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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
5A_868/2020, 5A_869/2020  
 
 
Arrêt du 20 janvier 2021  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Escher et Bovey. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
5A_868/2020 
A.________, 
représentée par Me Philippe A. Grumbach, avocat, 
recourante, 
et 
5A_869/2020 
B.________, 
représentée par Me Philippe A. Grumbach, avocat, 
recourante, 
contre  
C.________, 
représentée par Me Alexander Troller, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
opposition aux commandements de payer (poursuite pour effet de change), 
recours contre les arrêts de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile, des 28 août 2020 et 21 août 2020 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 14 décembre 2017, B.________, A.________ et D.________ ont souscrit dix-huit "  Promissory Note Guaranteed/ (Lettre de change à l'ordre  tu t  ireur/Aval " (  sic) en faveur de C.________ d'une somme totale de 4'077'400 euros, les différents montants, quinze en tout, étant payables de manière échelonnée entre le 28 février 2018 et le 31 mars 2019.  
Le texte desdits titres est rédigé en anglais, mais certains termes sont traduits entre parenthèses en français. C'est ainsi que C.________ est qualifiée de " the Payee (bénéficiaire) ", B.________ et A.________ soit de " the Maker (tireur/tirée) ", soit de " the Obligor 1 (donneur d'aval 1) " et D.________ de " the Obligor 2 (donneur d'aval 2) ". Par ailleurs, le chiffre 1 du texte s'intitule " Unconditional Promise (mandate pur e simple de payer une somme déterminée) " (  sic) et prévoit que " The Maker hereby unconditionally promises to pay the Payee EUR [...] (the Promised Amount). This Promissory Note is made to the Maker's own order (Art. 993 sect. 2 CO) ".  
 
A.b. A la réquisition de C.________, qui a engagé des poursuites pour effet de change, quinze commandements de payer, faisant référence à la " lettre de change ", ont été notifiés le 30 avril 2020 à A.________ et à B.________, qui y ont formé opposition le jour-même.  
L'Office des poursuites de Genève a transmis d'office au Tribunal de première instance de Genève (ci-après: tribunal) les commandements de payer frappés d'opposition. 
 
B.  
 
B.a.  
 
B.a.a. Lors de l'audience du 25 juin 2020, les poursuivies ont conclu à la recevabilité de leurs oppositions au motif que les documents, rédigés en anglais, ne contenaient pas la mention "  bill of exchange ". A titre subsidiaire, elles ont fait valoir que des sursis de paiement avaient été accordés et que le montant de 1'388'800 euros avait déjà été payé.  
 
B.a.b. Par jugement du 2 juillet 2020, le tribunal a notamment déclaré recevables les oppositions formées par A.________ aux commandements de payer, poursuite pour effet de change n° aa aaaaaa a, bb bbbbbb b, cc cccccc c et dd dddddd d à hauteur de 268'891 fr. et irrecevables pour le surplus, et déclaré irrecevables les oppositions formées aux onze autres commandements de payer. Par jugement séparé du même jour, il a déclaré recevables les oppositions formées par B.________ aux commandements de payer n° ee eeeeee e, ff ffffff f, gg gggggg g et hh hhhhhh h à hauteur de 268'891 fr. et irrecevables pour le surplus, et déclaré irrecevables les oppositions formées aux onze autres commandements de payer.  
En substance, le tribunal a considéré que le titre invoqué par la poursuivante, rédigé en anglais, portait la dénomination de "  promissory note ", laquelle se rapportait à un billet à ordre, et non à une lettre de change, expression qui se traduisait par "  bill of exchange ". Les billets à ordre satisfaisaient à toutes les conditions essentielles de l'art. 1096 CO. Faute de titre attestant des sursis invoqués, le tribunal a rejeté ce moyen mais il a en revanche tenu compte des versements allégués par les poursuivis.  
 
B.b. Statuant sur les recours du 13 juillet 2020 des poursuivies par arrêts séparés des 21 et 28 août 2020, la Cour de justice du canton de Genève a annulé et réformé les jugements attaqués sur la question relative aux frais judiciaires mais les a confirmés pour le surplus.  
 
C.   
Par deux actes postés le 19 octobre 2020, les poursuivies interjettent un recours en matière civile contre ces arrêts devant le Tribunal fédéral. Elles concluent à leur réforme, en ce sens que toutes les oppositions aux commandements de payer sont déclarées recevables, les poursuites pour effet de change étant suspendues et n'allant pas leur voie. En substance, elles se plaignent de la violation des art. 991 s. CO, 177 et 182 ch. 3 LP. 
Les causes ont été enregistrés sous n° 5A_868/2020 et 5A_869/2020. 
Par ordonnances séparées du 17 novembre 2020, l'effet suspensif a été attribué aux recours. 
Des observations sur le fond n'ont pas été requises. 
 
D.   
Le 24 novembre 2020, l'intimée a formé, dans chaque cause, une requête en fourniture de sûretés en garantie des dépens. 
 
Par ordonnance du 18 décembre 2020, les causes 5A_868/2020 et 869/2020 ont été jointes et les requêtes susvisées jugées prématurées, de sorte qu'il n'a pas été entré en matière sur celles-ci. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Les recours ont été interjetés par les parties qui ont succombé dans leurs conclusions devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF) et ils sont dirigés contre des arrêts rendus par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF), dans une affaire de poursuite pour dettes et de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF) dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Ils répondent en outre aux exigences de forme (art. 42 LTF) et de délai (art. 100 al. 1 LTF; arrêt 5A_378/2010 du 30 août 2010 consid. 1, publié  in Pra 2011 p. 543 n° 76) prévues par la loi. Les recours en matière civile sont donc recevables au regard des dispositions qui précèdent.  
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). L'art. 42 al. 2 LTF exige que le recourant discute les motifs de la décision entreprise et indique précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF).  
 
3.  
 
3.1. Dans ses deux arrêts, l'autorité cantonale a retenu que les termes "  promissory note ", indiqués dans le titre litigieux, correspondaient à l'instrument juridique désigné en français sous les termes de billet à ordre, mais que le texte de ce document se référait en revanche à plusieurs reprises à des dispositions du CO relatives à la lettre de change. Elle a jugé que la référence expresse à ces dispositions permettait de considérer que les parties avaient la volonté commune de se lier par un tel instrument, indépendamment de la désignation inexacte utilisée. Elle a ensuite examiné si l'absence de la mention " de change " suffisait pour supprimer la qualité d'effet de change du titre invoqué. Elle a retenu que le titre comportait dans le même article et la même langue tant l'engagement des recourantes de payer la somme de 422'200 euros que l'indication de l'effet de change du titre. Elle a relevé que la lettre de change et le billet à ordre étaient les deux effets de change visés par l'art. 177 LP, de sorte qu'en s'engageant par l'un ou l'autre, l'attention des recourantes avait été attirée sur les conséquences qui pouvaient en découler et que le but des art. 991 ch. 1 ou 1096 ch. 1 CO était atteint. Elle a précisé que cela valait d'autant plus que la lettre de change était en l'espèce tirée sur le tireur lui-même et qu'elle avait donc les caractéristiques du billet à ordre. Les recourantes ne pouvaient dès lors pas ignorer la nature cambiaire de leur engagement et ne soutenaient pas qu'elles n'avaient pas compris cette nature. L'autorité cantonale a donc conclu que le titre litigieux était valable comme effet de change malgré la confusion entre les deux types d'effets de change.  
 
3.2. Les recourantes se plaignent de la violation des art. 991 s. CO ainsi que des art. 177 et 182 ch. 3 LP.  
Elles soutiennent que la procédure de poursuite pour effet de change se caractérise par le formalisme en particulier sur les conditions de forme, à l'exclusion de toute interprétation de la volonté des parties, que les énonciations obligatoires de la lettre de change sont énumérées à l'art. 991 CO et que, en conséquence, les documents sur lesquels reposent les poursuites doivent impérativement contenir les termes "  bill of exchange ", ce qui n'est pas le cas dans le titre. Elles précisent à cet égard que la mention " de change " et le mandat pur et simple de payer une somme déterminée doivent être exprimés dans la même langue. Selon elles, le juge ne peut pas, comme l'a fait la cour cantonale, procéder à des amalgames et fusion des art. 991 et 1096 CO. Elles concluent qu'elles se sont valablement prévalues d'une exception cambiaire.  
 
4.   
La question qui se pose est de savoir si les oppositions des recourantes doivent être déclarées recevables au motif qu'elles ont soulevé une exception tirée du droit de change paraissant fondée au sens de l'art. 182 ch. 3 LP, soit le vice de forme de l'effet de change. 
 
4.1.  
 
4.1.1. Selon l'art. 177 LP, le créancier qui agit en vertu d'un effet de change (lettre de change [art. 991 ss CO] ou billet à ordre [art. 1096 ss CO]) ou d'un chèque peut requérir la poursuite pour effets de change lorsque le débiteur est sujet à la poursuite par voie de faillite (al. 1); il joint l'effet de change ou le chèque à sa réquisition (al. 2). Après que l'office des poursuites a constaté l'existence des conditions précitées, il notifie immédiatement le commandement de payer (art. 178 al. 1 LP). Si le débiteur forme opposition à la poursuite, l'office soumet cette opposition au juge de la mainlevée, qui examine, en procédure sommaire, la validité et le caractère exécutoire de l'effet de change (art. 181 LP). L'art. 182 LP oblige le poursuivi à faire valoir lui-même ses moyens et interdit au juge de l'opposition d'admettre un moyen qui n'aurait pas été soulevé. Le juge de l'opposition doit toutefois examiner d'office les points que le préposé, avant de donner suite à la réquisition de poursuite pour effets de change, devait vérifier d'office en vertu de l'art. 178 al. 1 LP, à savoir la réalisation des conditions posées par l'art. 177 al. 1 LP, parmi lesquelles l'existence d'un effet de change valable contenant toutes les énonciations essentielles exigées par le droit cambiaire (ATF 143 III 208 consid. 4.1).  
Aux termes de l'art. 182 ch. 3 LP, le juge déclare l'opposition recevable lorsque le débiteur soulève une exception admissible en matière de lettre de change et qu'elle paraît fondée. Les motifs d'opposition que le poursuivi peut faire valoir sous ce chiffre doivent résulter du droit cambiaire en général. Sont visées ici, notamment, les exceptions qui mettent en cause la validité de l'engagement cambiaire, dont la forme de l'effet de change. Une preuve stricte n'est pas exigée; il suffit - comme cela ressort du texte légal (" paraît fondée ") - que le moyen soit rendu vraisemblable (ATF 143 précité). 
 
4.1.2.  
 
4.1.2.1. La lettre de change (art. 991 ss CO; "  gezogener Wechsel ", "  bill of exchange ") est une instruction irrévocable par laquelle celui qui émet la lettre - le tireur - charge le tiré de payer la somme portée sur la lettre de change au preneur (dite instruction de paiement qualifié; arrêt 5A_378/2010 du 30 août 2010 consid. 3.1, publié  in SJ 2011 I p. 70).  
Le billet à ordre (art. 1096 ss CO; " eigener Wechsel " ou "  Eigenwechsel ", "  promissory note ") constitue une reconnaissance de dette abstraite (cf. art. 17 CO) émise sous la forme d'un effet de change, obligeant le souscripteur de l'effet en tant que débiteur principal (art. 1099 al. 1 CO; ATF 142 IV 119 consid. 2.3; arrêt 4A_460/2010 du 2 novembre 2010 consid. 3.3).  
Ce qui distingue le billet à ordre de la lettre de change c'est que celui qui le souscrit, au lieu de donner mandat à une tierce personne - le tiré - d'effectuer un paiement à l'échéance, promet d'effectuer ce paiement lui-même (ATF 143 III 208 consid. 4.2.1). Le souscripteur est ainsi obligé en tant que débiteur principal (art. 1099 al. 1 CO), alors que, lorsqu'il signe une lettre de change, il s'oblige uniquement comme débiteur subsidiaire et ne doit payer qu'en cas de recours (art. 1033 ss CO; EIGENMANN,  in Commentaire romand, CO II, 2ème éd., 2017, n° 1 ad Introduction aux articles 1096 à 1099). La lettre de change peut toutefois être tirée sur le tireur lui-même (art. 993 al. 2 CO). Même si cette forme de lettre de change a les caractéristiques d'un billet à ordre (cf. art. 1096 CO), les art. 991 ss CO sont applicables: la garantie est alors la même qu'en matière de lettre de change ordinaire, ce qui devient juridiquement pertinent dès le premier endossement. L'identité des personnes doit être clairement apparente sur le titre (arrêt 5A_378/2010 du 30 août 2010 consid. 3.1, publié  in SJ 2011 I p. 70).  
 
4.1.2.2. Le droit de change, dans l'intérêt de la sécurité des affaires et en considération de la responsabilité cambiaire, est caractérisé par la rigueur de la forme. La validité ou la nullité de l'effet de change doit résulter du titre lui-même (ATF 108 II 319 consid. 4). Ainsi, si la forme n'est pas respectée, l'effet de change n'est pas valable et les déclarations qu'il contient sont sans effet de droit cambiaire. Il constitue une simple reconnaissance de dette sur la base de laquelle une poursuite pour effet de change est exclue (cf. entre autres: EIGENMANN,  op. cit., n° 10 ad Intro. art. 990-1099 CO).  
Selon l'art. 991 CO, la lettre de change doit contenir, entre autres énonciations, la dénomination de lettre de change insérée dans le texte même du titre et exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre (ch. 1) et le mandat pur et simple de payer une somme déterminée (ch. 2). Ces mentions, qualifiées d'essentielles, sont celles dont l'absence entraîne la nullité du titre (DESSEMONTET/ BERTHOUD, Le droit de change, 2004, n° 5 p. 14; EIGENMANN,  op. cit., n° 6 ad art. 991 CO; GRÜNINGER/HUNZIKER/ROTH,  in Basler Kommentar, Wertpapierrecht, 2020, n° 24 ad art. 991 CO). Le titre dans lequel une des énonciations indiquées à l'art. 991 CO fait défaut ne vaut donc pas comme lettre de change, sauf dans certains cas (art. 992 CO), qui n'entrent pas en ligne de compte en l'occurrence (arrêt 5A_378/2010 précité  loc. cit.).  
La mention " de change " doit figurer sur le titre afin d'attirer l'attention sur le caractère cambiaire de l' obligation concernée en raison de la rigueur des dispositions de droit de change (rigueur de change). Formellement, il s'agit de la procédure de poursuite pour effet de change, simplifiée et accélérée, prévue aux art. 177-189 LP. Les mots " de change " sont donc nécessaires, en ce sens qu'ils ne peuvent être remplacés par une autre expression (p. ex. traite), mais suffisants, en ce sens qu'ils peuvent être combinés avec d'autres mots comme " promesse de change ", " seule de change ", " première de change " (DESSEMONTET/BERTHOUD,  op. cit., n° 10 s. p. 16; EIGENMANN,  op. cit., n° 10 ad art. 991 CO; GRÜNINGER/HUNZIKER/ROTH,  op. cit., n° 6 ad art. 991 CO).  
La langue de la rédaction du titre est indifférente du droit du lieu de souscription, mais l'art. 991 ch. 1 CO exige que la mention " de change " et le mandat pur et simple de payer une somme déterminée soient rédigés dans la même langue (DESSEMONTET/BERTHOUD,  op. cit., n° 3 p. 13; EIGENMANN,  op. cit., n° 11 ad art. 991 CO). On déduit des art. 992 ch. 2 et 996 al. 1 CO que le montant doit être indiqué en chiffres ou en toutes lettres sur le titre. Cette indication doit être inscrite dans le texte de la lettre de change. A défaut, il s'agira d'une lettre de change en blanc (art. 1000 CO; EIGENMANN,  op. cit., n° 5 ad art. 996 CO). Le mandat pur et simple de payer fait défaut lorsque le montant de la lettre de change est écrit simplement en chiffres, à droite en haut ou ailleurs en dehors du texte (ATF 99 II 324 consid. 1b). La nécessité d'insérer la désignation en tant qu' "effet" dans le texte même de l'acte, cela dans la langue utilisée pour la création du titre, n'empêche pas que l'acte soit rédigé dans plusieurs langues, mais à la condition que la désignation comme effet soit écrite dans la même langue que le mandat de payer (dans ce sens, cf. arrêt 4A_460/2010 du 2 novembre 2010 consid. 3.3 pour la promesse de payer du souscripteur du billet à ordre).  
La loi ne contient pas de dispositions spécifiques sur les termes à employer, sur l'ordre des énonciations ou sur leur emplacement sur le titre. Il suffit, par conséquent, que les indications impératives figurent sur le titre (EIGENMANN,  op. cit., n° 7 ad art. 991 CO). En particulier, l'art. 991 CO qui parle de " texte ", ne fait pas de distinction entre le corps et les intitulés du texte de l'effet de change. Il ressort au contraire de la jurisprudence que seuls les blancs sont prohibés, notamment quant au mandat de payer afin de réduire les risques d'une modification invisible pour les porteurs subséquents du montant faisant l'objet de l'engagement (cf. ATF 99 II 324 consid. 1b; PETITPIERRE-SAUVAIN, Les papiers-valeurs, Traité de droit privé suisse (TDPS) VIII/7, 2006, n° 238 p. 80). Certains auteurs exigent toutefois que la clause de change figure dans le texte même, et non simplement en intitulé, pour éviter la transformation en lettre de change d'un autre titre (ARMINJON/CARRY, La lettre de change et le billet à ordre, 1938, n° 196 p. 217 s.). D'autres soutiennent qu'en cas de doute, l'emplacement des mentions dans le titre peuvent constituer un moyen d'interprétation (EIGENMANN,  op. cit.loc. cit.; GRÜNINGER/HUNZIKER/ROTH,   op. cit., n° 4 ad art. 991 CO). Au vu des motifs qui permettent de sceller le sort de la cause, cette question n'a pas à être examinée plus avant.  
 
4.1.3. Eu égard au formalisme strict qui caractérise le droit de change, le juge de la poursuite ne peut interpréter les déclarations de change autrement que sur la base du titre lui-même, examiné conjointement avec l'éventuel protêt (ATF 111 III 33 consid. 2a). Le principe est donc qu'il ne peut pas suppléer à l'absence d'une mention essentielle par la voie de l'interprétation (DESSEMONTET/BERTHOUD,  op. cit., n° 4 p. 13 s.; cf. aussi, GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Articles 159-270, 2001, n° 25 ad art. 182 LP).  
Toutefois, le Tribunal fédéral a admis de manière générale qu'il faut, en présence de contradictions dans le texte de l'effet de change incriminé, tenter de les résoudre en recherchant la volonté réelle et concordante manifestée par les parties (arrêt 5A_378/2010 du 30 août 2010 consid. 4.1, publié  in SJ 2011 I p. 70; cf. aussi sur une déclaration d'aval, arrêt 4A_460/2010 précité consid. 3.4.3). Il n'a du reste pas exclu de qualifier de billet à ordre un titre désigné comme lettre de change si l'emploi de termes est dû à une erreur manifeste (ATF 111 III 33 consid. 3; dans le même sens, cf. arrêt de la Cour de justice du canton de Genève du 17 février 1959, publié  in SJ 1960 p. 409). Pour sa part, la doctrine n'exclut pas non plus que le formalisme de l'effet de change puisse être qualifié d'excessif et doive être corrigé. Ainsi, elle retient que si le titre désigné comme billet à ordre présente les caractéristiques essentielles de la lettre de change, il peut être admis comme telle (PETITPIERRE-SAUVAIN,  op. cit., n° 531 p. 160). Selon un auteur, il en découle que, si, par erreur, l'acte est désigné en tant que " billet à ordre ", mais qu'il mentionne également un tiré qui est assigné à payer (" payez  "), le titre doit être considéré comme une lettre de change (EIGENMANN,  op. cit., n° 8 ad art. 1096 CO). D'aucuns précisent toutefois qu'il faudrait non seulement qu'il y ait un tiré mais aussi que les mots " de change " apparaissent sur l'effet (DESSEMONTET/BERTHOUD,  op. cit., n° 330 p. 158).  
 
4.2. En l'espèce, l'autorité cantonale n'a pas violé l'art. 182 ch. 3 LP, en lien avec l'art. 991 CO, en rejetant l'exception soulevée par les recourantes. Même si, en plein texte, on ne trouve pas la mention "  de change " et le mandat pur et simple de payer une somme déterminée dans la même langue, cette exigence est respectée dans les libellés du texte, étant donné que la désignation générale de l'effet de change contient en français les termes " de change "  et le titre de la clause n° 1 "  mandate pur e simple de payer une somme déterminée " (  sic), la somme écrite en chiffres arabes figurant immédiatement au-dessous dans le texte. Ainsi, le titre répond aux exigences de l'art. 991 CO, les termes "  promissory note " participant d'une simple erreur. Cela étant, même à supposer que les mentions essentielles doivent figurer dans le corps du texte, il demeure que l'autorité cantonale a, à raison, retenu que, au vu de la désignation du titre et des références aux dispositions de la lettre de change, le recours aux termes "  promissory note " au lieu de "  bill of exchange " par les parties procède d'une erreur manifeste. C'est également à raison qu'elle a considéré que, malgré cette erreur, le titre doit être considéré comme valable dès lors que son texte contient, dans la même langue, soit en anglais, l'engagement pur et simple des recourantes de payer une somme déterminée et la qualité d'effet cambiaire du titre, de sorte que le but du formalisme de l'art. 991 CO consistant à attirer l'attention des parties sur la rigueur de change est préservé. Enfin, on ne peut que suivre l'autorité cantonale lorsqu'elle considère que la validité du titre doit d'autant plus être préservée que la lettre de change est tirée sur le tireur lui-même, de sorte que la distinction entre les deux effets de change - mandat inconditionnel de payer et promesse émanant du souscripteur personnellement - est à relativiser dans le cas précis.  
Il suit de là que les griefs des recourantes doivent être rejetés. 
 
5.   
En définitive, le recours est rejeté. Les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourantes qui succombent (art. 66 al. 1 LTF). Aucuns dépens ne sont dus, ni aux recourantes, au vu du sort réservé à leurs recours, ni à l'intimée, qui s'est opposée à l'effet suspensif, a présenté des requêtes en fourniture de sûretés en garantie des dépens jugées prématurées et n'a pas été invitée à répondre sur le fond de la cause (art. 68 al.1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Les recours sont rejetés. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 15'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourantes. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 20 janvier 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari