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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_254/2023  
 
 
Arrêt du 12 juillet 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys et van de Graaf. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Violation grave des règles de la circulation routière, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel 
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, 
du 29 novembre 2022 (n° 438 AM22.005329-DTE). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 24 janvier 2022, à U.________, sur une route principale, A.________, né en 1952, a été flashé au volant d'une voiture à 114 km/h, marge de sécurité déduite, au lieu des 80 km/h prescrits. 
Par jugement du 22 août 2022, statuant sur opposition à une ordonnance pénale du 21 avril 2022, le Tribunal de police de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a condamné A.________ pour violation grave des règles de la circulation routière à 20 jours-amende à 70 fr. le jour, avec sursis pendant 3 ans (Il à IV), ainsi qu'à une amende de 350 fr., convertible en 5 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif (V), et a mis les frais de la cause, par 600 fr., à la charge de A.________ (VI). 
 
B.  
Saisie par le condamné, par jugement du 29 novembre 2022, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel et confirmé le jugement du 22 août 2022. On renvoie à ce jugement quant à l'état de fait pertinent autant qu'il n'est pas restitué ci-dessus ou discuté ci-dessous. 
 
C.  
Par acte du 17 février 2023, A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement sur appel du 29 novembre 2022. Il conclut alternativement à l'annulation de cette décision ou à sa réforme en ce sens que l'infraction soit requalifiée comme de "gravité moyenne dite faute légère". 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 145 IV 154 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs ainsi que, de manière plus générale, tous ceux qui relèvent de la violation de droits fondamentaux, que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), soit s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 145 IV 154 consid. 1.1). 
 
2.  
Le recourant soutient dans un premier moyen que la limitation générale à 80 km/h hors localité serait dénuée de base légale. En bref, l'entrée en vigueur de "la loi sur les limitations de vitesse hors localité" aurait été une mesure provisoire, édictée en relation avec la "mort des forêts", limitée dans le temps jusqu'en 1987 et devant être revue ensuite. Or, précisément, les forêts se porteraient mieux que jamais, ce qui priverait "la loi sur les limitations de vitesse hors localités" de fondement. Cette loi ne serait donc plus en vigueur et aurait été détournée au mépris de tout processus démocratique. 
 
2.1. Le recourant n'expose pas précisément s'il entend invoquer la violation d'un droit fondamental et le cas échéant lequel. Il ne consacre spécifiquement aucun développement au principe de la légalité, respectivement à l'art. 5 Cst. Il est douteux que l'argumentaire développée à l'appui du recours réponde aux exigences de motivation accrues déduites de l'art. 106 al. 2 LTF. On peut, dès lors, se limiter à relever, brièvement ce qui suit.  
 
2.2. Comme l'a souligné à juste titre la cour cantonale, la fixation de limites de vitesse est une compétence qui a été déléguée par le législateur au Conseil fédéral depuis le 1er janv. 1977 (RO 1975 1257, 1976 2810 ch. II al. 2; FF 1973 II 1141). Cette délégation de compétence est intervenue sans lien prépondérant avec des questions environnementales.  
 
2.3. Quant aux limitations elles-mêmes, le Conseil fédéral les fixe à l'art. 4a de l'Ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR) du 13 novembre 1962 (RS 741.11), l'al. 1 let. b de cette disposition en particulier en ce qui concerne le 80 km/h hors des localités, à l'exception des semi-autoroutes et des autoroutes. Cette limitation a certes été édictée dans le contexte du débat relatif à la "mort des forêts". Cela ne signifie cependant pas que seuls des motifs environnementaux auraient présidé à son introduction et moins encore qu'elle ne contribuerait pas à la sécurité routière, comme le Tribunal fédéral l'a très rapidement constaté en matière tant pénale qu'administrative (v. ATF 113 Ib 143 consid. 2c; sur l'historique de ces normes v.: BUSSY/RUSCONI et al., Code suisse de la circulation routière commenté, 4e éd. 2015, nos 3.1 ss ad art. 32 LCR). Du reste, même formellement invalide, la signalisation d'une limitation de vitesse (appréhendée comme une décision générale) ne saurait être remise en cause à la demande d'un conducteur agissant individuellement sans égard à l'intérêt des autres usagers qui se fient à la signalisation et peuvent compter sur le fait que les autres usagers en feront de même (cf. ATF 128 IV 184 consid. 4.2 p. 185 s.), ce qui répond également à l'argument du recourant selon lequel le tronçon sur lequel il a été contrôlé s'apparenterait à une semi-autoroute. En tant que de besoin, on peut enfin relever que le renforcement des sanctions introduit par l'art. 90 al. 3 et 4 LCR notamment en cas de dépassement de la limitation à 80 km/h, démontre amplement que cette limitation ne poursuit pas uniquement un but de protection de l'environnement et ne procède pas d'un "détournement" de la volonté du législateur. Le moyen doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.  
 
3.  
Le recourant conteste ensuite avoir dépassé de plus de 30 km/h la vitesse autorisée, soit le résultat de la mesure effectuée. Il avance que la "voiture test" aurait été équipée de pneus neige, ce qui aurait sensiblement faussé l'appréciation du radar. On ignorerait du reste s'il y avait une "voiture test". 
Ainsi articulé, ce moyen ne répond manifestement pas aux exigences de motivation accrues précitées. Il est irrecevable. Au demeurant, les seules suppositions du recourant sur l'existence ou non d'une "voiture test" et de son équipement pneumatique ne sont en tout cas pas de nature à démontrer que la décision entreprise serait insoutenable et moins encore qu'elle le serait dans son résultat. En tant que de besoin, on peut relever qu'il ressort du procès-verbal de mesures de vitesse, que des tests de fonctionnement ont été effectués par un agent qualifié au début et à la fin du contrôle, soit à 9h16 et 12h21, et rien ne permet de douter que ces tests, opérés sur l'appareil vérifié et certifié par METAS qui a servi à mesurer la vitesse (dossier cantonal, p. 18), n'auraient pas été réalisés conformément aux prescriptions topiques. Le moyen doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
4.  
Le recourant conteste pour terminer la qualification de la violation des règles de la circulation comme grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, respectivement la gravité de la mise en danger qui lui est reprochée. 
 
4.1. Conformément à l'art. 90 al. 1 et 2 LCR, celui qui viole les règles de la circulation prévues par ladite loi ou par les dispositions d'exécution émanant du Conseil fédéral est puni de l'amende (al. 1). Celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (al. 2).  
 
4.2. Pour déterminer si une violation d'une règle de la circulation doit être qualifiée de grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, il faut procéder à une appréciation aussi bien objective que subjective. D'un point de vue objectif, la violation grave d'une règle de circulation au sens de l'art. 90 al. 2 LCR suppose que l'auteur ait mis sérieusement en danger la sécurité du trafic. Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue (ATF 142 IV 93 consid. 3.1 p. 96; 131 IV 133 consid. 3.2 p. 136). Subjectivement, l'art. 90 al. 2 LCR exige, selon la jurisprudence, un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c'est-à-dire une faute grave et, en cas d'acte commis par négligence, à tout le moins une négligence grossière. Celle-ci doit être admise lorsque le conducteur est conscient du caractère généralement dangereux de son comportement contraire aux règles de la circulation. Mais une négligence grossière peut également exister lorsque, contrairement à ses devoirs, l'auteur ne prend absolument pas en compte le fait qu'il met en danger les autres usagers, en d'autres termes s'il se rend coupable d'une négligence inconsciente. Dans de tels cas, une négligence grossière ne peut être admise que si l'absence de prise de conscience du danger créé pour autrui repose elle-même sur une absence de scrupules (ATF 131 IV 133 consid. 3.2 p. 136; arrêts 6B_973/2020 du 25 février 2021 consid. 2.1; 6B_1445/2019 du 17 avril 2020 consid. 2.2). Plus la violation de la règle de la circulation est objectivement grave, plus on admettra l'existence d'une absence de scrupules, sauf indice particulier permettant de retenir le contraire (ATF 142 IV 93 consid. 3.1 p. 96).  
 
4.3. Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement. Ainsi, les éléments objectifs - et en principe subjectifs - du cas grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR sont réalisés, sans égard aux circonstances concrètes, en cas de dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (arrêts 6B_1039/2021 du 14 janvier 2022 consid. 1.3.1; 6B_973/2020 du 25 février 2021 consid. 2.1; cf. ATF 143 IV 508 consid. 1.3 p. 512).  
Cependant, la jurisprudence admet que dans des circonstances exceptionnelles, il y a lieu d'exclure l'application du cas grave alors même que le seuil de l'excès de vitesse fixé a été atteint. Ainsi, sous l'angle de l'absence de scrupules, le Tribunal fédéral a retenu que le cas grave n'était pas réalisé lorsque la vitesse avait été limitée provisoirement à 80 km/h sur un tronçon autoroutier pour des motifs écologiques liés à une présence excessive de particules fines dans l'air, ou encore lorsque la limitation de vitesse violée relevait notamment de mesures de modération du trafic (ATF 143 IV 508 consid. 1.3 p. 512 et les références citées). 
 
4.4. En l'espèce, la réalisation de telles circonstances exceptionnelles n'est pas établie. Rien n'indique, en particulier, que la limitation de vitesse que le recourant n'a pas respectée ne viserait pas un but de sécurité, fût-ce à côté d'autres objectifs (v. supra consid. 2.3). Que la route en question offre trois voies de circulation, que le tronçon soit rectiligne et que la visibilité fût bonne ne constituent, en particulier, pas de telles circonstances. Comme l'ont relevé les autorités cantonales, cette route était non seulement ouverte à la circulation et empruntée effectivement par d'autres véhicules dont des poids lourds, mais pouvait aussi l'être par d'autres usagers moins rapides, dont des cycles infiniment plus lents et vulnérables. Quant au fait avancé par le recourant, qu'il n'aurait excédé la limitation dans une telle mesure que ponctuellement pour dépasser un véhicule qui aurait accéléré durant cette manoeuvre, il ne ressort pas de la décision entreprise et le recourant ne démontre pas en quoi il aurait été arbitraire d'en faire abstraction (v. supra consid. 1).  
Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de s'écarter de la pratique selon laquelle un dépassement de plus de 30 km/h hors localité constitue une mise en danger pour le moins abstraite accrue des autres usagers de la route. Quant à l'aspect subjectif, l'appréciation des autorités cantonales selon laquelle en adoptant une telle allure, le recourant a agi par une négligence grossière, elle n'est pas critiquable non plus. Il suffit de relever que le danger s'accroît avec l'importance de la violation de la limitation de vitesse, qu'un dépassement de plus de 30 km/h excède notablement ce que l'on rencontre malheureusement de manière plus ou moins habituelle et qu'en l'absence de circonstances exceptionnelles, tout conducteur lucide circulant à une telle allure sur une route soumise à la limite générale de 80 km/h hors localité devrait nécessairement se rendre compte qu'il dépasse très nettement la vitesse maximale autorisée (ATF 118 IV 188 consid. 2d). Dans la configuration - on ne peut plus banale - de l'espèce, qu'une telle prise de conscience ne soit, cas échéant, pas intervenue comme le soutient le recourant ne pourrait de toute manière être imputé qu'à une absence de scrupule signant une négligence certes inconsciente mais grossière et il s'agit donc subjectivement et objectivement d'une violation grave des règles de la circulation. 
 
5.  
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 12 juillet 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Vallat