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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_21/2022  
 
 
Arrêt du 14 novembre 2022  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Viscione et Abrecht. 
Greffière : Mme Betschart. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Katia Berset, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Commission sociale de la Ville de Fribourg, rue de l'Hôpital 2, 1700 Fribourg, 
intimée. 
 
Objet 
Aide sociale, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Fribourg du 8 novembre 2021 
(605 2021 53, 605 2021 54, 605 2021 56). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1972, disposant d'une autorisation d'établissement du canton de B.________, était bénéficiaire de prestations d'aide matérielle du Service social de la ville de U.________ depuis 2017. Le 26 juin 2019, il a déposé une demande d'aide matérielle auprès du Service de l'aide sociale de la ville de Fribourg (ci-après: SASV). Il a notamment indiqué s'être installé à Fribourg car il y avait trouvé un appartement de deux pièces qu'il sous-louait à partir du 1er juillet 2019 de son amie C.________ (au loyer de 950 fr., charges comprises). Le Service social de la ville de U.________ lui a encore versé une aide matérielle et a pris en charge le loyer pour le mois de juillet. A titre d'aide d'urgence, le SASV a versé à A.________ 300 fr. le 12 août 2019, 300 fr. le 4 septembre 2019 et 340 fr. le 4 octobre 2019 pour les mois d'août, septembre et octobre 2019.  
 
A.b. Parallèlement, A.________ s'est annoncé au Contrôle des habitants de la ville de Fribourg et il a adressé une demande de changement de canton au Service de la population et des migrants du Canton de Fribourg (SPoMi), qui a rejeté la demande par décision du 4 octobre 2019.  
 
A.c. Prenant acte de la décision de refus de changement de canton, le Service de l'action sociale du canton de Fribourg (ci-après: SASoc) a, par décision du 10 octobre 2019, accordé à A.________ une aide d'urgence pour la période du 4 au 31 octobre 2019, en vue d'organiser son retour dans le canton de B.________. Par décision du 14 octobre 2019, confirmée sur réclamation du SASV le 10 février 2020, le SASoc a confirmé l'aide d'urgence pour cette seule période, considérant que A.________ s'était constitué un domicile d'aide à Fribourg jusqu'à la décision de refus de changement de canton et qu'il appartenait dès lors au SASV de prendre en charge l'aide matérielle pour la période du 1er août 2019 au 3 octobre 2019.  
 
A.d. Par décision du 1er octobre 2020, la Commission sociale de la ville de Fribourg (ci-après: la Commission sociale) a confirmé l'octroi d'une aide d'urgence sous la forme d'un forfait d'entretien de 10 fr. par jour, ainsi que de la prise en charge des arriérés de primes d'assurance-maladie et des frais médicaux non couverts par celle-ci. Elle a en revanche refusé l'octroi du forfait d'entretien ordinaire ainsi que la prise en charge des frais de logement et du remboursement d'une dette de 600 fr. contractée auprès de C.________.  
 
A.e. Par décision du 28 janvier 2021, la Commission sociale a rejeté la réclamation formée par A.________ et a confirmé sa décision du 1er octobre 2020.  
 
B.  
Par arrêt du 8 novembre 2021, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a rejeté le recours formé par A.________ contre la décision du 28 janvier 2021. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens que la décision du 28 janvier 2021 soit annulée et qu'il ait droit à l'aide matérielle ordinaire du 1er août au 3 octobre 2019. A titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
La Commission sociale conclut au rejet du recours, pour autant qu'il soit recevable. Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d. LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement juridique sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 145 V 188 consid. 2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 2 LTF). Si la partie recourante entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, elle doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF); à défaut, un état de fait divergent de celui de la décision attaquée ne peut pas être pris en compte (ATF 145 V 188 consid. 2 précité; 135 II 313 consid. 5.2.2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral ne peut revoir les questions de droit cantonal que sous l'angle restreint de l'arbitraire, dans le cadre d'un moyen pris de la violation d'un droit constitutionnel (cf. art. 95 et 96 LTF, a contrario), expressément soulevé et développé conformément aux exigences de motivation accrues prévues à l'art. 106 al. 2 LTF. Celles-ci imposent à la partie recourante d'expliquer de manière claire et précise en quoi le droit constitutionnel aurait été violé (cf. ATF 140 III 385 consid. 2.3; 138 V 67 consid. 2.2).  
 
3.  
Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale est tombée dans l'arbitraire en confirmant le refus de l'intimée de verser au recourant l'aide matérielle ordinaire pour la période du 1er août au 3 octobre 2019, en particulier le forfait d'entretien et le loyer pour cette période. 
En revanche, il n'est plus contesté que le recourant s'était constitué un domicile d'aide sociale à Fribourg du 1er juillet 2019 au 4 octobre 2019, date de la décision du SPoMi refusant sa demande de changement de canton, et qu'il pouvait dès lors prétendre en principe à l'octroi de l'aide matérielle ordinaire du 1er août au 3 octobre 2019, pour autant que les conditions d'un tel octroi fussent remplies. 
 
4.  
 
4.1. Dans le canton de Fribourg, l'aide sociale est régie par la loi sur l'aide sociale du 14 novembre 1991 (LASoc; RS/FR 831.01), son règlement d'exécution du 30 novembre 1999 (RELASoc; RS/FR 831.0.11) et l'ordonnance du 2 mai 2006 fixant les normes de calcul de l'aide matérielle de la loi sur l'aide sociale (ci-après: l'ordonnance; RS/FR 831.0.12). Une personne est considérée dans le besoin lorsqu'elle éprouve des difficultés sociales ou lorsqu'elle ne peut pas subvenir à son entretien, d'une manière suffisante ou à temps, par ses propres moyens (art. 3 LASoc). Selon l'art. 4 LASoc, l'aide sociale comprend la prévention, l'aide personnelle et la mesure d'insertion sociale (al. 1); l'aide matérielle est une prestation allouée en espèces, en nature ou sous la forme d'un contrat d'insertion sociale (al. 4). Toute personne dans le besoin vivant à domicile et tenant son ménage a droit à un montant forfaitaire pour son entretien (art. 1 al. 1 de l'ordonnance). La couverture des besoins fondamentaux comprend, outre le montant forfaitaire mensuel pour l'entretien, les frais de logement (y compris les charges courantes) et les frais médicaux de base (art. 11 al. 1 de l'ordonnance).  
 
4.2. Aux termes de l'art. 5 LASoc, l'aide sociale est accordée dans la mesure où la personne dans le besoin ne peut pas être entretenue par sa famille ou ses proches conformément aux dispositions du code civil suisse ou de la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe ou ne peut pas faire valoir d'autres prestations auxquelles elle a droit. Cette disposition affirme le principe de subsidiarité de l'aide sociale. Ainsi, les prestations fournies à ce titre ne sont accordées que si la personne dans le besoin ne peut pas subvenir elle-même à ses besoins (possibilités d'auto-prise en charge), si elle ne reçoit pas l'aide d'un tiers (prestations d'assurances, emprunts, subventionnements, prestations volontaires de tiers etc.) ou si l'aide n'a pas été accordée en temps voulu (cf. ATF 141 I 153 consid. 4.2). Ce principe souligne le caractère subsidiaire de l'aide sociale et postule que toutes les autres possibilités aient déjà été utilisées avant que des prestations d'aide publique soient accordées; il exclut en particulier le choix entre les sources d'aide prioritaires et l'aide sociale publique (arrêts 8C_92/2013 du 10 février 2014 consid. 4.4; 2P.16/2006 du 1er juin 2006 consid. 5.1).  
 
4.3. Selon le principe de la couverture des besoins, l'aide sociale remédie à une situation de détresse actuelle, c'est-à-dire que les prestations d'aide sociale ne sont que fournies pour faire face à la situation actuelle et future (pour autant que le besoin perdure) et non pour une situation passée. En principe, l'aide ne peut donc pas être versée pour une période antérieure et servir à amortir des dettes, quand bien même un droit aux prestations aurait existé alors. Des exceptions peuvent être admises lorsque le non-paiement des dettes pourrait entraîner une nouvelle situation d'urgence à laquelle seule l'aide sociale pourrait remédier. Aussi l'aide sociale peut-elle être amenée à prendre en charge les arriérés de loyer. L'autorité décide de la prise en charge de dettes de cas en cas sur la base d'une pesée des intérêts (ATF 136 I 129 consid. 7.1.3 et les références; 136 V 351 consid. 7.1; arrêt 8C_866/2014 du 14 avril 2015 consid. 4.2.1).  
 
4.4. La jurisprudence a toutefois précisé que, même si l'aide sociale ne peut en principe pas être versée pour une période antérieure et servir à amortir des dettes, il faut tenir compte du fait qu'il s'écoule forcément un certain temps entre un refus de prester de l'autorité sociale et le jugement rendu contre ce refus. En cas de refus injustifié, ce laps de temps ne doit pas conduire à repousser d'emblée le versement des prestations au moment où statue l'autorité judiciaire. Autrement dit, pour autant que les autres conditions d'octroi soient remplies, l'aide sociale est due en principe à partir du dépôt de la demande (arrêt 8C_124/2016 du 23 novembre 2016 consid. 6.1 et la référence; cf. GUIDO WIZENT, Die sozialhilferechtliche Bedürftigkeit, 2014, p. 261 et 262).  
 
5.  
 
5.1. En l'espèce, la cour cantonale a retenu que la courte période du 1er août au 3 octobre 2019 était postérieure à la demande d'aide matérielle ordinaire, et qu'il fallait examiner si le recourant remplissait, pendant ce laps de temps, les conditions d'octroi d'une aide matérielle, même si celle-ci ne pourrait logiquement que porter sur le remboursement de dettes contractées durant cet intervalle. Pendant la période litigieuse, le recourant avait obtenu une aide d'urgence de 10 fr. par jour de la part du SASV, lequel avait également pris en charge les primes d'assurance-maladie et les frais médicaux. Au surplus, il avait reçu un montant de 600 fr. de son amie C.________, qui lui avait également sous-loué un appartement, dont il n'avait toutefois pas été en mesure d'acquitter le loyer jusqu'à ce jour. Seul était litigieux le montant de 2500 fr. au total qu'il affirmait devoir rembourser à son amie.  
Les juges cantonaux ont considéré que C.________ avait loué un appartement pour le recourant dès le 16 juin 2019, à fonds perdu en tout cas pour les quinze premiers jours, et qu'elle avait assumé au surplus une caution de 2550 fr. Elle avait conclu ensuite le contrat de sous-location, à partir du 1er juillet 2019, sans exiger la moindre garantie financière du recourant, alors qu'elle devait connaître sa situation financière précaire, et sans demander non plus des renseignements ou des garanties du SASV. Ce faisant, elle avait apporté au recourant une aide fondée sur des liens d'amitié, qui n'aurait pas été accordée par un tiers. Ainsi, et en allouant au surplus un montant de 600 fr. pour diverses dépenses non couvertes par l'aide d'urgence, elle avait financé, sur une base purement volontaire et sans garantie de remboursement, les frais de logement du recourant pour la période litigieuse. A défaut de cette aide, le recourant n'aurait pas pu emménager à Fribourg. Plus spécifiquement, il n'aurait pas pu louer un appartement dont le loyer dépassait (de 50 fr.) la norme admise pour une personne seule et que le Service social aurait en conséquence refusé de prendre en charge. L'existence d'un contrat de sous-location sur la base duquel elle pourrait exiger le paiement des loyers d'août et de septembre 2019 n'y changeait rien. Il en allait de même de l'accord conclu avec le recourant selon lequel le montant de 600 fr. devrait lui aussi être remboursé. On pouvait d'ailleurs douter qu'elle aurait réellement eu l'intention d'exiger le payement de ces montants. Elle avait certes adressé au recourant des rappels demandant le remboursement de ces montants (le 26 août 2019, le 23 octobre 2019 et le 12 août 2020); ceux-ci n'avaient toutefois fait l'objet depuis lors ni de relances régulières, ni de demandes de paiement par acomptes même modestes, ni de procédures de poursuite. 
Conformément au principe de la subsidiarité de l'aide sociale, de telles prestations volontaires d'un tiers, basées sur un lien d'amitié, devaient être considérées comme des ressources propres du recourant qui lui avaient permis d'assumer son entretien par d'autres moyens que l'aide matérielle. Cela avait pour conséquence d'exonérer l'autorité d'aide sociale d'octroyer elle aussi des prestations qui viseraient le même but. Retenir le contraire permettrait en effet à une personne sollicitant un droit à l'aide sociale d'obtenir des prestations de tiers que ceux-ci pourraient allouer librement, sans égard aux limitations strictes posées par la législation sur l'aide sociale, en prévoyant simplement une obligation formelle de remboursement qui les autoriserait ensuite à bénéficier d'un versement ultérieur par les autorités chargées d'appliquer cette législation. Cela reviendrait à mettre ces autorités devant le fait accompli, notamment s'agissant du logement et des autres prestations qu'elles doivent prendre en charge au titre de l'aide matérielle. Et cela pourrait conduire à un enrichissement de la personne concernée dans les cas où celle-ci ne procéderait finalement pas au remboursement en faveur du tiers des prestations dont elle a bénéficié. 
Par ailleurs, même s'il s'avérait que C.________ envisageait d'exiger effectivement le remboursement du montant précité, le remboursement de ces dettes ne permettrait pas une amélioration significative de la situation financière actuelle du recourant, vu ses dettes importantes d'environ 250'000 fr. envers le Service social de la Ville de U.________ et le fait qu'il continuait à ce jour de dépendre de l'aide matérielle, octroyée par ce Service social. 
 
5.2. Le recourant reproche à la cour cantonale pour l'essentiel d'être tombée dans l'arbitraire en considérant qu'il ne présentait pas une situation d'urgence, car il avait été aidé par son amie durant la procédure d'examen de son droit à l'aide sociale pour la période litigieuse. Ceci reviendrait à nier le droit aux prestations dans toutes les situations où un demandeur d'aide aurait pu avoir recours à des aides couvrant ses besoins vitaux pendant la période d'examen de sa demande d'aide. En admettant que l'aide d'urgence et les 600 fr. reçus de la part de son amie (soit 200 fr. par mois) auraient suffi à couvrir ses besoins pour les mois d'août à octobre 2019, l'intimée aurait en outre réduit sans justification ni décision formelle - et donc arbitrairement - le forfait d'entretien ordinaire de 986 fr. auquel il aurait droit selon le droit cantonal. Finalement, la cour cantonale aurait procédé à une appréciation arbitraire des preuves en retenant qu'au vu du lien d'amitié entre elle et le recourant, C.________ aurait financé les frais de logement et prêté le montant de 600 fr. sur une base purement volontaire et gratuite.  
 
6.  
 
6.1. Le versement rétroactif de prestations d'aide sociale exige - à l'instar du droit à l'aide actuel - que toutes les conditions d'allocation de l'aide aient été remplies pendant la période révolue en question, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges (cf. arrêt 8C_124/2016 du 23 novembre 2016 consid. 6.1). Dans de telles constellations, il convient donc également d'examiner (entre autres) de quelles ressources financières disposait le requérant durant l'intervalle litigieux, notamment s'il recevait des prestations de tiers. Car le principe de la subsidiarité exige, comme on vient de l'exposer (cf. consid. 4.2 supra), que les prestations de tiers doivent en règle générale être prises en compte à titre de revenu lors du calcul des besoins du bénéficiaire (respectivement requérant) de l'aide sociale (pour plus de différenciations et les exceptions à ce principe, non applicables en l'espèce, cf. ALEXANDER SUTER, Comment tenir compte des prestations volontaires de tiers?, in ZESO 2/20 p. 6).  
Toutefois, si la tierce personne a fourni sa prestation après le dépôt de la demande et en lieu et place de l'autorité d'aide sociale pour couvrir les besoins vitaux et personnels indispensables du requérant, il faut examiner de plus près à quel titre et à quelles conditions elle est intervenue. Si elle a apporté son soutien financier à fonds perdu (p. ex. sous la forme d'une donation), celui-ci doit être pris en compte à titre de revenu dans le calcul des besoins du requérant. Par contre, si elle a prêté de l'argent à l'intéressé, c'est-à-dire elle a fourni son soutien avec l'intention d'être remboursée, ce prêt ne peut en principe pas être pris en compte à titre de revenu du requérant (cf. WIZENT, op. cit., p. 264 et 438 et les références). Cela présuppose cependant que les besoins vitaux indispensables du requérant ne soient pas couverts en temps utile par l'autorité d'aide sociale et que le retard en ce qui concerne la décision sur l'aide sociale ne soit pas imputable au requérant, de sorte que la tierce personne intervient pour pallier les carences de l'autorité (WIZENT, op. cit., p. 261 et 438 et les références; CLAUDIA HÄNZI, Leistungen der Sozialhilfe in den Kantonen, in Christoph Häfeli [éd.], Das Schweizerische Sozialhilferecht, 2008, p. 137). Dans de telles circonstances, le versement rétroactif de prestations d'aide sociale matérielle peut également englober le remboursement de dettes qu'a accumulées le requérant auprès de tiers après le dépôt de la demande. Toujours est-il que les prestations versées à titre rétroactif ne peuvent pas outrepasser les besoins de base couverts par l'aide sociale (WIZENT, op. cit., p. 264), les limites (notamment concernant la prise en charge des loyers et du forfait d'entretien) étant également applicables dans ces constellations. 
 
6.2.  
 
6.2.1. En l'espèce, il est certes établi que le recourant n'aurait pas pu déménager à Fribourg sans le soutien financier de son amie. Toutefois, on ne peut pas faire abstraction du fait que les paiements de C.________ sont intervenus pour l'essentiel après la demande d'aide sociale du recourant et lui ont servi à subvenir à ses besoins vitaux (notamment de logement et quelques dépenses non couvertes par l'aide d'urgence de 10 fr. par jour) qui auraient dû être couverts par le Service de l'aide sociale de la ville de Fribourg à partir du 1er août 2019. A cela s'ajoute que le Service social de la ville de U.________ a pris en charge le premier mois du séjour du recourant à Fribourg, selon la pratique usuelle en matière d'aide sociale dans les cas de changement de commune d'un bénéficiaire d'aide dont le besoin d'aide subsiste, pratique qui vise à procurer le temps nécessaire à la personne bénéficiaire et à la nouvelle commune pour déterminer le droit à l'aide et les devoirs individuels (Normes CSIAS B.3-3 [version 2017]; cf. Normes CSIAS C.4.3. al. 4 [version 2021]). Cependant, le Service de l'aide sociale de la ville de Fribourg n'a formellement décidé sur le refus de prendre en charge l'aide matérielle ordinaire pour la période litigieuse qu'en octobre 2020, soit une année après l'écoulement de la période litigieuse et plus d'un an et trois mois après la demande. Ce retard n'est pas imputable au recourant. A partir du 1er août 2019, C.________ est donc intervenue en lieu et en place de l'autorité d'aide sociale - qui ne s'exécutait pas - pour couvrir au moins une partie des besoins urgents du recourant, notamment celui d'un logement, et ceci d'ailleurs sans qu'elle ait pu prévoir à ce moment pour combien de temps son aide (remplaçant celle de l'autorité) serait nécessaire.  
 
6.2.2. En sus du loyer, le recourant ne disposait, dans l'intervalle en question, que de l'aide d'urgence à raison de 10 fr. par jour et de la somme de 600 fr. que lui avait prêtée son amie pour subvenir à ses besoins. Le montant total était ainsi inférieur au montant forfaitaire mensuel de 986 fr. prévu à l'art. 2 de l'ordonnance pour l'entretien d'une personne vivant seule dans son propre ménage. Le fait que le loyer mensuel de 950 fr. dépassait de 50 fr. le montant maximal de loyer pour la ville de Fribourg n'aurait pas permis à l'autorité de refuser intégralement la prise en charge des frais de logement (cf. Normes CSIAS B.3-2 [version 2017] et Normes CSIAS C.4.1. [version 2021]). L'excédent de 50 fr. du loyer mensuel ainsi que le prêt unique de 600 fr. ne permettent par ailleurs pas de conclure que C.________ aurait financé au recourant un train de vie luxueux dépassant de manière claire celui d'un bénéficiaire d'aide sociale ordinaire (cf. arrêts 8C_140/2012 du 17 août 2012 consid. 7.2.1; 2P.127/2000 du 13 octobre 2000 consid. 2; WIZENT, op. cit., p. 435).  
 
6.2.3. Au surplus, C.________ a manifesté à plusieurs reprises au recourant sa volonté d'être remboursée, en lui adressant des sommations. Elle a certes renoncé à mettre en poursuite ses créances contre le recourant, ce qu'on ne saurait toutefois lui reprocher dans la mesure où celui-ci ne dispose toujours pas de moyens financiers propres et est (de nouveau) assisté par le Service social de la ville de U.________. Or il sied de rappeler que les prestations d'assistance et subsides alloués par une caisse ou société de secours en cas de maladie, d'indigence, de décès, etc. sont insaisissables (art. 92 al. 1 ch. 8 LP). Une poursuite serait donc d'emblée vouée à l'échec et ne ferait que créer des frais inutiles à la créancière. A cela s'ajoute qu'elle a conclu un contrat de sous-location à titre onéreux avec le recourant. Dans ces circonstances, la conclusion des juges cantonaux selon laquelle C.________ aurait apporté son aide à fonds perdu s'avère insoutenable.  
 
6.2.4. Initialement, C.________ a certes financé de son propre gré le déménagement du recourant à Fribourg et a même pris en compte des pertes au début du bail (soit le loyer pour la moitié du mois de juin 2019), ce qui peut s'expliquer par son lien d'amitié avec le recourant. Toutefois, au vu de ce qui précède, on ne saurait déduire de ces circonstances qu'elle aurait accepté de fournir toutes ses prestations suivantes également à fonds perdu et, au surplus, pour un temps alors imprédictible, vu qu'elle avait manifesté dès le début sa volonté d'être remboursée. Il serait en effet choquant et inadmissible qu'une autorité, qui a refusé - à tort - d'octroyer l'aide sociale en temps utile et qui a causé elle-même un retard considérable dans la décision sur l'aide, soit finalement libérée de son devoir de verser les prestations ordinaires au seul motif que le requérant a réussi à emprunter de l'argent à un tiers, qui est de cette manière intervenu pour pallier les carences causées par le retard de l'autorité. Que le recourant ait finalement pu subvenir (partiellement) à ses besoins vitaux, notamment de logement et de quelques dépenses dépassant le strict minimum de l'aide d'urgence, grâce à un prêt de son amie ne saurait donc dispenser l'autorité de fournir rétroactivement les prestations d'aide ordinaire.  
 
6.2.5. Dans ce contexte, il est par ailleurs sans pertinence que le recourant continue d'être soutenu par le Service social de la ville de U.________ et que le remboursement des dettes contractées auprès de son amie n'améliorerait pas de manière significative sa situation financière. En effet, ce critère s'applique primordialement dans les cas de reprise de dettes antérieures à la demande (cf. consid. 4.3 supra).  
 
6.3. En conclusion, l'arrêt attaqué, qui confirme la décision sur réclamation de l'intimée du 28 janvier 2021 niant le droit du recourant à l'aide sociale ordinaire, procède d'une appréciation insoutenable des preuves, conduisant à une application erronée des normes et principes juridiques applicables, et son résultat heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Il se révèle ainsi arbitraire et ne saurait être confirmé. Par conséquent, l'intimée devra verser l'aide sociale matérielle ordinaire (au prorata) pour la période du 1er août au 3 octobre 2019, sous déduction de l'aide d'urgence et des frais médicaux qu'elle a déjà pris en charge. Le recours s'avère ainsi fondé.  
 
7.  
L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 et al. 4 a contrario LTF) et versera une indemnité de dépens au recourant (art. 68 al. 1 LTF). 
Par ailleurs, il incombera à la cour cantonale de se prononcer à nouveau sur les dépens de la procédure précédente (art. 68 al. 5 LTF). On rappellera en outre que l'intimée devra également se prononcer sur l'assistance judiciaire pour la procédure de réclamation. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 8 novembre 2021 et la décision sur réclamation de l'intimée du 28 janvier 2021 sont annulés. L'intimée versera au recourant l'aide matérielle ordinaire pour la période du 1er août au 3 octobre 2019, sous déduction de l'aide d'urgence et des frais médicaux déjà pris en charge. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
L'intimée versera au recourant la somme de 2800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
La cause est renvoyée à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg pour nouvelle décision sur les dépens de la procédure antérieure. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg. 
 
 
Lucerne, le 14 novembre 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Betschart