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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_221/2022  
 
 
Arrêt du 24 juillet 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Juge présidant, 
Müller et Merz. 
Greffière : Mme Rouiller. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________ Sàrl, 
tous les trois représentés par Me Jacques Haldy, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine du canton de Vaud, Secrétariat général, rue Caroline 11, 1014 Lausanne, 
 
Municipalité de Nyon, case postale 1112, 1260 Nyon. 
 
Objet 
Protection du patrimoine; classement d'une villa, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 15 mars 2022 (AC.2020.0174). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ et B.________ (ci-après: les propriétaires) sont propriétaires de la parcelle n° 691 de la commune de Nyon. Celle-ci présente une surface totale de 3'048 m2, soit 2'906 m2 de jardin et 142 m2 de bâtiments, dont un immeuble d'habitation de 131 m2 (ECA n° 1054, ci-après: villa "La Paisible"). 
La villa "La Paisible" a fait l'objet d'une fiche établie en 2011 dans le cadre du recensement architectural du canton et a obtenu la note *2*, attribuée aux monuments d'importance régionale. En 2015, elle a été portée à l'inventaire des monuments non classés. 
 
B.  
En 2019, les propriétaires ont déposé une demande de permis de construire auprès de la Ville de Nyon portant sur la construction d'un immeuble de 14 logements sur l'ouest de la parcelle n° 691 et, afin de dégager un espace suffisant pour ce faire, le déplacement de la villa "La Paisible" d'environ 18.43 mètres vers l'est. 
La Centrale des autorisations en matière de construction du canton de Vaud (ci-après: CAMAC) a consulté les différentes instances cantonales concernées. Il ressort de la synthèse établie le 30 août 2019 que la Direction générale des immeubles et du patrimoine, section monuments et sites (ci-après: DGIP-MS), a refusé d'octroyer l'autorisation spéciale requise par l'art. 17 al. 1 de l'ancienne loi vaudoise sur la protection de la nature, des monuments et des sites (aLPNMS; abrogée par l'entrée en vigueur, le 1er juin 2022, de la loi cantonale du 30 novembre 2021 sur la protection du patrimoine culturel immobilier [LPrPCI; BLV 451.16]) au motif que la réalisation prévue porterait atteinte à l'objet inscrit à l'inventaire cantonal des monuments historiques non classés. La DGIP-MS précise à ce sujet que l'opération de déplacement du bâtiment, le privant de son soubassement, constituerait en tant que tel une atteinte à sa substance et un risque pour les autres structures qu'il s'agirait de rénover; la disparition de son jardin, son rapprochement de la rue au bord de laquelle se dresse un front d'immeubles au gabarit disproportionné et l'implantation d'une nouvelle construction, clairement plus volumineuse et la coupant de son prolongement paysager, seraient autant d'atteintes supplémentaires. 
Dans ce cadre, la DGIP-MS a annoncé engager une procédure de classement de la villa "La Paisible" comme monument historique. 
Ayant pris connaissance de la position de la DGIP-MS, la Ville de Nyon a émis, en date du 2 septembre 2019, un préavis négatif concernant le classement de la villa "La Paisible". 
 
C.  
Le Département vaudois des finances et des relations extérieures (ci-après: DFIRE, remplacé dès le 1 er juillet 2022 par le Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine) a, du 5 octobre au 4 novembre 2019, mis à l'enquête publique le projet de décision de classement protégeant la villa "La Paisible".  
Par décisions du 11 juin 2020, le chef du DFIRE a levé les oppositions formées par les propriétaires et par C.________ Sàrl (ci-après: C.________), titulaire d'un droit d'emption sur la parcelle n° 691, et a procédé au classement de la villa "La Paisible" et de la parcelle n° 691. 
 
D.  
Par arrêt du 15 mars 2022, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (ci-après: CDAP) a rejeté le recours formé par les propriétaires et C.________ contre les décisions du 11 juin 2020. Elle a notamment considéré qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner la production d'un préavis de la Commission des monuments historiques en lien avec la décision de classement. En outre, les intérêts privés des propriétaires et de C.________, ainsi que l'intérêt public à la densification, devaient céder le pas à l'intérêt public à classer et sauvegarder la villa "La Paisible" et la parcelle n° 691. 
 
E.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, les propriétaires et C.________ demandent au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt cantonal en ce sens que la décision de classement rendue le 11 juin 2020 est annulée. Subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la CDAP ou au DFIRE pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La CDAP renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de l'arrêt attaqué. Le chef du DFIRE conclut au rejet du recours. La Ville de Nyon renonce à se déterminer. Un second échange d'écritures a eu lieu, au terme duquel les parties maintiennent leurs conclusions respectives. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision rendue dans le domaine du droit public de la protection du patrimoine, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. 
En tant que propriétaires de la parcelle n° 691 et de la villa "La Paisible", lesquelles sont concernées par le classement litigieux, A.________ et B.________ sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué et peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à son annulation ou à sa modification. Il en va de même pour C.________, au bénéfice d'un droit d'emption sur la parcelle visée par le classement. Les recourants ont pris part à la procédure devant l'instance précédente. Ils ont dès lors qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF
Les autres conditions de recevabilité du recours sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond. 
 
2.  
Les recourants se plaignent d'une application arbitraire de l'art. 84 aLPNMS, entraînant une violation du droit d'être entendu. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal (art. 95 LTF). Il examine en revanche sous l'angle restreint de l'arbitraire l'interprétation et l'application des autres règles du droit cantonal ou communal (ATF 147 I 433 consid. 4.2; 146 II 367 consid. 3.1.5). Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 148 II 465 consid. 8.1; 148 I 145 consid. 6.1). Dans ce contexte, le recours est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 149 III 81 consid. 1.3; 146 I 62 consid. 3).  
 
2.2. L'art. 84 al. 1 ch. 2 aLPNMS prévoit que la Commission des monuments historiques (ci-après: la Commission) donne son préavis notamment sur les décisions de classement et de déclassement des monuments historiques, des sites bâtis et archéologiques.  
Procédant à une interprétation systématique de la loi et à un examen de l'exposé des motifs accompagnant celle-ci, la CDAP conclut que l'art. 84 aLPNMS n'impose pas de manière impérative un préavis de la Commission dans le cadre d'une décision de classement. Elle relève au surplus les difficultés pratiques auxquelles se heurterait l'établissement d'un préavis par la Commission au vu de son inactivité et de l'abrogation de la aLPNMS en juin 2022. Finalement, elle juge pouvoir trancher la cause en l'état, sans mesure d'instruction supplémentaire. Elle rappelle par ailleurs que les recourants, invités par la CDAP à se prononcer sur la proposition du DFIRE d'interpeller la Commission fédérale des monuments historiques (ci-après: CFMH) à défaut de pouvoir obtenir un préavis de la Commission cantonale, ont renoncé à cette possibilité et ont sollicité qu'il soit passé au jugement. 
 
2.3. Les recourants tentent de remettre en cause ces conclusions en soutenant que le texte légal serait clair et imposerait un préavis de la Commission dans le cadre d'une décision de classement. En cela, ils ne font qu'opposer leur propre interprétation de l'art. 84 aLPNMS à celle de l'autorité précédente, sans démontrer en quoi celle-ci serait manifestement insoutenable. Partant, les critiques des recourants sur ce point ne satisfont pas aux exigences accrues de motivation posées à l'art. 106 al. 2 LTF (cf. consid. 2.1 ci-dessus). En tout état, les juges cantonaux ont notamment fait la distinction avec la situation (modification et abrogation de classement) où le préavis de la commission est "nécessaire". Considérer au vu de ces éléments que le préavis n'est pas obligatoire en cas de décision de classement peut certes apparaître discutable, mais n'est assurément pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens ou au but de la aLPMNS; par conséquent, une telle interprétation ne peut être qualifiée d'arbitraire.  
En outre, les recourants ne reprochent pas à la CDAP, qui était composée de deux assesseures spécialisées, d'avoir considéré être suffisamment renseignée pour trancher la cause sur la base du dossier et d'une appréciation anticipée des preuves, sans devoir encore solliciter un préavis de la CFMH. Ils ne contestent pas non plus que la Commission, inexistante, ne pouvait être saisie. 
Le grief doit partant être écarté. 
 
3.  
Les recourants font valoir une violation de la garantie de propriété. En lien avec ce grief, ils estiment que le classement de la villa "La Paisible" et de la parcelle n° 691 ne respecte pas le principe de proportionnalité, en particulier les maximes de nécessité et de proportionnalité au sens étroit. 
 
3.1. La garantie de la propriété est ancrée à l'art. 26 al. 1 Cst. Elle n'est toutefois pas absolue. Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l'art. 36 Cst. La restriction doit ainsi reposer sur une base légale (al. 1), être justifiée par un intérêt public (al. 2) et respecter le principe de la proportionnalité (al. 3). Ce principe exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés - règle de l'aptitude -, que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive - règle de la nécessité -, et qu'il existe un rapport raisonnable entre le but visé et les intérêts publics ou privés compromis - règle de la proportionnalité au sens étroit - (cf. ATF 146 I 157 consid. 5.4; 140 I 168 consid. 4.2.1).  
D'après la jurisprudence, les restrictions de la propriété ordonnées pour protéger les monuments et sites naturels ou bâtis sont en principe d'intérêt public (ATF 135 I 176 consid. 6.1; arrêt 1C_485/2020 du 28 juin 2021 consid. 4.1). Comme tout objet ne mérite pas une protection, il convient de procéder à un examen global, objectif et basé sur des critères scientifiques, qui doit prendre en compte le contexte culturel, historique, artistique et urbanistique du bâtiment concerné. Les constructions qui sont les témoins et l'expression d'une situation historique, sociale, économique et technique particulière justifient une mesure de conservation. Le critère esthétique n'est pas le seul à être appliqué; peut également être digne de protection ce qui est typique d'une époque ou représentatif d'un style, même relativement récent, de façon à sauvegarder des bâtiments industriels ou commerciaux qui ne sont pas nécessairement des oeuvres d'art (cf. ATF 135 I 176 consid. 6.2; arrêt 1C_485/2020 du 28 juin 2021 consid. 4.1). La mesure ne doit en revanche pas être destinée à satisfaire uniquement un cercle restreint de spécialistes; elle doit au contraire apparaître légitime aux yeux du public ou d'une grande partie de la population, pour avoir en quelque sorte une valeur générale (ATF 135 I 176 consid. 6.2; 120 Ia 270 consid. 4a; arrêt 1C_708/2020 du 27 janvier 2022 consid. 3). 
Les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit alors mentionner les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ceux-ci auraient été violés (ATF 148 I 127 consid. 4.3; 143 IV 500 consid. 1.1). 
Sous cette réserve, le Tribunal fédéral examine en principe librement si une restriction de la propriété répond à un intérêt public et respecte le principe de la proportionnalité; il s'impose toutefois une certaine retenue lorsqu'il s'agit de tenir compte de circonstances locales dont les autorités cantonales ont une meilleure connaissance que lui, ou de trancher de pures questions d'appréciation (ATF 147 I 393 consid. 5.3.2; 135 I 176 consid. 6.1). Le Tribunal fédéral doit alors examiner, dans le cadre des griefs soulevés (art. 106 al. 2 LTF), si la décision attaquée se prononce de façon complète sur les motifs d'intérêt public invoqués pour justifier l'atteinte au droit de propriété et si, dans la pesée des intérêts, les intérêts privés ont été pris en considération de manière adéquate (cf. ATF 126 I 219 consid. 2c; arrêt 1C_142/2021 du 22 décembre 2021 consid. 2.1). 
 
3.2. Les recourants dénoncent en premier lieu une violation de la règle de la nécessité. Ils estiment que le but visé par un classement, à savoir la préservation de la villa "La Paisible", pourrait être atteint par des mesures moins incisives, permettant ainsi de limiter l'atteinte portée à leurs intérêts privés et à l'intérêt public à la densification.  
 
3.2.1. Il ressort de l'arrêt attaqué que, de ce point de vue, ni le règlement communal sur le plan d'extension et la police des constructions, ni d'éventuelles autres mesures de protection prévues par la législation cantonale ne permettent de refuser l'autorisation de réaliser les travaux envisagés par les recourants. A cet égard, la Municipalité de Nyon a, dans un préavis, estimé que le projet de construction des recourants pourrait être considéré comme respectant le recensement architectural. De même, toutes les instances cantonales consultées dans le cadre de la synthèse CAMAC, à l'exception de la DGIP-MS, auraient, le cas échéant, délivré les autorisations spéciales requises.  
La CDAP estime ainsi que seul le classement de la villa "La Paisible" et de la parcelle n° 691 est apte à atteindre le but de préservation de ces objets. Le DFIRE arrive à la même conclusion dans ses déterminations du 20 mai 2022: l'option de renoncer au classement du bâtiment n'est pas envisageable dans la mesure où elle conduirait à autoriser le déplacement de la villa et la construction d'un nouvel immeuble. Cela aurait pour conséquence de devoir réviser la note attribuée à la villa et de retirer cette dernière de l'inventaire. 
 
3.2.2. Les recourants ne démontrent pas par quelle autre mesure la villa "La Paisible" et son jardin pourraient être protégés, se contentant d'affirmer qu'une absence de classement et un déplacement de la villa seraient plus à même d'assurer ladite préservation.  
Dans ces circonstances, l'autorité pouvait, sans arbitraire, retenir qu'une part importante du caractère de la villa "La Paisible" tenait à son emplacement sur la parcelle et à ses liens avec le parc arboré qui l'entoure. Or, le projet litigieux perturberait cet ensemble. Dès lors, l'appréciation de l'autorité précédente consistant à dire que seul un classement de la villa "La Paisible" et de son jardin permet d'assurer la préservation de ces objets n'apparaît pas critiquable. 
 
3.3. En ce qui concerne la proportionnalité au sens étroit, les recourants contestent la pesée des intérêts effectuée par l'autorité précédente, laquelle a fait primer l'intérêt à la préservation du patrimoine sur leurs intérêts privés et sur l'intérêt à la densification.  
 
3.3.1. Les recourants font valoir que l'intérêt à la préservation du patrimoine a été mal apprécié.  
En particulier, ils rappellent qu'en cas de non-classement, la villa "La Paisible" ne serait pas démolie, mais seulement déplacée et, par conséquent, préservée. Un classement, à l'inverse, les empêcherait de mener leur projet de construction à bien, ce qui occasionnerait l'abandon de la villa "La Paisible" faute de moyens financiers pour la rénover. Les autres hypothèses évoquées par le DFIRE dans sa décision levant les oppositions au classement et reprises par la CDAP, consistant à agrandir de manière mesurée la villa "La Paisible" ou à construire un nouveau bâtiment plus modeste à ses côtés, ne permettraient pas de financer les travaux de rénovation de la villa. Au surplus, le projet des recourants n'impliquerait que la diminution du jardin existant, et non sa suppression. Finalement, à l'exception de la villa "La Paisible" et d'une autre villa, les autres bâtiments faisant partie de l'ensemble originel d'une dizaine de villas construites à la même époque n'existent plus; la CDAP aurait ainsi mal apprécié l'intérêt à préserver uniquement la villa "La Paisible". 
Les recourants estiment par conséquent que seule la solution proposée du déplacement de la villa permettrait de concilier les intérêts en jeu. 
 
3.3.2. La CDAP considère, en substance, que même si la valorisation de la parcelle n° 691 apparaît certes moindre en cas de classement, une telle mesure ne prive pas les recourants de tout avantage financier et n'exclut pas toute possibilité de construction. A cet égard, elle estime que les recourants se contentent de rejeter les alternatives évoquées par le DFIRE sans les examiner réellement et n'établissent pas que la mesure litigieuse les empêcherait d'obtenir un rendement suffisant de leur propriété immobilière ou de disposer des fonds nécessaires pour rénover la villa "La Paisible".  
L'autorité précédente fait en outre sien l'avis de la DGIP-MS selon lequel la villa "La Paisible" et l'intégralité du parc arboré qui l'entoure constituent une unité indissociable; classer uniquement le bâtiment sans son cadre porterait ainsi atteinte à la substance même de la villa. Enfin, la CDAP considère comme sans fondement l'argument des recourants selon lequel seul l'ensemble des villas aurait dû être protégé, et estime que la villa doit être protégée pour elle-même. Elle rappelle également que les autres villas, aujourd'hui démolies, bénéficiaient d'une note moins élevée au recensement architectural. 
 
3.3.3. Le Tribunal fédéral s'impose une certaine retenue lorsqu'il s'agit d'examiner l'appréciation de circonstances locales par les autorités cantonales. En effet, ces dernières disposent à la fois d'une marge de manoeuvre qu'il convient de respecter et, généralement, d'une meilleure connaissance de la situation locale (cf. ATF 147 I 393 consid. 5.3.2 précité).  
Compte tenu des éléments qui précèdent, la CDAP, qui a procédé à une inspection locale, pouvait apprécier, sans arbitraire, la situation en ce sens que l'intérêt au maintien de la villa "La Paisible" et de son jardin devait prévaloir. Aussi, même si le classement est de nature à diminuer les expectatives de rendement du propriétaire, la mesure de protection répond à un intérêt public important et ne porte pas atteinte au principe de la proportionnalité. L'instance précédente a d'ailleurs pris soin d'opposer la mesure litigieuse aux intérêts économiques des recourants. Cela étant, elle a relevé que des projets de construction alternatifs pouvaient être envisagés et qu'un entretien coûteux ne saurait être un argument pour s'opposer au classement. Elle rappelle à cet égard qu'une participation de l'Etat à l'entretien et à la restauration de monuments historiques classés est prévue par la loi (art. 56 aLPNMS, actuellement remplacé par l'art. 52 LPrPCI) et a été évoquée par le DFIRE à l'audience. Par rapport à ces éléments, les recourants se contentent de qualifier les alternatives suggérées par le DFIRE d'abstraites et d'irréalistes, sans procéder à un examen concret de celles-ci. 
 
3.4. Dans ces circonstances, la CDAP, dont la composition comprenait deux assesseures spécialisées, a procédé à une appréciation complète des éléments pour confirmer la mesure de classement de la villa "La Paisible" et insister sur la nécessité de préserver l'intégrité de la parcelle n° 691. C'est ainsi sans arbitraire que l'autorité cantonale a tenu compte du fait que l'ensemble formé par la villa et son jardin constituaient l'un des derniers témoins de ce type d'urbanisme, représentatif d'un quartier historique bâti dans les années 1900. La CDAP n'a pas non plus fait preuve d'arbitraire en retenant que la suppression du jardin entourant le bâtiment actuel entraînerait une modification fondamentale des lieux; au surplus, le projet litigieux dénaturerait la substance de la villa, notamment en la plaçant entre des barres d'immeubles dont les gabarits seraient disproportionnés.  
Partant, même si la mesure litigieuse est de nature à restreindre les possibilités de construire et à diminuer les expectatives de rendement des recourants, elle n'apparaît pas disproportionnée. Le grief doit par conséquent être rejeté. 
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants qui succombent (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à la commune et aux autres autorités concernées (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux recourants et à la Municipalité de Nyon, ainsi qu'au Secrétariat général du Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 24 juillet 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Kneubühler 
 
La Greffière : Rouiller