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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_165/2023  
 
 
Arrêt du 7 juillet 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Kiss et May Canellas. 
Greffière : Mme Godat Zimmermann. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Céline Moreau, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
Vice-présidente de la Cour de justice du canton de Genève, Assistance judiciaire, place du Bourg-de-Four 1, 1204 Genève, 
intimée. 
 
Objet 
assistance judiciaire, 
 
recours contre la décision rendue le 2 février 2023 par la Vice-présidente de la Cour de justice du canton de Genève, Assistance judiciaire (AC/2604/2022, DAAJ/11/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 14 mars 2022, l'assistance juridique a été accordée à A.________, ressortissante des Philippines, afin d'entreprendre des démarches auprès du Bureau de l'Amiable Compositeur (BAC) à l'encontre d'anciens employeurs, diplomates de la Mission du Pakistan auprès de l'Organisation des Nations Unies (ONU), à Genève. L'intéressée expliquait avoir travaillé comme domestique entre 2011 et 2021 pour plusieurs diplomates de ladite Mission, sans qu'aucune rémunération ne lui ait jamais été versée; les diplomates en cause avaient exploité sa force de travail en abusant de sa vulnérabilité, raison pour laquelle elle avait déposé plainte pénale à leur encontre pour traite d'êtres humains et usure par métier. 
 
A.a. Le 13 septembre 2022, A.________ a déposé au greffe de l'Assistance juridique du canton de Genève, par l'intermédiaire de son conseil, une requête tendant à l'octroi de l'assistance juridique aux fins d'ouvrir action en paiement devant le Tribunal des prud'hommes contre ses anciens employeurs; le dépôt de la requête de conciliation devait permettre l'interruption de la prescription de prétentions d'un montant non spécifié, consistant en salaires, indemnités pour démission immédiate justifiée et tort moral.  
 
A.b. La requérante a remis ses contrats de travail conclus le 5 septembre 2016, respectivement les 1er juillet 2020 et 1er février 2021, avec les diplomates B.________, respectivement C.________, pour effectuer du travail domestique au sein de leurs ménages privés. Dressés conformément au modèle rédigé par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), ces contrats précisaient être soumis à l'ordonnance sur les conditions d'entrée, de séjour et de travail des domestiques privés des personnes bénéficiaires de privilèges, d'immunités et de facilités (ordonnance sur les domestiques privés [ODPr; RS 192.126]).  
 
B.  
 
B.a. Par décision du 7 novembre 2022, la Vice-présidente du Tribunal de première instance du canton de Genève a rejeté la requête d'assistance juridique au motif que l'action prud'homale de la requérante paraissait vouée à l'échec.  
 
 
B.b. A.________ a recouru contre cette décision et sollicité préalablement l'octroi de l'assistance juridique pour la procédure de recours.  
Par décision du 2 février 2023, la Vice-présidente de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours et débouté la requérante de toute autre conclusion. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière civile. Elle demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision attaquée, de constater la violation du droit à un procès équitable, sous l'angle de l'accès effectif à un tribunal (art. 6 al. 1 CEDH), et du droit à la réparation effective des victimes de traites d'êtres humains (art. 4 CEDH), puis d'ordonner aux autorités genevoises de lui accorder l'assistance juridique civile, avec effet au 13 septembre 2022, et de confirmer le mandat confié à l'avocate signataire du recours. 
La recourante sollicite également d'être mise au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale, incluant la désignation de son conseil comme avocate d'office 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le refus de l'assistance judiciaire dans un procès civil - pendant ou, comme en l'occurrence, à introduire (cf. ATF 139 V 42 consid. 2.3) - est une décision incidente de nature à causer un préjudice juridique irréparable au plaideur requérant et, partant, sujette à un recours séparé selon l'art. 93 al. 1 let. a LTF (arrêts 4A_461/2022 du 15 décembre 2022 consid. 1; 4A_462/2022 du 6 mars 2023 consid. 1.1; cf. ATF 133 IV 335 consid. 4; 129 I 129 consid. 1.1). 
La voie de droit contre une telle décision est déterminée par le litige principal. En l'espèce, la recourante ne chiffre pas les prétentions déduites des rapports de travail qu'elle entend faire valoir en justice contre chacun des diplomates, mais allègue n'avoir jamais été rémunérée et disposer de prétentions de salaire sur plusieurs années ainsi qu'en indemnisation pour démission immédiate injustifiée et tort moral. Il s'ensuit que la valeur litigieuse est manifestement supérieure au seuil légal de 15'000 fr. prévu pour le recours en matière civile (art. 74 al. 1 let. a LTF en lien avec l'art. 51 al. 1 let. c LTF). 
Au surplus, le recours a été interjeté dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 LTF) par une partie qui n'a pas obtenu gain de cause (art. 76 al. 1 LTF); il est dirigé contre une décision rendue sur recours (art. 121 CPC) par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF). 
Le recours doit contenir des conclusions (art. 42 al. 1 LTF). Selon un principe général de procédure, les conclusions constatatoires ont un caractère subsidiaire (ATF 141 II 113 consid. 1.7). Elles supposent l'existence d'un intérêt digne de protection à la constatation immédiate de la situation de droit (arrêt 4A_618/2017 du 11 janvier 2018 consid. 5.2). En l'espèce, la procédure porte sur l'octroi de l'assistance judiciaire pour un procès civil à introduire et le recours comporte une conclusion en ce sens, recevable, contrairement aux conclusions tendant à la constatation de la violation de droits garantis par la CEDH sur lesquelles il n'y a pas à entrer en matière. 
 
2.  
La Vice-présidente de la Cour de justice a refusé à la recourante l'assistance judiciaire déduite de l'art. 117 CPC en jugeant qu'en l'état du droit actuel, l'action en paiement envisagée par la domestique privée philippine contre ses anciens employeurs, diplomates pakistanais, était dépourvue de chances de succès aussi longtemps que leur immunité de juridiction civile n'était pas levée par une renonciation écrite de l'État du Pakistan. 
Par surabondance, l'autorité précédente observe que, même si une action en justice était possible sans levée de l'immunité de juridiction, le recouvrement des créances de la recourante se heurterait à l'immunité d'exécution des diplomates, laquelle nécessite une renonciation distincte de la renonciation à l'immunité de juridiction. Or, une partie qui disposerait des ressources financières n'assignerait pas en justice des diplomates alors qu'elle serait empêchée de recouvrer ses créances et s'exposerait, en sus, à d'éventuels dépens, selon la valeur litigieuse. 
 
3.  
 
3.1. Dans le premier volet de son mémoire, la recourante reproche à l'autorité cantonale de ne pas avoir recherché, avant de procéder à l'examen des chances de succès au sens de l'art. 117 let. b CPC, si le refus d'accorder l'assistance judiciaire prononcé en première instance ne portait pas atteinte à ses droits en tant que victime de la traite d'êtres humains dans l'exploitation du travail, déduits de l'art. 4 CEDH et de l'art. 15 de la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains [CTEH; RS 0.311.543), ou à son droit effectif d'accès aux tribunaux garanti par l'art. 6 par. 1 CEDH.  
Elle allègue que la demande qu'elle entend déposer vise à obtenir réparation du dommage qu'elle a subi en sa qualité de victime de traite d'êtres humains (art. 15 al. 3 et 4 CTEH; art. 4 CEDH), action pour laquelle, conformément à l'art. 15 al. 2 CTEH, le droit suisse doit prévoir le droit à l'assistance d'un défenseur et à une assistance juridique gratuite. La recourante fait valoir que l'assistance juridique fait également partie des exigences liées au droit à un accès concret et effectif à un tribunal découlant de l'art. 6 par. 1 CEDH, lorsque, comme en l'espèce, une personne est en situation de net désavantage par rapport à son adversaire et que cette inégalité des armes est accentuée par la complexité des questions juridiques posées, par exemple en matière d'immunité de juridiction comme en l'occurrence. 
 
3.2. Aux termes de l'art. 15 al. 2 CTEH, chaque État prévoit, dans son droit interne, le droit à l'assistance d'un défenseur et à une assistance juridique gratuite pour les victimes, selon les conditions prévues par son droit interne.  
Pour l'octroi de l'assistance judiciaire, le droit suisse retient notamment le critère des chances de succès. A cet égard, la CourEDH a précisé que la CEDH n'oblige pas à accorder l'aide judiciaire dans toutes les contestations en matière civile. Un système d'assistance judiciaire ne peut pas fonctionner sans la mise en place d'un dispositif permettant de sélectionner les affaires susceptibles d'en bénéficier. En soi, un système qui prévoit de n'allouer des deniers publics au titre de l'aide judiciaire qu'aux demandeurs dont le pourvoi a une chance raisonnable de succès ne saurait être qualifié d'arbitraire. La CourEDH vérifie si les limitations appliquées ne restreignent pas l'accès au tribunal d'une manière telle que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même (arrêt Kaiser c. Suisse du 9 janvier 2018, § 59 à 61 et les références).  
En l'espèce, la recourante ne peut donc se prévaloir d'un droit à l'assistance judiciaire déduit directement d'un traité international, indépendamment du critère des chances de succès exigé en droit suisse. Le premier grief soulevé dans le recours se révèle mal fondé. 
 
 
4.  
Dans la seconde partie de son recours, l'employée reproche à la Vice-présidente de la Cour de justice d'avoir violé l'art. 117 CPC en lien avec l'art. 6 par. 1 CEDH dans son appréciation des chances de succès de l'action en justice envisagée contre les diplomates pakistanais. 
 
4.1. Selon la jurisprudence prévalant tant pour l'art. 117 CPC que pour l'art. 64 LTF, une cause est vouée à l'échec, respectivement dépourvue de toute chance de succès, lorsque la perspective d'obtenir gain de cause est notablement plus faible que le risque de succomber et qu'elle ne peut donc être considérée comme sérieuse, de sorte qu'une personne raisonnable disposant des ressources financières nécessaires renoncerait à engager la procédure en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter. En revanche, l'assistance judiciaire doit être accordée lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près, ou que les premières n'apparaissent que légèrement inférieures aux seconds. La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête d'assistance judiciaire, sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 139 III 396 consid. 1.2, 475 consid. 2.2; 138 III 217 consid. 2.2.4).  
L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance judiciaire sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés; cette hypothèse est réalisée lorsque la thèse du demandeur ne tient pas debout. L'assistance peut aussi être refusée s'il apparaît d'emblée que la démarche est irrecevable ou que la position du demandeur n'est pas juridiquement fondée. L'autorité chargée de statuer sur l'assistance judiciaire ne doit pas se substituer au juge du fond; elle doit seulement examiner s'il lui apparaît qu'il y a des chances que le juge adopte la position soutenue par le demandeur, chances qui doivent être plus ou moins équivalentes aux risques qu'il parvienne à la conclusion contraire (arrêts 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2; 4A_454/2008 du 1er décembre 2008 consid. 4.2). 
Lorsqu'il est saisi d'un recours contre une décision refusant l'octroi de l'assistance judiciaire pour défaut de chances de succès, le Tribunal fédéral n'a pas à se substituer au juge cantonal pour décider si la requête présentée en instance cantonale doit être admise ou non. Le juge cantonal dispose en effet d'un large pouvoir d'appréciation dans l'examen des chances de succès. Le Tribunal fédéral ne revoit dès lors sa décision qu'avec retenue: il doit uniquement vérifier que le juge cantonal ne s'est pas écarté des principes juridiques reconnus en la matière, qu'il n'a pas pris en considération des éléments qui ne jouent pas de rôle pour le pronostic dans le cas particulier ou, inversement, qu'il n'a pas méconnu des circonstances pertinentes dont il aurait dû tenir compte (arrêts 4A_461/2022 du 15 décembre 2022 consid. 9.1; 4A_638/2021 consid. 3.1.1; 4A_111/2021 consid. 3.1; 4A_383/2019 du 30 mars 2020 consid. 3; 4A_375/2016 du 8 février 2017 consid. 3.2 et les arrêts cités). 
 
4.2. L'action en justice envisagée ici porte sur des prétentions résultant de rapports de travail et opposerait une employée de maison de nationalité philippine à des diplomates de la Mission du Pakistan auprès de l'ONU en poste à Genève.  
 
4.2.1. Selon l'art. IV section 9 let. g de l'Accord sur les privilèges et immunités de l'Organisation des Nations Unies conclu les 11 juin/1er juillet 1946 entre le Conseil fédéral suisse et le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies (Accord ONU; RS 0.192.120.1), les représentants des Membres de l'ONU bénéficient, sauf exceptions non relevantes en l'espèce, des immunités dont jouissent les agents diplomatiques. Les employeurs que la recourante entend actionner en justice sont donc des agents diplomatiques au sens de l'art. 1 let. e de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques (CVRD; RS 0.191.01), jouissant à ce titre, en Suisse, de l'immunité de juridiction civile prévue par l'art. 31 par. 1 CVRD. Pour sa part, la recourante était, pendant la durée des rapports de travail, une domestique privée au sens de l'art. 1 let. h CVRD, soit une personne employée au service domestique d'un membre de la mission diplomatique, qui n'est pas employée de l'État accréditant.  
L'art. 31 par. 1 CVRD, consacrant le principe de l'immunité de juridiction civile, énumère, sous les lettres a, b et c, trois catégories d'actions auxquelles cette immunité n'est pas opposable. Il s'agit en substance des actions réelles concernant un immeuble privé possédé par l'agent diplomatique pour son propre compte dans l'État accréditaire (ou État hôte), de celles concernant les successions où l'agent se trouve impliqué à titre privé, notamment à titre d'héritier ou d'administrateur, et de celles concernant une activité professionnelle ou commerciale que l'agent exerce dans l'État accréditaire en dehors de ses fonctions officielles. 
 
Le Tribunal fédéral a jugé à ce propos que l'action civile intentée par un domestique privé à raison des rapports de travail, laquelle ne figurait pas dans cette énumération, était couverte par l'immunité (arrêt 4A_618/2014 du 7 juillet 2015 consid. 3.4; dans le même sens, MIRJAM BALDEGGER, Das Spannungsverhältnis zwischen Staatenimmunität, diplomatischer Immunität und Menschenrechten, 2015, p. 104). 
L'État accréditant peut, moyennant une renonciation expresse, lever l'immunité de juridiction des agents diplomatiques (art. 32 par. 1 et 2 CVRD). 
Le législateur suisse a regroupé dans la loi sur l'État hôte du 22 juin 2007 (LEH; RS 192.12) les règles relatives aux privilèges et aux immunités qui découlent du droit international coutumier et singulièrement de la CVRD (arrêt 4A_331/2014 du 31 octobre 2014 consid. 3.3; Message du 13 septembre 2006 relatif à la LEH, FF 2006 p. 7604). Fondé notamment sur l'art. 27 al. 2 LEH, le Conseil fédéral a adopté l'ODPr en date du 6 juin 2011. L'art. 41 ODPr régit le règlement des différends entre domestiques privés et employeurs. Selon l'al. 1 de cette disposition, la conclusion d'un contrat de travail entre un agent diplomatique et un domestique privé n'entraîne aucune renonciation aux privilèges et immunités de l'employeur; le cas échéant, il appartient au « bénéficiaire institutionnel » compétent de décider d'une levée de l'immunité de juridiction. S'il ne peut être résolu à l'amiable conformément à l'art. 41 al. 2 ODPr, le litige peut être porté devant l'autorité judiciaire en Suisse et il appartient alors à la partie demanderesse de présenter une demande de levée des immunités de juridiction et d'exécution par la voie diplomatique usuelle (al. 3). 
Il résulte de ce qui précède que, selon la conception suisse du droit international, l'immunité régie par les art. 31 par. 1 et 32 par. 1 et 2 CVRD est opposable à l'action intentée par un domestique privé ou un ancien domestique privé (arrêt 4A_618/2014 précité consid. 3.4). Appelé à examiner si une telle créance contre un diplomate était prescrite, le Tribunal fédéral a précisé que l'immunité de juridiction civile prévue par l'art. 31 par. 1 CVRD entraînait, aussi longtemps qu'elle perdurait, une impossibilité objective d'agir en justice propre à suspendre le délai de prescription au sens de l'art. 134 al. 1 ch. 6 CO, malgré la possibilité d'en obtenir la levée (arrêt 4A_618/2014 précité consid. 5). 
 
 
4.2.2. En l'espèce, la recourante n'allègue pas avoir engagé des démarches afin d'obtenir la levée de l'immunité de ses anciens employeurs et, partant, ne soutient pas que le pouvoir de juridiction civile sur ces diplomates pourrait, le cas échéant, exister au moment du prononcé du jugement au fond sur ses prétentions (cf. ATF 144 III 411 consid. 6.3.3; 133 III 539 consid. 4.2 à 4.6). Elle entend ouvrir action en paiement contre ses anciens employeurs sans demander la levée de leur immunité qui, à son sens, n'existerait pas dans le domaine en cause. La recourante se prévaut de la jurisprudence, tant conventionnelle que fédérale, qui exclut l'immunité absolue des États dans les litiges en matière de rapports de travail entre une ambassade ou une mission permanente et le personnel subalterne, dont elle fait partie en tant qu'employée domestique. Prônant le parallélisme entre immunité personnelle des agents diplomatiques et immunité des États, en particulier sous l'aspect de la garantie de l'accès aux tribunaux conférée par l'art. 6 par. 1 CEDH, elle fait valoir que les employeurs qu'elle entend rechercher ne bénéficieraient pas de l'immunité de juridiction civile. Dans l'arrêt 4A_618/2014 précité, le Tribunal fédéral n'aurait pas écarté cette approche, laissant explicitement la question ouverte, ce qui, aux yeux de la recourante, suffit pour que son action ne soit pas dénuée de chances de succès. A l'appui de sa thèse, la recourante invoque également l'arrêt du 24 septembre 2014 de la Chambre d'appel des prud'hommes du canton de Genève, objet du recours dans la cause 4A_618/2014 précitée, ainsi que l'arrêt de la CourEDH du 5 avril 2022 Benkharbouche et Janah c. Royaume Uni; elle produit en outre, en version anonymisée, un jugement du 20 février 2023 dans lequel le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève rejette l'exception d'immunité de juridiction soulevée par un agent diplomatique pakistanais dans un litige l'opposant à une domestique privée philippine.  
 
4.2.3. Dans la décision attaquée, l'autorité cantonale a jugé qu'en l'absence de levée de l'immunité des employeurs diplomates, l'action envisagée par la recourante apparaissait d'emblée irrecevable et dès lors vouée à l'échec. Ce faisant, elle a apprécié les chances de succès de la demande future à l'aune des règles de droit international rappelées plus haut (consid. 4.2.1), lesquelles soumettent le pouvoir de juridiction civile de l'État du for à la levée de l'immunité des agents diplomatiques. En substance, l'autorité précédente a jugé que la thèse soutenue par la recourante ne correspondait pas au droit actuel applicable et que, par conséquent, l'action envisagée était dépourvue de chances de succès.  
Dans l'arrêt 4A_618/2014 précité, le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur l'éventuelle application par analogie à l'immunité des agents diplomatiques de la jurisprudence relative à l'immunité des États et n'a donc pas confirmé le parallélisme appliqué dans l'arrêt genevois du 24 septembre 2014 que la recourante invoque. Néanmoins, il a observé qu'il s'agirait là d'une " innovation importante dans le contexte juridique [alors] connu des autorités exécutives concernées, des tribunaux et des praticiens " (consid. 4). 
Depuis 2015, le Tribunal fédéral n'a pas été amené à examiner cette question. Pour sa part, la CourEDH ne s'est apparemment pas non plus prononcée sur la compatibilité de l'immunité de juridiction civile des agents diplomatiques avec l'art. 6 par. 1 CEDH dans des litiges liés à des rapports de travail avec des employés domestiques. Contrairement à ce que la recourante prétend, l'arrêt Benkharbouche et Janah c. Royaume Uni du 5 avril 2022 concerne un cas mettant en jeu des États employant des travailleuses domestiques dans des ambassades, et non des rapports de travail entre diplomates et employées de maison.  
Tenue à un examen sommaire de la situation au moment du dépôt de la requête d'assistance judiciaire, l'autorité cantonale n'avait pas à se prononcer sur la pertinence de la position juridique défendue par la recourante, laquelle n'est certes pas dénuée de tout fondement mais implique un changement important dans l'application du droit. Elle pouvait se limiter à relever que les chances que le juge du fond adopte cette thèse n'étaient pas plus ou moins équivalentes à celles qu'il applique la solution résultant du droit actuel. 
En conclusion, la Vice-présidente de la Cour de justice ne s'est pas écartée des principes juridiques applicables en matière d'immunité d'un agent diplomatique contre lequel un domestique privé ouvre action pour des prétentions liées aux rapports de travail; partant, elle n'a pas abusé du pouvoir d'appréciation qui lui est reconnu en la matière. Le refus de l'assistance judiciaire faute de chances de succès de l'action envisagée par la recourante ne consacre pas de violation de l'art. 117 CPC
 
5.  
Vu la confirmation de la première motivation conduisant au refus de l'assistance judiciaire, point n'est besoin d'examiner les griefs que la recourante dirige contre les motifs subsidiaires de la décision attaquée, fondés sur l'immunité d'exécution des agents diplomatiques. 
 
6.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
Comme le recours lui-même était dépourvu de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire de son auteure sera rejetée (art. 64 al. 1 LTF). La recourante prendra dès lors à sa charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante et à la Vice-présidente de la Cour de justice du canton de Genève, Assistance judiciaire. 
 
 
Lausanne, le 7 juillet 2023 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
La Greffière : Godat Zimmermann