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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_233/2023  
 
 
Arrêt du 11 décembre 2023  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Maillard et Métral. 
Greffière : Mme Castella. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Pascal Junod, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Conseil d'État de la République et canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 2, 1204 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Droit de la fonction publique (révocation disciplinaire), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 28 février 2023 (A/2694/2022-FPUBL ATA/177/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ a été engagée par le Département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après: le DIP) du canton de Genève en tant qu'enseignante remplaçante à compter du 1 er janvier 2006, puis en tant que chargée d'enseignement de mathématiques dès le 1er septembre 2008. Le 1er septembre 2011, elle a été nommée fonctionnaire en qualité de maîtresse d'enseignement général dans l'enseignement secondaire. A compter du 17 septembre 2017, elle a exercé au collège B.________ (ci-après: le collège).  
 
A.b. Le 6 juillet 2020, A.________ a fait l'objet d'un blâme, motivé par des publications sur son compte Facebook, jugées incompatibles avec les devoirs et obligations découlant de son statut d'enseignante. En particulier, il lui était reproché d'avoir proféré publiquement des menaces à l'encontre de son employeur si celui-ci venait à remettre en question sa liberté d'expression, d'avoir fait la publicité de sa participation à l'événement C.________, alors que le signe de la quenelle était perçu comme un geste obscène et méprisant, pourvu d'une connotation antisémite auprès de la population genevoise, ainsi que d'avoir publié des images où elle s'affichait avec un gilet jaune muni d'un symbole, référence claire et non équivoque à une chanson pour laquelle D.________ avait été condamné pour provocation à la haine raciale. L'intéressée était priée de bien vouloir respecter son cahier des charges et ses devoirs de service, avec l'avertissement que tout nouveau manquement serait susceptible d'entraîner une résiliation des rapports de service. En référence au fait qu'elle avait exposé publiquement le litige l'opposant à son employeur, son devoir de réserve lui était rappelé et il lui était demandé de ne plus communiquer sur la procédure.  
 
A.c. Le 29 janvier 2021, le directeur général du collège a convoqué A.________ à un entretien de service lequel, après deux reports, s'est déroulé par voie écrite. Plusieurs éléments avaient été portés à la connaissance du DIP depuis le prononcé du blâme, susceptibles de constituer des manquements. Il était notamment fait référence à la publication sur divers réseaux sociaux de vidéos au contenu inadéquat ainsi qu'à des propos inadaptés tenus dans le cadre scolaire. Ces faits, s'ils étaient avérés, étaient incompatibles avec les devoirs et obligations découlant de son statut d'enseignante. A.________ a contesté l'ensemble des griefs.  
 
A.d. Par arrêté du 19 mai 2021, le Conseil d'État genevois a ordonné l'ouverture d'une enquête administrative à l'encontre de A.________ ainsi que la suspension provisoire de l'intéressée à partir de la rentrée scolaire 2021-2022, avec maintien du traitement.  
L'enquêtrice a rendu son rapport le 5 avril 2022, retenant les faits résumés suivants: 
 
- au cours des années scolaires 2018-2019 et 2019-2020, A.________ était intervenue auprès de deux classes, pendant une campagne de vaccination organisée par le DIP contre le papillomavirus, par un discours brouillant le message de protection de la santé véhiculé par les autorités compétentes et se positionnant en contradiction avec sa hiérarchie; 
- il ressortait d'une vidéo de l'événement C.________, diffusée sur Youtube, que A.________ était montée sur scène aux côtés de l'organisateur, D.________, afin de recevoir une "quenelle d'or", à savoir une statuette faisant le geste de la quenelle, qu'elle avait dédié à l'association E.________, faisant référence à la procédure ouverte contre elle au sein du DIP; dans une autre vidéo publiée sur Facebook en 2021, elle avait évoqué la procédure administrative en cours, faisant un lien entre des courriers adressés par l'association E.________ au DIP et les entretiens de service auxquels elle avait été convoquée en résumant: "l'association E.________ demande, l'État obéit", de sorte qu'elle se sentait légitimée à dédier sa quenelle d'or à cette association; 
- le 3 septembre 2020, A.________ avait une nouvelle fois diffusé sur Facebook la vidéo de mai 2019 [...] sur laquelle elle apparaissait aux côtés de D.________ [...]; 
- entre août 2020 et novembre 2021, A.________ s'était exprimée publiquement et à réitérées reprises au sujet du blâme du 6 juillet 2020 et de la procédure, dans des vidéos mises en ligne, dans des commentaires y relatifs ou encore lors d'interviews données à des médias numériques; elle ne s'était pas limitée à mentionner son blâme en réponse à une éventuelle question, mais avait, de manière récurrente et proactive, présenté la sanction comme un processus poursuivi par son employeur, le cas échéant sur impulsion de E.________, visant à la sanctionner pour des faits qu'elle ne parvenait à identifier, sinon la diffusion, dans le cadre de ses activités hors du contexte scolaire, d'informations qui dérangeaient, ou sa proximité avec une personne qui dérangeait (D.________); 
- A.________ avait publiquement déclaré, le soir de la votation du 28 novembre 2021 sur la loi COVID-19, que les résultats avaient été manipulés en faveur du oui, relayant une allégation indirecte et sans fournir de preuves en ce sens; à l'occasion de cette même intervention, elle avait affirmé que le conseiller d'État genevois en charge de la santé n'était pas vacciné contre le Covid-19 et avait mentionné, lors d'une interview donnée à un média, que ce même conseiller d'État n'avait pas respecté les gestes barrière lors d'un barbecue; 
- A.________ avait publiquement (sur Facebook) pris position contre une décision de la direction générale de l'enseignement obligatoire (ci-après: la DGEO) du 6 décembre 2021 relative au port du masque pour les élèves des classes de 5P à 8P, en la qualifiant d'insensée, en interpellant les parents et en relayant un appel à un rassemblement devant le siège du Conseil d'État pour manifester son opposition à cette décision de sa hiérarchie; 
- A.________ avait publié sur ses réseaux sociaux des textes et images comparant les mesures sanitaires prises pour contenir l'expansion du Covid-19 à la période nazie, établissant un parallèle entre ces mesures et celles ordonnées entre 1933 et 1945 contre les personnes de confession juive, comprenant en particulier l'obligation de porter l'étoile jaune; 
- A.________ avait mis en ligne, en 2021, une interview qu'elle avait réalisée de F.________, personnage controversé condamné pénalement en France, dont les propos contenaient, entre autres, une invitation aux forces de police et à l'armée françaises à renverser les gouvernants en place, les accusant de multiples activités à caractère pénal (corruption passive, protection de pédocriminels, mise en danger volontaire de la santé des personnes, etc.), une allusion à un complot khazar pour prendre le contrôle du monde en utilisant la religion juive ou encore la mention de l'existence d'une protection institutionnelle de la pédocriminalité. 
A.________ s'est déterminée sur le rapport d'enquête le 24 mai 2022, contestant tout manquement à ses devoirs et obligations d'enseignante. 
Par arrêté du 22 juin 2022, déclaré exécutoire nonobstant recours, le Conseil d'État a révoqué A.________, avec effet au 30 septembre 2022, et l'a libérée immédiatement de son obligation de travailler. 
 
B.  
A.________ a déféré l'arrêté du 22 juin 2022 à la Chambre administrative de la République et canton de Genève, en concluant à sa nullité et, subsidiairement, à son annulation. 
Le 7 novembre 2022, la juge déléguée a tenu une audience de comparution personnelle des parties. 
Par arrêt du 28 février 2023, la juridiction cantonale a rejeté le recours. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont elle demande l'annulation, en concluant au renvoi de la cause à la juridiction précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
L'intimé conclut au rejet du recours, tandis que la cour cantonale a renoncé à se déterminer, tout en persistant dans les considérants et le dispositif de son arrêt. La recourante a déposé des observations supplémentaires. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office (art. 29 al. 1 LTF) et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 148 I 160 consid. 1; 147 I 333 consid. 1).  
 
1.2. La recourante conclut uniquement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'instance précédente, sans prendre formellement des conclusions sur le fond du litige. Or des conclusions purement cassatoires ne sont en principe pas suffisantes (art. 107 al. 2 LTF). On déduit toutefois de son mémoire de recours que la recourante requiert la réforme de l'arrêt attaqué dans le sens de l'annulation de sa révocation, voire du prononcé d'une autre sanction disciplinaire (cf. ATF 133 II 409 consid. 1.4.1). Ainsi comprise, la nature cassatoire des conclusions ne s'oppose pas à l'entrée en matière.  
 
1.3. L'arrêt attaqué a été rendu en matière de rapports de travail de droit public au sens de l'art. 83 let. g LTF. Le litige porte sur une décision de révocation disciplinaire, à savoir une contestation pécuniaire qui échappe au motif d'exclusion de l'art. 83 let. g LTF. La valeur litigieuse dépasse par ailleurs le seuil de 15'000 fr. (art. 51 al. 2 et 85 al. 1 let. b LTF). Pour le surplus, déposé en temps utile et dans les formes requises, le recours est recevable au regard des art. 42, 90 et 100 al. 1 LTF.  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 V 35 consid. 4.2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Si le recourant entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF); à défaut, un état de fait divergent de celui de la décision attaquée ne peut pas être pris en compte (ATF 145 V 188 consid. 2). Le recourant ne saurait se borner à plaider à nouveau sa cause, contester les faits retenus ou rediscuter la manière dont ils ont été établis comme s'il s'adressait à une juridiction d'appel (ATF 134 II 349 consid. 3). Le Tribunal fédéral n'entre ainsi pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 140 V 213 consid. 2; 140 III 264 consid. 2.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Sauf exceptions non réalisées en l'espèce (cf. art. 95 let. c, d et e LTF), le recours devant le Tribunal fédéral ne peut pas être interjeté pour violation du droit cantonal en tant que tel, mais il est possible de faire valoir qu'une mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 143 I 321 consid. 6.1). Appelé à revoir l'application ou l'interprétation d'une norme cantonale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF1 48 II 465 consid. 8.1; 148 I 145 consid. 6.1).  
 
3.  
 
3.1. La loi cantonale genevoise du 17 septembre 2015 sur l'instruction publique (LIP; RS/GE C 1 10) s'applique notamment aux membres du corps enseignant secondaire (art. 1 al. 4 LIP). Aux termes de l'art. 123 LIP, les membres du personnel enseignant doivent observer dans leur attitude la dignité qui correspond aux missions, notamment d'éducation et d'instruction qui leur incombe (al. 1); ils sont tenus au respect de l'intérêt de l'État et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (al. 2). Cette règle est reprise à l'art. 20 du règlement cantonal du 12 juin 2002 fixant le statut des membres du corps enseignant primaire, secondaire et tertiaire ne relevant pas des hautes écoles (RStCE; RS/GE B 5 10.04), qui prévoit que les membres du corps enseignant doivent observer dans leur attitude la dignité qui correspond aux responsabilités leur incombant, tandis que l'art. 21 al. 1 RStCE rappelle qu'ils se doivent de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence. L'enseignant doit en particulier jouir d'une bonne réputation (art. 45 let. b RStCE). Par ailleurs, l'art. 114 al. 1 LIP prévoit que, dans le cadre scolaire, chaque élève a droit à une protection particulière de son intégrité physique et psychique et au respect de sa dignité.  
En tant que membre du corps enseignant, l'enseignant est chargé d'une mission d'éducation dont les objectifs sont énoncés à l'art. 10 LIP. Selon la jurisprudence cantonale développée à cet égard (cf. les arrêts cités au consid. 5b de l'arrêt entrepris), son rôle est ainsi de contribuer au développement intellectuel, manuel et artistique des élèves, à leur éducation physique mais aussi à leur formation morale à une période sensible où les élèves passent de l'adolescence à l'état de jeune adulte. Dans ce cadre, l'enseignant constitue, à l'égard des élèves, à la fois une référence et une image qui doivent être préservées. Il lui appartient donc, dès qu'il se trouve hors de sa sphère privée, d'adopter en tout temps un comportement auquel ceux-ci puissent s'identifier. À défaut, il détruirait la confiance que la collectivité, et en particulier les parents et les élèves, ont placée en lui. Ce devoir de fidélité embrasse l'ensemble des devoirs qui lui incombent dans l'exercice de ses activités professionnelles et extra-professionnelles. Dès que ses actes sont susceptibles d'interagir avec sa fonction d'éducateur, le devoir de fidélité impose à l'enseignant la circonspection et une obligation de renoncer, sauf à prendre le risque de violer ses obligations. Les devoirs spécifiques liés à la mission éducative s'imposent parfois même hors service, compte tenu de l'ascendant que les membres du corps enseignant exercent sur leurs élèves en raison de leur position d'autorité à leur égard. 
 
3.2. Les juges cantonaux ont confirmé la révocation de la recourante, retenant huit comportements constitutifs de manquements aux devoirs professionnels (cf. let. A.d supra) et rejetant les explications et justifications développées à leur égard par l'intéressée dans son acte de recours. Ils ont considéré que c'était de manière non critiquable que l'intimé avait retenu de graves et multiples violations des devoirs de service, tant dans le cadre scolaire que dans le contexte d'activités extra-professionnelles. Dans la mesure où la recourante avait déjà fait l'objet d'un blâme pour des faits similaires moins de deux ans avant le prononcé de la révocation, elle pouvait s'attendre à ce que les publications qui lui étaient reprochées soient constitutives de nouvelles violations de ses devoirs de fonction. C'était également à juste titre que l'autorité intimée avait estimé que seule la révocation était apte à sauvegarder l'intérêt public que constituait la protection des élèves, le respect des valeurs pédagogiques, la réputation de la fonction publique ainsi que le maintien de la confiance parentale et de la collectivité dans le personnel enseignant. Dans ces circonstances, aucune autre sanction disciplinaire n'apparaissait envisageable sous l'angle de la proportionnalité et aucune autre mesure ne permettait d'atteindre les objectifs précités. En tout état, la faute de la recourante était grave et avait irrémédiablement rompu le lien de confiance avec son employeur.  
 
4.  
 
4.1. La recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.) à deux égards. D'une part, elle reproche aux juges cantonaux d'avoir refusé sa requête tendant à la production de décisions non publiées, sanctionnant d'autres enseignants, notamment une enseignante d'un cycle d'orientation ayant effectué un salut hitlérien en classe et qui aurait été réintégrée. A son avis, un tel moyen de preuve pouvait mettre en évidence une violation du principe de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire. En outre, l'absence éventuelle de sanctions dans des situations semblables à la sienne montrerait le traitement d'exception qui lui est réservé. D'autre part, la recourante reproche aux premiers juges de n'avoir pas suffisamment motivé leur décision, du fait qu'ils n'auraient pas répondu à son argumentation fondée sur la liberté d'expression.  
 
4.2. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comporte plusieurs aspects, dont le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1; 145 I 167 consid. 4.1). Cette garantie constitutionnelle n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le refus d'une mesure probatoire par appréciation anticipée des preuves ne peut être remis en cause devant le Tribunal fédéral qu'en invoquant l'arbitraire (art. 9 Cst.) de manière claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 III 73 consid. 5.2.2; 138 III 374 consid. 4.3.2). Autrement dit, savoir si une offre de preuve ou un élément porté à la connaissance de l'autorité est pertinent, de sorte que l'autorité en n'y donnant pas suite, a violé le droit d'être entendu, se confond avec le grief d'arbitraire dans l'appréciation des preuves (arrêt 8C_715/2018 du 11 juillet 2019 consid. 3.2.3).  
Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. implique également pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 149 V 156 consid. 6.1; 146 II 335 consid. 5.1). 
 
4.3.  
 
4.3.1. La cour cantonale a considéré que le dossier de la procédure était complet et que la jurisprudence tant au niveau cantonal que fédéral contenait une importante casuistique en matière de sanctions disciplinaires en droit de la fonction publique, en particulier s'agissant de révocation. En outre, il n'apparaissait pas que Ia demande de production des décisions prononcées pour d'autres enseignants concerneraient des situations identiques ou à tout le moins similaires aux faits qui étaient reprochés à la recourante.  
Sous l'angle de l'appréciation anticipée des preuves, ces considérations échappent à la critique et ne se révèlent en tout cas pas arbitraires. On ne voit pas que d'autres décisions non publiées soient indispensables à la résolution du litige opposant la recourante à l'intimé, même sous l'angle d'un examen de la proportionnalité. Si la recourante entend se plaindre d'une inégalité de traitement au sens de l'art. 8 Cst., alors elle doit motiver son grief de manière précise et ne peut se limiter à invoquer la probable existence d'affaires similaires. En ce qui concerne l'enseignante qui, selon les dires de la recourante, aurait été réintégrée après avoir effectué un salut nazi en classe, cette situation - pour autant qu'elle soit avérée - diffère de la présente cause, qui se caractérise par la répétition de manquements aux devoirs de service, après le prononcé d'une sanction disciplinaire portant sur des faits de même nature. 
 
4.3.2. Quant au défaut de motivation allégué, il n'est pas davantage fondé. Comme on l'a vu (cf. consid. 4.2 supra), la cour cantonale n'est pas tenue de discuter tous les griefs invoqués par les parties et, en l'occurrence, elle a expressément écarté la possibilité que la liberté d'expression puisse atténuer la responsabilité de la recourante (cf. consid. 6b de l'arrêt attaqué). En tout état de cause, on discerne clairement les motifs qui ont guidé l'arrêt entrepris, la cour cantonale ayant examiné un par un les huit griefs retenus à l'encontre de la recourante et conclu à l'existence de violations graves et multiples des devoirs de service. Compte tenu de l'acte de recours, la recourante a été en mesure de saisir la portée de l'arrêt entrepris et de l'attaquer en connaissance de cause. Le grief tiré de la violation de son droit d'être entendue doit dès lors être écarté.  
 
5.  
 
5.1. Se plaignant d'arbitraire dans l'application du droit cantonal (art. 10 et 123 LIP), la recourante conteste toute violation de ses devoirs de fonction, en particulier de ses devoirs de réserve et d'exemplarité. Elle discute les manquements retenus en émettant de nombreux griefs à l'encontre de l'arrêt attaqué, sur lesquels on reviendra ci-après dans la mesure de leur pertinence.  
 
5.2.  
 
5.2.1. A propos des trophées représentant des quenelles d'or, la cour cantonale a retenu que la recourante devait s'attendre à l'ambiguïté que provoquerait l'exposition du symbole du trophée, geste à connotation antisémite notoire. De telles considérations sont dépourvues d'arbitraires. Dans l'ATF 143 IV 308 (cité par la recourante à l'appui de son recours), le Tribunal fédéral a certes admis que la signification de la "quenelle" pouvait varier selon les contextes et les avis, mais il a également reconnu que le geste qui y était associé était à tout le moins perçu comme obscène et méprisant et empreint d'une connotation antisémite compte tenu de la polémique qui l'entourait, généralement connue de la population genevoise (consid. 4.3). Cela étant, on ne peut se limiter, comme le fait la recourante, à considérer les trophées qu'elle a exhibés et qui reproduisent le geste de la quenelle comme une simple référence parodique aux Oscars. Quant aux considérations des juges cantonaux, selon lesquelles la comparaison entre les mesures sanitaires et les mesures imposées aux communautés juives était à tout le moins susceptibles de susciter une controverse, elles répondaient aux allégations de la recourante, laquelle expliquait en substance que son objectif était de sensibiliser les gens sur la fragilité des droits et libertés généralement tenus pour acquis et s'inscrivait dans un débat public sur les libertés et les dérives totalitaires menaçant la société démocratique. Contrairement à ce que celle-ci soutient, on ne voit là aucun flou "sur les réels reproches" retenus par les juges cantonaux. Lorsque la violation des devoirs de service se fonde sur le contenu de publications en ligne, notamment sur les réseaux sociaux, il n'est en tout cas pas arbitraire de mettre l'accent sur la manière dont les contenus sont susceptibles d'être perçus par un tiers, même si l'intention de l'émetteur n'est pas dénuée de toute pertinence. Dans ce contexte, les arrêts du 4 janvier 2023 de la Chambre pénale de recours produits par la recourante en instance cantonale (annulant le refus d'entrer en matière du ministère public sur ses dépôts de plainte pénale pour injure et dénonciation calomnieuse) n'ont pas la portée que celle-ci leur donne. En considérant que deux publications (dont la vidéo contenant la comparaison entre les mesures sanitaires et les mesures imposées sous le régime nazi) ne permettent pas d'établir d'emblée et de façon claire l'éventuel sentiment interne antisémite de la recourante et en renvoyant la cause pour que les personnes visées par les plaintes puissent apporter la preuve de la vérité ou de leur bonne foi, ces arrêts ne font que confirmer le caractère controversé des publications. Or, après avoir fait l'objet d'un blâme portant sur des manquements de même nature, la recourante a été avertie que de telles publications ne seraient plus tolérées. Ainsi, alors qu'elle avait déjà été sanctionnée pour avoir diffusé des images d'elle-même, au côté de D.________, vêtue d'un gilet jaune orné d'un symbole en référence à la chanson de celui-ci, la recourante a fait fi des mises en garde de son employeur en publiant une nouvelle fois les images litigieuses. L'argumentation développée à cet égard, sur l'absence de lien entre ces images et la chanson pour laquelle le prénommé a été condamné, est purement appellatoire et frise la témérité. En conclusion, on ne voit pas dans la motivation du recours d'arguments susceptibles de démontrer une application arbitraire du droit cantonal, en tant que les premiers juges ont retenu qu'elle avait failli à ses devoirs d'enseignante en persistant, après le blâme, par des publications d'images et vidéos à connotation antisémite. Dans ces conditions et sous l'angle de l'arbitraire, la révocation de la recourante peut déjà être confirmée.  
L'argumentation développée à l'égard des autres manquements retenus ne permet en tout cas pas d'aboutir à un autre résultat. On relèvera en particulier que les reproches liés aux prises de position publiques de la recourante sur les différends qui l'opposaient à son employeur ne sont pas isolés du contenu de ses propos, en sens que ce sont bien plus les termes utilisés (p. ex. acharnement de la part de l'employeur sous l'influence de E.________) qui sont problématiques (cf. arrêt entrepris consid. 6e) que le fait d'avoir parlé ouvertement de la procédure. De ce point de vue, la médiatisation de l'affaire n'apparaît pas décisive et, en tout état de cause, l'argumentation de la recourante repose en grande partie sur des faits qui n'ont pas été constatés dans l'arrêt attaqué, de sorte qu'elle n'est pas admissible (cf. consid. 2.1 supra). Il en va de même lorsqu'elle soutient que "des campagnes de plus en plus virulentes se dressent contre les politiques qui ont préconisé la vaccination obligatoire contre le Covid-19, lui donnant en tous les cas partiellement raison". Quant à la diffusion de l'entretien avec F.________, même si les juges cantonaux ne donnent pas plus d'indications sur les "valeurs véhiculées par le DIP" incompatibles avec les propos de l'intéressé (cf. let. A.d supra supra), ils n'ont pas fait preuve d'arbitraire en retenant que la passivité de la recourante, son manque d'esprit critique, de recul et de remise en question risquait de la faire apparaître comme soutenant le discours de l'interviewé. Enfin, s'agissant de la prise de position de la recourante sur le courrier de la DGEO concernant le port du masque par les élèves, s'il faut admettre avec la recourante que, contrairement aux considérations des premiers juges, on ne voit pas d'ambiguïté entre son point de vue personnel et celui de son employeur, il n'en demeure pas moins que son devoir de réserve et de fidélité lui imposait une certaine retenue. 
 
6.  
 
6.1. Invoquant la violation de sa liberté d'expression (art. 19 al. 1 et 3 Pacte ONU II [RS 0.103.2]; art. 10 CEDH; art. 16 al. 1 et 2 Cst.), la recourante fait valoir que la grande majorité des faits reprochés sont intervenus en dehors du cadre scolaire et avaient pour thème principal les mesures sanitaires, sujet de société qui s'inscrivait dans le cadre d'un débat public et démocratique au-delà des frontières régionales. Ainsi, les questions relatives à la pandémie de Covid-19 appelaient à la critique au regard des incertitudes scientifiques y relatives et la controverse autour de ces questions serait notoire, l'Office fédéral de la santé publique ayant par exemple cessé de recommander la vaccination en date du 31 mars 2023. En outre, la recourante invoque son statut d'enseignante au cycle d'orientation, qui ne constitue pas une fonction de cadre de l'administration; elle ne saurait donc être considérée comme une représentante de l'État.  
 
6.2. Pour autant qu'elle soit admissible, au égard aux exigences élevées de motivation applicables aux griefs de violation des droits fondamentaux (art. 106 al. 2 LTF), l'argumentation est mal fondée. En effet, la plupart des motifs qui ont justifié la révocation vont bien au-delà de déclarations ou du positionnement de la recourante vis-à-vis du Covid-19 et des mesures sanitaires y relatives. Tel est le cas des publications en lien avec les "quenelles d'or", le port du gilet jaune orné du symbole et l'interview de F.________, des prises de position publiques remettant en cause l'intégrité de son employeur dans la présente procédure et la régularité des votations fédérales du 28 novembre 2021, ou des propos dissuasifs tenus en classe sur la vaccination contre le papillomavirus. En outre, le devoir de réserve et de fidélité des agents publics qui, sous certaines conditions (cf. art. 36 Cst., art. 10 § 2 CEDH et 19 al. 3 Pacte ONU II), peut imposer des limites à l'exercice de la liberté de parole ou d'opinion s'étend aussi au comportement en dehors du service (ATF 136 I 332 consid. 3.2; arrêt 8C_1033/2010 du 10 juin 2011 consid. 5.3.1). Enfin, la recourante ne peut rien déduire en sa faveur de son statut de "simple" enseignante car c'est précisément au regard de sa mission éducative et, comme l'ont relevé les premiers juges, de sa proximité avec des jeunes en développement et en formation, impliquant à leur égard une position d'autorité et de référence, que la gravité des faits reprochés revêt une intensité particulière. Pour le reste, la recourante ne démontre pas que les conditions de restrictions de la liberté d'expression ne seraient pas remplies en l'espèce. En tout état de cause, sous l'angle du principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.), une sanction autre que la révocation apparaissait superflue, dès lors que la recourante a persisté dans ses publications et déclarations incompatibles avec sa fonction après une première mise en garde.  
 
7.  
Il résulte de ce qui précède que le recours, mal fondé, doit être rejeté. Le recours étant dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire pour la procédure devant le Tribunal fédéral doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). La recourante, qui succombe, supportera dès lors les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'il obtienne gain de cause, l'intimé n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative. 
 
 
Lucerne, le 11 décembre 2023 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Castella