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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_506/2023  
 
 
Arrêt du 14 février 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffière : Mme Jolidon. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Grégoire Rey, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Département de la santé et des mobilités, 
intimé. 
 
Objet 
Sanctions disciplinaires à l'encontre d'une vétérinaire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 18 juillet 2023 (ATA/775/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, née en 1962, a obtenu une autorisation de pratiquer en tant que vétérinaire le 10 mars 2011. Elle dirige un cabinet vétérinaire dans le canton de Genève (ci-après: le cabinet). 
Cinq propriétaires d'animaux, ainsi que le vétérinaire cantonal ont dénoncé A.________ auprès de la Commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients de la République et canton de Genève (ci-après: la Commission de surveillance), entre 2017 et 2021: ils s'alarmaient de la façon inadéquate dont les animaux de compagnie étaient pris en charge (cf. infra let. B.b). Cette autorité a ouvert une procédure disciplinaire à l'encontre de la vétérinaire, pour chacun de ces cas, procédure dans le cadre de laquelle A.________ a systématiquement été entendue. Au terme de l'instruction, ladite commission a émis un préavis du 4 juillet 2022 à l'adresse du Département de la santé et des mobilités de la République et canton de Genève (ci-après: le Département de la santé) dans lequel elle proposait une interdiction de pratiquer durant trois mois cumulée à une amende se montant à 15'000 fr.  
 
B.  
 
B.a. Sur la base du préavis du 4 juillet 2022 de la Commission de surveillance, le Conseiller d'Etat en charge du Département de la santé (ci-après: le Conseiller d'Etat) a, en date du 12 octobre 2022, interdit à A.________ de pratiquer pendant une durée de trois mois et lui a infligé une amende s'élevant à 5'000 fr.  
 
B.b. Par arrêt du 18 juillet 2023, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours de A.________ à l'encontre de la décision du 12 octobre 2022 du Conseiller d'Etat. Elle a retenu les faits et les violations des devoirs professionnels suivants:  
Le premier cas était celui d'un cochon d'Inde que ses maîtres avaient amené un samedi au cabinet de A.________, car il mangeait moins que d'habitude. Les juges précédents ont retenu qu'il ne s'agissait pas d'une urgence, étant précisé que la vétérinaire n'avait pas produit le dossier médical de l'animal, malgré les demandes de la Commission de surveillance. A.________ avait examiné l'animal et avait affirmé qu'il était ballonné; elle avait ensuite souhaité regarder dans la bouche du cochon d'Inde et forcé l'ouverture plusieurs fois, en insistant; l'animal hurlait et suffoquait de sorte que les maîtres lui avaient demandé d'arrêter de le stresser; la vétérinaire s'était alors rendue dans une pièce annexe, afin de continuer l'examen avec une assistante; un mauvais sentiment l'ayant envahi, un des maîtres avait rejoint la salle où se trouvait son cochon d'Inde; lorsqu'il avait ouvert la porte la vétérinaire réalisait un massage cardiaque sur l'animal; celui-ci était décédé. La Cour de justice a retenu que, compte tenu des circonstances, séparer l'animal de ses propriétaires n'était pas souhaitable, puisque d'une part cette façon de faire ne leur avait pas permis de comprendre ce qui se passait ni d'assister leur cochon d'Inde au moment de sa mort et d'autre part avait augmenté le stress de l'animal; sans dossier médical, il était impossible d'établir les causes du décès avec certitude; selon toute vraisemblance, l'animal, face au stress provoqué par les actes de la vétérinaire (plusieurs tentatives pour lui ouvrir la gueule, séparation d'avec ses maîtres et probable contention) avait eu une crise cardiaque; la prise en charge non adaptée et contraire aux règles de l'art par A.________ avait ainsi provoqué le décès du cochon d'Inde. 
Le deuxième cas concernait une chienne jack russel probablement tombée d'un balcon et amenée au cabinet par une auxiliaire de fourrière; celle-ci a, au cours de la journée, averti le vétérinaire cantonal du peu de soins prodigués à l'animal dans le cadre de sa prise en charge par A.________; la chienne ne présentait pas de blessures apparentes hormis quelques éraflures au niveau des pattes et du menton et un saignement au niveau de la gueule; il était conscient, en état de choc; sept heures après son arrivée au cabinet, la chienne était décédée; le rapport d'autopsie mentionnait que "l'animal présentait des lésions traumatiques de dentition cassée et d'éclatement/fissuration du foie associé à un hémoabdomen aigu et dont la sévérité est suffisante pour avoir entraîné sa mort. Diaphragme, rate, vessie et estomac intacts. Absence de fracture palpable". La Cour de justice a fait siennes les conclusions du Conseiller d'Etat: compte tenu de l'état de la chienne et de la chute subie, A.________ avait fautivement omis de lui administrer des antidouleurs durant la prise en charge, la laissant souffrir jusqu'à son décès; la prise de sang avait été effectuée plusieurs heures après l'arrivée au cabinet, alors qu'elle aurait dû l'être immédiatement (et répétée) car elle aurait pu renseigner sur la gravité d'une éventuelle hémorragie que la vétérinaire aurait dû soupçonner; il en allait de même des radiographies réalisées seulement cinq heures après la prise en charge de la chienne, alors que celles-ci auraient permis de préciser le diagnostic; ces trois éléments conduisaient à conclure à un manque manifeste de diligence de la part de A.________ qui n'avait pas procédé aux actes qui lui auraient permis de poser un diagnostic et d'éviter au chien de souffrir. 
Deux cas impliquaient des chats qui avaient été examinés, le 5 juin 2020 respectivement le 25 septembre 2020, non pas par A.________, absente, mais par B.________. Or, cette personne n'avait obtenu la reconnaissance de son diplôme de vétérinaire roumain que le 9 décembre 2020 et obtenu son autorisation de pratiquer que le 1er octobre 2021. Sans ce document, B.________ ne pouvait être qualifiée de professionnelle de la santé ni d'auxiliaire de soins au sens du droit cantonal topique et A.________ ne pouvait pas lui déléguer la prise en charge d'animaux. 
Il en allait de même au sujet d'un autre chat examiné au cabinet par C.________, le 27 mars 2019, qui ne possédait pas non plus d'autorisation de pratiquer, et par B.________ le 15 avril 2021. De plus, une assistante médicale vétérinaire avait pratiqué une prise de sang sur le chat, alors qu'un tel acte médical n'entrait pas dans le domaine de compétence d'une assistante selon le droit fédéral topique. En outre, A.________ avait violé son devoir d'agir avec soin et diligence, en procédant à la vidange des glandes anales de l'animal sans sédation, contrairement à ce qui avait été fait par le passé, lui causant une souffrance inutile (le chat était devenu incontrôlable, agressif et avait mordu sa propriétaire). 
Le dernier cas concernait un chien qui souffrait d'une endocardiose mitrale, à savoir la maladie cardiaque la plus répandue chez cet animal; le vétérinaire traitant, moins d'un mois avant la consultation du 11 avril 2021 auprès de A.________, avait adapté le traitement médicamenteux à la baisse; sa propriétaire l'avait amené au cabinet de l'intéressée car il présentait des difficultés à respirer; l'animal est décédé quelques heures après son arrivée. Les juges précédents ont retenu à l'encontre de la vétérinaire que les radiographies effectuées par celle-ci avaient impliqué une contention de l'animal et que cela était contre-indiqué en cas de problèmes respiratoires; en outre, A.________ eût dû procéder à une injection de Vetmedin en urgence, afin de rapidement stabiliser l'animal; compte tenu du diagnostic posé, il était manifeste que l'animal décompensait et que, le cas échéant, il était possible de corriger la situation en augmentant rapidement le dosage du médicament; la Cour de justice en a conclu que la prise en charge avait été trop lente et que les gestes d'urgence adéquats n'avaient pas été effectués, l'animal ayant agonisé plusieurs heures sans parvenir à respirer; ces éléments constituaient une violation de l'obligation d'agir avec soin et conscience professionnelle. 
Selon la Cour de justice, les manquements étaient graves. Durant la procédure, A.________ n'avait pas remis en cause sa pratique professionnelle; sa collaboration laissait à désirer, dès lors que, dans certains cas, elle n'avait pas fourni les documents requis par la Commission de surveillance ou ne les avait fournis qu'après plusieurs demandes; elle n'avait pas d'antécédents. La sanction, à savoir une interdiction de pratiquer de trois mois additionnée à une amende de 5'000 fr. respectait le principe de proportionnalité. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 18 juillet 2023 de la Cour de justice, de dire que les procédures susmentionnées instruites par la Commission de surveillance sont classées, d'enjoindre la Cour de justice à lui restituer l'avance de frais de 1'500 fr.; subsidiairement, de renvoyer la cause à la Cour de justice pour une nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Le Conseiller d'Etat conclut au rejet du recours. La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaire ne s'est pas déterminé. 
Par ordonnance du 17 octobre 2023, la Présidente de la IIe Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit :  
 
 
1.  
Le recours en matière de droit public, déposé en temps utile (art. 100 et 46 al. 1 let. b LTF) et en la forme prévue (art. 42 LTF) à l'encontre d'un arrêt final (art. 90 LTF) rendu, dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF), par l'intéressé qui a la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF), est recevable. 
 
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'examine cependant la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante (cf. art. 106 al. 2 LTF; ATF 145 I 121 consid. 2.1; 142 V 577 consid. 3.2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours en matière de droit public ne peut servir à critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause. Lorsque la partie recourante entend s'en prendre aux faits ressortant de l'arrêt entrepris, elle doit établir de manière précise la réalisation de ces conditions, c'est-à-dire qu'elle doit exposer, de manière circonstanciée, que les faits retenus l'ont été d'une manière absolument inadmissible, et non seulement discutable ou critiquable (cf. art. 106 al. 2 LTF). A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3, V 366 consid. 3.3; 145 V 188 consid. 2). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 114 consid. 2.1). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral, à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).  
 
2.3. Il sied de préciser ici que les règles de l'art médical, dont il est question dans la présente cause, constituent des principes établis par la science médicale, généralement reconnus et admis, communément suivis et appliqués par les praticiens (ATF 133 III 121 consid. 3.1; 108 II 59 consid. 1; 64 II 200 consid. 4a). Savoir si le médecin a violé son devoir de diligence est une question de droit; dire s'il existe une règle professionnelle communément admise, quel était l'état du patient et comment l'acte médical s'est déroulé relève du fait (ATF 133 III 121 consid. 3.1 et les arrêts cités). Les mêmes principes juridiques prévalent pour tous les membres des professions médicales universitaires, donc également pour les vétérinaires.  
 
3.  
L'objet du litige porte sur la violation, par la vétérinaire, de l'obligation d'exercer son activité avec soin et conscience professionnelle et sur la sanction prononcée, à savoir une interdiction de pratiquer sous sa propre responsabilité pour une durée de trois mois et une amende s'élevant à 5'000 fr. 
 
4.  
La recourante mentionne la prescription de la cause et l'art. 46 de la loi fédérale du 23 juin 2006 sur les professions médicales universitaires (loi sur les professions médicales, LPMéd; RS 811.11), sans développer plus avant ce grief. 
 
4.1. Selon l'art. 46 LPMéd, la poursuite disciplinaire se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle l'autorité de surveillance a eu connaissance des faits incriminés (al. 1); tout acte d'instruction ou de procédure que l'autorité de surveillance, une autorité de poursuite pénale ou un tribunal opère en rapport avec les faits incriminés entraîne une interruption du délai de prescription (al. 2); la poursuite disciplinaire se prescrit dans tous les cas par dix ans à compter de la commission des faits incriminés (al. 3).  
 
4.2. Cette disposition définit de façon très large les actes susceptibles d'interrompre le délai de prescription relatif de deux ans, puisqu'il s'agit de toutes les mesures d'instruction ou de procédure. En font notamment partie l'ouverture formelle de la procédure disciplinaire et tous les actes qui font progresser la procédure en vue de la décision finale et qui produisent des effets externes par rapport à l'autorité; il en va ainsi des mesures d'administration de preuves (interrogatoires, auditions, expertises, etc.), des décisions de nature procédurale ou des demandes d'observations (arrêts 2C_804/2022 du 20 juin 2023 consid. 4.2; 2C_845/2021 du 18 octobre 2022 consid. 7.3). Lorsque les différentes dénonciations sont incorporées à un seul et même dossier et ont conduit au prononcé d'une sanction unique, tout acte interruptif de prescription intervenu dans un des dossiers vaut pour toute la cause, c'est-à-dire tous les autres cas (arrêt 2C_804/2022 susmentionné consid. 4.5). Il n'en va toutefois ainsi que dans la mesure où les actes ayant donné lieu à l'ouverture des procédures disciplinaires antérieures ne sont pas déjà prescrits au moment d'être versé dans le dossier recensant tous les manquements du professionnel.  
 
4.3. La première dénonciation date du 7 novembre 2017 (ouverture de la procédure le 8 décembre 2017) et le Conseiller d'Etat a rendu sa décision le 12 octobre 2022. Entre ces deux dates déterminantes, les nouveaux manquements signalés ont été incorporés à la procédure en cours les 25 juin 2018, 10 août 2020, 18 novembre 2020 et 5 août 2021, ce qui a systématiquement interrompu la prescription. Pour chaque cas, la recourante a été entendue (oralement et/ou par le biais d'observations) et les faits de l'arrêt attaqué démontrent que de nombreux actes de procédure, au sens de l'art. 46 al. 2 LPMéd, ont régulièrement interrompu la prescription tout au long de ces années, sans que les deux ans de la prescription relative soient atteints. En relation avec les dates susmentionnées, il suffit de relever que la Commission de surveillance a informé l'intéressée, le 14 janvier 2020, que l'instruction de la cause était close (pour l'ouvrir à nouveau le 3 mars 2021 compte tenu d'une nouvelle dénonciation) et que sa sous-commission en charge de l'instruction allait lui remettre ses conclusions pour constater que la prescription relative de deux ans n'a jamais été atteinte.  
 
5.  
La recourante critique l'établissement des faits et l'appréciation des preuves par les juges précédents qui seraient tombés dans l'arbitraire à plusieurs égards. 
 
5.1. Il y a arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'établissement des faits ou l'appréciation des preuves si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (cf. ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 V 35 consid. 4.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 144 II 281 consid. 3.6.2). La partie recourante ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; elle doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3).  
 
5.2. L'intéressée attaque l'absence de détermination des règles de l'art en lien avec les actes qui lui sont reprochés.  
 
5.2.1. Elle s'en prend à la règle de l'art que la Cour de justice aurait retenue, voulant que, lors de la prise en charge de l'animal dans un cabinet, celui-ci ne soit pas séparé de son propriétaire car cela le mettrait en état de stress. Elle produit une pièce nouvelle à ce sujet émanant de la Société des vétérinaires suisses en lien avec la séparation d'un animal d'avec son maître.  
Les juges précédents ont estimé qu'il n'était pas nécessaire de donner suite à la demande d'expertise destinée à déterminer s'il existe une règle de l'art selon laquelle, durant une consultation, l'animal ne doit pas être séparé de son maître. Ils ont en effet considéré que in casu, indépendamment de toute pratique générale en la matière, compte tenu de l'état de stress du cochon d'Inde, l'avoir séparé de ses maîtres "n'était pas souhaitable", puisque cela augmentait encore le stress. Or, la recourante ne démontre pas en quoi ceux-ci auraient versé dans l'arbitraire à cet égard, se contentant d'affirmer que l'animal peut être séparé de son maître, selon les circonstances. De plus, au regard du nombre de manquements retenus à l'encontre de la vétérinaire, il lui appartenait d'établir l'influence que la correction de ce seul élément pourrait avoir sur le sort du litige, ce à quoi elle ne procède pas. Par conséquent, il n'y a pas lieu de prendre en considération la pièce nouvelle produite en annexe au recours (cf. supra consid. 2.2). 
Il découle également de ce qui précède que le grief portant sur la violation du droit d'être entendu (cf. art. 29 al. Cst.; ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1) de la recourante, dans la mesure où la Cour de justice a refusé d'ordonner une expertise portant sur une règle de l'art tendant à ne pas séparer l'animal de son maître durant une visite chez le vétérinaire, est rejeté. 
 
5.2.2. La recourante reproche à la Cour de justice de n'avoir pas établi la règle de l'art en lien avec l'acte consistant à tenter d'ouvrir la gueule du cochon d'Inde qui était "ballonné".  
A nouveau, les juges précédents ont estimé que ce n'était pas le geste en soi qui était répréhensible, mais la répétition de celui-ci sur un animal qui criait, paniquait et suffoquait. De plus, la recourante ne démontre pas non plus en quoi ceux-ci auraient versé dans l'arbitraire à ce sujet. Partant, le grief tombe à faux. 
 
5.2.3. L'intéressée se plaint également de l'absence de l'établissement des règles de l'art à deux égards qui commanderaient l'administration d'antalgiques à un chien tombé d'un immeuble compte tenu des douleurs et de l'état de stress de l'animal, ainsi que l'anesthésie d'un chat avant de vidanger les glandes anales. Elle estime que ni les antalgiques ni l'anesthésie n'étaient indispensables.  
Une telle argumentation est appellatoire, la recourante ne faisant qu'opposer son point de vue à celle des juges précédents. Affirmer qu'en retenant qu'il fallait administrer des antalgiques au chien et procéder à une anesthésie sur le chat ceux-ci sont tombés dans l'arbitraire ne suffit pas à démontrer l'arbitraire. 
 
5.3. La recourante mentionne encore d'autres faits dont elle estime qu'ils n'ont pas été établis correctement. A nouveau, elle procède à cette contestation, par le biais d'affirmations formulées de manière appellatoire, sans exposer ni a fortiori démontrer de manière précise en quoi les faits contestés auraient été omis ou retenus en violation de l'interdiction de l'arbitraire. Ainsi, les critiques portant sur l'état du cochon d'Inde à son arrivée au cabinet et sur la cause de son décès, sur les douleurs du chien tombé d'un immeuble et sur la nécessité d'effectuer rapidement des radiographies (ou une échographie), afin de poser un diagnostic le plus précis possible, ainsi que sur l'absence d'intérêt à effectuer des radiographies sur le jack russel souffrant d'une maladie cardiaque et sur l'utilité d'une injection de "Vetmedin", ne peuvent pas être prises en considération.  
 
5.4. En conséquence, le Tribunal fédéral statuera exclusivement sur la base des faits retenus par la Cour de justice.  
 
6.  
En vertu de l'art. 40 let. a LPMéd "Devoirs professionnels", les personnes exerçant une profession médicale universitaire à titre indépendant doivent, notamment, exercer leur activité avec soin et conscience professionnelle. 
 
6.1. L'arrêt attaqué retient, à l'encontre de la recourante, de nombreuses violations du devoir d'agir dans le respect des règles de l'art (cf., sur cette notion, ATF 149 II 109 consid. 10.2; 148 I 1 consid. 10.2) : il lui est reproché de ne pas avoir administré des antidouleurs à un chien tombé d'un immeuble, un sédatif à un chat pour vider les glandes anales de l'animal alors que ce geste lui était douloureux (il était devenu incontrôlable, agressif et avait mordu sa propriétaire), ainsi que du Vetmedin à un chien souffrant d'une maladie cardiaque, causant ainsi des souffrances évitables pour les animaux. La vétérinaire avait également effectué des radiographies et une prise de sang sur le chien tombé d'un immeuble trop tardivement, compte tenu du fait que ces actes étaient indispensables pour établir un diagnostic. La prise en charge du chien souffrant d'une maladie cardiaque avait été inadaptée et également trop lente: les radiographies étaient contre-indiquées en cas de problèmes respiratoires car elles impliquent une contention de l'animal; en outre, l'animal avait agonisé plusieurs heures sans parvenir à respirer, les gestes d'urgence adéquats n'ayant pas été opérés. En ce qui concerne le cochon d'Inde, le stress provoqué par les tentatives pour lui ouvrir la gueule, la séparation d'avec ses maîtres et une probable contention avaient eu pour conséquence la mort de l'animal hors la présence de ses maîtres. Ces éléments constituaient autant de violations de procéder conformément aux règles de l'art. La recourante n'a, en outre, pas été à même de produire un des dossiers médicaux.  
Les juges précédents ont également retenu que la vétérinaire avait fait fi de l'obligation de ne déléguer des soins qu'à un professionnel de la santé qui possède une formation reconnue et les compétences pour fournir ces soins (cf. art. 85 al. 1 et 3 de la loi genevoise du 7 avril 2006 sur la santé [LS/GE; RS/GE K 1 03]). Elle a, en effet, confié la responsabilité de certaines consultations à son cabinet, en son absence, à des personnes ne bénéficiant pas d'une autorisation de pratiquer. 
 
6.2. Le seul grief sur le fond que l'on peut décerner dans le recours, qui cite l'art. 40 let. a LPMéd, et qui est présenté de manière suffisante au regard de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF (cf. ATF 140 III 115 consid. 2; 140 III 86 consid. 2; 133 III 545 consid. 2.2), a trait à la violation d'agir selon les règles de l'art et il sera examiné ci-dessous. Tel n'est, en revanche, pas le cas de la violation de l'obligation de tenir un dossier médical et de la délégation non autorisée d'actes médicaux, retenues par les juges précédents, qui ne seront donc pas traitées.  
 
6.3. Le devoir d'exercer son activité avec soin et conscience professionnelle englobe celui de diligence et celui de respecter les règles de l'art (ATF 148 I 1 consid. 10.2). Le respect de ces règles vaut pour le traitement en lui-même, comme pour les examens et les investigations. Il implique l'exigence, pour le médecin, d'utiliser tous les moyens raisonnables qu'aurait pris un praticien diligent et consciencieux, afin de poser un diagnostic et traiter le patient (ATF 149 II 109 consid. 10.2; arrêt 2C_747/2022 du 14 février 2023 consid. 7.1).  
 
6.4. Au regard des faits retenus dans l'arrêt attaqué (cf. supra consid. 6.1), le Tribunal fédéral estime que la recourante a violé son devoir d'agir conformément aux règles de l'art, dès lors qu'elle a trop attendu pour procéder aux actes médicaux nécessaires à l'établissement d'un diagnostic en ce qui concerne un chien, compte tenu du fait que le diagnostic représente le préalable à tout traitement médical adéquat. Il en va de même en tant qu'elle n'a pas procédé ou procédé trop tardivement aux bons gestes respectivement actes médicaux dans les cas du chien souffrant d'une maladie cardiaque et du cochon d'Inde. Finalement, le fait de laisser souffrir trois animaux, alors que l'administration d'antidouleurs, d'un sédatif et d'un médicament topique aurait permis d'éviter cela, constitue une violation supplémentaire du devoir d'agir avec soin. En outre, au regard des circonstances, on ne peut que considérer que la recourante a enfreint ce devoir de manière fautive (ATF 149 II 109 consid. 9.2; 148 I 1 consid. 12.2) et qu'en conséquence une sanction s'imposait.  
 
7.  
La recourante estime que la sanction prononcée, à savoir une interdiction de pratiquer sous sa propre responsabilité de trois mois cumulée à une amende se montant à 5'000 fr. est disproportionnée. 
 
7.1. Selon l'art. 43 al. 1 LPMéd, en cas de violation des devoirs professionnels, des dispositions de la loi sur les professions médicales ou de ses dispositions d'exécution, l'autorité de surveillance peut prononcer les mesures disciplinaires suivantes: a. un avertissement, b. un blâme, c. une amende de 20'000 fr. au plus, d. une interdiction de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle pendant six ans au plus (interdiction temporaire), e. une interdiction définitive de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle pour tout ou partie du champ d'activité. L'amende peut être prononcée en plus de l'interdiction de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle (cf. art. 43 al. 3 LPMéd).  
Le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.) exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité); en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts [ATF 146 I 157 consid. 5.4; 143 I 403 consid. 5.6.3]). 
En matière de sanction disciplinaire, le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d'intérêt public recherchés. A cet égard, l'autorité doit tenir compte en premier lieu d'éléments objectifs, à savoir des conséquences que le manquement aux devoirs de la profession a entraînées sur le bon fonctionnement de la profession en cause et pour le patient (cf. arrêt 2C_539/2020 du 28 décembre 2020 consid. 5.3), et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l'intéressé (ATF 108 Ia 230 consid. 2b; 106 Ia 100 consid. 13c; arrêts 2C_53/2022 du 22 novembre 2022 consid. 13.3, non publié in ATF 149 II 109; 2C_922/2018 du 13 mai 2019 consid. 6.6.2). 
Les autorités compétentes disposent d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation d'une sanction disciplinaire. D'une manière générale, le Tribunal fédéral, qui examine l'ensemble de la question d'office (art. 106 al. 1 LTF) lorsque la sanction découle du droit fédéral, s'impose une certaine retenue en la matière, dès lors qu'il s'agit d'apprécier l'adéquation de la sanction prononcée et n'intervient que lorsque l'autorité cantonale a fait un usage insoutenable de la marge de manoeuvre que lui accorde le droit fédéral (ATF 148 I 1 consid. 12.2). 
 
7.2. Le but de la loi sur les professions médicales universitaires consiste en la protection de la santé publique au sens large. En l'espèce, la sanction prise à l'encontre de la recourante est apte à atteindre ce but, en lui faisant prendre conscience de l'importance des actes qu'elle a commis, puisqu'elle ne pourra plus pratiquer sous sa propre responsabilité pendant trois mois.  
Au regard des faits de l'arrêt attaqué (cf. supra "Faits" let. B.b), la violation de son devoir d'agir avec soin et conscience professionnelle (cf. art. 40 let. a LPMéd) par la recourante doit être qualifiée de grave. Elle a ainsi incontestablement mis à mal la confiance des patients envers la profession. Les six dénonciations à son encontre en attestent. Compte tenu de ces éléments, la nécessité d'une interdiction de pratiquer temporaire est évidente. 
On constate que la recourante a violé son devoir d'agir avec soin et conscience professionnelle à de nombreuses reprises (cf. supra consid. 6.1). Il ressort, en outre, des faits de l'arrêt attaqué que l'intéressée n'a jamais assumé la responsabilité d'aucune des fautes commises ni remis en cause ses pratiques. Une telle attitude ne plaide pas en sa faveur et seule une sanction relativement sévère semble à même de lui faire prendre conscience de la gravité de son comportement et de rétablir le fonctionnement correct de la profession. Les arguments de la vétérinaire, avancés pour contester la proportionnalité de la sanction, sont fondés en grande partie sur des faits qui ont été réfutés ci-dessus (cf. supra consid. 5). L'intéressée se prévaut aussi de ce que la Cour de justice a estimé que l'autorité de première instance avait "possiblement" considéré à tort que son assistante médicale ne pouvait pas effectuer des prises de sang. S'il est exact que les juges précédents ont souligné ce point, ils ont également retenu que cela n'était pas suffisant ni de nature à modifier la sanction, les autres manquements étant graves. Ainsi, on ne saurait considérer qu'une interdiction de pratiquer de trois mois et une amende de 5'000 fr. vont au-delà de ce qui est nécessaire, ce cumul étant rendu possible par l'art. 43 al. 3 LPMéd. L'interdiction légale de pratiquer allant jusqu'à six ans et le maximum de l'amende se montant à 20'000 fr., il faut constater que les juges précédents n'ont pas fait un usage insoutenable de la marge de manoeuvre dont ils disposaient, compte tenu des faits susmentionnés. Le grief portant sur la proportionnalité de la sanction est rejeté. 
 
8.  
Il découle de ce qui précède que le recours est rejeté. 
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Département de la santé et des mobilités et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, ainsi qu'à l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires. 
 
 
Lausanne, le 14 février 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : E. Jolidon