n'est dès lors pas en mesure de déterminer sur quels éléments précis s'est fondée la cour cantonale lorsque celle-ci s'est référée à l'"impression générale qui émane de l'apparence du site Internet" de la recourante, ni de se prononcer sur l'appréciation des juges précédents selon laquelle "les références aux marques de la demanderesse sont tellement nombreuses qu'il est implicitement suggéré que les parties ont tissé des liens". L'arrêt attaqué passe en outre sous silence divers éléments, pourtant régulièrement allégués, qui, s'ils étaient considérés comme établis, seraient susceptibles d'influer sur le sort de la cause. Dans la partie "En fait" de la décision entreprise, la juridiction cantonale s'est en effet bornée à indiquer ce qui suit s'agissant des informations fournies par la recourante sur son site internet:  
 
"Elle [la recourante] a produit une capture d'écran de son site internet à la date du 21 mars 2021, dont il ressort qu'il ne serait accessible qu'après avoir accepté un avertissement indiquant, en substance, être un atelier indépendant offrant des services de personnalisation de montres à la demande de clients pour un usage privé, ne pas fabriquer ni vendre de montres et n'être ni affiliée ni autorisée par les fabricants de montres sur lesquelles elle intervient. Elle allègue que tel était déjà le cas en 2019." (arrêt attaqué, let. f, p. 4). 
Comme le souligne à bon droit la recourante, la cour cantonale a ainsi fait totalement abstraction d'une série d'éléments, pourtant régulièrement allégués, se rapportant au contenu de son site internet ainsi qu'aux informations et autres avertissements destinés aux internautes naviguant sur les diverses pages web de celui-ci. L'intéressée fait ainsi notamment valoir qu'elle a allégué les éléments suivants: 
 
- l'accès à son site internet n'est possible qu'après acceptation d'une notice, laquelle apparaît également au bas de chaque page de son site internet avec le texte suivant: 
 
"A.________ est un atelier indépendant, qui ne fabrique pas, ni ne vend de montres (...). Nos interventions s'effectuent toujours dans le respect strict des histoires et des codes horlogers des marques ayant commercialisé les montres qui nous sont confiées pour individualisation (...). Nous ne sommes ni associés, ni affiliés à aucun autre groupe horloger. Nous effectuons notre travail en toute indépendance et n'entretenons aucune relation directe ou indirecte avec les marques sur les produits desquels nous sommes amenés à intervenir. Les marques citées sur notre site ne le sont qu'à titre de référence (...). Notre responsabilité à l'égard du propriétaire de la montre transformée et / ou des tiers est spécifiquement exclue pour tout usage autre que personnel et à titre privé par le propriétaire." 
- après acceptation de la notice initiale permettant d'accéder au site, la page d'accueil de celui-ci consiste en une présentation détaillée de l'atelier de la recourante, de ses artisans et de son savoir-faire, ne mettant en avant aucune marque ou produit de tiers; 
- sous la rubrique " Challenges " de son site internet, l'internaute peut accéder à des pages présentant certaines personnalisations de montres effectuées par la recourante pour le compte de ses clients, y compris pour diverses célébrités ayant recouru à ses services. Sur les pages en question, les mentions de marques de tiers figurent au milieu, de façon purement informative, pour décrire la provenance de la montre personnalisée, et parfois aussi en fin de page, sous la forme d'une unique photographie visant à illustrer le résultat des opérations réalisées par la recourante sur la montre du client concerné;  
- un astérisque figure après chaque modèle personnalisé, lequel mène à un texte figurant en bas de page du site internet ayant notamment le contenu suivant: 
 
"Les personnalisations ci-dessus ont été réalisées par A.________ de manière artisanale à la demande de nos clients uniquement. Ces personnalisations sont des exemples de nos réalisations et n'ont pas vocation à être répétées. Si vous souhaitez qu'A.________ personnalise votre montre, veuillez nous contacter." 
- sur la page de présentation de chaque exemple de services apparaît un bouton "demander ce service"; lorsque l'internaute clique sur celui-ci, il est redirigé vers un formulaire de demande auquel sont rattachées les conditions générales que le client doit accepter et qui rappellent que la recourante n'est ni affiliée ni autorisée ni approuvée par le fabricant d'origine des produits sur lesquels elle intervient; 
- sous la rubrique du site internet consacrée aux "Questions fréquemment posées" (FAQ), l'internaute est une nouvelle fois rendu attentif au fait que les fabricants de montres sur lesquelles intervient la recourante n'approuvent pas nécessairement les modifications apportées à leurs produits par des tiers qu'ils n'ont pas autorisés". 
La recourante souligne en outre, à juste titre, que la cour cantonale a totalement omis de procéder à la moindre constatation relative aux informations communiquées aux clients potentiels lors du processus de commande du service de personnalisation, alors même que l'intéressée avait allégué toute une série d'éléments à ce sujet. Au cours de la procédure, elle a notamment allégué les points suivants: 
 
- pour passer commande, l'internaute est tenu d'envoyer un formulaire, lequel suppose de cocher une case en vue de confirmer que l'intéressé a lu et accepté les conditions générales de services, lesquelles sont accessibles à tout un chacun, et prévoient notamment ce qui suit: 
 
"- A._________ est un atelier d'horlogerie uniquement dédié à l'art de la personnalisation de garde-temps et dès lors ne vend pas de montres ni n'offre de service en particulier de courtage pour obtenir des montres. 
- A.________ est une société indépendante qui offre des services en ligne de personnalisation de produits horlogers. A.________ n'est ni affiliée, ni autorisée, ni approuvée par le fabricant d'origine des produits sur lesquels nous intervenons. 
 
- La remise par le client à A.________ de sa montre aux fins de modifications entraîne la nullité de la garantie émise par le fabricant d'origine. Ladite montre transformée bénéficiera de notre garantie internationale de 5 ans. 
- La remise de la montre par le client à A.________ pour modifications doit se faire dans un délai de 5 semaines après confirmation de la commande. Toute montre reçue hors de ce délai occasionnera une majoration de 10% sur le prix de nos services. 
- Les services de personnalisation effectués sur la montre du client sont acceptés par A.________ et fournis exclusivement à ce dernier pour un usage personnel et privé, à l'exclusion de tout autre, en particulier la revente de la montre à un tiers." (passages mis en gras par la recourante); 
- le bon de commande détaille les réalisations commandées par le client et rappelle une nouvelle fois la teneur des conditions générales de services; 
- dans ses conditions générales de service, la recourante détaille sa propre garantie et apporte les précisions suivantes au sujet des droits de propriété intellectuelle: 
 
"Le nom des produits de marque mentionnés sur le Site sont des marques commerciales appartenant exclusivement à des sociétés tierces. Toute mention des noms ou des marques de ces sociétés n'est donnée qu'à titre de référence. 
Tous les droits de propriété intellectuelle, y compris les marques, relatifs aux montres personnelles sur lesquelles nous intervenons à votre demande sont la propriété de sociétés tierces. Ces sociétés tierces n'ont pas expressément approuvé les modifications que nous apportons aux montres originales de sorte que notre société ne bénéficie pas d'une autorisation explicite ni d'une licence explicite de leur part et intervient ainsi en toute indépendance. 
La mention du nom des produits et des marques de tiers sur le Site ne l'est qu'à titre de référence. " 
Il appert ainsi que la cour cantonale a omis de prendre en considération une série d'allégations régulièrement formulées par la recourante. Or, celles-ci présentent une pertinence certaine, dans la mesure où elles sont susceptibles d'influer sur les appréciations juridiques de l'autorité précédente selon lesquelles la recourante aurait créé, sur son site internet, l'apparence d'une forme de collaboration implicite avec l'intimée (apparence de co-branding), respectivement exploité, de manière parasitaire, la renommée de cette dernière. Il s'ensuit que le grief d'établissement incomplet des faits ainsi que le moyen pris d'une violation du droit d'être entendu de la recourante s'avèrent fondés.  
 
7.  
Au vu de ce qui précède, le présent recours doit être partiellement admis dans le sens des conclusions subsidiaires prises par la recourante. Ne disposant manifestement pas de tous les éléments lui permettant de trancher la présente cause, la Cour de céans n'est pas en mesure de réformer l'arrêt entrepris. Les constatations de fait contenues dans la décision attaquée sont en effet insuffisantes pour que le Tribunal fédéral puisse se prononcer à la place de l'autorité précédente, laquelle a statué en qualité d'instance cantonale unique. Il convient dès lors d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité précédente pour qu'elle établisse précisément les faits pertinents concernant le contenu du site internet de la recourante, puis qu'elle statue à nouveau sur la cause, en examinant si la manière dont la recourante offre ses services, respectivement promeut ses activités, contrevient, d'une quelconque façon, aux règles de la LPM ou aux dispositions de la LCD, en tenant également compte, lors de cet examen, de ce que ROLEX est une marque de haute renommée au sens de l'art. 15 LPM
 
8.  
En l'occurrence, la recourante obtient partiellement gain de cause, puisque son recours est admis en tant qu'il concerne la licéité de l'activité commerciale déployée par elle après le 1er octobre 2020. En revanche, l'autre aspect important du litige (question de savoir si la manière dont l'intéressée offre ses services et en fait la promotion contrevient ou non aux règles de la LPM ou aux dispositions de la LCD) demeure ouvert à ce stade. Partant, il se justifie de répartir les frais par moitié entre les parties et de compenser les dépens (art. 66 et 68 al. 1 et 2 LTF). Cette répartition des frais et dépens tient également compte de la circonstance selon laquelle la recourante a violé les droits de propriété intellectuelle de l'intimée avant l'introduction de la présente procédure, comme l'atteste l'achat test d'une montre personnalisée effectué en février 2020. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis par moitié à la charge de chaque partie. 
 
3.  
Les dépens sont compensés. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 19 janvier 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : O. Carruzzo