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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
5A_336/2008 / frs 
 
Arrêt du 28 août 2008 
IIe Cour de droit civil 
 
Composition 
M. et Mmes les Juges Raselli, Président, 
 
Hohl et Jacquemoud-Rossari. 
Greffière: Mme Mairot. 
 
Parties 
X.________ SA, 
recourante, représentée par Me Rudolf Schaller, avocat, 
 
contre 
 
Groupement F.________, à savoir: 
1. Caisse de pensions A.________, 
2. Caisse de pensions B.________, 
3. Caisse de pensions C.________, 
4. D.________ SA et 
5. Fondation de prévoyance E.________, 
intimées, représentées par Me Marc-André Nardin, avocat, 
 
Objet 
responsabilité du propriétaire, 
 
recours contre le jugement de la IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 21 avril 2008. 
 
Faits: 
 
A. 
A.a X.________ SA, société anonyme ayant son siège à La Chaux-de-Fonds (ci-après: la société), est propriétaire des bâtiments nos xx et yy à La Chaux-de-Fonds, situés sur les articles 1 et 2 du cadastre de cette ville. 
 
La Caisse de pensions A.________, la Caisse de pensions B.________, la Caisse de pensions C.________, D.________ SA et la Fondation de prévoyance E.________, réunies sous l'appellation de Groupement F.________ (ci-après: le groupement), sont titulaires en copropriété, pour différentes quotes-parts, d'un droit de superficie faisant l'objet d'un droit distinct et permanent immatriculé comme tel au registre foncier (article 3 du cadastre de La Chaux-de-Fonds) et portant sur l'intégralité de la surface de l'article 4, lui-même propriété de la commune de La Chaux-de-Fonds. 
 
Le groupement est à l'origine de la construction d'un vaste complexe immobilier, connu sous le nom de Y.________, sur la parcelle de plus de 36'000 m2 dont il bénéficie. Les travaux ont impliqué des tirs de minage qui se sont déroulés dans le courant de l'été 1992, sans qu'en soit connue avec précision la date de début et de fin. Auparavant, les promoteurs avaient confié à un architecte, Z.________, le mandat de dresser un constat détaillé de l'état de tous les bâtiments voisins du chantier, au nombre desquels figuraient les deux immeubles de la société. 
 
Au cours des travaux de minage, deux propriétaires voisins ont signalé l'apparition de dégâts causés à leurs bâtiments, sis aux nos aa et bb. 
 
L'architecte susnommé a été appelé à faire un nouveau constat de l'état de ces immeubles, dont les propriétaires ont en fin de compte été indemnisés par l'assureur de l'entreprise qui avait effectué les minages. Au 1er octobre 1992, aucun autre cas n'avait été signalé. 
A.b Par lettre du 28 juin 1994, adressée à l'entreprise générale chargée de la réalisation des travaux, la société a indiqué que des fissures nouvelles étaient apparues à l'intérieur de ses immeubles et qu'elle avait rencontré des problèmes de fermeture de portes et fenêtres, ce qu'elle mettait implicitement en relation avec les opérations de minage de « l'année passée ». Elle invitait en conséquence l'entre-preneur général à prendre contact avec elle pour constater les dégâts. 
 
Un premier constat a eu lieu le 12 décembre 1994. Il a été suivi d'un échange de correspondance puis, le 20 septembre 1995, d'un deuxième constat, à l'occasion duquel le recours à un expert a été décidé. Le 15 novembre 1995 - alors que le chantier était achevé - l'architecte susmentionné a établi un rapport comparant l'état actuel des immeubles concernés à celui de juin 1992. Constatant l'existence de nouvelles fissures, ce rapport les attribuait implicitement aux travaux d'excavation de l'été 1992. Comme ledit architecte était censé se limiter à un constat exhaustif de toutes les fissures constatées sur les immeubles de la société, la qualité d'expertise n'a pas été reconnue à son intervention. 
 
Une nouvelle rencontre ayant pour but le choix d'un expert a réuni la société, le groupement et divers assureurs le 28 mars 1996. Des propositions ont été faites à ce sujet, puis les mandataires des intéressés ont encore échangé de la correspondance. Le 5 juin 1997, le groupement a fait savoir à la société qu'il avait décidé de ne pas entrer en matière sur les dommages qu'elle alléguait. 
 
Le 24 août 1995, le groupement avait signé une renonciation à invoquer la prescription, pour autant que celle-ci n'eût pas déjà été acquise à cette date. Diverses prolongations ont reporté les effets de cette renonciation au 30 juin 1997. La société a requis des poursuites le 18 juin 1997 et des commandements de payer la somme de 500'000 fr. en capital ont été adressés à chaque membre du groupement entre le 3 et le 5 juillet 1997. Ils ont tous été frappés d'opposition totale. 
A.c Le 17 juin 1998, la société a ouvert action contre les membres du groupement, en concluant à ce qu'ils soient condamnés à lui payer la somme de 57'956 fr.55 avec intérêts à 5% dès le 18 juin 1997. Elle demandait en outre que la mainlevée de l'opposition faite aux commandements de payer soit prononcée à concurrence de cette somme. 
 
Les membres du groupement ont conclu au rejet de la demande, en invoquant la prescription de la prétention. Ils ont de plus contesté différents postes du compte de dommage. 
Dans le cadre de l'administration des preuves, une expertise a été ordonnée et confiée à une société d'hydrogéologie, de géotechnique et de géologie, pour élucider l'origine des dommages causés aux immeubles de la société. Il en résulte que les fissures subies par les bâtiments ont, selon toute vraisemblance, d'autres causes que les tirs de minage de l'été 1992. 
B. Par jugement du 23 septembre 2002, la IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté la demande. Selon cette autorité, si les dommages allégués étaient consécutifs aux tirs de minage effectués en 1992, comme le soutenait la société, ils étaient nécessairement apparus avant la fin de cette même année: invoquée pour la première fois en juin 1994, la créance en réparation de la société était donc prescrite. Comme la demanderesse n'avait pas démontré l'existence d'un lien de causalité entre un éventuel excès dans l'exercice de ses droits de la part du groupement et des fissures qui seraient apparues tardivement, sa demande devait être rejetée en toutes hypothèses. 
B.a Contre ce jugement, la société a déposé à la fois un recours de droit public et un recours en réforme au Tribunal fédéral. Le 16 avril 2003, la IIe Cour civile du Tribunal fédéral a rejeté le recours de droit public, dans la mesure de sa recevabilité. Elle a en revanche partiellement admis le recours en réforme, en tant que recevable, annulé le jugement du 23 septembre 2002 et renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Le Tribunal fédéral a considéré en substance que la cour neuchâteloise avait méconnu la notion de connaissance effective du dommage au sens de l'art. 60 CO, qui régissait la prescription à laquelle était soumise la demande, en considérant que la demanderesse aurait dû inspecter ses immeubles rapidement. Le délai d'une année, prévu à l'al. 1 de cette dernière disposition, partait en effet du jour où le lésé avait effectivement eu connaissance du dommage, et non de celui où il aurait pu découvrir l'importance de sa créance en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances. Or, s'il était concevable que la société ait rapidement eu une connaissance effective du dommage, l'autorité cantonale n'avait cependant effectué aucune constatation sur ce point. Il lui incombait en conséquence de compléter l'état de fait et de déterminer, sur cette base, à quel moment la société avait effectivement eu connaissance du dommage. Si l'autorité cantonale arrivait à la conclusion que la demande n'était pas prescrite, il lui appartiendrait de se prononcer sur l'existence éventuelle d'un lien de causalité naturelle et adéquate entre les opérations de minage et les fissures invoquées, ce qui n'avait pas été fait. 
B.b A la demande des parties, une instruction complémentaire limitée à la question de la prescription a d'abord été menée. Par jugement sur moyen séparé du 25 septembre 2006, la Cour civile neuchâteloise a rejeté l'exception de prescription soulevée par le défendeur. 
 
C. 
Statuant à nouveau par jugement du 21 avril 2008, la IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, se fondant sur les conclusions de l'expert, a rejeté la demande en réparation du dommage, au motif que l'existence d'un lien de causalité naturelle et adéquate entre les opérations de minage conduites par le groupement défendeur durant l'été 1992 et le dommage allégué par la société demanderesse n'avait pas été dûment établi. Cette autorité a par ailleurs considéré que la nouvelle argumentation de la recourante visant à étendre la relation de cause à effet qu'il convenait d'établir, en ce sens que le lien de causalité ne devait plus être noué seulement entre les tirs de minage et les fissures, mais, de façon générale, entre celles-ci et la conduite du chantier, n'était pas recevable, pour divers motifs. 
 
D. 
La société exerce un recours en matière civile contre le jugement du 21 avril 2008. Elle demande au Tribunal fédéral de condamner les membres du groupement à lui payer la somme de 57'956 fr.55 avec intérêts à 5% dès le 18 juin 1997 et de prononcer, à concurrence de ce montant, la mainlevée de l'opposition faite aux commandements de payer nos 1, 2, 3, 4 et 5. Subsidiairement, la recourante conclut au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelles instruction et décision. 
 
Les intimées proposent le rejet du recours. 
L'autorité cantonale n'a pas formulé d'observations et s'est référée aux considérants de son jugement. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
1.1 Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF), puisqu'elle a pour objet la responsabilité du superficiaire selon l'art. 679 CC (cf. ATF 111 II 236 consid. 2 p. 237/238; 88 II 252 consid. 3 p. 263/264; 70 II 85 consid. 4 p. 94; Paul-Henri Steinauer, Les droits réels, t. II, 3e éd., n. 1905), en relation avec l'art. 685 al. 1 CC, et émanant de l'autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF), le recours est en principe recevable dès lors qu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. 
 
Pour autant qu'elle soit pertinente (cf. infra, consid. 1.3, relatif à l'ancien art. 66 OJ), la valeur litigieuse est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF), l'autorité cantonale ayant constaté qu'elle était égale aux prétentions de la société demanderesse, d'un montant de 57'956 fr.55. 
 
1.2 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été retenus de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III 138 consid. 1.4 p. 140). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
 
1.3 Le jugement entrepris a été rendu à la suite d'un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral. La LTF ne connaît pas de disposition expresse équivalente à l'art. 66 al. 1 OJ, qui prévoyait que l'autorité cantonale était tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral. Cette règle demeure toutefois valable sous le nouveau droit (Message concernant la révision totale de la loi d'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 p. 4143; arrêts 4A_71/2007 du 19 octobre 2007 consid. 2.2; 4A_138/2007 du 19 juin 2007 consid. 1.5). Le tribunal auquel une affaire est renvoyée voit sa cognition limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'il est lié par ce qui a été déjà jugé définitivement par le Tribunal fédéral (cf. ATF 133 III 201 consid. 4.2 p. 208; 131 III 91 consid. 5.2 p. 94 et les arrêts cités) et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui (ATF 104 IV 276 consid. 3d p. 278). La juridiction cantonale n'est donc libre de sa décision que sur les points qui n'ont pas été tranchés par l'arrêt de renvoi ou dans la mesure où elle se fonde sur des faits complémentaires établis postérieurement à cet arrêt (cf. J.-F. Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, n. 1.3.2 ad art. 66 OJ). Les considérants de l'arrêt retournant la cause pour nouvelle décision à l'autorité cantonale lient aussi le Tribunal fédéral et les parties (ATF 133 III 201 consid. 4.2 p. 208; 125 III 421 consid. 2a p. 423). 
 
Il n'y a dès lors pas lieu d'examiner le grief de la recourante, selon lequel l'autorité cantonale aurait établi les faits de manière inexacte en retenant que les fissures avaient été constatées en 1994, soit deux ans après les derniers tirs de minage, alors qu'il résulterait du dossier que les premières constatations des dégâts remontent au mois de mars 1993, autrement dit quelques mois seulement après la fin des opérations de minage, la recourante n'ayant pas attaqué le fait prétendument erroné dans ses recours adressés au Tribunal fédéral contre le premier jugement de l'autorité cantonale. 
 
2. 
2.1 La Cour civile a d'abord estimé que la société demanderesse n'avait pas démontré, ni même rendu vraisemblable de manière prépondérante, l'existence d'un lien de causalité entre les tirs de minage de l'été 1992 et les dommages causés à ses immeubles. La recourante ne le conteste pas valablement, se contentant d'affirmer, de manière appellatoire, qu'il serait absolument insoutenable de nier le lien causal naturel entre le chantier, en particulier «des minages», et les dégâts causés à son immeuble. 
 
Elle reproche en revanche aux juges précédents d'avoir, dans un second temps, refusé d'examiner la question du lien de causalité naturelle et adéquate entre les travaux de construction en général et les dégâts subis par ses bâtiments, au motif qu'elle n'aurait allégué que les opérations de minage comme cause du dommage, et non l'ensemble des immissions du chantier. Elle se plaint de violations des art. 8 et 679 CC, 66 al. 1 OJ, 9 et 29 Cst., 6 CEDH ainsi que de violation du principe de la bonne foi, et de formalisme excessif. 
 
2.2 L'autorité cantonale considère que, dans ses conclusions en cause et sa plaidoirie, la demanderesse étend la relation de cause à effet qu'il conviendrait d'établir, puisque le lien ne devrait plus être noué entre les tirs de minage et les fissures, mais bien de façon toute générale entre celles-ci et la conduite du chantier; fondée sur cette nouvelle approche du problème, la société soutient alternativement que l'instruction aurait dû porter sur une nouvelle administration de preuves ou que les preuves au dossier suffisent à étayer cette thèse. 
 
Pour les juges précédents, cette nouvelle argumentation n'est pas recevable, pour divers motifs. En premier lieu, l'entier des allégations de la demanderesse, dans les mémoires introductifs d'instance, repose sur une relation de cause à effet entre tirs de minage et fissures. De plus, une allégation aussi générale que «la conduite d'un chantier» qui s'est étendue sur plusieurs années ne saurait satisfaire au fardeau de l'allégation. La demanderesse a par ailleurs elle-même exclu dans sa réplique que les fissures de ses immeubles puissent avoir des origines géologiques; le revirement qu'elle opère dans ses conclusions en cause, pour prétendre que les constatations de l'expert à ce sujet étayeraient en définitive ses propres affirmations, ne manque dès lors pas de surprendre et ne saurait convaincre. Troisièmement, les hypothèses émises par l'expert, pour expliquer le phénomène de dessication et de tassement du sol ayant le plus probablement entraîné l'apparition des fissures, ont toutes pour origine des causes autres que le chantier en question et antérieures à celui-ci, le phénomène s'étant étalé sur plusieurs, voire sur des dizaines d'années: construction de bâtiments et routes en amont, dont un garage, obstruction des apports d'eaux en amont, réfection des routes avoisinantes, notamment. Enfin et surtout, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour qu'après examen de la prescription, cette juridiction se prononce sur l'existence éventuelle d'un lien de causalité naturelle et adéquate entre les opérations de minage et les fissures invoquées. Dès lors, la relation de cause à effet qui devait être examinée a été déterminée de façon contraignante par l'autorité de recours. Si la demanderesse entendait alléguer de nouveaux faits, de manière à définir différemment la relation de cause à effet qui restait à discuter, elle avait encore la faculté de se réformer, ce qu'elle n'a pas fait. Seule donc la relation de cause à effet qui résultait des allégués de la demanderesse pouvait et devait être appréciée. 
 
3. 
Dans la mesure où la recourante reproche à l'autorité cantonale d'avoir refusé d'administrer de nouvelles preuves consistant, en particulier, dans l'audition de témoins, son grief est irrecevable. Selon le principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi (cf. ancien art. 66 al. 1 OJ), l'autorité cantonale à laquelle une affaire est renvoyée, en plus d'être liée par les motifs de l'arrêt en question, ne peut tenir compte de faits nouveaux (conclusions, allégations, preuves, etc.) que si la procédure civile cantonale le permet (ATF 116 II 220 consid. 4 p. 222). Il en va de même sous le nouveau droit (cf. supra, consid. 1.3). Dès l'instant où c'est le droit procédure qui détermine seul la mesure dans laquelle des «nova» sont admissibles, la recourante pouvait se prévaloir d'une violation arbitraire du droit cantonal de procédure applicable (art. 9 Cst.). Il lui appartenait ainsi de préciser quelle disposition de ce droit aurait été enfreinte de manière insoutenable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 133 III 462 consid. 2.3 p. 466). Faute pour elle de s'être pliée à cette exigence, sa critique apparaît insuffisamment motivée. 
 
4. 
La recourante fait aussi grief aux juges cantonaux d'avoir considéré qu'elle n'avait pas allégué l'hypothèse d'un lien de causalité entre les immissions du chantier dans leur ensemble et les dégâts subis par ses bâtiments. Elle se plaint sur ce point de constatation insoutenable des faits et, semble-t-il, d'arbitraire dans l'application du droit cantonal de procédure, ainsi que d'une violation de l'art. 679 CC, en relation avec l'art. 8 CC
 
4.1 Selon les constatations de la cour cantonale, l'entier des allégations de la demanderesse, dans les mémoires introductifs d'instance, repose sur une relation de cause à effet entre les tirs de minage et les fissures. Seul l'allégué 11 de la demande est formulé aussi généralement que le fait valoir la société dans ses conclusions en cause: toutefois, il se réfère aux constatations de l'architecte Z.________, pour qui il ne fait aucun doute que les fissures sont en rapport avec les minages, ce qui ramène à la relation de cause à effet «étroite» entre les minages et les fissures, laquelle n'est pas établie. La recourante ne démontre pas d'arbitraire au sujet de cette opinion. Elle se contente de reprendre des passages des mémoires où le chantier est mentionné comme cause du dommage, sans tenter d'établir que l'interprétation des magistrats cantonaux, fondée sur la certitude de l'architecte que les fissures avaient été causées par les tirs de minage, serait insoutenable. Quant aux lettres et autres documents du dossier auxquels la recourante se réfère, ils n'établissent pas non plus que celle-ci aurait allégué, en la forme prescrite et en temps utile selon les exigences cantonales de procédure, que le déroulement du chantier en général serait la cause du dommage, et non pas seulement les opérations de minage; cela même si, comme le soutient la recourante, en procédure civile neuchâteloise, les parties présentent une indication sommaire des faits allégués. Dans ces conditions, il n'est pas démontré que l'autorité cantonale aurait arbitrairement constaté les faits ou violé le droit cantonal de procédure en considérant que l'argumentation nouvellement présentée par la recourante n'était pas recevable, faute d'avoir été valablement alléguée. 
 
Dès lors que les juges précédents ont considéré - sans arbitraire - que les faits déterminants n'avaient pas été énoncés, il n'y a pas lieu de se prononcer sur le grief de la recourante relatif aux exigences de la motivation en fait («Substanzierungspflicht»; cf. à ce sujet: ATF 127 III 365 consid. 2b p. 368; 123 III 183 consid. 3e p. 188; 108 II 337 consid. 2 et 3 p. 338 ss). A cet égard, il n'est pas décisif que la Cour civile ait considéré, parmi d'autres motifs, que l'allégation générale selon laquelle «la conduite du chantier» serait la cause des fissures n'était pas suffisante car elle ne permettait pas au groupement d'apporter la contre-preuve que, tout au long de ce chantier et sur plusieurs années, les travaux avaient été conduits en tous points et toutes circonstances dans les règles de l'art et de façon non dommageable pour le voisinage. 
 
5. 
Outre la question de la prescription, l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral du 16 avril 2003 limitait le réexamen de la cause à celle de l'existence éventuelle d'un lien de causalité naturelle et adéquate entre les opérations de minage et les fissures invoquées. Comme il a été exposé ci-dessus, il n'était pas insoutenable de considérer que la nouvelle argumentation de la demanderesse, selon laquelle les dégâts subis par ses immeubles auraient eu pour cause, plus généralement, l'ensemble des immissions du chantier, n'était pas recevable. Dès lors, il n'y a pas lieu d'examiner les moyens soulevés par la recourante en rapport avec cette dernière hypothèse, en particulier l'interprétation de l'expertise à laquelle elle se livre. De même, l'existence d'un prétendu dommage évolutif a déjà été tranchée dans l'arrêt sur recours de droit public du 16 avril 2003, de sorte qu'elle ne saurait être revue ici (cf. supra, consid. 1.3). 
 
6. 
Enfin, la recourante fait valoir que dix ans se sont bientôt écoulés depuis la demande introductive d'instance. Invoquant les art. 29 Cst. et 6 CEDH - qui n'offre, à cet égard, pas de protection plus étendue que la garantie constitutionnelle -, elle affirme qu'une telle durée est excessive, dès lors qu'il ne s'agit pas d'un cas compliqué. 
Comme l'autorité cantonale a rendu son jugement, la question de l'éventualité d'un retard injustifié au sens des art. 29 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH, autrement dit d'un déni de justice formel, n'est plus d'actualité et n'a donc pas à être examinée (cf. Lorenz Meyer, Das Rechtsverzögerungsverbot nach Art. 4 BV, thèse Berne 1982, p. 132 et 140/141). Savoir si ce retard était de nature à engager la responsabilité de l'État et à entraîner par conséquent le paiement de dommages-intérêts à la recourante doit être tranché par le juge compétent pour connaître des actions en responsabilité de l'État. Il n'appartient donc pas au Tribunal fédéral de se prononcer à ce sujet dans la présente procédure en réparation du dommage fondée sur la responsabilité du propriétaire. Le grief est ainsi irrecevable. 
6.1.1 
 
7. 
En conclusion, le recours se révèle mal fondé et doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. La recourante, qui succombe, supportera par conséquent les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera en outre des dépens aux intimées (art. 68 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3. 
Une indemnité de 4'000 fr., à verser aux intimées à titre de dépens, est mise à la charge de la recourante. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
Lausanne, le 28 août 2008 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: 
 
Raselli Mairot